Le 7 mars 2017 de 19h10 à 19h50, la chaîne française d’information internationale France 24 (version anglaise) a organisé son débat d’actualité The debate sur le thème « La RPDC : l’escalade ». Le présentateur François Picard a ainsi animé un débat en anglais de 40 minutes où sont intervenus : en duplex depuis Denver (Etats-Unis) Christopher Hill, ancien ambassadeur américain en Corée du Sud de 2004 à 2005 et ancien assistant au secrétaire d’Etat de 2005 à 2009, actuellement doyen de l’Ecole d’études internationales Joseph Korbell de l’université de Denver ; en duplex depuis Leeds (Grande-Bretagne) Adam Cathcart, enseignant d’histoire de la Chine à l’université de Leeds et coauteur de l’ouvrage Change and Continuity in North Korean Politics ; en duplex de Manchester (Grande-Bretagne) Jihyun Park, militante de l’Alliance européenne pour les droits de l’homme en Corée du Nord ; seul présent sur le plateau à Paris, Benoît Quennedey, vice-président de l’Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) chargé des actions de coopération.
Le journaliste animateur du débat a commencé par présenter l’actualité avec les relations compliquées entre la Malaisie et la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), les récents tirs de missiles nord-coréens et l’attitude selon lui réservée de l’administration Trump.
Christopher Hill a répondu le premier en assurant qu’il n’avait aucun doute sur l’identité du mort de l’aéroport de Kuala Lumpur et sur le fait qu’il s’agissait d’un meurtre de sang-froid perpétré à l’instigation du régime de Pyongyang. Sur l’insistance du journaliste quant aux circonstances très particulières de ce décès, Christopher Hill a déclaré que la traque et l’assassinat avaient été menés de façon très professionnelle.
Adam Cathcart, après avoir rappelé le mode de vie de Kim Jong-nam et les circonstances d’accession au pouvoir de Kim Jong-un, a déclaré que le fait que la RPDC ait attendu 5 jours pour mentionner (en la niant) l’utilisation supposée du neurotoxique VX après l’annonce des autorités de Malaisie pourrait être le signe que la RPDC veut faire savoir au monde qu’elle possède un stock d’armes neurotoxiques.
Jihyun Park a utilisé son tour de parole non pas pour répondre aux questions posées mais pour revenir sur le thème des droits de l’homme en RPDC (reprenant notamment le chiffre contestable et contesté de 3 millions de morts de la famine à la fin des années 1990), en entonnant les couplets habituels de la propagande des services secrets sud-coréens dont elle est très proche. Mieux vaut, sur cette question, aller voir le film de Jero Yun actuellement diffusé dans les salles françaises Madame B, histoire d’une Nord-Coréenne.
Benoît Quennedey a replacé l’attitude des autorités de RPDC dans leur contexte. Tout d’abord pour elles il s’agit d’un citoyen porteur d’un passeport diplomatique nord-coréen répondant au nom de Kim Chol. A ce titre elles estiment que, en application du droit international, le corps aurait dû leur être rendu, ce que n'ont pas fait les autorités malaisiennes - ce qui a entraîné les protestations de l’ambassadeur de la RPD de Corée à Kuala Lumpur puis son expulsion. Enfin il a rappelé les mystères entourant cette affaire car le neurotoxique VX qui aurait été utilisé est si dangereux que les deux femmes arrêtées auraient dû subir des séquelles.
Christopher Hill a approuvé la manière de procéder des autorités de Malaisie face à l’attitude irresponsable d’un «Etat voyou » (sic). En tant qu’ancien haut dignitaire de l’administration Bush qui avait fait usage de ce concept il apparait tout à fait légitime pour utiliser cette expression. Il a terminé son intervention en assurant que d’ici quatre ans la RPDC aurait des missiles dotés de têtes nucléaires, ce qui amèneraient les Etats-Unis « à un point de crise absolue ». Quant aux manoeuvres militaires en cours, il a déclaré : « je regrette seulement qu’elles n’aient pas eu lieu au printemps 1950 ce qui aurait empêché l’invasion nord-coréenne. » Pour lui les protestations du Nord contre ces manoeuvres relèvent de la manipulation. Reprenant une antienne du discours néo-conservateur, il a déclaré : « nous allons réellement arriver à une crise et il nous faut être préparés à tout. » S'agissant de l’installation des missiles THAAD au sud, selon lui, les Chinois ne comprennent pas qu’ils ne sont pas visés et il faut les convaincre qu’une péninsule coréenne réunifiée sous la houlette de Séoul serait dans l’intérêt de la Chine… Pour lui, la Corée va être le problème numéro un de l’administration Trump, plus que la Syrie ou d'autres régions, mais il faut du temps pour mettre en ordre de bataille une nouvelle administration américaine.
Concernant l’installation des missiles THAAD, Adam Cathcart a répondu que, plus qu’une pression accrue sur Pyongyang de la part du gouvernement chinois, c’est envers Séoul que s'exerce une pression accrue de la part de la Chine, en particulier dans le domaine économique. Il est allé jusqu’à dire qu’à cet égard le déploiement du système THAAD était une aubaine pour Pyongyang.
La deuxième intervention de Jihyun Park a été sans aucun rapport avec les questions posées. Ce faisant, Christopher Hill en a profité pour féliciter les autorités sud-coréennes de leur activité dans le champ des droits de l’homme et pour assurer ce pays de l’alliance indéfectible des Etats-Unis. Selon lui si l’administration Trump se lance dans une guerre commerciale avec la Chine ce ne sera pas le bon moment pour les amener à revoir leur position sur la Corée.
Benoît Quennedey a élargi le propos sur l’installation du système THAAD. Tout d’abord il n’y a pas que les Chinois qui s’y opposent et qui se sentent visés, car les Russes, pour les mêmes raisons, n’en veulent pas non plus. Il a aussi rappelé la position de faiblesse de l’actuel gouvernement de Corée du Sud qui cherche à mettre en place THAAD dès que possible alors que le principal parti d’opposition est contre ce déploiement et en position de regagner le pouvoir en remportant l'élection présidentielle à venir très prochainement. Il a été le premier intervenant à mentionner aussi l’opposition de l’opinion publique sud-coréenne au dispositif THAAD. Il a également rappelé que la situation restait ouverte pour les Etats-Unis et qu’il ne fallait pas négliger le rôle éventuel d'intermédiaire et de négociateur de la Russie.
Puis Adam Cathcart s’est étendu sur la campagne contre les intérêts économiques sud-coréens mené en Chine, et qui vise notamment le groupe sud-coréen Lotte (qui possède dizaines de supermarchés en Chine..) et a cédé un terrain de golf pour l’installation du radar et des missiles THAAD.
Revoir l'intégralité du débat sur le site de France 24 :
Latest update : 2017-03-07 By François PICARD Christopher HILL Chief US negotiator with North Korea (2005-2009) Adam CATHCART Chinese History Lecturer, Leeds University Jihyun PARK Activist ...
Latest update : 2017-03-07 By François PICARD Christopher HILL Chief US negotiator with North Korea (2005-2009) Adam CATHCART Chinese History Lecturer, Leeds University Jihyun PARK Activist ...
Après le tir de quatre missiles par la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) le 6 mars 2017, en réaction au lancement de manoeuvres militaires conjointes américano - sud-coréennes d'une ampleur sans précédent, la tension a encore monté d'un cran avec le début du déploiement, au sud de la péninsule, du dispositif américain de missiles antibalistiquesTerminal High Altitude Area Defense (THAAD), dont les premiers équipements sont arrivés à Osan, au sud de Séoul le 7 mars 2017. La République populaire de Chine a réagi par la voie de son ministre des Affaires étrangères, Wang Yi, qui, lors d'une conférence de presse s'étant tenue le 8 mars, a réitéré l'opposition de son pays au déploiement de THAAD, tout en esquissant les voies d'une sortie de crise qui permettrait de préserver la paix et la stabilité en Asie du Nord-Est.
Wang Yi, lors de sa conférence de presse du 8 mars 2017.
Dans la doxa néoconservatrice, l'affaire est entendue : la Chine serait toujours in fine l'alliée d'une Corée du Nord belliqueuse et aventurière, et la course aux armements entretenue en Asie du Nord-Est par les Etats-Unis relèverait de la légitime défense du Japon et de la République de Corée (Corée du Sud) face à un adversaire pourtant infiniment moins puissant (le budget militaire américain est plus de 100 fois supérieur à celui de la Corée du Nord).
Mais avec le début du déploiement de THAAD en Corée du Sud, Pékin dénonce à présent ouvertement l'utilisation du prétexte nord-coréen pour redéployer les forces armées américaines dans la région Asie-Pacifique et bien contrecarrer, en premier lieu, la montée en puissance de la Chine. Lors de sa conférence de presse du 8 mars 2017, le ministre des Affaires étrangères chinois Wang Yi a rappelé "solennellement" l'opposition de son pays au déploiement de THAAD :
Nous demandons à la Corée du Sud de ne pas insister à vouloir prendre ce chemin, car le résultat ne peut qu'être dommageable pour les autres et ne peut que faire du mal à soi-même.
Plus qu'un moyen d'intercepter un hypothétique missile nord-coréen (dont la réussite technique serait de surcroît hasardeuse), le dispositif THAAD permet un espionnage militaire de la Russie et de la Chine, et affaiblit donc les capacités d'autodéfense de Pékin et Moscou.
Wang Yi a usé d'une métaphore ferroviaire pour analyser la situation en Corée, en évoquant l'image de
deux trains qui accélèrent l'un en face de l'autre sans qu'aucun des deux ne veuille céder le passage.
Dans ce contexte, la Chine renvoie dos à dos les deux Etats coréens. Vis-à-vis de Pyongyang, Pékin a suspendu les importations de charbon nord-coréen suite à l'essai balistique auquel a procédé la RPD de Corée le 12 février 2017. Selon une source très proche des services de renseignement américains (Radio Free Asia), la RPD de Corée aurait réagi en suspendant ses exportations de terres rares vers la Chine. Enfin, la Chine a donné son accord sur le communiqué de presse du Conseil de sécurité des Nations unies, rédigé par les Etats-Unis, condamnant les tirs de missiles balistiques nord-coréens du 6 mars 2017, adopté à l'unanimité des membres du Conseil de sécurité.
Il n'est pas nouveau que la Chine applique les sanctions internationales contre la Corée du Nord, dont elle a toujours désapprouvé le programme nucléaire. En revanche, les sanctions économiques prises à l'encontre de la Corée du Sud suite au déploiement de THAAD sont relativement inédites par leur ampleur. Ainsi, les agences de voyages chinoises ont suspendu leurs circuits touristiques en Corée du Sud.
Un autre sujet concerne le conglomérat sud-coréen de l'agroalimentaire Lotte, qui a cédé à l’armée sud-coréenne un terrain de golf pour accueillir le système THAAD. Les activités de 23 magasins du groupe Lotte ont été suspendues par les autorités chinoises pour infraction aux règles de sécurité incendie. Les autorités sud-coréennes dénoncent une mesure de rétorsion contre THAAD et entendent saisir l'Organisation mondiale du commerce (OMC). En tout état de cause, des manifestations appelant au boycott des produits sud-coréens ont éclaté en Chine, alors qu'un nombre croissant de voix appelle, en Chine, à "sanctionner la Corée du Sud".
Manifestation à Jilin (Chine) contre le déploiement de THAAD et pour le boycott des produits sud-coréens.
Dans ce contexte, les propositions chinoises d'une sortie de crise ne doivent pas être interprétées comme de nature à favoriser la Corée du Nord ou bien les Etats-Unis et la Corée du Sud, mais traduisent bien une volonté de renouer le dialogue - tout en préservant les intérêts chinois.
Lors de sa conférence de presse du 8 mars 2017, Wang Ji a ainsi déclaré :
Afin de désamorcer la crise qui se prépare dans la péninsule, la Chine propose que, dans un premier temps, [la Corée du Nord] suspende ses programmes nucléaire et balistique, en échange de l'arrêt des manœuvres militaires à grande échelle des Etats-Unis et de la Corée du Sud.
Cette proposition est raisonnable : elle reprend le principe "action contre action" qui avait permis d'aboutir à de précédents accords sur la question nucléaire en Asie du Nord-Est, en visant à créer un climat de confiance mutuel et à engager une désescalade par étapes, dans laquelle chacune des parties s'engage à accomplir simultanément un geste d'apaisement. De fait, les Etats-Unis avaient déjà arrêté leurs exercices de guerre dans les années 1990 pour créer les conditions d'un dialogue avec Pyongyang - et une telle initiative ne serait donc pas nouvelle. Pour sa part, la Corée du Nord a proposé à de multiples reprises de suspendre son programme nucléaire et balistique contre la reprise de dialogue en vue de parvenir à des garanties de sécurité, qui pourraient lui permettraient de renoncer in fine à sa force de dissuasion nucléaire - mais elle ne peut pas accepter le diktat de l'administration Obama consistant en un désarmement nucléaire complet, unilatéral et sans contreparties.
La proposition chinoise est désormais sur la table. Les Etats-Unis et la Corée du Sud vont-ils sérieusement l'envisager, ou préfèreront-ils s'entêter dans une course aux armements qui ne peut que précipiter les dangers de guerre en Asie ?
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Dans la matinée du 6 mars 2017, la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) a procédé au tir de quatre missiles balistiques - apparemment de courte ou de moyenne portée, les travaux des experts américains et sud-coréens étant encore en cours à l'heure où nous publions ces lignes. Ces nouveaux tirs apparaissent comme une riposte à l'engagement des manoeuvres militaires conjointes américano - sud-coréennes qui, année après année, mobilisent un nombre croissant d'hommes en recourant à des équipements toujours plus sophistiqués, et sont ainsi dénoncés par Pyongyang comme des préparatifs d'invasion de la péninsule.
Tir d'un missile à partir d'un sous-marin par la RPDC le 23 avril 2016
Le 1er mars 2017 a commencé l'exercice militaire annuel Foal Eagle, devant mobiliser 290 000 soldats sud-coréens et 10 000 soldats américains, ainsi que le porte-avions USS Carl Vinson. Ils doivent être suivis, à partir du 13 mars, de l'exercice militaire Key Resolve, basé sur une simulation informatique, pour une durée de deux semaines. Ces manoeuvres militaires - les plus grandes au monde, et de surcroît d'une ampleur sans précédent cette année de l'aveu même d'un responsable militaire sud-coréen à l'agence séoulite Yonhap - mobilisent notamment le dernier cri des bombardiers américains - qui sont l'une des armes favorites des Etats-Unis pour attaquer un pays. Ainsi, parmi l'équipement stratégique utilisé pour ces exercices, on retrouve l'avion de chasse furtif F-35B, déployé en janvier dernier sur la base aérienne américaine au Japon. Doivent aussi être mobilisés un bombardier stratégique B-1B et un bombardier nucléaire B-52, tous deux basés à Guam, ainsi qu'un avion de chasse furtif F-22 stationné au Japon.
La RPD de Corée avait promis de riposter fermement à ce qu'elle dénonce comme la répétition générale d'un plan d'invasion. De fait, les exercices participent à la mise en oeuvre du plan opérationnel OPLAN 5027, dont le but revendique est « l'élimination du régime nord-coréen » et l'anéantissement de l'armée nord-coréenne.
La réaction militaires des autorités nord-coréennes a consisté, ce 6 mars, dans le lancement de quatre missiles balistiques en direction de la mer de l'Est, qui ne constituent manifestement pas des missiles balistiques intercontinentaux (ICBM) selon l'agence de presse sud-coréenne Yonhap, citant le Comité des chefs d’état-major interarmées (JCS) du ministère sud-coréen de la Défense :
Les quatre projectiles ont été tirés vers 7h34 depuis le site de lancement de Tongchang-ri, dans la province du Pyongan du Nord, et ont été détectés à 7h36, a précisé le JCS dans un communiqué. Tous les engins ont volé environ 1.000 km et atteint une altitude de 260 km avant de retomber dans la mer de l'Est.
«La Corée du Sud et les Etats-Unis sont en train d'effectuer une analyse minutieuse sur les informations supplémentaires. Il faudra un certain temps pour obtenir les résultats de l’analyse», a ajouté le JCS.
Vu le nombre de missiles et la distance de vol, il ne s’agirait pas de missiles balistiques intercontinentaux (ICBM) capables d'atteindre la côte est du continent américain, a évalué le ministère de la Défense lors d'un point de presse.
Plus tôt dans la journée, des officiels ont noté que les projectiles pourraient être confondus avec des ICBM s'ils sont lancés avec un grand angle.
Des experts ont quant à eux estimé qu'il s'agirait de missiles de courte portée Scud (500-700 km) ou de missiles de portée moyenne Rodong (1.300-1.500 km).
Les Etats-Unis, le Japon et la République de Corée (Corée du Sud) ont vivement dénoncé une "provocation" contrevenant aux résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies. Pour leur part, la Russie et la Chine ont appelé l'ensemble des parties à faire preuve de retenue.
Les tirs de missiles balistiques nord-coréens, de même que les exercices de guerre américano - sud-coréens, s'inscrivent dans une escalade des tensions où chaque partie riposte en graduant sa réponse. Washington justifie l'intensification chaque année des manoeuvres militaires menées avec ses alliés par la poursuite des programmes nucléaire militaire et balistique nord-coréens, tandis que la RPD de Corée répond qu'elle n'a d'autre choix pour défendre sa souveraineté que de disposer d'une capacité de dissuasion nucléaire... et donc de répondre aux menaces américaines par de nouveaux essais nucléaires et/ou tirs de missiles.
Cette escalade des tensions traduit une impasse, dont seule une reprise du dialogue permettra de sortir. Malheureusement, à ce jour, Washington et Séoul entendent accélérer la course aux armements, en envisageant le déploiement en Corée du Sud d'armes nucléaires tactiques ainsi que l'accélération de la mise en place du système de missiles balistiques THAAD - vivement dénoncé comme une menace par la Russieet la Chine (laquelle a par ailleurs commencé à prendre des mesures de rétorsion économique vis-à-vis de la Corée du Sud suite au déploiement de THAAD) :
Washington a par ailleurs annoncé, le 5 mars, étudier la possibilité de déployer en Corée du Sud des armements nucléaires tactiques en guise de dissuasion. Séoul et Washington ont également décidé d’accélérer l’installation en Corée du Sud du Thaad (Terminal High Altitude Area Defense – système de missiles antibalistiques américain).
Depuis le 14 février 2017, la mort, la veille, de celui qui est présenté comme étant Kim Jong-nam retient toute l’attention des médias internationaux pour ce qui concerne l’actualité coréenne. De fait, tous les ingrédients d’un roman d’espionnage sont réunis - y compris la fascination de l’assassinat par empoisonnement. Toutefois, un certain nombre de zones d’ombre demeurent et justifient, compte tenu des conséquences géopolitiques de cette affaire et de la manière avec laquelle elle est généralement présentée par les grands médias, que la rédaction de l’Association d’amitié franco-coréenne juge utile de lister ces interrogations, en laissant au lecteur le soin de se faire sa propre opinion.
Qui est mort ?
Un citoyen nord-coréen, mort le 13 février au cours de son transport de l’aéroport vers l’hôpital de Kuala Lumpur en Malaisie, détenteur d'un passeport diplomatique au nom de Kim Chol, né en 1970, a été présenté, dès le lendemain par la presse sud-coréenne comme étant Kim Jong-nam, demi-frère du dirigeant de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) Kim Jong-un. Seul un test ADN pourrait avec certitude déterminer l’identité du défunt. Cependant, l’article 40 (alinéas 3 et 4) de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques stipule que les personnes munies d’un passeport diplomatique bénéficient d’un principe d’inviolabilité personnelle. A ce titre, la réalisation d’un test ADN et d’une autopsie suppose l’accord préalable de la République populaire démocratique de Corée. La RPDC - comme le droit international l'autorise - a refusé la réalisation de ce test ADN et de cette autopsie et a demandé à ce que le corps du défunt lui soit remis. Par son refus, l’attitude de la Malaisie est doublement critiquable.
Premier point critiquable, la réalisation d’une autopsie et d’un test ADN sans l’accord de la RPDC est constitutive d’une violation des conventions internationales ainsi que l’a rappelé le Comité des juristes coréens (de la RPD de Corée) le 22 février.
Par ailleurs, la réalisation d’un test ADN suppose un prélèvement, en Malaisie ou ailleurs, sur un membre de la famille du défunt. Or, à ce jour, aucune information quant à l’arrivée prochaine en Malaisie d'un membre de la famille de Kim Jong-nam n'a été vérifiée de manière certaine. Le corps n'a pas non plus été réclamé par la famille et, conformément aux conventions internationales, aurait dû être immédiatement remis aux représentants de la RPDC à Kuala Lumpur.
Le test ADN réalisé par la Corée du Sud sur la base d’empreintes digitales laissées dans un restaurant manque quant à lui de crédibilité et d’impartialité et doit donc être écarté.
Second point critiquable, le gouvernement de la RPD de Corée a demandé à être associé à l’enquête. Cette requête a été refusée par la Malaisie. Le rejet de cette proposition d’enquête conjointe formulée par la RPDC traduit un refus manifeste de coopération mais pourrait aussi témoigner de la peur de la part de la police malaisienne que des lacunes de l’enquête puissent être révélées au grand jour - après la tragique disparition du vol MH370 en mars 2014, où les autorités malaisiennes ont été très critiquées pour leur gestion calamiteuse de la catastrophe et de ses suites.
Quelle est la cause de la mort ?
Des zones d’ombre entourent les circonstances et la cause de la mort du citoyen nord-coréen, la presse internationale s’étant contentée de relayer la thèse diffusée - très rapidement - par les médias sud-coréens (cf. ci-dessous la réponse à la question « D'où vient l'information relayée par les médias occidentaux ? ») selon laquelle il s’agirait d’un assassinat par empoisonnement. L’autopsie, réalisée sans autorisation de la République populaire démocratique de Corée (cf. question « Qui est mort ? »), ne lève pas toutes les questions, en l’absence, visiblement à ce jour, de test ADN. En attendant, deux thèses s’opposent.
La mort du citoyen nord-coréen a tout d’abord été présentée par la police malaisienne comme étant la conséquence d’un accident cardiaque. Certains médias sud-coréens ont cependant affirmé qu’il s’agissait d’un « assassinat par empoisonnement » et cette thèse a immédiatement été reprise par la police malaisienne puis par les médias internationaux. Cette affirmation, par son caractère précipité, pour le moins, devrait pourtant susciter un certain nombre d’interrogations.
Une vidéo récupérée de manière incertaine avant d'être diffusée par la télévision japonaise FujiTV a depuis été largement relayée et sert de pierre angulaire à la thèse selon laquelle le citoyen nord-coréen aurait été assassiné. Or, sur cette vidéo, ni l’angle de la prise de vue ni la mauvaise qualité des images ne permettent d’établir avec certitude l’existence d’un assassinat par empoisonnement, tandis que le visage de la personne est difficile à discerner. Une photo a circulé, publiée notamment en France par l'hebdomadaire Paris Match, d'un homme présenté comme Kim Jong-nam, évanoui après l' « attentat ». Mais c’est manifestement un faux, les vêtements n’étant pas les mêmes que sur la vidéo diffusée par la télévision japonaise.
D’après les tenants de la thèse de l’assassinat par empoisonnement, le citoyen nord-coréen aurait été empoisonné à l’aide du poison VX, « plus mortel que le gaz sarin » (c'est à dire plus mortel que mortel !) comme le souligne la dépêche AFP ayant alimenté une bonne partie de la presse française... Inventé par les Britanniques et modifié par les Etats-Unis, assimilé à une arme de destruction massive, ce poison est extrêmement dangereux et doit être manipulé avec une extrême précaution. L’Institut coréen pour les analyses de défense (KIDA), relevant du ministère sud-coréen de la Défense, avait avancé en 2016 que la RPD de Corée disposerait de six types de gaz innervant dont le VX. La thèse selon laquelle une femme aurait pu, sans aucune protection, asperger le citoyen nord-coréen de ce poison est cependant sujette à caution, et ce point a été souligné par la partie nord-coréenne. Elle n'est cependant pas la seule à s’interroger. Dans un article du quotidien français Le Monde, l’idée que ce poison ait été utilisé est écartée par deux spécialistes :
Pour le médecin général Patrice Binder, spécialiste des armes biologiques, aujourd’hui à la retraite, il n’est cependant pas crédible que le VX ait pu être appliqué à mains nues sur le visage de la victime par les deux exécutantes présumées. 'Elles auraient été en état de choc, même sous atropine', principal antidote au VX. 'Même en se protégeant avec des gants, manipuler ce produit à la toxicité diabolique est extrêmement dangereux', ajoute Olivier Lepick, chercheur associé à la Fondation pour la recherche stratégique, auteur d’une thèse sur l’utilisation des armes chimiques pendant la première guerre mondiale.
L’identité et le parcours des deux femmes accusées d’avoir participé à l’empoisonnement posent de sérieux doutes (voir question « Que sait-on des deux femmes soupçonnées d'avoir assassiné la victime ? »).
Contre cette théorie, la République populaire démocratique de Corée a exprimé un certain nombre d’objections, récusant catégoriquement la thèse de l’empoisonnement faute de traces toxiques indubitables ou de lésions. Pour faire la lumière sur ce décès, la RPD de Corée a même proposé au gouvernement malaisien l’envoi d’une délégation pour permettre la réalisation une enquête conjointe et indépendante de toute pression, notamment de la part de la Corée du Sud dont elle dénonce l’ingérence dans cette affaire. Cette proposition n’a pour le moment pas été acceptée. Dans l’attente d’une éventuelle coopération, la RPDC s’en tient à ce qui avait été affirmé initialement par l’hôpital de Kuala Lumpur et le gouvernement malaisien, à savoir une attaque cardiaque.
D'où vient l'information relayée par les médias occidentaux ?
La chaîne sud-coréenne Chosun TV est la première à avoir annoncé, le 14 février 2017, l'assassinat de Kim Jong-nam, d'après d’une « source gouvernementale » non précisée. Chosun TV est la chaîne du quotidien ultra-conservateur Choson Ilbo, très proche des services de renseignement sud-coréens, à quelques mois (semaines ?) d'une élection présidentielle mal engagée pour les conservateurs au pouvoir à Séoul (voir question « En cas d'assassinat de Kim Jong-nam, quels seraient les commanditaires et leurs mobiles ? »).
Dans la première information diffusée par Chosun TV, la victime, immédiatement présentée comme étant Kim Jong-nam, aurait été tuée à l’aide d’aiguilles empoisonnées puis aspergée ; dans un second temps, un tissu lui aurait été mis de force sur le visage pendant quelque quinze secondes, cette durée variant ensuite à quelques secondes ; la nature du poison prétendument utilisé a ensuite été précisée. A ces quelques éléments près (mais qui ont leur importance), le scénario présenté par Chosun TV n’a guère évolué dans ses grandes lignes. Les services de renseignement sud-coréens n’ont pas souhaité, dans un premier temps, faire de commentaires à la presse, la désignation de la Corée du Nord étant alors du fait de la police malaisienne. Toujours selon les médias sud-coréens, ce serait la Malaisie qui aurait informé la Corée du Sud, alors que la victime est nord-coréenne et (s’il s’agissait bien de Kim Jong-nam) résidait en Chine. Ces éléments ont naturellement conduit la RPDC, par la voix de son Comité des juristes, à dénoncer une collusion entre la Malaisie et la Corée du Sud.
Que sait-on des deux femmes soupçonnées d'avoir assassiné la victime ?
Peu après le décès du citoyen nord-coréen, la police malaisienne a annoncé l’arrestation de deux femmes. Au cours des interrogatoires, elles ont affirmé qu’elles pensaient prendre part à un jeu télévisé de type « caméra cachée » et auraient reçu une somme d’argent assez dérisoire (90 dollars) pour asperger le visage de la victime d’un produit qu’elles pensaient être de l'« huile pour bébé ». Cependant, l’identité, l’activité et le parcours de ces deux femmes posent un certain nombre d’interrogations qui sont de nature à remettre en cause la thèse d'un assassinat par empoisonnement orchestré par la RPDC. En effet, au regard de leur vulnérabilité et des pressions dont elles peuvent faire l’objet, notamment au cours des interrogatoires par la police malaisienne, leurs témoignages doivent être considérées avec prudence. De nationalités indonésienne et vietnamienne, elles travaillent toutes les deux dans le milieu de la prostitution et ont l’habitude de se déplacer en Asie pour leurs activités. L’une d’elles, Doan Thi Huong, est de nationalité vietnamienne et l’étude de son compte Facebook est troublante car elle révèle des liens avec de nombreux citoyens sud-coréens (27 sur un total de 65 amis) ainsi qu’une connaissance de l’alphabet coréen. Une enquête indépendante serait donc la bienvenue pour déterminer la nature exacte de ses liens avec la Corée du Sud.
En cas d'assassinat de Kim Jong-nam, quels seraient les commanditaires et leurs mobiles ?
La RPDC a-t-elle assassiné Kim Jong-nam? On peut s’interroger sur l’intérêt pour les Nord-Coréens d’éliminer un homme volontairement à l'écart des jeux de pouvoir en RPDC, qui n’était pas un opposant ni un dissident, et de surcroît sous la protection des autorités chinoises, alors que Pékin est le principal partenaire de la Corée du Nord. Les critiques de Kim Jong-nam contre la RPD de Corée ne doivent pas être surinterprétées : elles sont anciennes et parcellaires, certaines déclarations de Kim Jong-nam allant même dans le sens d’un souhait que le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un réussisse dans sa direction du pays. A l’appui cependant d’une mise en cause de la Corée du Nord, les médias ont affirmé que le fils aîné de Kim Jong-nam, Kim Han-sol, aurait renoncé à commencer des études à Oxford - Kim Han-sol ne s’étant par ailleurs pas exprimé publiquement depuis le 13 février 2017. La victime était dans la partie de l’aéroport de Kuala Lumpur dévolue aux vols low cost, ce qui ne correspond pas au mode de vie prétendu de Kim Jong-nam. Le mode opératoire supposé, particulièrement peu discret, a entraîné une large publicité nuisant à l’image de la RPD de Corée. L’amateurisme extrême de ce qui est présenté comme un assassinat par empoisonnement, avec le recours à des civils de nationalité étrangère, peut être de nature à écarter l'idée une intervention du gouvernement nord-coréen (et, si c'est le cas, à quel niveau ?). Si la RPDC avait réellement eu l’intention d’éliminer Kim Jong-nam, on peut objecter qu’elle l’aurait fait avec d’autres moyens et dans un autre lieu qu’un hall d’aéroport bondé.
En outre, la République populaire démocratique de Corée et la Malaisie entretiennent de longue date d'excellentes relations allant jusqu'à l'absence de visas entre les deux pays. Quelques semaines avant l'incident du 13 février 2017, la RPD de Corée et la Malaisie avaient même signé un accord pour approfondir leur coopération dans le domaine culturel. Quel intérêt avait la RPD de Corée à ainsi ruiner une si belle entente ?
Pour accréditer le mobile de l’assassinat par la RPD de Corée, différentes hypothèses (d’origine sud-coréenne ou occidentale) ont été émises mais toutes restent à être étayées : Kim Jong-nam aurait voulu faire chanter les autorités de la RPD de Corée en menaçant de gagner la Corée du Sud, il aurait pu prendre la tête d’un gouvernement en exil, etc…
En tout état de cause, la Malaisie recherche des suspects nord-coréens, y compris un diplomate, dont plusieurs ont quitté la Malaisie peu après l'incident du 13 février. La RPDC parle quant à elle de manipulation et d'atteinte à sa souveraineté au regard du principe d’immunité diplomatique dont jouissent les diplomates, immunité consacrée par les conventions internationales et devant à ce titre être respectées. La Malaisie objecte que les circonstances de la mort justifieraient ce non-respect du droit international.
Les triades chinoises ont-elles assassiné Kim Jong-nam? Le mode de vie et les dettes potentielles de Kim Jong-nam, passant le plus clair de son temps à Macao, en font une cible potentielle pour certains intérêts économiques chinois liés aux triades. L’assassinat en dehors du territoire chinois traduirait alors une volonté de brouiller les pistes en évitant de se soumettre aux juridictions chinoises. En outre, les deux assassins présumées fréquentaient des milieux interlopes dont Kim Jong-nam aurait été un habitué.
Les services secrets sud-coréens ont-ils assassiné Kim Jong-nam? Cette hypothèse a des partisans, en Corée du Sud notamment, où les services secrets ont été impliqués dans des opérations pour tout ou partie non élucidées. Parmi les dernières affaires en date, la manipulation de l’élection présidentielle sud-coréenne de décembre 2012 et la dissimulation des causes du naufrage du ferry Sewol ayant entraîné en avril 2014 la mort de quelque 300 passagers - majoritairement des lycéens en voyage scolaire. En outre, une élection présidentielle doit intervenir dans les prochains mois en Corée du Sud, alors que la présidente conservatrice Park Geun-hye a été destituée par le Parlement en décembre dernier et que la Cour constitutionnelle devrait confirmer (ou non) d’ici la mi-mars ce vote de destitution. L’affaire fait opportunément le jeu des services secrets proches de la droite sud-coréenne. En tout état de cause, cette affaire détourne provisoirement l’attention de la presse des nombreux problèmes internes à la Corée du Sud (procédure de destitution, enquêtes pour corruption, manifestations massives…) et constitue donc un parfait contre-feu médiatique. Les citoyens sud-coréens ont une expression pour désigner ce genre d'incident spectaculaire impliquant la RPDC et survenant très opportunément à la veille d'échéances majeures en Corée du Sud : le « vent du Nord ».
Un autre pays a-t-il assassiné Kim Jong-nam?A supposer que le poison puissant soupçonné (le VX) ait été utilisé, peu de pays peuvent le produire. Parmi ces pays, il y a la Russie, laquelle est un partenaire important (à défaut d’être un allié) de la RPDC. Il est notoire qu'une partie des techniciens et scientifiques russes s’est engagée dans des activités illicites après la disparition de l’Union soviétique en 1991. Certaines agences des Etats-Unis, autres producteurs du VX, auraient aussi eu intérêt à commettre un attentat spectaculaire « sous fausse bannière », en l'occurrence celle de la Corée du Nord, pour faire avancer les intérêts stratégiques américains en Asie et particulièrement en Corée où l'installation prochaine du système antimissile THAAD soulève une vive opposition. Dans sa déclaration du 22 février, le Comité des juristes de la RPDC s'étonne d'ailleurs que la mise en place du système THAAD ait été évoquée lors d'une réunion ministérielle tenue le 16 février en Corée du Sud et ayant pour sujet l'incident de Kuala Lumpur.
Enfin, la possibilité selon laquelle Kim Jong-nam aurait simulé sa propre mort avec le recours à un tiers n’est pas à exclure. Kim Jong-nam, passionné de jeux et père de famille, a toujours préféré les joies d'une vie discrète aux lumières du pouvoir et aurait eu tout intérêt à passer pour disparu et ainsi recommencer une nouvelle vie.
Les mystères qui entourent la disparition d’un Nord-Coréen le 13 février 2017 à Kuala Lumpur doivent inciter à n'écarter aucune hypothèse et, en tout cas, à rester extrêmement prudent face à une histoire vendue un peu trop vite par les grands médias malgré ses trop nombreuses incohérences.
Le 30 janvier 2017, l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) et le Pôle de renaissance communiste en France (PRCF) ont coorganisé une conférence à Grenoble, sur le thème "Mouvement social en Corée du Sud, agressions impérialistes contre la Corée du Nord". Nous publions ci-après un compte rendu de cette conférence et deux vidéos présentant les interventions des conférenciers, publiées sur le compte Youtube du PRCF.
Présentation par Jin Yong-ha, responsable du Comité des Travailleurs du Parti Démocratique et Populaire (Corée du Sud)
1-Contexte historique
La situation en Corée est très mal connue en France. Pour connaître la situation en Corée, il faut connaître son histoire. La Corée est un petit pays entouré de grandes puissances qui a dû sans cesse lutter pour conserver son indépendance. La politique isolationniste poursuivie jusqu'en 1910 a empêché l'industrialisation du pays et l'a rendu vulnérable à l'invasion japonaise. L'occupation japonaise se poursuivit de 1910 à 1945 avec pour objectif l'anéantissement de la culture coréenne et de sa langue. Lorsque les Américains occupèrent ensuite le sud de la péninsule, ils donnèrent à la Corée du Sud une apparence d'indépendance tout en mettant à la tête de l'Etat sud-coréen les anciens dirigeants de la collaboration avec les Japonais. Cela conduisit à une révolte très forte des Coréens du sud et à la formation du Comité national des travailleurs de Corée. Ce syndicat appela à la grève générale puis fut dissout par l'Etat sud-coréen pour être remplacé par des syndicats jaunes. Une dictature militaire perdura des années 1960 jusqu'à la fin des années 1980. Un événement important fut l'immolation par le feu du jeune travailleur Jon Tae-Il en 1970 qui marqua le mouvement de résistance à la dictature. En juillet-septembre 1987, une série de grèves eut pour revendication la création d'un syndicat démocratique. Celle-ci fut effective avec la création de la Confédération Générale des Syndicats (KCTU) en 1995. De ce syndicat naquit le Parti Progressiste unifié en 2000. Il y a en Corée moins de distance entre parti et syndicat démocratique qu'en France.
2-Actualité
Le mandat du président sud-coréen est de 5 ans. La présidence actuelle Park Geun-hye est la prolongation de la présidence réactionnaire précédente avec Lee Myung-bak. La présidence de Lee Myung-bak fut entachée entre autres par le lancement du projet d'aménagement des quatre fleuves à la fois inutile et dangereux pour l'environnement. 2009 fut une année d'importantes répressions contre les travailleurs avec l'interdiction du syndicat des fonctionnaires alors que le droit de se syndiquer est reconnu par la Constitution sud-coréenne. La présidence Park Geun-hye a commencé en décembre 2012 suite à des fraudes électorales massives. En décembre 2014, le Parti progressiste unifié fut interdit suite à l'affirmation mensongère selon laquelle il aurait préparé un coup d'Etat avec le soutien de la Corée du Nord. Ceci montre le caractère fascisant de la présidence Park Geun-hye. Il y eut également le scandale du naufrage du Sewol avec 300 enfants morts en avril 2014, scandale qui ne fut jamais éclairci. Des mesures de répression furent prises contre les parents des victimes et les militants pour la vérité sur le naufrage, avec des arrestations et gardes à vue arbitraires de plusieurs jours. En 2013, le siège de la KCTU fut perquisitionné et son dirigeant arrêté et condamné à 7 ans de prison ferme. L'Organisation internationale du travail émit des protestations. Les demandes de création de syndicats de fonctionnaires furent rejetées et le syndicat des enseignants interdit. Il faut savoir que la Corée du Sud a 10 millions de travailleurs précaires et trois millions de chômeurs pour 50 millions d'habitant et n'a pas de système complet de sécurité sociale. Participer aux luttes sociales et syndicales en Corée du Sud mène très souvent en prison. La répression est particulièrement forte dans les grandes entreprises comme Samsung et Hyundai, dont le poids économique est écrasant. A Hyundai, il y a deux fois pus de travailleurs précaires que de travailleurs permanents. A Samsung, les syndicats sont interdits. Il y a eu récemment une tournée européenne des syndicalistes (illégaux) de Samsung. Un problème grave est notamment l'exposition des travailleurs à des substances toxiques qui ont causé au moins 80 leucémies mortelles. A cela s'ajoutent d'autres problèmes comme ceux de la dette étudiante. En conclusion, la résistance est forte au sein du peuple de Corée du Sud, et porteuse d'espoir pour l'avenir.
Présentation sur la Corée du Nord et l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) par Benoît Quennedey, vice-président de l'AAFC chargé des actions de coopération
La Corée du Nord est l'objet de tous les fantasmes. Toute personne portant un autre regard que celui des médias dominants sur la Corée du Nord sera facilement qualifiée de "suppôt du régime". L'image négative la Corée du Nord en Occident est largement fabriquée par les services secrets sud-coréens et américains, alors que les Etats-Unis stationnent près de 30 000 soldats dans la péninsule coréenne. Ceci s'explique notamment par son système économique capitaliste, sa position géostratégique entourée de grandes puissances et ses capacités technologiques puisque la Corée du Nord est un des quelque 10 pays au monde capables de lancer un satellite dans l'espace.
Les Nord-Coréens ne prétendent pas être un modèle. La culture politique locale est très marquée par le confucianisme. Il s'agit d'une adaptation locale des démocraties populaires.
L'Association d'amitié franco-coréenne considère le dialogue avec la Corée du Nord nécessaire comme avec tout pays différent du nôtre. Dès sa fondation en 1969, l'AAFC ne comporta pas que des communistes mais aussi des socialistes, des gaullistes de gauche ou encore des chrétiens progressistes.
Le destin des deux Corée est lié malgré la division. Comme l'a montré la succession d'une phase de démocratisation de la Corée du Sud en 1998-2008 et de dialogue avec le Nord, suivie d'une phase autoritaire et de fermeture du dialogue avec la Corée du Nord, le combat social en Corée du Sud et le combat pour la paix et la réunification en Corée sont liés.
L'AAFC n'a pas pour but défendre en bloc un gouvernement qui ne prétend pas exporter son modèle, mais de donner des clés pour mieux comprendre la situation en Corée. La situation française est particulière puisqu'il s'agit du seul pays européen avec l'Estonie qui n'a pas établi de relations diplomatiques complètes avec la République populaire démocratique de Corée. L'AAFC ne s'intéresse pas seulement au Nord mais aussi au Sud de la péninsule, d'où sa contribution à la fondation du Comité international pour les libertés démocratiques en Corée du Sud.
La question est souvent posée de savoir si la Corée du Nord est un pays socialiste. Le socialisme est un concept qui prend dans la réalité des formes diverses. On retrouve en Corée du Nord les caractéristiques essentielles du socialisme développé dans les démocraties populaires, avec notamment la propriété collective des grands moyens de productions, le système de santé et d'éducation gratuits, les logements à prix modiques. Cependant, la Corée du Nord ne se reconnaît plus dans le marxisme-léninisme mais dans une idéologie qui lui est propre, les idées du Juche
La Corée du Nord a été fondée par des résistants à l'occupation japonaise, et la menace impérialiste permanente l'a amenée à maintenir une certaine opacité des mécanismes décisionnels au sommet de l'exécutif comme il est d'usage dans tous les réseaux de résistance. On notera cependant que le pouvoir à la base est exercé par les cellules du Parti du travail de Corée, qui fait remonter ses décisions, informations et opinions en haut de la pyramide.
Lors des années 1990, la Corée du Nord a perdu subitement la plupart de ses partenariats commerciaux. De plus la perte d'accès au pétrole soviétique à des conditions préférentielles cumulé avec de graves inondations ont considérablement mis à mal l'agriculture nord-coréenne jusqu'alors assez fortement mécanisée. Cette situation a conduit à un certain nombre de réformes marquées par la légalisation et la généralisation des marchés de surplus agricoles, la monétarisation de l'économie et une autonomisation de gestion des entreprises.
Le programme nucléaire nord-coréen prend son origine dans son manque de confiance dans ses alliés qui s'avèrera ensuite justifié dans les années 1990. Les dirigeants nord-coréens furent d'avis que seule la dissuasion nucléaire pouvait protéger leur pays d'une invasion des Etats-Unis, et furent confortés dans cette opinion par l'invasion de l'Irak, de l'Afghanistan, de la Libye... La Corée du Nord se voit ainsi, non sans raisons, comme un Etat guérilla en permanence menacé.
Dans la matinée du 12 février 2017, la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) a procédé depuis la base de Banghyon à un tir de missile balistique, considéré comme étant de moyenne portée par les experts américains et sud-coréens. La RPD de Corée a procédé à huit tirs de missile de moyenne portée en 2016. Il s'agit du premier tir de missile balistique depuis l'entrée en fonctions, le 20 janvier 2017, du Président américain Donald Trump, qui reçoit actuellement le Premier ministre japonais Shinzo Abe. Ce tir intervient par ailleurs à quelques jours de la célébration du 75e anniversaire de la naissance du Dirigeant Kim Jong-il, le 16 février prochain.
Missile nord-coréen à portée intermédiaire sur son véhicule TEL (tracteur-élévateur-lanceur) pendant une parade militaire à Pyongyang
Comme les précédents tirs de missile ou lancements de satellite par la RPD de Corée, qui contreviennent aux résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies et étaient déjà souvent intervenus à la veille de dates anniversaires de la RPD de Corée, la dernière initiative de Pyongyang a soulevé de vives protestations des administrations conservatrices en fonctions à Séoul et Tokyo, soutenues sans réserves par l'administration américaine. De ce point de vue, Donald Trump - qui a déclaré être "à 100 %" derrière le Japon - s'inscrit dans la continuité de son prédécesseur Barack Obama. Mais pouvait-il faire autrement, alors qu'il reçoit en ce moment même Shinzo Abe ? Enfin, contrairement à ce que d'aucuns observateurs avaient envisagé, l'administration Trump n'a ni procédé à l'interception du missile nord-coréen, ni procédé à des frappes en RPDC sur la base de lancement.
Plusieurs interrogations se posent néanmoins. D'une part, quelle est la nature exacte du tir de missile nord-coréen ? D'autre part, pourrait-il y avoir de nouvelles sanctions contre la RPD de Corée, ainsi qu'une intensification des exercices militaires américano-sud-coréens (qui reprendront dans quelques semaines) et une accélération du déploiement en Corée du Sud du système américain de missiles antimissile THAAD ?
En réponse à la première question, les experts américains et sud-coréens estiment à ce stade - en l'absence par ailleurs de réaction officielle nord-coréenne - qu'il s'agit d'un nouveau tir de missile de moyenne portée, et non du lancement d'un missile balistique intercontinental (acronyme anglais : ICBM), comme attendu après le discours de Nouvel An du Maréchal Kim Jong-un. Des missiles avaient été repérés par les Occidentaux depuis plusieurs semaines sur leur rampe de lancement ; les militaires sud-coréens avaient estimé, dans un premier temps, qu'il s'agissait d'ICBM, avant de se rétracter en déclarant qu'il s'agissait de missiles de moyenne portée.
Selon l'agence sud-coréenne Yonhap, il s'agirait d'une version améliorée d'un missile de moyenne portée de type Rodong, qui aurait parcouru 500 kilomètres avant de tomber en mer de l'Est - soit 100 kilomètres de plus que les Rodong. Par ailleurs, l'altitude de vol aurait diminué de 1 400 à 550 kilomètres, traduisant un progrès dans la technologie balistique en ce qui concerne la poussée du moteur et le poids de l'engin.
Outre l'intérêt militaire scientifique pour la RPD de Corée de procéder à ce nouveau lancement, le moment retenu semble indiquer une volonté de tester la réaction de l'administration Trump. Cette manière de faire, consistant à agir en premier en prenant une initiative contraire à la volonté des Etats-Unis et de leurs alliés, n'est pas nouvelle pour Pyongyang, qui entend ainsi créer un rapport de forces avant d'éventuelles négociations.
Le pari n'est pas sans risques, puisque ce tir de moyenne portée (s'il est bien confirmé qu'il s'agit d'un tir de moyenne portée) pourrait entraîner, contrairement aux précédents tirs de ce type, l'adoption par le Conseil de sécurité d'une nouvelle résolution alourdissant les sanctions internationales contre Pyongyang. Mais y aurait-il une unanimité en ce sens au sein du Conseil de sécurité, notamment de la part de la Chine et de la Russie, qui condamnent par ailleurs le déploiement de THAAD en Corée du Sud ? Alors que Moscou et Pékin ne se sont pas empressés de réagir à la dernière initiative nord-coréenne, Pyongyang teste sans doute autant la Chine et la Russie que les Etats-Unis de Donald Trump.
Pour l'état-major sud-coréen, il s'agit " d'une démonstration de force en réaction à la ligne dure de la nouvelle administration américaine vis-à-vis du Nord ". Lire aussi : Les Etats-Unis r...
La Corée du Nord aurait tiré, ce dimanche, une version améliorée du missile balistique de moyenne portée de type Rodong, préviennent des experts sud-coréens.
Le Foyer Rural de Tousson, dans le cadre de ses rencontres « Café des Lumières », a proposé la vidéo projection de la conférence de Robert Charvin, « Comment être Coréen du Nord ou Russe, ou l’escamotage de la géopolitique », conférence donnée à la Sorbonne le 1er octobre de l’année dernière. Cette manifestation a été organisée avec le parrainage des films de l'An 2.
C’est le Festival de Cannes qui a sensibilisé des adhérents du Foyer Rural sur la Corée et un grand magasin culturel parisien qui les a amenés à s’intéresser au cinéma nord-coréen et à la République Populaire Démocratique de Corée depuis 2011. C’est ainsi que dans cette suite de rencontres sur la Corée (stages cinéma, gastronomie, conférences avec des réalisateurs : Pierre-Olivier François et David Carr-Brown…), un petit groupe d’adhérents a découvert la conférence de Robert Charvin, ce mercredi 11 janvier 2017. Aucun n’avait de connaissance sur la RDPC autre que ce qu’en rapportent les médias. Ils étaient très curieux et nul doute que les qualités du conférencier et la notoriété de la Sorbonne ont contribué au sérieux de ce Café des Lumières. Les cinquante minutes de la conférence ont semblé très courtes tant la qualité de l’orateur est passionnante et des applaudissements ont été spontanés en fin de projection. Robert Charvin n’est pas sans rappeler à certains moments le linguiste américain Noam Chomsky par des traits d’humour décalé … « les Etats-Unis s’estiment menacés par la RDPC… c’est comme ci la France se sentait menacée par le Portugal »… Comme dans La fabrique du consentement (Contre-feux, éd. Agone) de l’auteur américain, Robert Charvin entreprend plutôt une analyse des médias, presse écrite, télévisions et réseaux sociaux, en lien avec l’actualité comme le déploiement du matériel militaire en Pologne, pour « assurer la paix »… A l’affirmation souvent entendue que la RDPC serait un pays agresseur, il rappelle qu’un pays n’est agresseur que quand il est sûr de gagner la partie. Des observations et réflexions qui se retrouvent également dans son livre éponyme à destination des journalistes.
« Quel philosophe ! » s’est exclamé un participant. Il estime que c’est par ces rencontres que les choses avancent dans la compréhension du monde.
Le Café des Lumières se termine par l’invitation de son prochain rendez-vous, un dimanche de février, en présence de Juliette Morillot qui vient de publier son livre co-écrit avec Dorian Malovic (La Croix) La Corée du Nord en 100 questions.
Du 28 décembre 2016 au 18 janvier 2017, des étudiants sud-coréens visitent la France, l'Allemagne, la République tchèque, la Hongrie, l'Autriche et la Suisse dans le cadre du sixième voyage international pour la paix (et du cinquième voyage en Europe), organisé par l'association "Papillons de l'espoir" et soutenu par le Conseil coréen pour les femmes requises pour l'esclavage sexuel militaire du Japon. Le 2 janvier 2017, ils ont été place du Trocadéro, à Paris, sur le parvis des Droits de l'Homme, pour exprimer l'aspiration de tout un peuple à vivre en paix, ce qui exige de porter un regard lucide sur le passé - le Japon devant notamment formuler des excuses pour le crime de l'esclavage sexuel des "femmes de réconfort", principalement coréennes, commis avant et pendant la Seconde guerre mondiale.
Nulle part dans le monde peut-être davantage que dans la péninsule coréenne l'exigence de paix n'est plus forte, alors que la guerre civile internationalisée qu'a été la guerre de Corée s'est soldée par un simple accord d'armistice, en 1953, sans signature à ce jour d'un traité de paix ni mise en place de mécanismes de sécurité collective qui permettraient de privilégier le dialogue aux tensions et aux sanctions, et de supprimer les armes nucléaires sur le sol coréen.
Ce message de paix a été porté par les divers orateurs présents, coréens, japonais et français, tandis que des messages ont également été lus en anglais et en espagnol. Comme les années précédentes, l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) était présente : par la voix de son vice-président en charge des actions de coopération, Benoît Quennedey, elle a rappelé son exigence d'une paix durable en Corée, qui implique de renouer avec le dialogue, de mettre fin à la course aux armements et de trouver une solution honorable aux drames vécus par les "femmes de réconfort", anciennes esclaves sexuelles de l'armée japonaise - ce que ne permet pas le déshonorant accord nippo-sud-coréen signé fin 2015 - mais que la nouvelle situation politique ouverte, en Corée du Sud, par le vote de destitution de la Présidente Park Geun-hye pourrait heureusement remettre en cause.
Comme l'ont expliqué les organisateurs de "Papillons de l'espoir" qui relaient la campagne de 100 millions de signatures pour la résolution de la question de l'esclavage sexuel, le papillon symbolise cet espoir d'un monde d'harmonie, sans guerre, débarrassé de la violence intolérable faite aux femmes en période de conflit :
Le Papillon est le symbole qui représente la battement des ailes de la Liberté, échappant aux discriminations, à l'oppression, à la violence. Papillons de l'espoir est une association pour la résolution de la question de l'esclavage sexuel infligé par l'armée japonaise. Nos principales activités sont des campagnes pour la collecte de 100 millions de signatures au niveau national mais aussi international, ainsi qu'en France, en Allemagne, en Equateur et en Bolivie.
Puissent les papillons de l'espoir symboliser cette aspiration universelle à la justice, à la paix et à la fraternité !
La couverture médiatique des événements est parfois étrangement différente des faits eux-mêmes. Le traditionnel message de nouvel an télévisé du Président Kim Jong-un, le 1er janvier 2017, en offre une illustration frappante : alors que le numéro un nord-coréen a clairement mis en avant le souci d’œuvrer pour la paix et la sécurité en Corée, les médias anglo-saxons n'ont retenu que la poursuite du programme nucléaire et balistique de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) pour transformer un message de paix en un discours belliqueux. Décryptage (PS : les extraits cités dans l'article sont une traduction, non officielle, par l'AAFC).
Une fois n'est pas coutume, alors que la part la plus importante du message de nouvel an a été consacré, comme à l'ordinaire, à la situation économique intérieure, la dépêche de l'agence KCNA en ayant rendu compte a déjà évoqué les questions internationales.
Selon l'agence KCNA, dans un contexte marqué en 2016 par le renforcement sans précédent des sanctions contre la RPD de Corée, le Président Kim Jong-un a déclaré que « tant que les États-Unis et leurs suiveurs n'abandonneront pas leurs exercices de guerre », la RPDC « continuera de renforcer son potentiel d'autodéfense et sa capacité à mener une attaque préventive avec comme pivot ses forces nucléaires », tout en précisant que « les tests d'un missile balistique intercontinental sont en phase finale » - une référence étant par ailleurs faite aux progrès réalisés l'an passé dans le domaine balistique et nucléaire, notamment les essais nucléaires de janvier et septembre 2016 présentés comme des essais de bombes H. Mais ces précisions, qui ne sont en rien nouvelles et doivent être envisagées sous l'angle nord-coréen selon lequel l'objectif du désarmement nucléaire n'est possible que dans un cadre global, contrairement au désarmement unilatéral de la RPDC que recherchent les États-Unis (et qui, une fois obtenu, leur ont permis d'agresser des pays dépourvus de moyens suffisants d'autodéfense, comme l'Irak et la Libye).
Le principe de la politique étrangère de la RPD de Corée reste, comme le rappelle le premier paragraphe de la dépêche de l'agence KCNA, « la défense de la paix et de la sécurité », dans la péninsule coréenne et dans le monde. La RPD de Corée entend continuer à développer une politique d' « indépendance, de paix et d'amitié », fondée sur des « relations de bon voisinage, d'amitié et de coopération » avec tous les États qui respectent sa souveraineté.
Selon la dépêche de l'agence KCNA, le Dirigeant Kim Jong-un a ensuite mis l'accent sur la nécessité d'améliorer les relations intercoréennes et d'encourager par tous les moyens la réunification de la patrie, alors que l'année 2017 marque le 45e anniversaire de la déclaration conjointe du 4 juillet 1972 et le 10e anniversaire de la déclaration du 4 octobre 2007. La RPDC est « constante dans sa position de ne pas combattre ses compatriotes mais de défendre ses compatriotes et la paix du pays (…) Tous les Coréens, du Nord, du Sud et de la diaspora, doivent être solidaires et se réunir autour du principe consistant à tout subordonner à la réunification » - par-delà les différences d'idéologies et de systèmes politiques. Ce message trouve une résonnance particulière après le vote par le Parlement sud-coréen d'une motion de destitution de la Présidente sud-coréenne Park Geun-hye, qui a favorisé les tensions intercoréennes – le nom de Mme Park n'étant toutefois pas cité (tout comme d'ailleurs ceux des actuel et futur présidents américains).
La plus grande partie du message de nouvel an concerne, une nouvelle fois, la priorité portée à l'amélioration de la situation économique et au développement du pays, dans la continuité des orientations définies lors du septième Congrès du Parti du travail de Corée en mai 2016 dans le cadre de la stratégie quinquennale de développement économique (le mot « stratégie » étant employé de préférence à celui de « plan »), et sur la base des résultats obtenus l'an passé.
Trois secteurs industriels sont à privilégier : l'électricité, la métallurgie et la chimie. L'accent est porté non seulement sur les aspects quantitatifs, mais aussi sur l'amélioration de la qualité de la production – notamment pour la métallurgie afin de diminuer les coûts d'extraction en modernisant le processus de production (dans la dépêche de KCNA, cette modernisation est décrite comme un recours aux technologies modernes dans le cadre des idées du Juche). Les transports, qui sont un des freins au redressement de l'économie, sont à nouveau identifiés comme une priorité – notamment les transports ferroviaires.
Pour atteindre l'objectif d'autosuffisance alimentaire, le besoin d'accroître la production agricole est souligné – sont notamment cités l'amélioration de l'alimentation du bétail dans la région de Sepho, la production de fruits, de champignons et de légumes et la pisciculture.
Dans le domaine de la construction, plusieurs chantiers prioritaires sont identifiés : la construction de logements rue Ryomyong, la station électrique de Tanchon et la modernisation de l'usine de locomotives Kim Jong-thae.
Toujours selon le Président Kim Jong-un, l'atteinte des objectifs de développement exige une amélioration de modes de gestion, la mise en œuvre des progrès technologiques (il est fait allusion à la mise sur orbite du satellite Kwangmyongsong-4 en février 2016, ainsi qu'au développement d'un modèle coréen de robotisation) ainsi qu'un travail idéologique de mobilisation des travailleurs et des soldats – rappelant ainsi le rôle de l'armée comme acteur économique.
Les priorités ainsi définies constituent autant d'orientations pour la politique de la RPDC en 2017, justifiant l'intérêt d'en faire une analyse rigoureuse.
Il aurait fallu près de trois mois pour que les Etats membres du Conseil de sécurité des Nations Unies (au premier rang desquels les Etats-Unis et la Chine) se mettent d'accord, le 30 novembre 2016, sur une nouvelle résolution renforçant les sanctions contre la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), suite à l'essai nucléaire nord-coréen du 9 septembre 2016. L'Association d'amitié franco-coréenne déplore vivement une logique d'escalade des tensions, alors que les politiques de sanctions ont montré leur inefficacité quant à l'objectif de bloquer le développement des programmes nucléaire et balistique nord-coréens, mais frappent en revanche les populations les plus fragiles.
Une fois encore, ce sont les sanctions économiques - sans lien avec les programmes militaires et balistiques - qui sont renforcées, dans l'objectif d'une asphyxie de la RPD de Corée et d'un effondrement du régime nord-coréen, conformément à l'idéologie néo-conservatrice : plafonnement des exportations de charbon nord-coréennes vers la Chine (soit une perte de revenus annuelle pour la RPDC estimée à 700 millions de dollars), interdiction d'exportation de plusieurs minerais (cuivre, zinc, nickel), des hélicoptères et des statues, ces dernières constituant l'un des domaines d'excellence de la RPDC.
La liste noire des personnes, administrations et entreprises (gel d’avoirs et interdiction de voyager), ciblées car en lien supposé avec les programmes nucléaire et balistique, comprend 21 nouveaux noms.
La liste des produits de luxe interdits d'exportation vers la Corée du Nord est complétée par les tapis et la vaisselle dite "de luxe", ainsi que par 18 produits ou technologie à usage dual (c'est-à-dire pouvant être utilisés à des fins civiles ou militaires).
Enfin, en méconnaissance du respect de la souveraineté diplomatique des Etats, la résolution jette la suspicion sur chaque diplomate nord-coréen, en entendant limiter la taille des représentations diplomatiques nord-coréennes à l'étranger et en interdisant aux diplomates de la RPD de Corée de détenir plus d'un compte bancaire.
Il aura fallu trois mois pour arriver à un compromis au sein du Conseil de sécurité de l'ONU. À la suite du 5 e essai nucléaire nord-coréen, le 9 septembre, et de ses derniers essais de missi...