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6 septembre 2009 7 06 /09 /septembre /2009 20:32

Les 21 et 22 février 1977 s'est tenue, à Bruxelles, la Conférence mondiale pour la réunification pacifique de la Corée, à laquelle participait notamment le sénateur André Aubry, chef de la délégation française, aujourd'hui président de l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC). Les changements politiques intervenus en Europe de l'Est après 1989 ont conduit à rendre publics des documents d'archives diplomatiques jusqu'alors tenus secrets : publié depuis janvier 2009, le rapport en date du 3 mars 1977 rédigé par Lajos Lelkes, premier secrétaire de l'ambassade de Hongrie à Pyongyang, et adressé à Frigyes Puja, ministre hongrois des Affaires étrangères, est un document exceptionnel pour comprendre la position d'un pays membre du Pacte de Varsovie vis-à-vis de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord). Il montre que les principes défendus par Pyongyang sur la réunification de la Corée, avec le soutien de nombre d'organisations internationales tiers-mondistes et de pays non alignés, ainsi que par les Partis communistes s'inscrivant dans la mouvance eurocommuniste (soucieux de se démarquer de Moscou), ont été regardées comme "nationalistes" par l'ambassade de la Hongrie en RPDC.  

Ayant réuni à Bruxelles, les 21 et 22 février 1977, 160 délégués originaires de 50 pays, la Conférence mondiale pour la réunification pacifique de la Corée a été un événement fondateur du mouvement de solidarité avec la Corée, avec la création du
Comité international de liaison pour la réunification et la paix en Corée (CILRECO), auquel est affiliée l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC).

Document secret aujourd'hui déclassifié (dans une traduction en anglais comportant quelques coquilles, notamment sur la graphie des noms propres), le rapport alors rédigé par le premier secrétaire de l'ambassade de Hongrie à Pyongyang apporte des éclairages intéressants sur les participants à la Conférence mondiale de Bruxelles, ainsi que sur la position de Budapest, alors membre du Pacte de Varsovie, l'alliance militaire constituée en Europe autour de l'Union Soviétique.

La liste des organisations internationales présentes à la Conférence montre le soutien des mouvements tiers-mondistes et non-alignés, le Premier secrétaire de l'ambassade de Hongrie 
Lajos Lelkes mentionnant plus particulièrement :
- le
Conseil mondial de la paix, qui a réaffirmé en avril 2008 sa solidarité avec le peuple coréen pour une réunification pacifique et indépendante ;
- la
Fédération syndicale mondiale ;
- le Comité de solidarité Afro-Asiatique ;
- la
Conférence chrétienne pour la paix, évoquant la position de solidarité pour la réunification de la Corée adoptée par le Conseil oécuménique des Eglises, le 1er juiller 2008 ;
- l'Organisation de solidarité des peuples, d'Asie, d'Afrique et d'Amérique latine (OSPAAAL), plus connue sous le nom de
Conférence tricontinentale.

Le comité international ayant parrainé la conférence fait apparaître le soutien actif de chefs d'Etat étrangers (l'amiral Ratsiraka, Madagascar ; Gnassingbé Eyadema, Togo ; le général Kérékou, Bénin) mais aussi de personnalités de divers horizons politiques (le leader socialiste japonais Narida Domi et le gouverneur socialiste de Tokyo Ryokichi Minobe ; Santiago Carrillo, secrétaire général du Parti communiste d'Espagne ; Romulo Escobar Bethancourt, alors président de l'Université de Panama, conseiller du chef de l'Etat, et qui allait devenir le président du Parti révolutionnaire démocratique). De même, comme l'observe le diplomate hongrois, le comité préparatoire en Belgique comprenait non seulement des responsables du Parti socialiste et du Parti communiste belges, mais aussi des personnalités de sensibilité démocrate-chrétienne. Le chef de la délégation de la RPD de Corée était le ministre de l'Education, Kim Sun-ki.

Le parrainage de Santiago Carrillo est également significatif de l'appui des Partis communiste européens s'inscrivant dans la mouvance eurocommuniste : outre le PC espagnol, les Partis communistes français et italien, dont il est souligné la participation active aux travaux de la Conférence, étaient représentés par des membres de leur Comité central, à l'instar d'ailleurs du Parti communiste cubain et de l'Alliance communiste yougoslave.

Le chef de la délégation française était le sénateur communiste André Aubry, actuel
président de l'AAFC. Son rapport a porté sur les relations internationales, le danger de guerre, et le retrait des troupes américaines et de leurs armes nucléaires en Corée, thèmes toujours d'actualité dans le combat du CILRECO. Le rapport présenté par la chef de la délégation italienne a présenté les violations des droits de l'homme en Corée du Sud, alors gouvernée par les militaires. L'opposition sud-coréenne, non invitée à la Conférence, n'était pas présente.

Signe supplémentaire de l'indépendance de Pyongyang, très impliqué dans le mouvement des pays non-alignés, vis-à-vis de Moscou, les représentations diplomatiques à Pyongyang des pays membres du Pacte de Varsovie étaient invitées à la conférence comme observateurs. Il aurait été convenu qu'ils ne soient pas présents au niveau de leurs ambassadeurs : la Hongrie, comme d'ailleurs la Chine, était ainsi représentée par son Premier secrétaire. En revanche, la Yougoslavie et Cuba avaient envoyé des délégations officielles. 
 
Alors que la RPD de Corée a toujours refusé de rejoindre le Conseil d'assistance économique mutuelle, les 30 contributions sont décrites comme "ayant de profondes résonances anti-impérialistes", le rapport soulignant les échos de la lutte du peuple coréen pour sa réunification aux
combats d'indépendance dans le Tiers-Monde, notamment au Sahara Occidental et en Palestine, dans la continuité de la conférence de Colombo des pays non-alignés, en 1976.

Le rapport de l'ambassade de Hongrie souligne la réussite de la conférence et le soutien "tout à fait remarquable" obtenu parmi des partis communistes et socialistes influents, en envisageant que la réunification de la Corée prenne une place accrue dans les travaux des pays non-alignés, ainsi qu'au sein de l'Internationale socialiste : de fait, les organisations internationales progressistes, présentes en 1977, ont globalement maintenu, depuis cette date, leurs positions sur la question de la réunification de la Corée, alors que la participation de dirigeants socialistes au mouvement international de solidarité, aujourd'hui au sein du CILRECO, a été acquise à la même période. Toujours selon le rapport de l'ambassade de Hongrie, un des objectifs principaux était de sensibiliser l'opinion internationale, et d'abord celle ouest-européenne et nord-américaine, à la question de la réunification de la Corée, dans un mouvement plus organisé.   

Si l'ambassade hongroise  juge "positive" la tonalité anti-impérialiste, l'indépendance vis-à-vis des grandes puissances dans la réunification de la Corée est déplorée : elle "fait ressortir le caractère nationaliste des concepts de la réunification de la RPDC" (cette mention de la seule RPDC est importante, dans la mesure où il est observé que la RPDC aurait guidé l'ensemble des travaux). Pour Budapest, cette position serait illusoire sans le soutien de la Chine et de l'URSS. Dans le débat interne au mouvement communiste international, il est cependant fait une mention - critique - de l'influence chinoise qui s'exercerait sur certaines délégations africaines et asiatiques.

Les divergences de la Hongrie peuvent aussi refléter celles de l'URSS et d'autres pays socialistes, sans qu'elles ne s'expriment alors ouvertement. En effet, la solidarité entre pays socialistes conduisait, à cette époque, à un soutien de principe à Pyongyang sur la question de la réunification. Mais la pérestroïka en URSS, ainsi que les réformes menées dans plusieurs pays d'Europe centrale, créèrent ensuite le contexte politique opportun au relâchement des liens de certains pays socialistes avec la RPD de Corée, avant même la disparition de l'URSS et des démocraties populaires d'Europe de l'Est. De fait, des relations diplomatiques officielles ont été établies entre Moscou et Séoul en septembre 1990, un an avant la dissolution de l'Union soviétique.  

Source :
Centre de recherches de Budapest sur l'histoire de la guerre froide

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commentaires

T
<br /> Merci pour ses informations, ils seront très utiles pour mon exposé que je vais préparer très bientôt<br /> <br /> <br />
Répondre

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