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24 juillet 2016 7 24 /07 /juillet /2016 15:10

En septembre 2015, la Présidente sud-coréenne Park Geun-hye se démarquait des dirigeants occidentaux en se rendant à Pékin pour les cérémonies commémorant la fin de la Seconde guerre mondiale, arrivant à mener une politique d'équilibre entre Washington et Pékin. En février 2016, l'adoption, avec le soutien de la République populaire de Chine, de sanctions d'une ampleur sans précédent contre la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) pouvait à nouveau être perçue par les autorités sud-coréennes comme le signe que la Chine se rapprochait fortement de leurs positions sur la question nucléaire dans la péninsule coréenne. Mais la décision américano - sud-coréenne de déployer en Corée le système américain THAAD de missiles antibalistiques a mis fin à ce qui apparaissait comme un début de rapprochement stratégique entre Séoul et Pékin : en choisissant clairement le camp américain par une décision qui menace les intérêts stratégiques chinois (la portée du THAAD permettant d'atteindre la Chine du Nord-Est), Séoul est à nouveau perçue comme le simple supplétif de Washington en Asie du Nord-Est, soulevant colère et incompréhension dans l'opinion publique chinoise.

Dessin paru dans le quotidien chinois (pro-gouvernemental) "Global Times" du 20 juillet 2016, pour illustrer un article de Ding Gang intitulé "THAAD pourrait faire l'objet d'une frappe chirurgicale".

Dessin paru dans le quotidien chinois (pro-gouvernemental) "Global Times" du 20 juillet 2016, pour illustrer un article de Ding Gang intitulé "THAAD pourrait faire l'objet d'une frappe chirurgicale".

Il n'est pas fortuit que l'opposition chinoise au système de missiles THAAD ait été exprimée dans un rapport sur la mise en oeuvre de la résolution 2270 imposant de nouvelles sanctions contre la RPD de Corée, adoptée par le Conseil de sécurité des Nations Unies après l'essai nucléaire nord-coréen du 6 janvier 2016 et le lancement d'un nouveau satellite par Pyongyang le 7 février 2016. En effet, pour Pékin les sanctions contre la RPD de Corée ne sont pas une fin en soi, mais doivent conduire à un retour au dialogue et aux négociations sur la question nucléaire dans la péninsule coréenne. Or, pour Washington (comme pour les faucons au pouvoir à Séoul), les sanctions sont bien une fin en soi, visant à provoquer l'effondrement de la RPD de Corée et étant combinées avec une escalade des tensions entretenue par Washington pour accélérer le processus militaire devant conduire à la chute du régime nord-coréen. Pour les partisans américains et sud-coréens de l'option militaire, le déploiement de THAAD n'est d'ailleurs que l'une des facettes les plus visibles de leur jeu hypocrite - prétendant parer à la menace d'un adversaire cent fois plus faible - mais elle n'est pas la seule : le commandement militaire américain utilise au maximum la carte des médias pour mener une guerre psychologique consistant à décrire les dirigeants nord-coréens (comme d'ailleurs ceux de tout pays s'opposant à la domination américaine) comme des dictateurs atteints de folie, tandis que s'amplifient des manoeuvres militaires désormais tripartites - associant Washington, Tokyo, Séoul et dont l'adversaire réel est bien Pékin, et pas Pyongyang.

L'opposition de la Chine au déploiement de THAAD, rappelée dans le rapport remis par Pékin sur la mise en oeuvre de la résolution 2270, fait écho à la colère de l'opinion publique chinoise vis-à-vis des dirigeants sud-coréens, et dont rend compte un éditorial du Global Times (titre lié au Quotidien du Peuple) en date du 22 juillet 2016. Cet éditorial s'offusque également de la manière dont  les positions de principe chinoises pour la paix et le désarmement en Asie du Nord-Est (y compris pour le désarmement nucléaire de la RPDC) sont travesties par les médias conservateurs sud-coréens, qui lient le refus par Pékin du système THAAD et l'application par la Chine des sanctions contre la RPD de Corée :

Séoul est-elle consciente des dégâts qu'elle a créés sur les intérêts de sécurité chinois et de la confusion qui en découle quant aux perceptions et aux analyses nouvellement partagées en ce qui concerne les sanctions [contre la RPDC] ? (...) La Chine a déjà payé le prix d'un refroidissement de ses relations avec la Corée du Nord, et a enregistré les pertes diplomatiques les plus importantes quant à la question nucléaire nord-coréenne.

En d'autres termes, pour l'auteur de l'éditorial du Global Times du 22 juillet 2016, la Chine ne s'apprête pas à remettre en cause le principe des sanctions contre la RPDC, mais elle ne veut pas non plus être le jouet des intérêts américains servis par les autorités sud-coréennes - alors qu'elle a beaucoup perdu en termes non seulement d'intérêts nationaux (du fait des sanctions économiques contre Pyongyang, où elle a investi des milliards de dollars), mais aussi de prestige diplomatique, dans un contexte d'impasse des pourparlers à six (la Chine, les Etats-Unis, les deux Corée, la Russie et le Japon) sur la question nucléaire dans la péninsule.

Sources :

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