Malgré des sanctions sans précédent, l'économie nord-coréenne apparaît aujourd'hui résiliente, après un taux de croissance estimé à près de 4 % en 2016 par les autorités sud-coréennes elles-mêmes. Un universitaire chinois, Jin Jingyi, en rend compte après deux voyages dans le pays (mai et novembre 2017), dans un article du quotidien sud-coréen (progressiste) Hankyoreh, traduit de l'anglais par YB - en s'interrogeant toutefois jusqu'à quand la République populaire démocratique de Corée pourrait ainsi résister aux sanctions internationales.
Les militaires se rassemblent pour un spectacle de feu d'artifice sur les rives du fleuve Taedong à Pyongyang le 1er décembre pour célébrer le lancement réussi du missile Hwasong-15.
L'économie nord-coréenne florissante semble démentir l'efficacité des sanctions
Quand j'ai visité la Corée du Nord fin mai dernier [NdT : 2017], ma plus grande question était de savoir combien de temps le Nord pourrait résister aux sanctions de la communauté internationale. Mais cette question a été rendue sans intérêt pratique du fait des changements étrangement positifs visibles dans ce pays. Le pays débordait tellement d'énergie que je me suis demandé si « les sanctions sans précédent » existaient vraiment. Les universitaires disaient que l'économie nord-coréenne était florissante et de telles remarques prenaient partout leur sens.
Au début du mois dernier [novembre 2017], je suis allé en Corée du Nord encore une fois. C'était au début de l'hiver, mais le temps à Pyongyang m’a semblé exceptionnellement froid, comme s’il reflétait les dures sanctions mises en oeuvre. Cela m'a rappelé une nouvelle fois la question de savoir pendant combien de temps le Nord pourrait endurer des sanctions d'une telle dureté. Après que la Corée du Nord a réalisé son sixième essai nucléaire le 3 septembre [2017], les sanctions de la communauté internationale ont mis le Nord sous une pression cruelle.
Pendant ma visite, j’ai eu la chance de voir une réunion de 5 000 scientifiques des sciences sociales venus de tout le pays pour la troisième convention des sciences sociales de Corée du Nord, qui avait lieu pour la première fois en 45 ans. Quand j'ai entendu les applaudissements assourdissants, les acclamations et les slogans criés avec passion, je suis arrivé à la conclusion que plus la pression et les sanctions étaient fortes, plus elles renforçaient le régime en exacerbant l'animosité envers la communauté internationale.
Mais ce que j'ai trouvé de plus mystérieux encore était que la convention ait duré un jour et demi et que soient à peine mentionnés les mots "nucléaire", "missile" ou "sanctions" dans les remarques formulées par un des membres nouvellement élus du Bureau Politique du Parti du travail de Corée, par ailleurs Vice-Président du parti. Le mot "sanctions" est à peine apparu pendant les conversations avec les scientifiques nord-coréens au sujet de l’économie de leur pays. Comment cela est-il possible ? En dépit de la vive assurance répandue dans le monde extérieur que la Corée du Nord ne pourra pas tenir encore longtemps et qu’elle s'effondrera bientôt, les Nord-Coréens semblent accepter cette situation avec une sérénité remarquable.
J'ai demandé directement aux experts nord-coréens combien de temps ils pourraient endurer les nouvelles et dures sanctions de la communauté internationale. En réponse, ils m'ont indiqué qu'ils avaient toujours été sous le coup des sanctions. Après des décennies de sanctions ils avaient appris comment s'en accommoder. Ils ont soutenu qu'ils n'étaient pas sous le coup de sanctions parce qu'ils développaient des armes nucléaires, mais que c'est parce qu'ils développaient des armes nucléaires que les Etats-Unis menaçaient leur sécurité avec ces sanctions. Cela suffisait à faire de Kim Jong-un un "héros légendaire" luttant hardiment contre les Etats-Unis, le plus fort pays au monde, avec ses armes nucléaires et ses missiles. Finalement, il est possible de conclure que les sanctions renforcées ont donné une légitimité accrue au gouvernement de Kim Jong-un et l'ont conduit à réaliser des accomplissements comparables à ceux de ses grand-père et père, Kim Il-sung et Kim Jong-il.
À part le fait que le temps était exceptionnellement froid pour un début d'hiver, il n’y avait pas beaucoup de changement à Pyongyang depuis la fin mai. Pendant les cinq premières années de la direction de Kim Jong-un, les sanctions ont diminué de moitié l'approvisionnement du pays en pétrole brut. Il en a résulté un doublement du prix de l'essence, qui se vendait maintenant à environ 10 renminbi (1.51 $ américain) par litre. Mais le prix des bus et des taxis, fonctionnant à l’essence, n’a pas monté du tout. Le prix du riz est aussi resté stable. Il n'y avait toujours aucune indication que l'économie chancellerait. Même les experts nord-coréens s'en étonnaient.
Comme les Nord-Coréens ne sont pas des surhommes, ils seront sûrement affectés par les dures sanctions mises en oeuvre sur le long terme. La question, cependant, est que le Nord a depuis longtemps pris des mesures pour se préparer aux sanctions. Dans le cas où les réserves de pétrole brut seraient complètement coupées, le Nord consacrerait ses efforts à extraire du pétrole brut du charbon et à ses propres réserves de pétrole [NdT : pétrole offshore, aujourd'hui non exploité]. Pour conserver le pétrole lourd, il a développé une méthode d'ignition sans fuel dans ses centrales fonctionnant au charbon.
La Corée du Nord a aussi affecté de grandes quantités du charbon, désormais interdit à l’exportation, à la consommation énergétique intérieure et augmenté la part des usines fonctionnant au charbon dans son mix énergétique. Elle transfère la technologie avancée de son industrie d'armement vers l'industrie légère et augmente fortement la part des produits de l'industrie légère réalisés dans le pays. Les leaders nord-coréens affirment qu'ils remédieront au manque d'énergie et résoudront complètement l'approvisionnement alimentaire d'ici à 2020. Combien de temps la Corée du Nord peut-elle tenir avec de telles méthodes ? Si la direction nationale continue à épuiser ses moyens avec de dures sanctions dures empêchant un dynamisme nouveau, il y a peu de chance que l'économie grandisse. Mais les expressions imperturbables qu'on peut lire sur les visages des Nord-Coréens suggèrent clairement qu'ils ont la force de continuer à endurer.
Le jour précédant mon départ il y a eu des fortes chutes de neige à Pyongyang. C'était le signe qu'une autre malédiction glaciale s’annonçait. Mais ce jour-là, au moins, il faisait anormalement chaud pour la saison.
Par Jin Jingyi , professeur du Centre de Langues étrangères de l’université de Beijing.
Traduit par YB de l’édition anglaise du journal Sud-Coréen Hankyoreh du 4 décembre 2017.
Booming North Korean economy seems to belie effectiveness of sanctions When I visited North Korea at the end of this past May, my biggest question was how long the North can withstand sanctions by ...
Réunis le 5 décembre 2017, les ministres en charge des finances des 28 Etats membres de l'Union européenne ont adopté une liste noire de 17 "paradis fiscaux", c'est-à-dire d'Etats ou d'entités jugés non suffisamment coopératifs dans la lutte contre l'évasion fiscale. Et, surprise, selon les informations divulguées dans la presse figure dans cette liste la République de Corée (Corée du Sud).
Les scandales en série (LuxLeaks, Panama Papers...) ont suscité une réaction (tardive) des autorités de l'Union européenne pour définir une liste de paradis fiscaux, même si les Etats membres n'ont pas (encore ?) pu se mettre d'accord sur les sanctions à appliquer. Selon Bruno Le Maire, ministre français des finances :
Nous avons adopté aujourd’hui [5 décembre 2017] au niveau de l’UE une liste d’États qui ne font pas le nécessaire pour lutter contre l’évasion fiscale. Cette liste qui est une liste noire comprend 17 États.
Selon une source diplomatique largement reprise dans la presse, 17 pays figurent dans la liste noire de l'Union européenne (UE) : Bahreïn, Barbade, Corée du Sud, Emirats Arabes Unis, Grenade, Guam, Îles Marshall, Macao, Mongolie, Namibie, les Palaos, Panama, Samoa, les Samoa américaines, Sainte Lucie, Trinidad et Tobago et Tunisie. 17 autres pays figurent dans une liste grise, c'est-à-dire qu'ils ont pris des engagements qui doivent faire l'objet d'un suivi.
Surprise : aucun Etat européen ne figure dans cette liste. Selon les explications données par l'Union européenne, les critères retenus les excluent en effet de facto, comme l'observent les journalistes du quotidien Le Monde Anne Michel et Cécile Ducourtieux :
Pour éviter d’être classées sur la liste noire définitive, les juridictions devaient théoriquement respecter trois grands critères définis par Bruxelles fin 2016 :
En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/economie/article/2017/12/05/paradis-fiscaux-l-union-europeenne-doit-se-prononcer-sur-une-liste-noire-de-18-pays_5224741_3234.html#98rQVRVsMpXoi7e9.99se conformer aux standards d’échange automatique de données de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), éviter de favoriser l’implantation de sociétés offshore et s’engager à accepter, d’ici à fin 2017, les lignes directrices de lutte contre l’évasion fiscale des multinationales de l’OCDE. L’Union a choisi d’exclure d’emblée les pays européens de cette liste : ils sont déjà censés se conformer au droit de l’UE en matière de lutte contre l’évasion et la fraude fiscales.
Le problème est bien l'écart entre le droit et le pratique : les entités concernées sont "censées se conformer au droit de l'UE". En outre, l'absence de sanctions rend aujourd'hui l'exercice totalement vain.
Enfin, si la Corée du Sud a effectivement pratiqué une déréglementation libérales qui pose de sérieuses questions, croit-on sérieusement que c'est dans cet Etat de plus de 50 millions d'habitants, membre de l'OCDE et du G20, que se réfugient les riches contribuables voulant échapper au fisc ?
Au regard de ces interrogations, l'AAFC déplore vivement qu'un pays tel que la Corée du Sud soit jeté à la vindicte de l'opinion publique européenne et internationale
Le conseil des ministres des finances de l'UE examinait, mardi, une liste de pays ou juridictions opaques ou non coopératives. Le Monde | * Mis à jour le | Par Anne Michel et Cécile Ducourtieux ...
Malgré les menaces - ou peut-être au contraire en raison de ces dernières - proférées par les Etats-Unis de "détruire complètement" la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) "en cas de guerre", selon les propos de S.E. Nikki Haley, ambassadrice américaine au Nations Unies, le Conseil de sécurité des Nations Unies est apparu plus que jamais divisé après le lancement par Pyongyang, le 29 novembre 2017, de son plus puissant missile balistique intercontinental à ce jour.
Les Etats-Unis ont beau menacer d'abattre sur Pyongyang les foudres d'une guerre impitoyable, ils ont échoué : la RPDC est bel et bien devenue une puissance nucléaire à part entière, en dépit des plus lourdes sanctions jamais imposées dans l'histoire des Nations unies. En outre, l'hypothèse de frappes américaines est désormais hautement improbable. Car tout d'abord, où frapper ? Les armes nucléaires nord-coréennes sont disséminées sur son territoire, enfouies et non localisées. Par ailleurs, une riposte nord-coréenne serait telle - notamment pour ses voisins sud-coréen et japonais - que le scénario d'une frappe en premier des Etats-Unis n'a le soutien de pratiquement aucun Etat, et ne reçoit pas davantage l'assentiment de l'appareil d'Etat américain conscient des conséquences qui en découlerait. Le Président Donald Trump a perdu son bras-de-fer avec le Maréchal Kim Jong-un.
Dans ce contexte les Etats-Unis espèrent encore utiliser la carte des sanctions, afin de provoquer l'effondrement de la RPD de Corée. Sauf que les dernières sanctions restant à appliquer consistent à ce que les partenaires de la Corée du Nord rompent tous leurs liens économiques, politiques et diplomatiques avec cette dernière, à commencer par son approvisionnement en pétrole. Cette hypothèse est cependant rejetée par la Chine, par laquelle transite plus des quatre cinquièmes des échanges économiques extérieurs de la Corée du Nord - tandis que la Russie, par la voix de son ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, dénonce l'attitude américaine qui aurait selon elle provoqué les réactions nord-coréennes :
Notre opinion est négative : nous avons à plusieurs reprises souligné que la pression des sanctions est épuisée et que toutes ces résolutions qui ont imposé des sanctions impliquaient nécessairement de reprendre un processus politique et de reprendre les négociations (...) Les récentes actions des Etats-Unis semblent avoir été dirigées délibérément pour provoquer des actions brusques de Pyongyang.
C'est la première fois qu'une initiative de Pyongyang que les Etats-Unis et leurs alliés qualifient de "provocation" suscite un tel renversement de l'imputation des responsabilités par un membre permanent du Conseil de sécurité, en l'occurrence la Russie.
Dans ce contexte, la sagesse consiste à reconnaître la situation actuelle et à prôner un dialogue sur des bases réalistes, comme le rappelle l'éditorialiste de RTL Alain Duhamel, pourtant d'ordinaire favorable à une ligne qu'on qualifierait d'euro-atlantiste :
"La Corée du Nord est la neuvième puissance nucléaire du monde après les cinq membres du Conseil de sécurité des Nations-Unies, le Pakistan, l'Inde et Israël", constate avec gravité Alain Duhamel (...).
La voie diplomatique n'apparaît pas utopique pour Alain Duhamel : de nombreux pays ont un intérêt à l'emprunter. "La Corée du Sud en premier : si la Corée du Nord est détruite, la Corée du Sud le sera aussi. La Chine, limitrophe, le Japon, qui serait visé. La Corée du Nord a atteint son objectif en acquérant l'arme nucléaire pour garantir son indépendance."
Si demander aux Nord-Coréens de renoncer à l'arme nucléaire est utopique, un contrôle serait envisageable. "On peut imaginer un plafond nucléaire et un contrôle de ce plafond", espère l'éditorialiste.
Pour la paix en Corée et dans le monde, il est en effet temps de sortir des postures idéologiques pour reconnaître la réalité nouvelle des équilibres stratégiques et engager les négociations sur la base d'une limitation de la puissance nucléaire nord-coréenne - et non plus d'un utopique désarmement nucléaire unilatéral par la Corée du Nord dans lequel Pyongyang n'obtiendrait aucune contrepartie, tant en termes de sécurité nationale que d'arrêt de l'escalade militaire américaine dans la région Asie-Pacifique (et des menaces militaires étatsusiennes dans cette partie du monde). Oui, la feuille de route russo-chinoise est bien la seule voie de sortie crédible de l'impasse actuelle, où a conduit l'impéritie de l'administration Trump.
Devant l'ONU, les États-Unis appellent tous les pays à couper leurs relations avec la Corée du Nord, après son dernier tir de missile intercontinental.
ÉDITO - Pyongyang inquiète la communauté internationale après avoir tiré un missile balistique intercontinental susceptible d'atteindre les États-Unis et L'Europe.
Si la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) s'est abstenue, depuis le 15 septembre 2017, de toute nouvelle initiative militaire (essai nucléaire, tir de missile) de nature à aggraver les tensions, tel n'est pas en revanche le choix opéré par l'administration américaine du Président Donald Trump : sous son impulsion, les Etats-Unis ont engagé de nouveaux exercices de guerre conjoints avec la République de Corée à compter du 11 novembre dernier, mis en place unilatéralement de nouvelles sanctions contre des organisations et des individus de nationalités chinoise et nord-coréenne et réinscrit la RPD de Corée sur la liste des Etats soutenant le terrorisme. Cette volonté américaine continue de faire peser des menaces de guerre, l'escalade n'étant évitée que par la retenue nord-coréenne - mais jusqu'à quand ? Dans ce contexte lourd de menaces, la Chine et la Russie ont présenté une feuille de route visant à revenir sur la voie de la paix et du dialogue en Asie du Nord-Est. Mais ces deux puissances seront-elles entendues ? Certains responsables politiques y font obstacle, comme le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian.
Donald Trump à la base militaire de Camp Humphreys, en Corée du Sud, le 7 novembre 2017
Ce n'est malheureusement pas parce que la question coréenne n'est plus à la une de l'actualité que les tensions diminuent : le fait est que seules les initiatives nord-coréennes sont mises en exergue par les médias occidentaux, celles des Etats-Unis et de leurs alliés étant systématiquement sous-évaluées quant aux dangers qu'elles font courir sur la paix dans la région Asie-Pacifique.
La menace est d'abord d'ordre militaire : comme l'a souligné un article publié par BFM TV le 11 novembre 2017, les manoeuvres militaires qui ont été engagées du 11 au 14 novembre 2017 ont été exceptionnelles par l'ampleur des moyens déployés, en ayant mobilisé trois porte-avions de l'armée américaine :
L'exercice conjoint dans le Pacifique occidental, qui doit se poursuivre durant quatre jours, mobilise les porte-avions USS Ronald Reagan, USS Nimitz et USS Theodore Roosevelt, ainsi que sept navires sud-coréens, dont trois destroyers, a précisé le ministère sud-coréen de la Défense. C'est la première fois depuis dix ans que des manœuvres de ce type mobilisent trois porte-avions.
L'administration américaine resserre par ailleurs son étau économique sur la Corée du Nord : le 21 novembre 2017, le département du Trésor américain a annoncé sanctionner une nouvelle personnalité chinoise, 13 entités chinoises et nord-coréennes supplémentaires ainsi que 20 nouveaux navires appartenant à des compagnies nord-coréennes, qui seront donc désormais coupés du système financier américain. Si, selon l'agence sud-coréenne Yonhap, ces mesures sont justifiées par des "soupçons" de financement des programmes militaires de la RPDC, aucune preuve n'est apportée quant à la réalité de ces accusations, les autorités américaines multipliant les arguments d'autorité sur de prétendus contournements des sanctions. Au contraire figurent dans cette liste des entités administratives nord-coréennes ayant des activités commerciales très générales, dont le nom même ("bureau de l'administration maritime", "ministère des Transports terrestres et maritimes") ne corrobore pas véritablement l'hypothèse d'une quelconque implication dans des activités militaires. Celle-ci est d'autant plus douteuse qu'il existe une séparation stricte entre l'administration civile et l'administration militaire en RPDC.
Montrant son peu de connaissance des réalités économiques nord-coréennes, le secrétaire d'Etat Rex Tillerson a par ailleurs déclaré, à la suite de Donald Trump, que les sanctions commenceraient à avoir de l'effet comme le prouveraient "de longues queues d'attente dans les stations-service" - dans un pays où pourtant la grande majorité des habitants n'ont pas de voiture individuelle ou de véhicule professionnel.
Enfin, la réinscription par Washington, toujours fin novembre, de la Corée du Nord dans la liste des Etats soutenant le terrorisme, sans faits nouveaux de nature à justifier cette décision, relève autant de l'unilatéralisme discrétionnaire américain (destiné à provoquer une réaction de Pyongyang, laquelle justifierait ainsi de nouvelles sanctions ?) que d'un plan d'asphyxie économique de la RPDC poursuivi de manière constante par les Etats-Unis, afin de provoquer l'effondrement de son système économique et social.
Conscientes des risques de conflit que comporte une telle escalade des tensions, la Chine et la Russie plaident, de manière constante, pour un double gel : de ses essais nucléaires et balistiques par la Corée du Nord, de la poursuite de leurs manoeuvres militaires et de l'alourdissement continu des sanctions par les Etats-Unis et leurs alliés. Lors d'une session du club de discussions Valdaï, qui réunit hommes politiques, experts et universitaires ainsi qu'hommes d'affaires, qui s'est tenue à Séoul le 27 novembre 2017, le vice-ministre russe des Affaires étrangères Igor Morgoulov a présenté les trois étapes de la feuille de route russo-chinoise :
- tout d'abord, le "double gel", avec une révision à la baisse des exigences attendues de la part de Washington (non plus la suspension des exercices militaires conjoints avec la Corée du Sud, mais la diminution de leur intensité et de leur ampleur), afin de faire baisser les tensions diplomatiques et militaires ;
- puis l'engagement de négociations bilatérales directes entre Pyongyang et Washington d'une part, Séoul et Pyongyang d'autre part ;
- enfin, des négociations multilatérales portant sur la mise en place d'un dispositif collectif de maintien de la paix et de la sécurité en Asie du Nord-Est, impliquant notamment la dénucléarisation de la Corée du Nord.
Si le gouvernement allemand - dans un pays où le sentiment pacifiste est très puissant - a soutenu la proposition du "double gel", celle-ci continue de se heurter à l'hostilité de plusieurs puissances internationales de premier plan. Au premier rang de celles-ci figure, le Japon, dont le Premier ministre a profité des tensions militaires actuelles pour provoquer et remporter largement des élections législatives anticipées en se déclarant "100 % d'accord" avec Donald Trump - suivant une position réaffirmée par le ministre des Affaires étrangères Taro Kono lors d'une rencontre à Moscou avec son homologue russe Sergueï Lavrov, le 24 novembre 2017.
Mais la France serait peut-être aussi sur la ligne dure, de manière plus surprenante au regard des déclarations du Président Emmanuel Macron quant au nécessaire retour à une tradition diplomatique "gaullo-mitterrandienne". Il est vrai cependant que le porte-parole de ces étranges déclarations de sympathie pour les "faucons" américains était le ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian, lors d'une rencontre à Pékin avec le Premier ministre chinois Li Keqiang. Or M. Le Drian est effet un des "transfuges" les plus visibles de la présidence de François Hollande, sous le mandat duquel il avait exercé les fonctions de ministre de la Défense et été en pointe dans l'engagement de la France sur de multiples terrains de guerre à l'étranger, comme la Syrie. En prenant le contrepied de la ligne diplomatique du Président Emmanuel Macron, sans doute M. Le Drian jouait-il l'une de ses innombrables partitions personnelles qui lui ont valu de devoir changer de département ministériel au printemps 2017 et d'être encadré par une administration plus respectueuse des lignes politiques fixées par le nouveau chef de l'Etat.
Pour sa part, l'Association d'amitié franco-coréenne reste comme toujours solidaire de toute initiative tendant à favoriser la paix et le dialogue en Asie du Nord-Est, quels qu'en soient les initiateurs.
Russia has criticised Japan for allowing a US military build-up in north Asia under the pretext of countering North Korean aggression. Foreign minister Sergei Lavrov attacked Tokyo for allowing its
En visite à Pékin, Jean-Yves Le Drian a confirmé la venue du président Emmanuel Macron en Chine, où il doit effectuer sa première visite début 2018 ...
Malgré de vives tensions, Moscou croit encore à la possibilité d'un dialogue entre les Etats-Unis et la Corée du Nord. Mais pour ce faire, trois étapes seraient nécessaires, comme l'a détail...
Les Etats-Unis ont annoncé aujourd'hui un nouveau train de sanctions visant des entités ainsi que des navires chinois et nord-coréens suspectés de soutenir le programme d'armement nucléaire de...
Poursuivant en Chine sa tournée asiatique, le Président Donald Trump a renoué avec sa rhétorique fleurie et toute en nuances sur le dirigeant nord-coréen et la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord). Parallèlement, le 11 novembre 2017, ont commencé de nouveaux exercices militaires conjoints américano-sud-coréens, prévus pour une durée de quatre jours. Ces nouvelles initiatives, qu'on peut qualifier soit de provocations et/ou d'incitations à la guerre soit de démonstrations de force suivant le point de vue adopté, confrontent en réalité les Etats-Unis à un risque accru d'impuissance militaire et d'isolement diplomatique sur le dossier coréen, signant l'échec d'une politique élaborée au coup par coup, en l'absence d'une vision stratégique approfondie qui prendrait en compte les intérêts et les objectifs des différentes parties.
Le porte-avions USS Ronald Reagan dans la mer de l'Est, au large de la Corée (photo d'archives)
Dans la tête de Donald Trump : une logique binaire et l'occultation d'un risque sans précédent d'isolement diplomatique américain sur la question coréenne
Un jour Donald Trump tente de séduire les Sud-Coréens en évitant les propos insultants et belliqueux vis-à-vis des Nord-Coréens, et un autre à Pékin il vitupère à nouveau contre la RPD de Corée... Cette inconstance ne doit pas s'interpréter en termes relevant d'une psychologie de café du commerce (invoquant, au choix, la folie, la colère ou une imprévisibilité maladive), mais bien dans le cadre de l'objectif que poursuit, de manière constante, le numéro un américain : il avait affirmé, en début d'année, que, lui président et contrairement à ses prédécesseurs taxés d'impuissance et de faiblesse, jamais il n'accepterait que la Corée du Nord se dote d'une capacité de dissuasion nucléaire comportant des armes et des vecteurs susceptibles d'atteindre le territoire américain. Cette perspective étant devenue réalité, et le Président Donald Trump refusant de se dédire, il estime dès lors ne disposer que de deux choix : soit la Corée du Nord renonce (volontairement ou sous la contrainte) à sa capacité de dissuasion nucléaire, soit elle est vouée à disparaître en tant qu'Etat et régime politique, dans le cadre d'une guerre ou (à moindres frais, en termes de vies de soldats américains) sous l'effet de sanctions sans précédent visant à l'effondrement économique, politique et social de la RPD de Corée.
Les termes de cette équation ainsi posés, Donald Trump sait qu'il a besoin de la Chine pour asphyxier la Corée du Nord, dont elle est (de très loin) le premier partenaire économique, et juge que, vis-à-vis de Pékin, la politique de la mise en garde est la plus efficace - mâtinée de menaces à peine voilées de rétorsions, en partie mises en oeuvre, contre les intérêts économiques chinois. Concernant la Corée du Sud, ce doit être un allié à ménager, tant en termes militaires (les Etats-Unis préférant toujours que les supplétifs étrangers de leurs soldats s'exposent le plus fortement et perdent le plus grand nombre d'hommes) qu'au regard de sa capacité à potentiellement saper les objectifs de politique nord-coréenne de l'administration Trump : le Président Moon Jae-in est contre la guerre, hostile à ce que son pays se dote d'armes nucléaires - comme l'avait ouvertement envisagé Donald Trump - et favorable au dialogue intercoréen pour sortir de la crise actuelle.
Si lors de sa récente visite à Séoul Donald Trump a essayé de plaire aux dirigeants et à l'opinion publique de la République de Corée, c'est parce qu'il n'avait pas le choix. Mais le spectaculaire réchauffement des relations sino-sud-coréennes mises à mal par le déploiement de THAAD, ce progrès étant à mettre à l'actif du Président Moon Jae-in, ne signe-t-il pas au contraire pour l'administration Trump le risque que se dessine une stratégie alternative à la sienne ? Donald Trump ne peut ignorer que la politique nord-coréenne des Etats-Unis est fortement impopulaire à l'étranger (sauf peut-être dans les milieux conservateurs, qui sont majoritaires, au Japon), car elle comporte les risques d'une escalade militaire vers une guerre qui satisferait essentiellement l'objectif stratégique d'une invulnérabilité du territoire américain, tout en exposant à de très lourdes pertes non seulement la Corée du Nord, mais aussi ses voisins dont Washington recherche pourtant l'assentiment et l'appui.
La Chine, comme l'observe d'ailleurs un dossier de l'hebdomadaire L'Express qu'on ne peut pas accuser d'anti-américanisme primaire, renforce ainsi sa position d'acteur incontournable d'une sortie de crise en Corée : en ne prenant pas partie pour la RPDC tout en votant et en appliquant (après les avoir modérées au regard des intentions américaines) les sanctions internationales contre la Corée du Nord, Pékin apparaît comme une puissance ayant une diplomatie raisonnable, favorable au dialogue, susceptible de rallier à ses positions tous les Etats concernés par la crise en cours, y compris potentiellement les Etats-Unis s'il y aura une prise de conscience de l'impasse actuelle. Plus Donald Trump multiplie les provocations verbales et militaires, plus il renforce la diplomatie chinoise qui a tenté, certes jusqu'ici sans grand succès (à part en direction de la Russie), de rallier d'autres pays (l'Allemagne, la France...) à ses appels à une sortie de la crise par la voie diplomatique. Mais l'idée chemine, et pourrait un jour mettre en échec la politique nord-coréenne des Etats-Unis fondée sur une fuite en avant dont l'objectif final (une guerre nucléaire ou l'effondrement d'un pays doté d'armes nucléaires, qui seraient disséminées dans le monde, parallèlement à des flux massifs de population en dehors de la RPDC), constituent des scénarios catastrophes, sauf dans la tête de Donald Trump et d'une poignée de représentants de l'appareil d'Etat américain qui semblent ne pas correctement prendre en compte toutes les données de l'équation.
Exercices de guerre : le gouffre financier et l'impuissance militaire au regard des coûts humains d'un improbable conflit au sol
Dans l'esprit de Donald Trump, ce qui compte le plus n'est en effet pas tant ce que peuvent penser ses homologues à Séoul, Pékin ou Tokyo que d'apparaître, aux yeux de l'opinion publique américaine (et donc des médias qui façonnent l'opinion), comme le commandant militaire invincible de la Grande Amérique, et cette nécessité est sans cesse renforcée par les revers réels ou potentiels sur la scène intérieure ou en d'autres endroits du monde. C'est contre l'intelligentsia qu'il a gagné de manière inattendue l'élection américaine. C'est à nouveau contre tout ce que les Etats-Unis (et le monde occidental) compte d'experts et d'analystes de la question coréenne qu'il entend imposer sa politique nord-coréenne comme prétendument rationnelle et consensuelle, en mobilisant pour sa cause des médias qu'il n'hésite pas à vilipender par ailleurs. Le procédé n'est pas nouveau : la propagande de guerre repose sur ce schéma invariant, plus d'une fois mis en oeuvre dans les guerres conduites par l'hyperpuissance américaine.
Un des éléments de langage majeurs porte sur les manoeuvres militaires américaines, qu'il faut donc légitimer comme nécessaires et défensives par nature face à la menace supposée d'un régime nord-coréen qui serait incontrôlable et prêt à tout. A compte du 11 novembre 2017, comme le signale l'AFP, des exercices inédits de grande ampleur associent ainsi de nouveau GIs et soldats sud-coréens, moins d'un mois après les précédentes manoeuvres conjointes :
Des bâtiments de la marine de guerre sud-coréenne se sont joints samedi à trois porte-avions américains, dans une démonstration de force inédite à l'adresse de la Corée du nord, dont les ambitions nucléaires sont au centre de la tournée en Asie du président américain Donald Trump.
L'exercice conjoint dans le Pacifique occidental, qui doit se poursuivre durant quatre jours, mobilise les porte-avions USS Ronald Reagan, USS Nimitz et USS Theodore Roosevelt, ainsi que sept navires sud-coréens, dont trois destroyers, a précisé le ministère sud-coréen de la Défense.
C'est la première fois depuis dix ans que des manœuvres de ce type mobilisent trois porte-avions.
"L'exercice est destiné à renforcer la dissuasion contre les menaces nucléaires et les missiles de la Corée du nord, et à démontrer notre préparation à repousser toute action provocatrice du Nord", a déclaré un porte-parole du ministère.
La dépêche de l'AFP aurait pu être encore plus favorable à la politique nord-coréenne de Donald Trump, en mentionnant les tirs nucléaires et balistiques de la RPDC (interrompus depuis plus de deux mois, contrairement aux initiatives américaines qui, elles, n'ont jamais cessé). Mais elle n'en sert pas moins lourdement les intérêts de la propagande de guerre (ou de préparation à la guerre) américaine, en mentionnant les dernières déclarations du Président Trump vis-à-vis de la Corée du Nord et en évitant de dire que ses envolées verbales, s'ajoutant aux provocations militaires, relèvent de la seule volonté américaine, et pas d'une dissuasion contre un ennemi cent fois moins puissant militairement.
Poursuivons en effet la citation de cette dépêche de l'AFP qui, après une concession à la neutralité attendue d'une agence de presse (son auteur dit que les Nord-Coréens seront mécontents, mais minimise ces critiques en employant les termes non neutres de "régime de Pyongyang"), cite encore une fois les éléments de langage du gouvernement américain et évite soigneusement à l'endroit des Etats-Unis les termes "provocations", "exercices de guerre" et autres expressions toujours réservées à la seule Corée du Nord, tout en prêtant à la seule partie nord-coréenne le fait, pourtant avéré dans les documents stratégiques américains, que ces manoeuvres militaires ont bien un caractère offensif. Enfin, la dépêche de l'APF conclut de manière assez extraordinaire sur la volonté prétendue de dialogue et de conciliation du Président Donald Trump :
Le régime de Pyongyang dénonce régulièrement ces manœuvres, destinées selon lui à préparer une invasion de son territoire, et réplique parfois avec ses propres manœuvres militaires ou des tirs de missile. Les bâtiments américains vont conduire des exercices de défense, de surveillance maritime, de riposte aérienne, entre autres opérations, a indiqué de son côté la marine américaine.
Ces manœuvres interviennent dans la foulée de la visite du président Trump à Séoul et Pékin, dominées par la menace nucléaire nord-coréenne. Dans un discours musclé devant l'Assemblée nationale sud-coréenne, Donald Trump a appelé mercredi le dirigeant nord-coréen Kim Jong-Un à ne jamais sous-estimer la détermination de l'Amérique et à renoncer à son programme nucléaire, avant de dénoncer les horreurs d'une "dictature cruelle".
Mais au cours de sa tournée actuelle en Asie, Donald Trump s'est parfois montré plus conciliant en évoquant des "progrès" et de possibles négociations.
Mais l'administration américaine voudrait-elle mener une nouvelle guerre de Corée qu'il est douteux qu'elle dispose des moyens nécessaires, y compris en termes de préparation stratégique. Dans un rapport rédigé à la demande du Congrès américain, le Pentagone, par la voix de l'amiral Michael Dumont, vice-directeur de l'état-major interarmées, a indiqué que découvrir et "neutraliser" les armes nucléaires nord-coréennes - qui est l'objectif affiché d'un conflit avec la RPDC - nécessiterait l'envoi de troupes au sol, ce que les Etats-Unis sont en général particulièrement réticents à opérer étant donné la faible acceptation par l'opinion publique américaine de pertes humaines importantes dans un conflit. Or, une guerre au sol entraînerait des pertes élevées, que le rapport du Pentagone reconnaît par ailleurs être incapable d'évaluer dans un aveu d'impréparation qui a inquiété des députés démocrates. Enfin, le même rapport estime probable, en cas de guerre terrestre, l'utilisation par la Corée du Nord d'armes biologiques et chimiques - alors même que les Etats-Unis ont utilisé de telles armes en Corée entre 1950 et 1953 - ce qui dépasse le seuil de tolérance des Américains. Mais si l'on remplaçait les soldats américains au sol par des Sud-Coréens ? Une telle guerre américaine aérienne avec des supplétifs sud-coréens au sol relève en réalité d'une double erreur d'analyse, en ce qui concerne l'acceptation d'un conflit par les Sud-Coréens et d'une capacité américaine à ne perdre pratiquement aucun homme : la Corée du Nord dispose des moyens et d'une volonté de résistance à une invasion que n'avait pas l'Irak de 2003...
En outre, les manoeuvres militaires à répétition des Etats-Unis et de leurs alliés sont coûteuses pour le contribuable américain. Ce sujet budgétaire n'est pourtant jamais évoqué dans la couverture médiatique de ces exercices, sans doute parce qu'il serait de nature à affaiblir le consensus qui tend à s'établir dans la société et la classe politique américaine en cas de conflit - propagande de guerre oblige. Il n'en demeure pas moins que l'hostilité de l'appareil d'Etat américain à une guerre aujourd'hui mal anticipée, qui pourrait constituer un nouveau bourbier comme naguère au Vietnam, conjuguée aux critiques de nombreux élus démocrates, force l'administration Trump à en rabattre : plus l'armée américaine montre ses muscles, moins elle est capable d'agir réellement dans une guerre. Au fond, dans l'alternative présentée ci-dessus quand nous avons essayé de comprendre le mode de pensée du président américain, Donald Trump (ou à défaut les généraux et les diplomates qui lui sont fidèles) sait que la voie la plus sûre serait de soumettre la Corée du Nord à un régime de sanctions tel que le pays n'aurait d'autre choix que l'alternative suivante :
- négocier un diktat où elle désarmerait unilatéralement face à un pays qui pourrait continuer de la menacer,
- être exposée au risque d'un effondrement et d'une révolte intérieure dont rêvent, en vain, les néo-conservateurs depuis un quart de siècle. En cela, l'administration Trump diffère sensiblement de celles qui l'ont précédées, en cherchant à provoquer encore plus activement un processus d'effondrement qui ne s'est pas produit.
Oui, mais comment justifier aux yeux des autres pays du monde qu'il faut encore renforcer les sanctions contre le pays déjà le plus lourdement sanctionné au monde, qui exerce un droit d'auto-défense, et dont les populations sont confrontées, sinon à l'effondrement à court terme, du moins à une pénurie d'énergie et à une nouvelle famine sous l'empire des sanctions actuelles ?
L'espoir américain d'une réaction nord-coréenne qui permettrait d'accroître les sanctions internationales et de provoquer l'effondrement espéré de la Corée du Nord
Pour renforcer les sanctions contre la RPDC, l'administration Trump a impérativement besoin que la Corée du Nord réagisse à ses manoeuvres militaires et à ses provocations verbales dûment assumées - ou, pour reprendre une métaphore du monde de la corrida, ait l'attitude du taureau face auquel le toréador agite un chiffon rouge avant de l'abattre.
Malheureusement pour Washington, l'administration nord-coréenne, loin de tomber dans ce piège, combine de manière très rationnelle les objectifs d'autodéfense du pays (qui ont justifié l'accélération de la mise en place d'une force de dissuasion complète face à une administration américaine considérée comme décidée à lui faire subir le sort de l'Irak en 2003 et de la Libye en 2011) et une auto-restriction dans la poursuite de ses programmes nucléaires militaires et balistiques au regard de l'impact des sanctions internationales sur l'économie du pays et les conditions de vie de la population. Dans ce contexte, les autorités nord-coréennes ont évité, jusqu'à présent, de réagir face aux provocations américaines de Donald Trump lors de son actuelle tournée asiatique - ce qui a conduit ce dernier à affirmer bruyamment qu'il avait remporté une manche dans son bras-de-fer contre la Corée du Nord, et que sa politique nord-coréenne serait donc (selon lui) couronnée de succès, alors que les risques d'isolement diplomatique n'ont jamais été aussi élevés et l'impuissance militaire aussi patente.
Dans ce contexte, les Nord-Coréens ont rappelé une nouvelle fois qu'ils étaient ouvert au dialogue, mais pas à un diktat qui consisterait pour eux à abandonner tout moyen de défense face à la politique hostile des Etats-Unis, comme le rappelle une autre dépêche de l'AFP citée par Le Point :
"Nous ne sommes pas opposés au dialogue mais nous ne mettrons jamais les questions liées aux intérêts suprêmes de la Corée du Nord et de la sécurité de ses citoyens sur la table des négociations", soulignait une tribune publiée dans le journal gouvernemental Minju Joson.
Face à l'escalade des tensions et des sanctions entretenues par l'administration Trump, la porte du dialogue et d'une issue négociée à la crise reste ainsi ouverte. Mais les partenaires des Etats-Unis sauront-ils trouver les moyens de les convaincre de sortir d'une impasse qui leur permet, à court terme, d'affermir l'image d'un Donald Trump se posant en chef de guerre toujours victorieux (car évitant soigneusement le combat réel), se rêvant en leader d'un monde dit libre dans sa croisade contre le Mal, nostalgique de la geste reaganienne ayant conduit à la victoire américaine dans la guerre froide ? Le monde a changé, mais les logiciels intellectuels de certaines têtes (mal-)pensantes sont restés bloqués dans un passé révolu, quand leurs concurrents - Chine et Russie en tête - se frottent les mains de pouvoir exercer une influence renforcée par les erreurs d'analyse américaines.
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Lors de la conférence internationale pour la paix et la réunification en Coréequ’elle a organisée à Paris les 23 et 24 juin 2017, l’Association d’amitié franco-coréenne a souligné la diversité des associations d’amitié avec la Corée dans le monde, au regard notamment des contextes historiques nationaux. En particulier, les pays du tiers-monde se retrouvent dans le combat anticolonialiste et d’émancipation des anciens pays colonisés mené par la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord). C’est dans ce contexte qu’il faut resituer, pour pleinement la comprendre, l’action de l’Association culturelle haïtiano-coréenne (ACHC) présentée ci-après dans l’entretien que nous ont accordé ses dirigeants. Notamment, l’absence de représentation diplomatique permanente de la RPD de Corée à Haïti a conduit l’ACHC à s’inscrire dans une action de solidarité plus large, impliquant en particulier Cuba, soutien constant et de longue date de la RPDC.
Réunion de l'Association culturelle haïtiano-coréenne (photo : ACHC)
Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) : Pouvez-vous nous rappeler les dates importantes pour l’Association culturelle haïtiano-coréenne et ses objectifs?
Association culturelle haïtiano-coréenne (ACHC) : Juste avant d’entrer dans cette interview, l’Association culturelle haïtiano-coréenne tient à présenter ses profonds remerciements à l’Association d’amitié franco-coréenne qui a pris la noble décisionde coopérer avec elle en vue d’une action commune dans le sens du soutien au peuple coréen. Les dates importantes de notre association sont le 9 septembre (date de la fondation de la RPD de Corée), le 15 janvier (le jour du chosongeul, l'alphabet coréen), le 16 février (l’anniversaire du grand Dirigeant Kim Jong-il), le 15 avril (l’anniversaire du grand Leader, le Président Kim Il-sung), le 18 novembre (date de la bataille de Vertières), le 18 mai (date de la création du drapeau d’Haïti), le 1er janvier (date de la proclamation de l’indépendance d’Haïti), le 4 juin (date de naissance de Jacques Roumain, fondateur du premier Parti communiste haïtien), etc. Comme il est clairement mentionné dans nos documents de légalisation, l’ACHC a trois objectifs majeurs : primo, défendre les intérêts matériels et moraux de ses membres ; secundo, développer le sens de solidarité avec la Corée et organiser des meetings pour la réunification des deux Corée ; tertio, entretenir des relations culturelles avec la Corée et avec des associations qui ont le même but que nous.
AAFC : Où en sont les liens d’État à État entre Haïti et la République populaire démocratique de Corée ?
ACHC : La République d’Haïti n’a ni rapport diplomatique, ni rapport commercial avec la RPD de Corée. Notre association a pour but de faire connaître la culture coréenne aux Haïtiens. Nos activités sur la RPD de Corée participent d’un objectif noble qui est celui d’informer nos compatriotes sur la RPD de Corée et de montrer que ce pays est agressé chaque jour par l’impérialisme. Au fil des ans, nous pourrons établir des contacts plus approfondis.
AAFC : L’ACHC a mis en place des actions de solidarité concrètes avec le peuple coréen, et vous avez aussi reçu un soutien des représentants de la RPD de Corée à Cuba. Pouvez-vous nous en dire quelques mots ?
ACHC : Il est vrai que nous avons établi un contact avec des représentants de la RPD de Corée à Cuba sur la demande de Monsieur Kim Jong-nam et de Mademoiselle Kim Kum-yong, les personnes responsables de la relation de notre association avec le gouvernement de Pyongyang. Le contact de notre association avec les représentants diplomatiques de la RPD de Corée à Cuba n’a pas encore atteint le niveau espéré parce que nous avons déjà de bonnes relations avec Pyongyang. Cette situation ne nous a pas toujours offert l'occasion de recourir à la représentation diplomatique de la RPD de Corée à Cuba. Alors, cette année, nous allons travailler beaucoup plus afin de renforcer notre relation avec l’ambassade de la RPD de Corée à Cuba. En ce qui concerne notre relation avec Cuba, notre association a une parfaite relation avec les représentants diplomatiques de Cuba en Haïti. Nous avons réalisé nos premières activités pour Cuba lors de la mort du grand Leader cubain Fidel Castro. Par la suite, nous avons aussi eu une grande journée de réflexion pour parler de l’embargo criminel des États-Unis contre Cuba. En novembre 2017, nous allons organiser une grande activité en mémoire de Fidel Castro de concert avec le consulat de Cuba en Haïti. Le premier secrétaire du consulat de Cuba en Haïti, Monsieur Alexis Pena Orozco, est un ami de notre association.
AAFC : Steeve Noël, en tant que président de l'Association culturelle haïtiano-coréenne, vous vous êtes rendu en Corée pour la première fois en août 2017. Quelles ont été vos impressions ?
ACHC : A mon arrivée à Pyongyang, j’ai été surpris de la modernisation du pays. Ce que j’ai vu là-bas est extraordinaire. Comme je l’avais dit à mon guide lors de mon voyage, la RPD de Corée n’a rien à envier aux pays occidentaux. La RPD de Corée est un pays moderne avec un grand potentiel humain et matériel. Les médias occidentaux, qui se trouvent sous la férule du capital, ont beaucoup de torts en propageant des propagandes qui tentent vainement de faire de la RPD de Corée un pays de « famine » et de « dictature ». Je voudrais que les gens aillent voir de leurs propres yeux ce qu’est la RPD de Corée qui n’a rien à voir à ce que racontent les médias occidentaux asservis par le capital. Ce qui m’a surtout marqué, c’est le développement de la culture coréenne et l’importance de celle-ci aux yeux du peuple. Les gens du monde entier doivent surtout savoir que la RPD de Corée n’est pas une menace pour le monde. C’est totalement faux !La RPD de Corée veut exprimer la singularité de son peuple et veut se défendre contre quiconque la menace. C’est un droit sacré que rien au monde ne peut lui enlever.
AAFC : La conférence de Paris des 23 et 24 juin 2017 a souligné l'importance de la coopération entre associations d’amitié avec la Corée. Quelles sont vos attentes en la matière, sachant que notre association française a, par exemple, déjà nouéde longue date des liens avec ses homologues belge et irlandaise ?
ACHC : Effectivement, notre but est de lier des relations avec d’autres associations dans le monde. Les associations belges et irlandaises nous ont aidés en nous envoyant des livres, des images et des drapeaux pour orner nos salles lors des conférences. Nous espérons pouvoir inviter certaines associations du monde entier à venir participer à certaines de nos activités. Pour la conférence de Paris, nous avons été représentés par Monsieur Jean Lavalasse, le responsable de notre association à l’extérieur, et nous avons eu un compte rendu de cette conférence. Nos attentes se portent surtout vers une coordination de l’ensemble des activités de diverses associations qui ont le même but et vers une solidarité mutuelle entre ces associations.
AAFC : La période récente a vu une offensive de l’impérialisme américain contre la RPD de Corée. Comment le peuple haïtien exprime-t-il sa solidarité à l'égard des Coréens ?
ACHC : Oui, le peuple haïtien est solidaire des Coréens comme cela a toujours été le cas dans la trajectoire historique de ce peuple. Haïti a non seulement mis en déroute tout un système d’exploitation colonial et esclavagiste qui a servi à la constitution du capital européen, mais a aussi apporté un soutien sans faille à plusieurs pays de l’Amérique latine dans leurs combats en vue de se défaire du joug colonial. Haïti n’a jamais tourné le dos à ses amis même dans les moments les plus difficiles. Certes, il y a une exception : l’expulsion de Cuba de l’Organisation des États américains (OEA). Il faut surtout se rappeler que le peuple était opprimé à ce moment-là par la dictature la plus sanglante de toute l’Amérique latine et la Caraïbe, la dictature des Duvalier. Une dictature qui avait été supportée par les États-Unis et le monde soit disant « démocratique ». Le chacal François Duvalier, sous l’ordre des États-Unis, avait participé à la décision d’expulsion de Cuba de l’OEA. C’est une décision qui a fait beaucoup de tort au peuple Cubain, nous en sommes conscients. Il faut surtout savoir qu’il y a souvent d’énormes écarts entre le peuple et ses dirigeants. Tout comme nous disons non à l’embargo des États-Unis contre Cuba. C’est aussi ce que les États-Unis veulent faire contre les Coréens en imposant un embargo criminel contre la RPD de Corée. Nous nous inscrivons en faux face à cette décision. Lors des conférences, nos interlocuteurs ont expliqué combien la RPD de Corée est un pays pacifique. Le peuple haïtien est solidaire de la RPD de Corée parce qu’elle est un pays souverain qui se fait respecter. Nous avons beaucoup à apprendre auprès des Coréens, par exemple compter sur ses propres forces, tenir haut le drapeau de la souveraineté et être fier de son dirigeant.
Le 6 octobre 2017, le prix Nobel de la paix a été attribué à la Campagne internationale pour l'abolition des armes nucléaires (acronyme anglais : ICAN), coalition de plus de 500 ONG à l'origine de l'adoption par 122 Etats membres des Nations unies, le 7 juillet 2017, du projet de traité sur l'interdiction des armes nucléaires - qui entrera en application 90 jours après que cinquante Etats l'auront ratifié. Cette décision, qui intervient dans un contexte de fortes tensions autour de la péninsule coréenne où l'usage et le déploiement d'armes nucléaires sont dangereusement évoqués, conforte l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) dans son action plaidant pour revenir à la table des négociations et engager une désescalade qui doit conduire, à terme, à l'avènement d'un monde sans armes nucléaires.
Deux jours après l'ouverture à la ratification du projet de traité pour l'interdiction des armes nucléaires, l'Association d'amitié franco-coréenne, dans un article exprimant sa position publié le 22 septembre 2017, soulignait l'urgence, pour sortir de l'impasse dans la péninsule coréenne, de s'engager résolument sur la voie d'un désarmement nucléaire multilatéral - impliquant l'ensemble des pays disposant d'armes nucléaires :
La seule issue à la crise en cours sur le nucléaire nord-coréen consiste donc à ce que les Etats-Unis cessent de menacer la RPD de Corée avec des armes nucléaires (en apportant par ailleurs des garanties de sécurité à la Corée du Nord) et s'engagent eux aussi sincèrement, comme la France et le Royaume-Uni, vers une interdiction complète des armes nucléaires dont ils restent les principaux détenteurs (si l'on juge par les critères du nombre d'essais et de têtes nucléaires). Ce processus sera long, exigeant des concessions de toutes les parties (et pas seulement de la Corée du Nord), mais en tout état de cause ils ne peuvent pas demander aux autres ce qu'ils refusent d'accomplir eux-mêmes. Dans ce seul contexte, il serait raisonnable pour Pyongyang d'abandonner également ses armes nucléaires, qui sont aujourd'hui son assurance-vie face aux menaces extérieures.
Ce désarmement multilatéral doit, selon l'AAFC, être engagé simultanément par les Etats dotés de l'arme nucléaire et proportionnellement aux arsenaux nucléaires dont ils disposent, afin qu'il ne serve pas de prétexte à certains Etats pour conserver le monopole de l'arme de destruction massive, sans équivalent au monde, que constitue l'arme nucléaire. A cet égard, il convient de rappeler que, selon les données de l'ICAN, près de 94 % des ogives nucléaires sont détenues par deux pays, la Russie (8 500 ogives) et les Etats-Unis (7 700 ogives), devant (dans cet ordre) la France (300 ogives), le Royaume-Uni (250 ogives), la Chine (225 ogives), le Pakistan (environ 110 ogives), l'Inde (environ 100 ogives), Israël (80 ogives) et la Corée du Nord (moins de 10 ogives).
Si aucun des neuf Etats aujourd'hui dotés de l'arme nucléaire n'a participé aux discussions sur le traité pour l'interdiction des armes nucléaires, leurs motivations ne sont pas identiques, comme l'avait rappelé le vote, le 27 octobre 2016, au sein du premier comité de l'Assemblée générale des Nations unies sur la résolution L. 41qui prévoyait l'ouverture de négociations cette année sur un "instrument juridiquement contraignant visant à interdire les armes nucléaires en vue de leur élimination complète". La République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) avait voté pour la résolution L. 41, réaffirmant ainsi sa position traditionnelle selon laquelle elle n'avait développé des armes nucléaires qu'à des fins de dissuasion, mais restait fondamentalement attachée à un monde sans armes nucléaires. La Chine, l'Inde et le Pakistan s'étaient abstenus. Les cinq autres Etats dotés de l'arme nucléaire (Etats-Unis, France, Israël, Royaume-Uni, Russie) avaient voté contre la résolution L. 41. Nous avions alors souligné que la France avait été particulièrement active pour s'opposer à cette démarche visant à l'interdiction des armes nucléaires :
La France a été particulièrement en pointe dans l'opposition à ce texte, en faisant pression sur les eurodéputés français pour qu'ils s'opposent à une résolution au Parlement européen confortant la démarche de l'Assemblée générale des Nations unies. L'argumentaire français est qu'il fallait s'opposer à un texte "inefficace et déstabilisateur", et donc en rester aux instruments existants... qui ont fait la démonstration de leur inefficacité.
Sur la question coréenne, l'ICAN est à l'origine d'une pétition dont l'AAFC partage le principe et les objectifs, à savoir le retour immédiat aux pourparlers à six et la fin de l'escalade militaire par l'ensemble des parties - y compris la fin des exercices de guerre américano-sud-coréens :
La crise actuelle dans la péninsule Coréenne nécessite une action immédiate en vue de désamorcer les tensions. Les manoeuvres militaires qui ont lieu en Corée du Sud doivent être arrêtées et aucun test de missiles ou d’arme nucléaire ne doit avoir lieu dans les pays impliqués dans ce conflit. Nous appelons donc les six pays qui ont été parties à des négociations dans le passé à retourner immédiatement à la table des négociations pour discuter les termes d’un traité de paix.
Cependant, par réalisme quant aux équilibres diplomatiques et aux réalités stratégiques, l'AAFC adapte cet appel de l'ICAN dans son positionnement. Nous préconisons d'abord, dans un premier temps, un double moratoire (de ses essais nucléaires et balistiques par la Corée du Nord, de leurs manoeuvres militaires et de la course aux armements par les Etats-Unis), concurremment à la levée en tout ou partie des sanctions internationales qui menacent la vie même des populations nord-coréennes, pour enclencher un processus de dialogue en recréant les conditions d'une confiance mutuelle entre l'ensemble des Etats parties aux pourparlers à six. Cette dynamique, reposant sur le principe "action contre action", doit ainsi conduire, à terme, au désarmement nucléaire effectif de toute la péninsule coréenne.
Réuni le 2 octobre 2017 à Paris pour évoquer la situation de la Corée, le Comité national de l'Association d'amitié franco-coréenne a adopté la déclaration suivante :
Le 19 septembre 2017, s'exprimant devant la 72ème Assemblée générale des Nations unies, le Président des États-Unis d'Amérique a menacé de « destruction totale » un pays de 25 millions d'habitants, la République populaire démocratique de Corée (Corée du Nord). Quelques jours auparavant, le 11 septembre, le Conseil de sécurité des Nations unies adoptait une nouvelle série de sanctions (la neuvième depuis 2006) contre la Corée du Nord coupable de vouloir se doter des mêmes outils destructeurs que ceux qui la menacent.
Les troupes des Nations unies sous commandement des États-Unis ont déjà procédé à ce qui était considéré comme la destruction presque totale de la Corée du Nord : entre 1950 et 1953, pendant ce qu'il est convenu d'appeler la Guerre de Corée. Ce conflit s'est achevé par l'accord d'armistice du 27 juillet 1953 et aucun traité de paix n'a été signé. Depuis 64 ans, la péninsule coréenne reste en état de belligérance, les États-Unis stationnant toujours des forces militaires massives en République de Corée (Corée du Sud), au Japon et dans la zone Asie-Pacifique.
Le Conseil de sécurité a été conduit par certains de ses membres à adopter des résolutions qui donnent l’impression que les tensions dans la péninsule coréenne ne sont imputables qu’à une seule partie. Les résolutions du Conseil imposent au peuple de Corée du Nord des sanctions qui aggravent encore les tensions, et encouragent d’autres pays à adopter unilatéralement leurs propres sanctions. En outre, les sanctions prises par le Conseil de sécurité enfreignent l'esprit, sinon la lettre, de la Charte des Nations unies.
Aux termes de l’article 39 de la Charte des Nations unies et dans le cadre de ses attributions exclusives en matière de sécurité collective, « le Conseil de sécurité constate l'existence d'une menace contre la paix, d'une rupture de la paix ou d'un acte d'agression et fait des recommandations ou décide quelles mesures seront prises conformément aux Articles 41 et 42 pour maintenir ou rétablir la paix et la sécurité internationales ».
Or, au regard des qualifications employées par le Conseil de sécurité par le passé, il est patent que la notion de « menace contre la paix » dans la péninsule coréenne est susceptible de concerner un grand nombre de situations et de démarches entreprises, pas seulement du fait de la Corée du Nord. À ce titre, la récurrence des exercices militaires menés conjointement par les États-Unis et la Corée du Sud sont clairement constitutifs d'une « menace contre la paix » en simulant un affrontement armé avec la Corée du Nord et une invasion de cette dernière.
Il est inacceptable que les exercices militaires conjoints américano-sud-coréens n’aient jamais été inscrits à l’ordre du jour du Conseil de sécurité, ni traités afin que des mesures soient adoptées par les Nations unies. En omettant de traiter cette situation, le Conseil de sécurité donne une impression de partialité, ce qui ne peut que compromettre les buts qu’il est supposé poursuivre au titre du chapitre VII de la Charte des Nations unies. La sécurité collective suppose une approche globale et honnête de la situation, non une position n’obéissant qu’à un seul point de vue, en l'occurrence celui des États-Unis d'Amérique.
Il est de la responsabilité de chaque membre du Conseil de sécurité, dont la France, de soulever tout ce qui pourrait menacer la paix dans la péninsule coréenne, et non de se focaliser sur les actions d’un seul protagoniste. La cause de la paix dans le monde suppose que les provocations récurrentes et réitérées ne soient pas tues et passées sous silence au motif que certains pays ne sont pas d'accord.
Enfin, au dixième anniversaire de la déclaration inter-coréenne du 4 octobre 2007 pour le développement des rapports Nord-Sud, la paix et la prospérité, les Nations unies doivent s’engager dans une démarche associant tous les Coréens pour que, pacifiquement, ils soient les seuls à prendre leur destin en mains, conformément aux principes du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et de non-ingérence exprimés par la Charte des Nations unies.
L'Association d'amitié franco-coréenne est déterminée à prendre toute sa part dans ces combats.
Le 7 juillet 2017, 122 Etats membres des Nations unies (sur les 192 que compte l'organisation) ont adopté le projet de traité sur l'interdiction des armes nucléaires, ouvert à la ratification depuis le 20 septembre et qui entrera en application 90 jours après avoir été ratifié par cinquante Etats. Aucune des puissances nucléaires n'a participé aux discussions sur le traité, mais le vote, le 27 octobre 2016, du premier comité de l'Assemblée générale des Nations unies en faveur de la résolution L.41 prévoyant l'ouverture de négociations sur un "instrument juridiquement contraignant visant à interdire les armes nucléaires en vue de leur élimination complète" faisait clairement apparaître quelles puissances nucléaires envisagent réellement l'interdiction des armes nucléaires, éclairant ainsi d'un jour nouveau les enjeux de la crise actuelle autour de la Corée sur la question nucléaire.
Essai nucléaire français "Licorne" (puissance : 1 Mt) sur l'atoll de Mururoa le 3 juillet 1970
Un seul pays doté de l'arme nucléaire, la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), avait voté pour la résolution L. 41. Le vote de la délégation nord-coréenne était cohérent avec sa position de principe pour un monde sans armes nucléaires : la RPDC a développé sous la contrainte ses armes nucléaires comme un outil de dissuasion pour ne pas subir le sort de pays comme l'Irak et la Libye, alors que l'administration Trump laisse sous-entendre que les Etats-Unis pourraient bien, en revanche, utiliser à nouveau des armes nucléaires contre la Corée du Nord - comme ils l'ont déjà fait en 1945 en bombardant et tuant à Hiroshima et Nagasaki.
Sans surprise, les Etats-Unis et leurs alliés (Corée du Sud, Japon, Allemagne, France, Royaume-Uni, Australie, Israël...) ont voté contre la résolution L. 41, de même que la Russie, tandis que la Chine, l'Inde et le Pakistan se sont abstenus.
Si les Etats-Unis et leurs alliés multiplient les sanctions contre la RPD de Corée, c'est bien pour conserver le monopole de l'arme nucléaire, inquiets à l'idée que des Etats qui ne soient pas leurs clients se dotent de cette arme en suivant l'exemple de la RPD de Corée. Une telle conception des relations internationales nie la souveraineté des Etats, qui est pourtant officiellement la base du droit international.
La seule issue à la crise en cours sur le nucléaire nord-coréen consiste donc à ce que les Etats-Unis cessent de menacer la RPD de Corée avec des armes nucléaires (en apportant par ailleurs des garanties de sécurité à la Corée du Nord) et s'engagent eux aussi sincèrement, comme la France et le Royaume-Uni, vers une interdiction complète des armes nucléaires dont ils restent les principaux détenteurs (si l'on juge par les critères du nombre d'essais et de têtes nucléaires). Ce processus sera long, exigeant des concessions de toutes les parties (et pas seulement de la Corée du Nord), mais en tout état de cause ils ne peuvent pas demander aux autres ce qu'ils refusent d'accomplir eux-mêmes. Dans ce seul contexte, il serait raisonnable pour Pyongyang d'abandonner également ses armes nucléaires, qui sont aujourd'hui son assurance-vie face aux menaces extérieures.
Adoptée à l'unanimité par ses membres, alors que la Russie et la Chine menaçaient d'opposer leur veto, la résolution 2375 du Conseil de sécurité des Nations unies impose de nouvelles sanctions drastiques contre la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) à la suite de son sixième essai nucléaire, après la très sévère résolution 2371. Après avoir fait monter les enchères tant sur le contenu du texte qu'en ce qui concerne son adoption rapide, les Etats-Unis ont dû composer avec la Russie et la Chine, tandis que la RPDC avait menacé les Etats-Unis de contre-mesures après la présentation par Washington de propositions sans équivalent dans l'histoire du Conseil de sécurité des Nations unies.
L'ambassadrice américaine aux Nations unies Nikki Haley et son homologue chinois Liu Jieyi, le 11 septembre 2017
Les Etats-Unis avaient avancé l'idée d'un embargo total sur les produits pétroliers nord-coréens, ce qui aurait eu pour effets de briser l'économie nationale et de causer de très nombreuses victimes. Le texte adopté par les Nations unies, en imposant des limitations aux échanges d'hydrocarbures, rappelle le précédent irakien qui avait conduit à cette situation absurde qu'un des plus grands producteurs au monde de pétrole et de gaz naturel soit privé de ses ressources d'exportations et doive mendier la livraison de produits alimentaires pour nourrir ses populations. Il en avait résulté un vif ressentiment contre les Etats-Unis et leurs alliés, qui avait alimenté des années plus tard le terrorisme islamiste contre l'Occident.
La RPD de Corée, quant à elle, n'exploite pas de pétrole ni de gaz, souffre déjà d'un manque d'énergie pour l'approvisionnement de son économie et la vie quotidienne de ses habitants mais disposerait de stocks d'hydrocarbures pour un certain nombre de mois.
La résolution 2375 prévoit un embargo sur le gaz naturel et une limitation des importations nord-coréennes de pétrole à 500.000 barils pendant trois mois à partir du 1er octobre, puis 2 millions de barils à partir du 1er janvier pour une période de 12 mois - montrant ainsi clairement quelle pourrait être la prochaine restriction, pour Washington et ses alliés, si la RPDC procédait à de nouveaux essais balistiques et nucléaires. Il s'agirait d'un tiers du volume des approvisionnements du pays en produits pétroliers.
Outre cette restriction inédite sur les achats d'hydrocarbures par Pyongyang, la résolution 2375 interdit les exportations de produits textiles par la Corée du Nord - soit un manque à gagner de 800 millions de dollars par an, ou le quart de ses exportations, ce qui s'ajoute à la limitation d'environ un tiers des exportations nord-coréennes résultant de la résolution 2371. C'est bien une autarcie qu'entend imposer l'administration Trump aux Nord-Coréens.
En raison visiblement de l'hostilité de la Russie, les sanctions ciblées contre le dirigeant nord-coréen (gel des avoirs, interdictions de voyager) ont été abandonnées. Moscou a observé que ce serait une mesure relevant d'une politique de changement de régime, que Washington prétend ne pas mener. De nouvelles personnalités et entités, liées notamment au programme balistique, sont toutefois placées sur la liste noire des interdictions bancaires.
La résolution prévoit également des inspections en haute mer des navires nord-coréens mais avec l'accord de l'Etat du pavillon, ainsi qu'un échange d'informations sur les contrats de travail des quelque 50 000 Nord-Coréens à l'étranger. Les Etats-Unis avaient envisagé des mesures beaucoup plus sévères dans ces deux domaines.
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