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6 novembre 2024 3 06 /11 /novembre /2024 18:34

Alors que ni la Fédération de Russie, ni la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) n'ont confirmé ou infirmé la présence de troupes nord-coréennes aux côtés des Russes en Ukraine, le quotidien sud-coréen Hankyoreh (progressiste) a démenti la perte de 40 soldats nord-coréens sur le front ukrainien. 

Carte de la guerre en Ukraine, à la date du 5 novembre 2024

Carte de la guerre en Ukraine, à la date du 5 novembre 2024

Le 4 novembre 2024, Andrii Kovalenko, qui dirige le Centre de lutte contre la désinformation au Conseil ukrainien de sécurité nationale et de défense a annoncé sur Twitter que les premières troupes nord-coréennes ont déjà été sous le feu des soldats ukrainiens dans la région de Koursk. Peu après, la présidence ukrainienne a ajouté que les Nord-Coréens ont commencé à combattre et subi des pertes. L'information a été largement relayée par les médias du monde entier tout en opérant parfois de surprenants rétropédalages, les Ukrainiens parlant ensuite de "petit engagement". L' "information" a été diffusée par TF1 ou France 24. Le Monde a en revanche publié le démenti d'un membre du cabinet du président sud-coréen, peu suspect de sympathies pour la RPDC. 

Cité par le Hankyoreh, un officiel du renseignement sud-coréen a en effet rapidement réagi en démentant la présence sur le front à ce jour de soldats nord-coréens, et a fortiori des pertes militaires : 

Les troupes nord-coréennes ne se sont pas encore engagées dans les combats, alors pourquoi y a-t-il des morts ?

Le quotidien Hankyoreh a souligné la nécessité de recouper par des sources indépendantes les données ukrainiennes, au risque sinon d'être victime de désinformation, en rappelant le précédent de la vidéo d'un pilote ukrainien de légende, "le fantôme de Kyiv", qui aurait abattu six appareils russes en l'espace de 30 heures.

Le journal a précisé à quelles conditions la présence de troupes nord-coréennes au combat devrait être considérée comme un fait établi : soit les autorités russes ou nord-coréennes le confirment directement, soit si d'autres sources le corroborent, dans les cas suivants :  

Si des troupes au niveau d'une compagnie ou d'un bataillon ou à un niveau supérieur participent aux combats et que l'identité des troupes nord-coréennes est confirmée parmi les morts ; si un prisonnier de guerre nord-coréen témoigne directement des troupes nord-coréennes combattant en Ukraine ; si des documents militaires nord-coréens contenant des ordres opérationnels, des ordres de combat ou des plans d'entraînement tactique sont confisqués ; ou si des écoutes téléphoniques confirmant la participation des troupes nord-coréennes au combat sont divulguées.

Source : 

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21 février 2023 2 21 /02 /février /2023 22:53

Ayant participé à une conférence sur la blockchain en République populaire démocratique de Corée (Corée du Nord), le Britannique Christopher Emms est lourdement menacé par le FBI. Bien qu'il se soit réfugié en Russie, la nouvelle s'est répandue qu'il aurait été arrêté à son hôtel et placé en détention le mardi 21 février 2023, pour être interrogé par le bureau de Moscou d'Interpol. Mais l'intéressé a démenti lui-même ces rumeurs. Christopher Emms est soumis à un procès politique et doit pleinement bénéficier des garanties offertes aux personnes qui ont fui leur pays et craignent avec raison d'être persécutées en raison de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un groupe social ou (dans le cas d'espèce) de leurs opinions politiques. A ce titre, Christopher Emms a confirmé qu'il avait engagé la procédure requise pour obtenir l'asile politique en Russie.

PS : article mis à jour le 23 février 2023, à la suite du démenti apporté par Christopher Emms lui-même sur sa détention

URGENT : Christopher Emms nie avoir été placé en détention en Russie et menacé d'extradition

La nouvelle selon laquelle Chistopher Emms aurait été arrêté, à la suite d'une notice rouge d'Interpol, l'aurait exposé à un sort comparable à celui de Virgil Griffith - alors même que, en tant que citoyen britannique, il ne devrait en aucun cas être soumis à la compétence territoriale des tribunaux américains. 

Faut-il également le rappeler, les présomptions d'une violation des sanctions contre la Corée du Nord au regard de sa participation (ancienne) à une conférence à Pyongyang ne reposent sur rien de solide. Comme l'a rappelé Radha Stirling, fondateur de l'ONG Due Process International qui aide à défendre les droits humains face aux gouvernements :

Précisément parce qu'il n'a rien fait de mal : il n'a fourni aucune information à la Corée du Nord qui n'apparaisse déjà clairement sur la première page de Google.

Le démenti de la rumeur de l'arrestation de Christopher Emms ne permet toutefois pas d'identifier la source de la désinformation, manifestement d'origine occidentale.

Source : 

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29 octobre 2022 6 29 /10 /octobre /2022 10:46

Sous le titre "Est-il temps d'accepter la Corée du Nord comme une puissance nucléaire ?", la journaliste de CNN Paula Hancocks donne la parole à plusieurs experts de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) qui estiment que la position des Etats-Unis et de leurs alliés (une dénucléarisation complète, vérifiable et irréversible de la Corée du Nord), qui aussi celle du Conseil de sécurité des Nations unies, ne correspond plus à la réalité. Dans ce contexte, il conviendrait de reconnaître la RPD de Corée comme une puissance nucléaire et s'efforcer plutôt de contrôler et de limiter le développement de son programme nucléaire militaire. Cette logique s'inscrirait dans une limitation globale des arsenaux militaires des différentes protagonistes, par un accord international. Elle n'a rien de nouveau ni d'exceptionnel - c'est ce qu'avaient négocié les Etats-Unis et l'URSS pendant la détente, à la fin de la guerre froide - mais a été jusqu'à présent refusée par les Etats-Unis et leurs alliés vis-à-vis de Pyongyang, tout en acceptant en revanche qu'Israël, l'Inde et le Pakistan soient des puissances nucléaires.

Kim Jong-un inspectant un tir de missile (KCNA, octobre 2022)

Kim Jong-un inspectant un tir de missile (KCNA, octobre 2022)

Alors qu'un nouveau essai nucléaire nord-coréen est considéré comme imminent par un certain nombre d'experts, et que les sanctions contre le programme nucléaire et balistique nord-coréen n'en ont pas empêché les progrès, la journaliste de CNN donne la parole à des spécialistes qui appellent à changer de politique.

Selon Jeffrey Lewis, professeur adjoint au centre James Martin des Etudes de Non-Prolifération à l'Institut Middlebury d'études des relations internationales à Monterey, il convient de reconnaître au moins implicitement (comme pour l'Inde et Israël) la Corée du Nord en tant que puissance nucléaire :

Je pense qu'une étape fondamentale que le (président américain Joe Biden) doit franchir est qu'il doit être clair, tant pour lui que pour les Etats-Unis, que nous n'allons pas conduire la Corée du Nord à désarmer et que nous devons fondamentalement accepter la Corée du Nord comme un Etat nucléaire. Vous n'avez pas nécessairement besoin de le reconnaître légalement.

Selon le Professeur Andreï Lankov, de l'Université Kookmin, la guerre en Ukraine a rappelé que "les armes nucléaires sont la seule garantie fiable de sécurité", et que dans ces conditions Pyongyang ne peut pas accepter de discuter de sa dénucléarisation.


Pour le Professeur Cheong Seong-chang, de l'Institut Sejong, les efforts pour empêcher la Corée du Nord de se doter de l'arme nucléaire ont échoué, et continuer de rechercher la dénucléarisation de la Corée du Nord revient à "courir après un miracle".

Selon les chercheurs cités par CNN, le gel par Pyongyang de son programme nucléaire, en contrepartie de la levée d'une partie des sanctions, doit ainsi être envisagé - ce qui revient à retourner à la voie des négociations où s'était engagé Donald Trump, mais dans des conditions moins favorables aujourd'hui qu'en 2019.


C'est dans ce contexte qu'un appel à négocier un contrôle des armements et une réduction des risques sécuritaires a été ouvertement exprimé, lors d'une conférence le 27 octobre 2022, par Bonnie Jenkins, sous-secrétaire d'Etat pour le contrôle des armements : 

S'ils voulaient discuter avec nous... un contrôle des armements peut souvent être une option si vous avez deux parties désireuse de s'asseoir à la table des négociations et de discuter (...) Et il ne s'agit pas seulement de contrôle des armements mais de réduction des risques - tout ce qui conduit à un traité classique de contrôle des armements avec les différents aspects de ce contrôle que nous devons avoir avec eux. Nous avons dit très clairement à la RPDC (...) que nous sommes prêts à discuter avec eux - nous n'avons pas de conditions préalables.

Ces déclarations ont soulevé une levée de boucliers - à commencer par le département d'Etat américain, dont le porte-parole a déclaré qu'il n'y avait aucun changement dans la position de l'administration américaine sur la dénucléarisation de la RPDC.


Mais dans un contexte où de plus en plus d'experts soulignent l'impasse des sanctions, n'est-il pas temps de réellement envisager de changer de politique ? Car ce qui est en jeu est aussi la paix dans la région la plus fortement militarisée au monde : la dangereuse escalade à laquelle nous assistons ne peut que nous inciter à ne pas balayer d'un revers de main toute proposition réaliste pour empêcher qu'un nouveau conflit meurtrier endeuille l'Asie du nord-est et, au-delà, n'ait des répercussions sur la planète tout entière.

 

Sources :

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23 septembre 2022 5 23 /09 /septembre /2022 20:29

Selon le Pentagone, la Russie, manquant de munitions, se serait tournée vers de nouveaux fournisseurs - dont la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) - pour l'approvisionner dans son effort de guerre en Ukraine. Pyongyang a cependant fermement démenti.

Affiche du Mouvement de la paix contre la guerre en Ukraine

Affiche du Mouvement de la paix contre la guerre en Ukraine

Selon John Kirby, du Conseil de sécurité national américain, pour pallier l'épuisement de ses stocks militaires la Russie se serait tournée vers la Corée du Nord pour acquérir "des millions de cartouches, de roquettes et d'obus d'artillerie". 

Ce n'est pas la première fois que la Corée du Nord était mentionnée dans le conflit en Ukraine : elle avait naguère été présentée comme étant sur le point d'envoyer des soldats combattre aux côtés des Russes, ce qui est improbable étant donné que Pyongyang a cessé d'envoyer des soldats combattre à l'étranger depuis plusieurs décennies - qui plus est ces envois de troupes s'opéraient dans le cadre privilégié des luttes de libération nationale. Mais cette fois les autorités nord-coréennes ont réagi en opposant un démenti formel à l'envoi d'armes en Russie. Selon un responsable du Bureau général de l'Equipement du ministère de la défense de la RPD de Corée, cité par l'agence officielle KCNA :  

Nous n’avons jamais exporté d’armes ou de munitions vers la Russie auparavant et nous n’envisageons pas d’en exporter.

Le même communiqué a dénoncé des "rumeurs", alimentées par "des forces hostiles". 

En tout état de cause, l'AAFC, fondamentalement attachée à la paix en Corée et partout dans le monde, se félicite du démenti nord-coréen : les fournitures d'armes à un belligérant prolongent un conflit auquel il convient de tout faire pour y mettre fin. Refuser des livraisons d'armes à un pays en guerre est une règle de base dans les efforts conduits par les Nations unies pour maintenir et rétablir la paix, quel que soit le pays considéré.

Nous réaffirmons aussi notre attachement au désarmement militaire et au refus des exercices militaires pour prévenir les risques d'escalade vers des conflits meurtriers et garantir que les différends internationaux soient toujours réglés par des voies pacifiques.

 

Source : 

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20 novembre 2018 2 20 /11 /novembre /2018 23:13

Dans notre édition du 13 novembre 2018, nous mettions en garde contre un article du New York Times citant une étude qui entendait dénoncer les sites cachés de missiles de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord). Nous décrivions notamment des méthodes analogues à la désinformation sur les armes de destruction massive ayant conduit à la guerre d'Irak en 2003. De fait, le 17 novembre 2018 le journaliste d'investigation Tim Shorrock (à l'origine de la publication de preuves sur le fait que les Américains ont laissé faire en connaissance de cause le massacre de Kwangju en 1980) révélait, dans The Nation, comment l'article du New York Times s'inscrit bien dans une démarche de manipulation de l'opinion publique. Son enquête a été intitulée "Comment le New York Times a trompé l'opinion à propos de la Corée du Nord", par référence directe à l'article du New York Times qui dénonçait l'attitude selon lui "trompeuse" des autorités nord-coréennes.

Tim Shorrock

Tim Shorrock

Tim Shorrock observe tout d'abord que les prétendues révélations de l'étude à laquelle le New York Times a donné sa publicité planétaire émane d'un organisme, le Centre d'études stratégiques et internationales, qui est totalement intégré au complexe militaro-industriel américain. 

Alors que les auteurs de l'étude mettaient en garde contre la possibilité que "certaines informations puissent se révéler fausses ou incomplètes" (et ils savaient de quoi ils parlaient, puisque la présidence sud-coréenne devait réagir quasi-immédiatement sur les erreurs de cette étude), cette réserve méthodologique a totalement disparu dans l'article du New York Times qui a "révélé" l'information au monde entier. 

Et pour cause : l'auteur de l'article du New York Times, David Sanger, est un journaliste de "l'Etat profond", en l'occurrence un agent d'influence des services de renseignement qui l'alimentent en fuites dûment orchestrées - ce qui a permis à David Danger de devenir l'une des voix autorisées sur les programmes militaires nord-coréens. Pour Tim Shorrock, David Sanger n'est que depuis trop longtemps le porte-voix des services de renseignement américains.

Au-delà des divergences d'approches entre la République de Corée (Corée du Sud) et les Etats-Unis sur la question coréenne, il est désormais patent que les autorités américaines utilisent tous les moyens en leur pouvoir - à commencer par le pouvoir médiatique - pour imposer des réponses qui ne sont pas celles de Séoul - qui a dû, en l'espèce, contre-attaquer, mais n'a pas osé mettre directement en cause David Sanger et le  puissant New York Times.

Washington a lancé de longue date la guerre médiatique contre la Corée du Nord, et c'est le rôle des citoyens conscients d'empêcher que l'appareil de propagande des renseignements américains ne précipite la planète dans un nouveau conflit pour le seul profit du lobby militaro-industriel.

Sources : 

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13 novembre 2018 2 13 /11 /novembre /2018 23:08

Dans un contexte où le dialogue américano - nord-coréen est pour le moment suspendu, un certain nombre d'acteurs tentent de faire pencher la balance dans le sens d'un arrêt des discussions et d'un retour au cycle antérieur des tensions et des sanctions, dont ils espèrent qu'elles entraînent l'effondrement de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord). C'est ainsi qu'un rapport émanant notamment de milieux du renseignement, publié par un groupe ("Beyond Parallel") relevant d'un certain Centre d'études stratégiques et internationales, a été publié fort à propos dans le New York Times, pour démontrer la "grande supercherie" à laquelle se livrerait la Corée du Nord, en entretenant un réseau d'au moins vingt bases secrètes de missiles balistiques. Sauf que le contenu du rapport n'a rien de scoop, et encore moins valeur de preuve quant à une supposée duplicité dont ferait preuve Pyongyang dans ses discussions avec les Etats-Unis. 

Les photos de la base de Sakkanmol, présentées comme l'une des principales pièces à conviction

Les photos de la base de Sakkanmol, présentées comme l'une des principales pièces à conviction

Comme toujours, le rapport présente toutes les garanties attendues d'un travail d'experts dont les conclusions seraient recoupées, vérifiées et indubitables, en se fondant sur des images satellitaires et de "nombreux" entretiens avec des experts occidentaux du renseignement et des transfuges nord-coréens. 

Mais l'entreprise de déstabilisation du dialogue entre Washington et Pyongyang est tellement évidente, et par ailleurs contraire aux intérêts de Séoul, que c'est  la présidence sud-coréenne (citée par l'agence Yonhap) a jugé nécessaire de démonter, une à une, les conclusions d'un rapport destiné, une fois encore, à dresser l'opinion publique occidentale contre le régime de la RPD de Corée, suivant des méthodes qui rappellent la salve médiatique menée à grande échelle à la veille de l'invasion de l'Irak en 2003. 

Première faille du rapport : les informations données ne constituent pas un scoop, et sont d'ailleurs connues de longue date par Séoul et Washington qui dispose d'informations plus complètes et plus fiables.  Selon Kim Eui-kyeom, porte-parole de la présidence sud-coréenne cité par Yonhap : 

Les autorités des services de renseignement de la Corée du Sud et des Etats-Unis ont des informations beaucoup plus détaillées fournies par les satellites militaires et sont en train de suivre étroitement (cela).

Deuxième faille : l'amalgame opéré entre les missiles balistiques intercontinentaux et les missiles balistiques de courte et moyenne portée. Toujours selon le porte-parole de la présidence sud-coréenne cité par l'agence Yonhap, "les installations n'ont rien à voir avec les missiles balistiques intercontinentaux (ICBM) et les missiles balistiques à portée intermédiaire (IRBM)". 

Troisième faille : Pyongyang ne s'est engagé en rien sur ces sites de missiles et ne peut donc pas être accusé d'en avoir dissimulé l'existence. Selon Yonhap, 

Le Nord n'a pas promis de fermer la base et il n'y a pas eu d'accord ou de négociations pour celle-ci, a souligné Kim.

Bref, beaucoup de bruit pour rien ? Non, car dans la guerre médiatique contemporaine l'ennemi à abattre doit faire l'objet d'attaques systématiques, sur tous les fronts, en engageant les grandes manoeuvres préalables sur le terrain de la manipulation des opinions publiques, sans laquelle aucune guerre ne peut aujourd'hui être menée en Occident, avant le déclenchement des hostilités.  

Plus que jamais, l'Association d'amitié franco-coréenne amène à redoubler d'efforts dans le combat contre la désinformation, pour le dialogue et pour la paix.

Principale source : 

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11 novembre 2018 7 11 /11 /novembre /2018 13:37

Le 9 novembre 2018, le Président Moon Jae-in a remplacé les deux principaux acteurs de la politique économique du gouvernement : le ministre de l'Economie Kim Dong-yeon et le conseiller présidentiel en charge de l'économie Jang Ha-sung étaient ouvertement en désaccord, le second voulant poursuivre une politique de croissance basée sur l'augmentation des revenus (dont il est l'inspirateur, et qui figurait dans le programme du Président Moon Jae-in), quand le premier entendait mettre l'accent sur la déréglementation de l'économie. Kim Dong-yeon et Jang Ha-sung ont été remplacés respectivement par Hong Nam-ki et Kim Su-hyun. Alors que la politique économique est un sujet majeur de divergences entre le gouvernement et l'opposition conservatrice (avec la politique d'ouverture au Nord du Président Moon), les médias français ont très largement répété les éléments de langage figurant dans une dépêche de l'AFP, laquelle apporte une image complètement biaisée des termes du débat en reprenant les arguments douteux des opposants de droite au Président Moon. 

De gauche à droite : Hong Nam-ki et Kim Su-hyun, respectivement nouveau ministre de l'Economie et nouveau conseiller présidentiel chargé des politiques économiques

De gauche à droite : Hong Nam-ki et Kim Su-hyun, respectivement nouveau ministre de l'Economie et nouveau conseiller présidentiel chargé des politiques économiques

En apparence, la dépêche de l'AFP peut sembler factuelle : elle précise les changements d'acteurs, met en exergue le conflit qui opposait Kim Dong-yeon et Jang Ha-sung et rappelle les données macro-économiques de la Corée du Sud. En réalité, elle biaise - délibérément ? - les données politiques et économiques en soulignant implicitement que la politique du Président Moon Jae-in serait à l'origine d'un ralentissement de l'économie présenté comme inquiétant. Cette lecture partisane s'inspire directement de l'argumentaire de la droite conservatrice qui avait engagé la République de Corée sur une pente autoritaire avant d'être chassée par le peuple lors de la révolution des bougies. Cette présentation et cette analyse biaisées ne résistent pourtant pas à l'examen des faits. 

Le remaniement ministériel est d'abord décrit comme un "limogeage". Nous avons de la chance, le journaliste de l'AFP aurait pu parler de "purge" - mais l'accusation de "dictature"  (à laquelle les "purges" sont nécessairement liées) ne fait pas (pas encore ?) partie des faux procès lancés contre les démocrates coréens, qui sont au contraire - faut-il le préciser ? - les héritiers de ceux qui ont abattu le régime de la junte militaire. Le journaliste de l'AFP aurait été bien inspiré de rappeler que dans le système sud-coréen c'est le Président de la République qui forme le gouvernement sans le paratonnerre du Premier ministre, mais donner au lecteur des clés pour se forger sa propre opinion ne fait pas partie de la culture de l'AFP. 

Ensuite, la politique de relance économique du Président Moon Jae-in - d'inspiration keynésienne - est réduite à quelques appréciations sommaires et, bien entendu, décrite comme "sujette à controverse". Relisons les éléments de langage de l'AFP : 

À l'international, Moon s'est fait connaître pour son rôle dans la spectaculaire détente en cours avec le voisin du Nord armé de la bombe nucléaire. Mais à domicile, sa politique économique est de plus en plus sujette à controverse et sa cote de popularité descend dans les sondages. Son gouvernement a nettement augmenté le salaire minimum, réduit la durée du travail et transformé des contrats de travail temporaires en contrats à durée indéterminée dans le cadre d'une politique de redistribution destinée à stimuler une "croissance portée par les revenus".

AFP (via "La Tribune")

La désinformation commence dès la première phrase : Moon Jae-in a le mauvais goût de vouloir dialoguer avec le régime honni - forcément honni - du Nord car "armé de la bombe nucléaire" (le mot "armé" est employé de préférence à celui de "doté", car il occulte délibérément la stratégie de dissuasion nucléaire de la Corée du Nord qui a développé l'arme atomique pour ne pas connaître le sort de l'Irak ou de la Libye, et parce qu'il a le mérite d'introduire dans l'esprit du lecteur l'idée d'un risque de guerre fondé, forcément, sur la dangerosité d'un Etat puissance nucléaire).

Le processus de réécriture des faits continue en utilisant le procédé de l'omission : la cote de popularité du Président Moon Jae-in diminue. C'est un fait, indéniable, sauf qu'elle n'est jamais tombée en dessous de 50 %. Une précision que le journaliste de l'AFP juge sans doute contre-productive, car elle irait à l'encontre de sa démonstration. Et corréler cette cote de popularité sur la politique économique relève de la pure désinformation : la cote de popularité du président sud-coréen suit au contraire les développements internationaux autour de la péninsule coréenne, rebondissant lors des sommets inter-coréens. Et si elle baisse aujourd'hui, c'est d'abord parce qu'elle part de très haut (jusqu'à 75 % de satisfaits !). 

Vient enfin l'essentiel : la politique menée, basée sur une hausse du salaire minimum, une résorption de l'emploi précaire (par la transformation de contrats de travail en contrats à durée indéterminée) et la réduction du temps de travail. Tout cela est balayé en une demi-phrase, sans recontextualiser ni juger utile d'apporter des détails : rappeler que la durée maximum hebdomadaire de travail a été réduite de... 68 à 52 heures ou que la République de Corée est le champion de l'OCDE pour la durée du travail, ou encore que le travail précaire place la Corée du Sud très en-dessous des standards de l'OCDE, serait allé à l'encontre de la démonstration forcée imposée par l'AFP, et reprise par l'immense majorité des médias français. 

Après cette mise en bouche - ou ce conditionnement - est asséné l'argument d'autorité : la politique économique du gouvernement sud-coréen rompt avec le passé et aujourd'hui la croissance diminue. La boucle est bouclée : il faut accréditer l'idée que la Corée du Sud suivrait un mauvais chemin économique et devrait impérativement changer de cap. Citons là encore ce que dit l'AFP, qui fait pleinement coprs avec les conservateurs sud-coréens (qui, faut-il le préciser, recueillent 20 % des intentions de vote, soit moitié moins que les démocrates au pouvoir) : 

Il s'agit d'un revirement complet par rapport au modèle de croissance passé, porté par les exportations et les investissements des énormes conglomérats sud-coréens, et qui a vu l'économie sud-coréenne se hisser au quatrième rang asiatique.
Les critiques du gouvernement affirment que cette politique a eu l'effet inverse de celui escompté, en aggravant la situation des gens aux revenus les plus faibles et en forçant les petites entreprises à licencier, tandis que les mastodontes hésitent à investir au vu du renforcement des régulations. Le mois dernier, la banque centrale avait ramené sa prévision de croissance annuelle à 2,7%, contre un taux effectif de 3,1% en 2017. Au troisième trimestre, le taux de chômage a avancé de 0,4%, à 3,8%, le taux de chômage des jeunes s'établissant à 9,4%, soit son plus haut niveau depuis 1999.

AFP (via "La Tribune")

Relisons bien ce qu'écrit l'AFP : auparavant la Corée du Sud suivait un "modèle de croissance", un modèle qui lui a permis de devenir la quatrième économie d'Asie. L'auteur de la dépêche n'ose pas parler de miracle, mais seul le mot manque, et l'idée implicite est limpide : la rupture avec le modèle produit des effets négatifs. 

La déformation des faits attend ici des sommets : non seulement ce n'est pas parce qu'un modèle a fonctionné qu'il sera toujours performant, mais plus fondamentalement le miracle du fleuve Han (qui traverse Séoul) est en partie la création d'économistes néolibéraux qui omettent quelques points pourtant fondamentaux : que la croissance sud-coréenne a été basée sur un dirigisme étatique accordant des avantages à une poignée de conglomérats liés au pouvoir militaire (les chaebols) ainsi que sur l'injection massive de capitaux étrangers, et pas sur l'application de la doxa libérale ; que les contreparties (très longues journées de travail, faible protection sociale, dualisme entre les grandes entreprises et le reste de l'économie, milices privées brisant les grèves et tuant au besoin les syndicalistes) sont la face cachée de ce qui n'est pas précisément un paradis des travailleurs. Enfin, les conglomérats ont dû être réformés de force, l'accumulation de dettes pourries au sein de ces entreprises étant une des causes directes de la crise asiatique de 1998, qui a conduit au plongeon de l'économie sud-coréenne et à l'injection la plus massive de l'histoire de capitaux des institutions financières internationales dans l'économie d'un pays. A l'époque le chômage (et singulièrement le chômage des jeunes) a atteint un pic en 1999, point certes mentionné par l'AFP mais en oubliant curieusement de faire la moindre référence à la crise asiatique de 1998.

Rapprocher la politique actuelle du ralentissement économique en cours relève non seulement de la mauvaise foi, mais de mensonges sur les mécanismes économiques : la politique de relance actuelle par les revenus produit nécessairement de la croissance à court terme (c'est sur le plus long terme que les économistes divergent, suivant leurs références), si bien que la croissance économique de l'année 2018 serait au contraire encore plus faible sans le soutien aux revenus et à la consommation des ménages. Si l'économie sud-coréenne s'est autant ralentie ces dernières années, c'est bien davantage du fait des effets à moyen et long termes des politiques de dérégulation des prédécesseurs libéraux-autoritaires du Président Moon, qui eux n'ont pas été avares en "réformes". Qu'il est loin le temps où le président Lee Myung-bak (au pouvoir entre 2007 et 2012, et aujourd'hui en prison pour corruption) promettait 7 % de croissance économique par an !

Ce qui est reproché au Président Moon Jae-in est bien son refus de s'inscrire dans la politique de déréglementation néolibérale : ne pas se soumettre aux injonctions des détenteurs de capitaux lui vaut une volée de bois vert, et suffit manifestement à justifier les arrangements de l'AFP avec la vérité. 

PS : la dépêche de l'AFP a été reprise pratiquement mot à mot par les médias suivants, entre autres : 

- Ouest France

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1 novembre 2018 4 01 /11 /novembre /2018 22:52

C'est le dernier rapport sur les droits de l'homme en Corée du Nord dont les médias français (de France 2 dans son journal télévisé de 20h, le 1er novembre 2018, au Figaro) jugent utile de rendre compte sans porter la moindre appréciation critique sur la façon dont le travail d'enquête a été mené : selon Human Rights Watch, des violences sexuelles seraient commises de manière systématique et sans protection ni réparation des victimes. L'Association d'amitié franco-coréenne a mené, pour sa part, le travail d'investigation qui constitue la base du métier de journaliste. 

La conclusion du rapport est sans appel : les viols et autres violences sexuelles contre les femmes seraient monnaie courante, acceptés socialement et le fait de hauts fonctionnaires et autres personnes en position d'autorité. Selon Human Rights Watch

Le rapport de 86 pages, intitulé « ‘You Cry at Night, but Don’t Know Why’: Sexual Violence against Women in North Korea » (« ‘Vous pleurez la nuit sans savoir pourquoi’ : Violence sexuelle à l’égard des femmes en Corée du Nord »), décrit les contacts sexuels non désirés et la violence sexuelle qui sont devenus si courants en Corée du Nord qu’ils en sont venus à être acceptés comme faisant partie de la vie ordinaire. De nombreux Nord-Coréens – hommes et femmes – ont déclaré à Human Rights Watch que lorsqu’un responsable en position de pouvoir « sélectionnait » une femme, elle n’avait d’autre choix que de céder à toutes ses exigences, qu’elles soient sexuelles, pécuniaires ou autres. Les femmes interrogées ont déclaré que ces prédateurs sexuels comprenaient de hauts responsables du parti, des gardes et interrogateurs des prisons et d’autres lieux de détention, des policiers et agents de la police secrète, des procureurs et des soldats. Craignant de subir déchéance sociale et représailles, et sans presque aucune voie de recours, les Nord-Coréennes dénoncent rarement les abus.

Human Rights Watch

Sur quels éléments se base cette conclusion, dans un rapport au titre sensationnaliste à souhait (comme si la force des mots devait pallier le manque d'éléments tangibles incontestables) ? Les récits, encore et toujours, d'une poignée de réfugiés nord-coréens, dont on sait pourtant que nombre d'entre eux sont employés et rémunérés par les services de renseignement, qu'ils soient sud-coréens ou - plus rarement - ceux de pays occidentaux. A contrario les propos de réfugiés nord-coréens qui, eux, ne cherchent pas à attirer la lumière sont rejetés dans l'ombre. Le film (Madame B. Histoire d'une Nord-Coréenne) retraçant le récit d'une réfugiée nord-coréenne ordinaire, dont l'AAFC a soutenu la diffusion, ne parle ainsi pas tant des violences faites aux femmes (bien que le héros du documentaire soit une héroïne) que des violences et des discriminations qu'encourent les Nord-Coréens candidats à l'asile politique en Corée du Sud puis une fois sur place, à commencer par les interrogatoires inhumains qu'ils subissent dans les centres de rétention gérés par les autorités sud-coréennes. Mais cette violence-là, elle documentée de manière incontestable, n'a pas droit de cité : elle ne cadre pas avec les schémas de la presse occidentale.

Car qui retrouve-t-on comme grands témoins du rapport de HRW ? Choi Seong-guk, dont les dessins illustrent l'article de HRW cité plus haut : coïncidence, M. Choi travaillait pour les services de propagande du Nord, avant de passer au Sud... où il poursuit, comme nombre d'anciens agents du Nord ayant fait défection, le même travail de conditionnement des opinions publiques, mais naturellement à fronts renversés. Que notre interlocuteur ne présente pas les garanties de crédibilité minimums qu'est en droit d'attendre le lecteur n'effleure pas le moins du monde les salariés de HRW, qui jugent même bon d'ajouter comme commentaires de son dessin : "ce dessin n’est pas un portrait de personnes réellement observées, mais illustre une situation typique décrite par des femmes ayant vécu ce genre de situation." Il ne s'agit pas "de personnes réellement observées", mais doit-on considérer qu'il s'agit d'une fiction ? Plus fondamentalement, accepterait-on comme récit indubitable de prisonniers de Guantanamo le reportage d'une ancienne victime de la torture américaine à Guantanamo passée dans les rangs des communicants de Daech ? A tout le moins, un caveat serait émis. Rien de tel, naturellement, dans le cas de la Corée du Nord, qui pour le journaliste occidental moyen a forcément tort, car elle est la Corée du Nord.


Autres témoignages : ceux de "commerçantes". Que les femmes soient les principales commerçantes en Corée du Nord pourrait déjà, en soi, susciter un débat sur le rôle qu'elles jouent dans une société où l'argent occupe une place de plus en plus importante (et un excellent observateur de la Corée du Nord comme Philippe Pons a bien relevé, dans Corée du Nord : Un Etat-guérilla en mutation, qu'il s'agissait d'un élément montrant une émancipation des femmes dans la période récente). Mais là n'est pas le débat : ces commerçantes parlent de rapports sexuels forcés - commis par ceux qui contrôlent les marchés généraux de biens et de services où elles opéraient. Que de tels rapports coercitifs et de violence existent est probable vu l'étendue des marchés généraux en Corée du Nord, mais qu'ils soient présentés comme la norme est un raccourci saisissant, surtout si l'on recontextualise les propos de ces anciennes commerçantes. En Corée du Nord, ces détenteurs de l'autorité ainsi mis en cause sont fréquemment haïs - ils concentrent le ressentiment de larges pans de la population, et l'image qu'ils véhiculent est, peu ou prou, celle du contrôleur du fisc ou de l'huissier de justice en Occident. Si l'on ajoute que les commerçant-e-s ayant fui la Corée du Nord ont souvent commis des infractions graves qualifiées de crimes dans les législations dans tous les pays du monde, quelle valeur accorder à ces témoignages, qui combinent le ressenti et la vengeance personnels avec le besoin de se valoriser par des récits extraordinaires ? Ce biais ("plus mes propos narrent des choses horribles, plus ils ont de valeur") est bien connu des chercheurs sud-coréens qui travaillent sur les difficultés, pourtant réelles, vécues par les réfugiés nord-coréens, et qui cherchent ainsi à approcher la vérité. Pourtant, à aucun moment ce biais n'a été pris en compte par les salariés de HRW. Pire, les propos témoignant des violences les plus graves ont été considérés comme les plus crédibles, au point de servir de titre au rapport mené. 

Or les violences faites aux femmes constituent précisément, parce qu'il s'agit d'un point sur lequel les vérifications sont difficiles, l'un des cas les plus fréquents de distorsion entre la réalité vécue par les réfugiés et ce qu'ils expriment, et qui aurait ainsi mérité un travail plus sérieux sur un sujet éminemment important. La jeune et photogénique Park Yeonmi, dont les affabulations ont été démontées par une journaliste australienne peu suspecte de sympathies pour la Corée du Nord, Mary Ann Jolley, parlait ainsi de violences sexuelles dans un centre pour réfugiés en Mongolie où, selon des sources fiables, de telles pratiques n'existent pas.

Mais là où l'enquête de HRW pêche le plus fortement réside dans ses affirmations à l'emporte-pièce selon lesquelles il n'y aurait pas de politique de protection des droits des femmes par les autorités nord-coréennes, à commencer par la répression des crimes sexuels, ce qui revient donc à faire l'Etat et de son appareil judiciaire un complice (quand il n'est pas l'auteur des crimes, par les personnes dépositaires de l'autorité publique ouvertement mises en cause de par leurs fonctions, du reste assez floues). Pourtant, c'est le contraire qui ressort du discours des officiels nord-coréens (que les auteurs n'ont d'ailleurs pas jugé utile d'interroger, instruisant exclusivement un procès à charge). Ainsi, lorsqu'elles démontent les mensonges du réfugié Shin Dong-hyuk (qui a ensuite décidé de se mettre en retrait, après avoir présenté ses excuses pour n'avoir pas dit la vérité), le célèbre faux Rescapé du camp 14, les autorités nord-coréennes soulignent que ce dernier aurait commis une agression sexuelle, à l'origine de son emprisonnement. Qu'elle soit vraie ou fausse, étayée ou de circonstance, l'accusation des Nord-Coréens envers Shin Dong-hyuk révèle néanmoins un point important : les crimes sexuels sont pris au sérieux par la justice nord-coréenne, et ce malgré les dénégations de HRW. 


Mais pourquoi cet intérêt spécifique pour les droits des femmes, et les crimes sexuels en particulier, et maintenant ? Il convient tout d'abord de rappeler qu'il s'agit d'une préoccupation constante des services de renseignement sud-coréens, grands pourvoyeurs d'éléments de langage prêts à l'emploi sur les droits de l'homme en Corée du Nord, surtout au moment où le mouvement #MeToo touche - plus que d'autres - la société sud-coréenne. De ce point de vue, renvoyer la Corée du Nord aux vicissitudes de la Corée du Sud est un expédient utile, surtout en ces temps où le rapprochement inter-coréen ne fait pas que des heureux - et comme à chaque fois en semblables circonstances, la question des droits de l'homme en Corée du Nord resurgit opportunément. Le rapport de HRW tombe à pic, et il n'est pas étonnant qu'un média public comme France 2 lui accorde une couverture maximale en y consacrant un reportage de son journal télévisé de 20 heures, alors que les autorités françaises ont encore récemment démontré qu'elles étaient arc-boutées sur une position hostile à tout dialogue avec la Corée du Nord

Si Human Rights Watch a donc abordé un sujet important, il est extrêmement regrettable que les conditions de son travail d'enquête l'invalident. Les droits des femmes en Corée du Nord méritent mieux qu'un rapport de circonstance, conduit à charge et sans esprit critique, fortement influencé par des acteurs qui ont un intérêt à présenter la Corée du Nord telle qu'ils voudraient qu'elle soit et non telle qu'elle est.

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21 septembre 2018 5 21 /09 /septembre /2018 22:55

Le point de vue de l’AAFC dans les médias. Benoît Quennedey dans les journaux télévisés de France 24 le mardi 18 septembre. A 22h un passage sur France 24 en français et à 22h30 sur sa version en anglais, les deux dans une atmosphère très professionnelle et à chaque fois en ouverture du journal télévisé.

Sommet inter-coréen : l'AAFC sur France 24

A 22h pour illustrer le sujet sur le sommet en cours entre les deux leaders coréens à Pyongyang la journaliste Claire Bonnichon (CB) interroge Benoit Quennedey (BQ)

CB : Pour la première fois en 11 ans un président de la Corée du Sud est à Pyongyang. Au Sud comme au Nord on attend beaucoup de cette rencontre.

BQ : La Corée reprend en main son destin. C’est très important que les Coréens dessinent eux-mêmes leur avenir. Car on a dit que le Nord dépendait de la Chine et le Sud des Etats-Unis. De plus, la première réunion a eu lieu au siège du Comité Central du Parti du travail de Corée ; c’est tout un symbole.

CB : 17 patrons accompagnent le président Moon Jae-in. Que peut-il se passer ?

BQ : Les quatre principales entreprises du Sud sont représentées par leurs dirigeants. Pour le moment les sanctions bloquent encore les échanges économiques potentiels.

CB : C’est pourquoi rien ne débouchera.

BQ : Oui mais dans une perspective de long terme cela permet d’étudier ce qui peut être réalisé. Par exemple il ne faut pas oublier que la Corée du Sud est enclavée comme une île et que le raccordement et le développement des voies ferrées pourraient amener à la possibilité, par exemple, de relier Busan à Marseille.

CB : Les pourparlers entre la RPDC et les Etats-Unis sont au point mort..

BQ : Il n’y a pas de calendrier avec un contenu, pas de système de sécurité collective proposé. Par contre les rapports avec la Chine sont bons et j’étais présent à Pyongyang la semaine dernière quand, devant la foule présente pour fêter le 70e anniversaire de la fondation de la RPD de Corée, Kim Jong Un a pris, pour la lever avec la sienne, la main du représentant de la Chine Li Zhangshu (un des sept plus hauts dirigeants du Parti communiste chinois). Pyongyang a clairement manifesté, lors des cérémonies, sa volonté d'aller de l'avant sur le chemin de la paix.

A 22h30 changement de plateau et c’est Mark Owen (MO) qui interroge en anglais Benoît Quennedey (BQ).

MO : Voyons-nous des changements à Pyongyang ?

BQ : J’étais présent à Pyongyang pour les la commémoration du 70e anniversaire de la fondation de la RPD de Corée. Il y a des changements dont la venue, la première fois en 11 ans, du président sud-coréen.

MO : La grande question c’est la dénucléarisation, mais pour la population ?

BQ : La RPDC est toujours sous le coup de sanctions mais la présence des patrons du Sud montre que ceux-ci prennent en compte la possibilité de levée de ces sanctions.

MO : Réouvrir la zone spéciale de Kaesong, développer les échanges c’est ce que veulent ces grands patrons.

BQ : Oui, le Sud ne prend pas seulement sa part dans le volet diplomatique mais aussi dans le volet économique. Le Sud développe son indépendance par rapport aux Etats-Unis comme d’ailleurs le Nord vis-à-vis de la Chine.

MO : Je ne suis jamais allé en Corée du Nord mais j’espère le faire un jour. Peut-on se déplacer librement ?

BQ : J’y suis allé huit fois depuis 2005. Le programme des visites est discuté en commun. Il faut sortir de la capitale pour avoir une image plus complète du pays. C’est clair qu’est en cours une ouverture au monde extérieur et que le pays est beaucoup plus ouvert qu’il y deux décennies.

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21 août 2018 2 21 /08 /août /2018 20:57

Du 20 au 22 août 2018 puis du 24 au 26 août, des centaines de membres de familles coréennes séparées de part et d'autre du trente-huitième parallèle se retrouvent dans les monts Kumgang, au nord de la péninsule. La déclaration de Panmunjom, signée lors du sommet inter-coréen du 27 avril 2018 entre les présidents Kim Jong-un et Moon Jae-in, avait prévu ces nouvelles rencontres - riches en émotions - entre des parents et des enfants, des frères et des sœurs, ou entre des cousins sans aucune possibilité de communiquer ou d'échanger entre eux depuis plus de 65 ans. Les autorités sud-coréennes envisagent la possibilité d'organiser ces rencontres sur une base régulière, alors que beaucoup des personnes qui s'étaient inscrites pour revoir une dernière fois leurs proches sont hélas aujourd'hui décédées. Benoît Quennedey, président de l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC), a été invité aux journaux télévisés de France 24, le 20 août 2018, pour évoquer ces réunions, sur la chaîne francophone (à 20h) puis sur la chaîne anglophone (20h30). Nous rendons compte ci-après de son entretien sur le canal francophone de la chaîne internationale.

Lee Keum-som (Sud, 92 ans) retrouve son fils Ri Sang-chol (Nord, 71 ans)

Lee Keum-som (Sud, 92 ans) retrouve son fils Ri Sang-chol (Nord, 71 ans)

Le journaliste Mathieu Cavada (MC) commence l'entretien en demandant si cette séparation des familles est un traumatisme profond.

Benoît Quennedey (BQ) : C’est la 20e rencontre depuis le début des années 2000 et la première depuis octobre 2015. Pendant près de sept décennies ces familles ont été complètement séparées, aucun moyen de communication n’étant possible entre leurs membres

MC : Combien de personnes sont séparées ?

BQ : Au sud on comptait plus de 100 000 personnes concernées par la séparation ayant demandé à revoir un membre direct de leur famille dans le cadre des réunions de familles séparées, mais si l'on inclut toutes les familles ayant un proche direct de l'autre côté de la zone démilitarisée (parents/enfants, frères/sœurs) cela représente au bas mot des millions de personnes, sans parler évidemment des relations amicales ou des voisins. L’absence totale de communications amène à des surprises, ainsi une femme pasteur sud-coréenne vivant en France a découvert que sa sœur, vivant au Nord, était l'équivalent chez nous d’Edith Piaf.

MC : Il n’y a pas beaucoup d’intimité dans ces retrouvailles, tout se passe devant des caméras.

BQ : Il y a aussi, pendants ces retrouvailles de deux fois trois jours, des moments de rencontre dans des salons ou des chambres d'hôtel de façon plus intime et sans la présence des caméras. Auparavant il s'agissait plutôt de rencontres entre frères et sœurs et entre parents et enfants, maintenant c'est souvent entre cousins. Bien sûr que c’est un choc de se retrouver ainsi et cela même peut être douloureux. Il faut aussi éviter d’aborder des sujets polémiques tels que la politique.

MC : Est-ce qu’ils reconnaissent leurs proches ?

BQ : La presse rapporte le cas d’une mère de 92 ans séparée de son enfant qui avait 5 ans… En plus de cette difficulté il y a les distances physiques, ou encore vestimentaires, créées par la division du pays. Par contre les mots restent les mêmes avec quelques anglicismes au Sud et russismes au Nord, nonobstant le sentiment d’avoir conservé la pureté de la langue au Nord.

MC : Cette rencontre n’est-elle pas pour Kim Jong-un un moyen de faire diversion alors que la dénucléarisation n’avance pas ?

BQ : Le processus de dénucléarisation est un processus de longue durée, où tant les Etats-Unis que la Corée du Nord attendent des gestes de l'autre partie. Ces rencontres entre familles séparées marquent déjà la force du rapprochement en cours Nord-Sud et sont vécues par les deux parties divisées de la Corée comme un processus d'abord humanitaire.

 

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