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1 juillet 2022 5 01 /07 /juillet /2022 22:37
"Faire du terrain en Corée du Nord" ? La réponse d'universitaires et de chercheurs

En 2021, l' "Atelier des Cahiers" a édité un essai intitulé "Faire du terrain en Corée du Nord", publié sous la direction de Valérie Gelézeau et Benjamin Joineau. Cet ouvrage relate et analyse le déplacement en République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), en octobre 2013, de sept chercheurs : outre les deux auteurs précités, Yannick Bruneton, Evelyne Chérel-Riquier, Koen De Ceuster, Alain Delissen et Françoise Ged. A la suite de ce déplacement, la géographe et urbaniste Valérie Gelézeau, spécialiste de la Corée, et l'architecte Françoise Ged ont pu initier une coopération franco-(nord-)coréenne dans leurs domaines de spécialité, accueillant ensuite à plusieurs reprises des confrères nord-coréens en France. L'Association d'amitié franco-coréenne revient sur la manière dont les auteurs ont rendu compte de leur échange, à la lumière de cette question : comment faire un travail de recherche de terrain, réputé impossible, en Corée du Nord ?

Lorsqu'en avril 2012 une délégation de l'AAFC en visite en Corée du Nord rencontrait des architectes nord-coréens formés en France qui lui avaient fait part de leur intérêt d'engager des coopérations avec des universitaires français, elle ne se doutait pas que plusieurs de ses interlocuteurs de l'EHESS, spécialistes de la Corée, souhaitaient alors eux aussi mettre en place un programme d'échanges avec la RPDC. Cette question d'un échange universitaire devait à nouveau être abordée lors d'un nouveau voyage de l'AAFC au nord de la péninsule, en juillet-août 2013, au cours duquel nous avons à nouveau remis de la documentation dans le domaine de l'architecture. Dans ce contexte, nous nous sommes félicités de la concrétisation du programme universitaire et pluridisciplinaire, engagé en octobre 2013 sous l'impulsion notamment de Valérie Gelézeau, et à la préparation duquel nous avions modestement contribué. L'ouvrage paru aux éditions de l'Atelier des Cahiers rend compte de ces échanges, huit ans après leur mise en place, et auxquels un coup d'arrêt (espérons-le temporaire) a été donné par la fermeture des frontières nord-coréennes depuis le début de l'année 2020, dans le contexte de lutte contre la pandémie liée au Covid-19.

Il y a plusieurs niveaux de lecture de ce qui constitue fondamentalement un essai sur la notion de travail de terrain dans le domaine de la recherche universitaire. Tout d'abord, nous pouvons lire les résultats concrets de ces échanges à partir d'une lecture de l'urbanisme de Pyongyang, en particulier dans le compte rendu de mission qu'a effectué Françoise Ged. Nous pouvons aussi découvrir une expérience de ce qu'on peut qualifier de choc interculturel, même pour des universitaires spécialistes de la Corée (mais plutôt du Sud). Enfin - et c'est sans doute le plus intéressant - les auteurs (et plus particulièrement Valérie Gelézeau, dans le chapitre consacré au "making off" du terrain) posent des questions essentielles sur la difficulté de mener des travaux de recherche au regard des contraintes imposées à tout voyageur en Corée du Nord : en particulier, c'est l'organisme d'accueil qui détermine, certes en lien avec les visiteurs, le programme de visite, dans une volonté de contrôle totale et constante - laquelle s'inscrit en filiation avec les modalités des déplacements qui pouvaient naguère être effectués en Union soviétique et dans la Chine avant 1979. De ce point de vue, la Corée du Nord ne constitue pas une exception de lieu et de temps, mais ces spécificités posent d'évidentes questions éthiques pour le visiteur que les auteurs traitent tant avec la distance scientifique qui s'impose qu'en maniant un humour qui rend leur ouvrage attrayant pour le néophyte soucieux de découvrir la Corée du Nord (et procède à une utile démystification). Et au final, nous faisons nôtres leurs conclusions selon lesquelles c'est en favorisant les interactions que l'on contribue le plus utilement à la compréhension de l'autre, en évitant les jugements de valeur et les a priori : "cela fait plus de quarante ans que les sciences humaines et sociales ont abandonné l'illusion de cette entreprise totalitaire qu'est le terrain ; il est temps de lâcher prise et d'abandonner aussi pour la Corée du Nord cette illusion. C'est la première condition qui permettra de tirer les études nord-coréennes d'une préhistoire méthodologique prisonnière non seulement des limites d'un "contexte fermé", mais d'une conception orientalisante et moralisante de tout ce qui touche à la Corée du Nord." (p. 139)

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3 avril 2019 3 03 /04 /avril /2019 19:48

Les éditions Le Petit Futé ont publié le 27 mars 2019 leur premier guide touristique consacré à la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), avec l'ambition d’offrir aux touristes francophones (des guides existent déjà en d'autres langues) qui envisagent de visiter la RPDC des informations sur les sites touristiques majeurs, l’histoire de la Corée, sa culture ainsi qu’un certain nombre d’informations pratiques. Sollicitée par le Petit Futé en 2016, au début du projet, l'Association d'amitié franco-coréenne a toujours encouragé le développement des échanges touristiques, lesquels sont les mieux à même de permettre aux visiteurs occidentaux, français en particulier, d’acquérir une vision moins caricaturale que celle habituellement véhiculée dans les médias au sujet de la RPDC. Mais si l'AAFC salue l'initiative du Petit Futé, elle relève aussi plusieurs insuffisances et erreurs, volontaires ou non, dans ce guide sur la Corée du Nord.

Si les sanctions internationales et autres embargos ont pour conséquence de freiner la plupart des secteurs d’activités de la RPDC, le secteur du tourisme reste quant à lui épargné, si on fait abstraction de la décision prise en septembre 2017 par le gouvernement des Etats-Unis d'interdire aux citoyens américains de voyager en Corée du Nord. Le tourisme constitue une source de développement intéressante, tant sur le plan économique évidemment, avec la création de nouvelles infrastructures, que sur le plan culturel, avec la formation par exemple de guides et d’accompagnateurs disposant de capacités en langues étrangères.

Ces dernières années, sous l’impulsion du dirigeant de la RPDC Kim Jong-un, on a assisté à la multiplication des grands chantiers visant à permettre la venue d’un nombre plus important de visiteurs, dont les plus emblématiques sont la station de ski de Masikryong ou encore une immense station balnéaire sur la côte orientale, à Wonsan, dont l'inauguration est prévue en 2020.

Aujourd’hui, malgré tout le potentiel de la RPDC, on estime que, chaque année, seulement 4 000 à 6 000 touristes occidentaux visitent le pays. Le nombre de touristes chinois est bien sûr beaucoup plus élevé. Pour l’avenir, l’ambitieux objectif d’accueillir 1 million de touristes a été plusieurs fois avancé. Si les chiffres actuels sont relativement décevants, ils s’expliquent en grande partie par un contexte international tendu, même si la détente observée à partir de 2018, entre la RPDC et la Corée du Sud d'une part et entre la RPDC et les Etats-Unis d'autre part, devrait permettre un accroissement du nombre de touristes dans le Nord de la péninsule.

Hélas, le Petit Futé « Corée du Nord » n’échappe pas, dès l'introduction, aux tournures relevant davantage des articles à sensation d'une certaine presse que du guide touristique : « tyrannie communiste », « Etat communiste totalitaire », « un des régimes les plus totalitaires de la planète », etc.

Surtout, l’ouvrage ressemble souvent à une compilation de poncifs, clichés et autres racontars. On retrouve ainsi ce qu'il faut bien qualifier de fantasmes, avec la référence à la prétendue existence d’une « brigade de plaisir », ou « division de la joie », qui serait constituée « d’environ 2 000 femmes et jeunes filles mises à disposition du dirigeant nord-coréen dans le but de servir aux ardeurs sexuelles et aux désirs du cher dirigeant » (p. 26).

C’est encore la référence à la non moins hypothétique « Division 39 » dont le rôle serait, d’après les auteurs, d’ « alimenter la caisse noire de Kim Jong-un, actuel dirigeant de Corée du Nord […] par des activités légales (vente d’armes entre autres), mais également illégales telles que la contrefaçon monétaire et le trafic de drogue » (p. 120).

Aucune source fiable ni élément concret ne vient accréditer la réalité de telles choses. Des experts occidentaux reconnus ont même depuis longtemps tordu le cou à certaines rumeurs continuant pourtant de circuler à propos de la Corée du Nord.

D’autres passages du Petit Futé « Corée du Nord » font davantage sourire. On rassurera donc les lecteurs en leur apprenant qu’il n’existe pas seulement deux stations de métro en exploitation à Pyongyang (p. 108) mais que, sauf exception et comme dans n'importe quelle grande ville, toutes les stations sont utilisées chaque jour par les habitants de la capitale nord-coréenne. Et, contrairement à ce qu'indique Le Petit Futé, il est autorisé d’avoir un chien à Pyongyang et il est totalement faux d’affirmer que « la seule manière pour que la population puisse voir un chien est d’aller au zoo » (p. 132). De tels exemples d’âneries (pour rester dans le champ lexical animalier) ne manquent pas et pourraient ici être multipliés.

D'autres importantes erreurs d’appréciation de la part des auteurs du guide sont aussi à relever. Il est ainsi indiqué au sujet du Cimetière des martyrs de la Révolution que « chaque pierre tombale est surmontée d’un buste en bronze représentant le héros décédé, supposément du moins (cela signifierait qu’une photo de chaque personne enterrée sur place ait été disponible à l’époque... Difficile à croire) » (p. 128). En vérité, ces bustes ont été réalisés sur la base des souvenirs du Président Kim Il-sung qui mena la guérilla contre l’occupation japonaise jusqu'en 1945.

Au-delà, on regrettera que l’ouvrage se focalise à l’extrême sur Pyongyang et ses environs en y consacrant 37 pages, tout en ne faisant que survoler le reste du pays en 25 pages seulement, donnant l'impression que les auteurs ont passé l’essentiel de leur séjour dans leur hôtel de Pyongyang sans avoir eu l’opportunité de se rendre dans les différentes régions accessibles aux étrangers, ou alors beaucoup trop rapidement.

Quelques bonnes idées sont toutefois à relever dans ce guide touristique, comme, par exemple, de courtes interviews du chercheur spécialiste de l'Asie Théo Clément et de Dorian Malovic, chef du service Asie au quotidien français La Croix, dont les articles se distinguent par leur objectivité, leur mesure... et une connaissance du terrain.

Les informations pratiques sont quant à elles d’une grande utilité et permettront aux lecteurs de préparer au mieux leur voyage.

On appréciera aussi les petites biographies d’« enfants du pays », bien qu’elles aient souvent tendance à reprendre les éléments fournis par la presse sud-coréenne ou Wikipédia, avec tous les biais que de telles sources induisent... Enfin, les pages réservées à la culture coréenne (gastronomie, histoire, etc) sont fournies et plutôt bien faites, offrant aux lecteurs un bon aperçu de la Corée avant et pendant leur voyage. Cependant, dans le cas de l’histoire coréenne, c’est trop souvent une perspective sud-coréenne qui est préférée à celle de la Corée du Nord, les deux versions différant souvent sur des sujets aussi importants que la responsabilité du déclenchement de la guerre de 1950-1953, les incidents frontaliers, ou les attaques attribuées au Nord… Donner le point de vue nord-coréen, ou simplement relativiser le point de vue sud-coréen, permettrait pourtant de donner aux lecteurs deux visions d'événements toujours débattus par les spécialistes, et ainsi assurer un minimum d'objectivité.

Pour n'évoquer qu'un seul cas, récent, le guide impute à la Corée du Nord « l'attaque contre la navette (sic) Cheonan, au cours de laquelle plusieurs dizaines de militaires sud-coréens sont tués » en mars 2010 (p. 49). S'il est exact que l'enquête officielle américano-sud-coréenne a conclu à la responsabilité de la Corée du Nord dans l'affaire du naufrage de la corvette (et non navette) Cheonan, la RPDC a toujours nié toute implication. Surtout, les conclusions de l'enquête officielle ont été remises en question, entre autres, par un ancien membre du groupe d'enquête, par des chercheurs indépendants d'universités américaines, et par les experts de la marine russe invités à examiner les « preuves » de la culpabilité nord-coréenne... Malheureusement, les lecteurs du Petit Futé les moins avertis des méandres de la situation dans la péninsule coréenne ne le sauront jamais.

En résumé, si l’idée de rédiger un guide touristique sur la RPDC est excellente et répond sans doute à un véritable besoin, le Petit Futé « Corée du Nord », malgré quelques bonnes idées, pêche par trop d'erreurs et approximations. Ces erreurs peuvent relever d’une incompréhension d’une situation très complexe ou d’un manque de travail (manque de temps ?), ce qui reste, dans une certaine mesure, excusable, tant il convient de reconnaître que la RPDC est un pays difficile à appréhender même après plusieurs voyages. Cependant, face à tant d’informations non vérifiées, voire mensongères, le voyageur connaissant un minimum le pays pourra légitimement se demander en quoi un tel guide touristique se distingue d’un énième brûlot suintant une hostilité primaire envers la Corée du Nord.

 

Corée du Nord, Le Petit Futé, mars 2019 (192 pages)

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30 septembre 2018 7 30 /09 /septembre /2018 09:31

Du 4 au 13 septembre 2018, une délégation de l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) a visité la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), à l'invitation du Comité coréen pour les relations culturelles avec les pays étrangers, dans le contexte de la célébration du 70e anniversaire de la fondation de la RPD de Corée, proclamée le 9 septembre 1948. Pour l'organisation de leur visite, les participants remercient tout particulièrement Mme Jong Un-a, secrétaire générale de l'Association d'amitié Corée-France. Alors que ce déplacement prenait place dans un contexte diplomatique nouveau, marqué par l'amorce d'un dialogue direct américano - nord-coréen au plus haut niveau et avant un nouveau sommet inter-coréen à Pyongyang, du 18 au 20 septembre 2018, l'AAFC a interrogé Benoît Quennedey et Patrick Kuentzmann, respectivement président et secrétaire général de l'AAFC, qui faisaient partie de la délégation de l'AAFC.

AAFC - Les commémorations ont compris notamment une parade civile et militaire, une nouvelle représentation des jeux de gymnastique de masse, et une parade aux flambeaux. Que doit-on retenir de ces cérémonies, sur la forme et sur le fond ?

Benoît Quennedey - Les représentations de gymnastique de masse sont devenues l'une des expressions de l'identité de la République populaire démocratique de Corée, en constituant le plus grand spectacle vivant au monde - même s'il a également des équivalents dans d'autres pays, notamment en Asie de l'Est. La longue préparation des spectacles de masse, pendant plusieurs mois, avec la participation de nombreux citoyens de la ville de Pyongyang, est l'expression de la primauté du collectif sur l'individu dans la société fortement empreinte de tradition confucéenne, qui se réclame aujourd'hui du socialisme, qu'est la Corée du Nord. La parade militaire n'est pas, en revanche, propre à la RPD de Corée : la France a aussi son défilé du 14 juillet, le jour de la fête nationale, pour ne citer que notre pays... Cette année, les exercices de voltige des avions militaires avaient gagné en précision et en dextérité, alors qu'il s'agit d'appareils peu adaptés à ce type de prouesses - comme un signal des capacités de défense aérienne du pays, qui subit des menaces militaires d'abord aériennes. Enfin, la parade aux flambeaux et surtout le spectacle de gymnastique de masse ont encore fait progresser la République populaire démocratique de Corée dans une maîtrise totale de ce type de spectacle à nul autre pareil au monde... Toujours sur la forme, j'observe que les apparitions publiques du Président Kim Jong-un auxquelles nous avons assisté ont été moins nombreuses qu'en 2012 (seulement deux : lors de la parade civile et militaire et pour l'inauguration du spectacle de gymnastique de masse), et que cette année il ne s'est pas exprimé publiquement. Il ne s'agit pas à mon sens d'un retrait, mais de la volonté de rappeler que l'exercice du pouvoir en RPD de Corée repose sur un collectif. Je laisse toutefois le soin à Patrick Kuentzmann, "vétéran" de l'AAFC quant au nombre de visites effectuées depuis 2005 (personnellement, je me rendais à Pyongyang pour la huitième fois depuis 2005), de détailler les évolutions sur le fond de ces manifestations officielles, qui ont dominé la couverture médiatique des cérémonies en dehors de la Corée - notamment de la part des différents médias français présents (TF1, France Télévisions, Le Monde, Europe 1...).

Quelques tableaux du spectacle de gymnastique de masse "Le Glorieux pays" (photos : KCNA)

Patrick Kuentzmann - C'était ma dixième visite (depuis 2005) en République populaire démocratique de Corée. Les manifestations officielles étaient, comme d'habitude en RPD de Corée, parfaitement organisées. En revanche, le message transmis à l'occasion de ces manifestations était nouveau, et peut même être considéré comme un message de paix adressé au monde, et aux Etats-Unis en particulier. D'abord, la parade militaire du 9 septembre ne présentait aucun missile, de courte, moyenne ou longue portée, et faisait la part belle aux armements défensifs, surtout anti-aériens. Le message était donc clair : la RPD de Corée, si elle reste bien décidée à se défendre, veut avancer dans ses négociations avec les Etats-Unis sur ses programmes nucléaire et balistique. Le défilé civil qui a immédiatement suivi le défilé militaire était particulièrement imposant, mettant l'accent sur le développement économique, avec la participation de tous les corps sociaux et professionnels du pays : femmes, étudiants, infirmiers, sportifs, scientifiques, etc. Là encore, aucune allusion au nucléaire, fût-il civil, ou même à la conquête spatiale, alors que la RPD de Corée se montrait jusque là très fière des progrès accomplis dans ce domaine. Mais la présentation d'une fusée spatiale aurait pu être mal interprétée, et les Coréens ont donc préféré s'abstenir. On peut voir dans cette prudence un signe supplémentaire de la bonne volonté des Coréens dans leurs négociations en cours avec les Etats-Unis, et espérer que ces derniers fassent preuve d'autant de sagesse. Il n'y a eu aucune allusion non plus aux programmes nucléaire et spatial dans le spectacle de gymnastique de masse, intitulé "Le Glorieux pays", où les différents tableaux ont mis l'accent sur le développement économique, mais aussi sur la coopération internationale et sur le dialogue intercoréen. Un des tableaux présentait même le film de la rencontre du 27 avril 2018 entre le dirigeant Kim Jong-un et le président sud-coréen Moon Jae-in, déclenchant les applaudissements du public présent dans le stade du Premier-Mai. Quelque chose de proprement inédit, inenvisageable il y a encore quelques mois. Le ressenti face à tous ces éléments est que l'évolution positive des relations entre la Corée du Nord et les Etats-Unis, d'une part, entre la Corée du Nord et la Corée du Sud, d'autre part, est quelque chose de profond pouvant aboutir à un apaisement durable dans cette région du monde.

Parade militaire et civile du 9 septembre 2018 à Pyongyang (photos : KCNA)

AAFC - La délégation de l'AAFC a aussi participé à des rencontres internationales avec les associations d'amitié avec la Corée. Quel message a plus particulièrement délivré l'AAFC lors de ces manifestations ? 

PK - Les manifestations à l'occasion des grands anniversaires de la RPD de Corée sont aussi l'occasion de réunir les associations d'amitié avec la Corée venues du monde entier. Cette année, une réunion était plus particulièrement consacrée aux échanges d'expérience des différentes associations. Dans son exposé, le président de l'Association d'amitié franco-coréenne a fait part des actions récentes de l'association dans divers domaines (voir exposé ci-dessous). Le message principal qu'on peut en retenir est que l'amitié avec la RPD de Corée, et la Corée en général, passe par un soutien au dialogue intercoréen, impliquant lui-même de soutenir le mouvement pro-réunification, au Nord comme au Sud, en étant, entre autres, solidaire avec les militants réprimés au nom de l'anachronique (plus que jamais) loi sud-coréenne dite de sécurité nationale. Envisager la question coréenne dans sa globalité est une la ligne constante de l'Association d'amitié franco-coréenne.

Préparation de l'intervention de Benoît Quennedey, président de l'AAFC, avant la réunion des associations d'amitié le 11 septembre 2018 à Pyongyang (photo : AAFC)

BQ - Soutenir par des déclarations la paix et la réunification en Corée est nécessaire, mais pas suffisant : la particularité de l'AAFC, du moins parmi les associations d'amitié basées en Europe, est d'être structurée dans les régions françaises, de prendre toute notre place dans des manifestations qui ont rassemblé à Paris jusqu'à 800 personnes (pour obtenir le départ de la présidente conservatrice sud-coréenne Park Geun-hye), et de ne jamais négliger l'importance de promouvoir la connaissance de la langue et de la culture coréennes - y compris dans les coopérations que nous avons initiées, en particulier dans le domaines universitaire (architecture, mathématiques fondamentales...). Nous avons aussi participé à la mise en place, à Paris, du Comité international pour les libertés démocratiques en Corée du Sud (CILD), pour lutter contre la répression politique et favoriser la pleine démocratisation de la République de Corée. Outre la présentation des activités de l'AAFC que j'ai été amenée à faire à Pyongyang, je relève que, lors d'une marche pour la paix, la banderole de l'AAFC était la première du cortège après celle du cortège de tête (ne mentionnant aucune association en particulier). J'y vois le signe d'une reconnaissance, par nos homologues coréens, du rôle joué par l'Association d'amitié franco-coréenne dans le mouvement de solidarité internationale.

Délégation de l'AAFC participant à la marche internationale pour la paix, la prospérité et la réunification de la Corée le 11 septembre 2018 à Pyongyang (photo : AAFC)

AAFC - La délégation de l'AAFC a eu un entretien avec M. So Ho-won, président de l'Association d'amitié Corée-France et vice-président du Comité coréen de solidarité avec les peuples du monde. Quels sujets ont été abordés lors de cette rencontre ?

PK - Le président de l'Association d'amitié Corée-France a exprimé à nouveau ses remerciements pour tout ce qu'a fait l'Association d'amitié franco-coréenne depuis près de 50 ans. Il est notamment revenu sur la conférence organisée à Paris en juin 2017, un événement qui a apparemment marqué nos amis coréens. A cet égard, il est significatif que le Comité des relations culturelles avec les pays étrangers, qui chapeaute toutes les associations d'amitié entre la RPD de Corée et les autres pays, ait prévu une réunion consacrée aux échanges d'expérience entre associations d'amitié, puisque l'échange d'expérience était précisément un des points figurant dans la déclaration finale de la conférence de Paris. Et puisque l'Association d'amitié fêtera son cinquantième anniversaire en octobre 2019, nous avons convenu de la venue en France d'une délégation de notre association homologue coréenne pour participer à la célébration de ce cinquantenaire.

BQ - Lors de la rencontre avec M. So Ho-won, j'ai aussi souligné la diversité professionnelle et d'origine géographique des membres qui composaient la délégation de l'AAFC présente lors des cérémonies, ainsi que les visites régulières en RPD de Corée d'autres membres de l'AAFC : dans le cadre d'un accueil universitaire de plusieurs mois ce printemps, au sein d'une délégation spécialisée dans le tennis de table en juillet 2018 et, quelques jours après le retour en France de la délégation, à l'occasion du Festival international du film de Pyongyang (PIFF). Chacune de ces participations est l'occasion de promouvoir concrètement les coopérations franco-coréennes. L'occasion a aussi été donnée de parler des activités futures de l'AAFC, dont effectivement l'accueil d'une délégation du Comité coréen des relations culturelles avec les pays étrangers en France (idéalement, à Paris et dans l'un des comités régionaux de l'AAFC) dans un peu plus d'un an, et qui pourra aussi être l'occasion d'une nouvelle conférence internationale sur la Corée, après celle de juin 2017 que nous avions organisée à Paris.

M. So Ho-won, président de l'Association d'amitié Corée-France, et Mme Jong Un-a, secrétaire générale de l'Association d'amitié Corée France, le 5 septembre 2018 à Pyongyang (photo : AAFC)

AAFC - Le programme de visites de la délégation comportait aussi, à sa demande, des rencontres plus spécifiques - avec l'Université d'architecture et des matériaux de construction de Pyongyang (PUA), le ministère de la Sécurité de la construction et l'usine de panneaux solaires de Pyongyang. Comment l'AAFC a-t-elle pu, dans ces différents domaines, faire progresser la coopération franco-coréenne ? On retient aussi que la défense de l'environnement et la sécurité des travailleurs ne sont pas seulement des slogans...

BQ - Des rencontres avec la PUA ont lieu à l'occasion de chacune des visites de délégations de l'AAFC en RPD de Corée depuis avril 2012 : outre des donations de matériel scientifique (tandis que des demandes ont été à nouveau formulées par nos interlocuteurs dans d'autres domaines, comme l'architecture paysagère), il s'agit de connaître les attentes des Coréens pour les mettre en contact avec des homologues français. Une délégation européenne pluridisciplinaire de spécialistes de la Corée, composée notamment d'architectes et d'urbanistes, s'est ainsi rendue en RPD de Corée à l'automne 2013, et cette coopération se poursuit depuis cette date (accueil d'universitaires nord-coréens en France et français en Corée du Nord).

Un des membres de la délégation étant chef d'entreprise dans le secteur du BTP, nous avons souhaité savoir quelle était la politique nord-coréenne en matière de sécurité des travailleurs : nous avons ainsi pu avoir une discussion ouverte sur les causes et les conséquences du dramatique effondrement d'un immeuble dans le quartier de Pyongchon, à Pyongyang, en 2014 : était en cause la mauvaise qualité de matériaux de construction (en l'occurrence, du ciment), d'origine chinoise et qui n'avait pas été vérifiée par les organismes compétents du ministère... Le fait que la sécurité de la construction soit désormais un ministère à part entière depuis 1996 atteste d'une préoccupation réelle, même si nos interlocuteurs sont conscients des progrès qui restent à accomplir : ils ont été désireux de disposer des normes françaises en la matière. Enfin, les préoccupations environnementales sont apparues très présentes : l'objectif est de parvenir à une autosuffisance en énergie des bâtiments à hauteur de 50 %.

Rencontre des membres de la délégation de l'AAFC avec les professeurs de l'Université d'architecture et des matériaux de construction de Pyongyang le 5 septembre 2018 (photo : AAFC)

La défense de l'environnement a été encore plus marquée lors de la visite de l'usine de panneaux solaires de Mokran Kwangmyong, à Pyongyang, que nous avions spécifiquement demandée : aujourd'hui, environ 50 % des panneaux solaires du pays proviennent d'une production propre, à l'usine de Pyongyang, créée en 2011 et toujours en cours d'agrandissement, ainsi que dans trois autres usines (situées, pour l'une d'entre elles, à Nampo, et pour deux autres dans la province du Hwanghae du Sud). Il n'y a rien d'exceptionnel qu'un pays sous embargo (y compris énergétique) développe ses propres capacités d'énergie ; ce qui est plus original est que l'essor des énergies renouvelables constitue une priorité pour le développement du pays, affirmée au plus haut niveau de l'Etat, et qui repose tant sur des capacités d'innovation que sur l'accumulation primitive de capitaux permettant une diversification des activités (l'usine de Mokran Kwangmyong était initialement spécialisée dans la production de DVD, où elle se positionne d'ailleurs en leader sur le marché nord-coréen, tout en développant par ailleurs une recherche dans le secteur de l'éolien).

Usine de panneaux solaires de la compagnie Mokran Kwangmyong à Pyongyang le 12 septembre 2018 (photo : AAFC) 

AAFC - La délégation française a aussi fait une donation à la Foire internationale du livre scientifique et technique...

PK -  A l'occasion de la Foire internationale du livre scientifique et technique, qui avait lieu au complexe des sciences et techniques de Pyongyang, l'Association d'amitié franco-coréenne a donné des livres, sous format papier et électronique, exposés sur le stand des associations d'amitié. Des éditeurs étrangers, surtout russes et chinois (Chine continentale et Taïwan), étaient aussi présents. Il faut noter que trois gouvernements étrangers disposaient de leur propre stand pour y exposer des livres sur leur pays : le Nigéria, le Laos et la Roumanie. La Roumanie était donc la digne représentante de la culture latine, la France, qui a ouvert en 2011 un bureau dévolu aux affaires humanitaires et culturelles à Pyongyang, n'ayant pas jugé utile d'exposer à la Foire du livre. Cet investissement (minime) n'aurait pourtant pas été de trop, alors que l'apprentissage du français est en perte de vitesse et que des perspectives nouvelles se dessinent dans cette partie du monde. A moins que les autorités françaises considèrent que la culture française est un produit de luxe entrant dans le champ des sanctions internationales décrétées par la "communauté internationale" à l'encontre de la Corée du Nord.

Inauguration de la Foire internationale du livre scientifique et technique au Complexe des sciences et techniques de Pyongyang le 10 septembre 2018 (photos : AAFC)

AAFC - Le programme du déplacement comporte aussi  des visites permettant de disposer d'un aperçu sur la vie économique et sociale : école normale de Pyongyang, institut d'ophtalmologie, usine textile Kim Jong-suk... Où en est la Corée du Nord ?

BQ - L'école normale de Pyongyang que nous avons visitée a mis l'accent sur le développement de technique modernes d'apprentissage, tant en ce qui concerne les moyens matériels (avec un recours à l'imagerie 3D) que les méthodes (les futurs enseignants étant placés en position interactive avec les élèves, alors que l'enseignement en Corée est traditionnellement très vertical, les élèves recevant les connaissances des enseignants).

Ecole normale de Pyongyang le 11 septembre 218 (photos : AAFC)

Ce qu'il faut retenir de ces visites est que le pays, en dépit des sanctions (à moins que la production intérieure et l'innovation ne soient stimulées par les sanctions ?), continue son processus de modernisation : c'est patent dans le cas de l'usine de textile Kim Jong-suk, si l'on compare avec la visite qu'y avait effectuée une autre délégation de l'AAFC une dizaine d'années plus tôt (diversification de la production, automatisation accrue, même si le travail s'effectue toujours en deux équipes de huit heures, traduisant le manque continu d'énergie pour un fonctionnement des usines à plein rendement), ainsi que dans la mise en place de nouvelles infrastructures collectives, en particulier dans le secteur prioritaire de la santé (avec la visite, pour la première fois cette année, de l'institut d'ophtalmologie). A cet égard, j'ai obtenu la confirmation que la médecine moderne (dite occidentale) est combinée avec la médecine traditionnelle, si décriée en Occident où le poids du lobby pharmaceutique  a contribué au discrédit des médecines dites alternatives. 

Usine textile Kim Jong-suk de Pyongyang le 7 septembre 2018 (photos : AAFC)

Supermarché Potonggang de Pyongyang le 7 septembre 2018 (photo : AAFC)

AAFC - Vous avez aussi eu l'occasion sur place de rencontrer la délégation française conduite par Yann Moix et dont faisait partie Gérard Depardieu...

BQ - La première fois que j'ai pu apercevoir la délégation dont faisait partie Gérard Depardieu, une nuée de journalistes et de curieux s'est précipitée sur lui. D'une voix de stentor il a écarté tout ce petit monde - il m'expliquera ensuite qu'un coup de gueule permet d'éloigner les importuns. Je ne parle pas des autres invités - il est d'un abord extrêmement facile et chaleureux, extrêmement curieux de connaître et de comprendre d'autres cultures - mais d'une certaine presse, qui le dézingue systématiquement, et à qui il rend bien le mépris qu'elle lui oppose.

PK - Toutes les délégations étrangères étant logées dans le même hôtel, le Yanggakdo, nous avons effectivement eu l'occasion de rencontrer la délégation conduite par Yann Moix, avec Gérard Depardieu. Prendre son petit-déjeuner, le plus naturellement du monde, avec un des plus grands acteurs français est un moment privilégié et une expérience originale qui ne peut advenir qu'en Corée. Un moment marquant de plus au milieu de toutes les festivités auxquelles nous avons pu assister ! Yann Moix prévoit de réaliser un film sur Depardieu en Corée du Nord - à moins qu'il s'agisse d'un film sur la Corée du Nord visitée par Depardieu -, l'un et l'autre fêtant cette année leur soixante-dixième anniversaire.

AAFC - Enfin, nous avons cru comprendre que le transit par Pékin n'a pas été exempt de complications. Pouvez-vous nous en dire un mot ?

PK - Il faut ici entrer dans les subtilités du règlement chinois sur l'immigration. Les ressortissants de certains pays, dont la France, peuvent séjourner sans visa à Pékin, à condition d'arriver à l'aéroport international de Pékin et de repartir de ce même aéroport dans les 144 heures vers un pays tiers. On ne peut donc pas bénéficier de cette mesure si on fait la moindre escale en Chine avant d'arriver à Pékin, et il faut alors un visa en bonne et due forme. En 2015, pour avoir mal compris ce point du règlement, certains membres de l'AAFC, qui avaient fait une escale de seulement quelques heures à Kunming pendant leur trajet vers Pékin d'où ils devaient repartir au bout de 48 heures pour Pyongyang, se sont retrouvés, en toute bonne foi, sans titre de séjour valable et ont dû payer une amende au moment de leur départ vers la Corée. On aurait pu en rester là et, d'ailleurs, ces mêmes personnes n'ont eu aucun problème en 2017 pendant leur transit par Pékin. Mais cette année, le service chinois de l'immigration s'est souvenu de l'incident de 2015, et les personnes concernées se sont vu interdire l'entrée en Chine à l'aéroport de Pékin. Elles ont donc été accompagnées jusqu'à l'embarquement du vol pour Pyongyang, mais sans leurs bagages déjà débarqués en Chine. Les bagages ont été livrés plusieurs jours après à Pyongyang, non sans l'intervention - insistante - de la compagnie nord-coréenne Air Koryo auprès des autorités chinoises. Les membres d'autres délégations étrangères venus en Corée en passant par Pékin ont subi le même sort. A quelque chose malheur est bon puisque cette mésaventure a permis de mesurer le dévouement de nos amis coréens, cherchant à régler au plus vite cette affaire. Elle a aussi été l'occasion d'une séance mémorable de shopping à Pyongyang, au milieu de Coréens amusés, pour reconstituer une partie du contenu des bagages "perdus". Enfin, elle a permis de tester l'efficacité du service consulaire de l'ambassade de République populaire de Chine à Pyongyang, puisque, même pour un transit de quelques heures à Pékin, il a fallu y effectuer les démarches pour demander un visa chinois afin d'éviter de connaître le même genre d'ennui au retour.

AAFC - Merci Patrick Kuentzmann et Benoît Quennedey.

Quartier Ryomyong de Pyongyang (rénové en 2017), le 12 septembre 2018 (photo : AAFC)

Programme de la délégation de l'Association d'amitié franco-coréenne en République populaire démocratique de Corée du 4 au 13 septembre 2018

Mardi 4 septembre 2018

Arrivée en Corée

Mercredi 5 septembre 2018

10h : rencontre avec M. So Ho-won, président de l'Association d'amitié Corée-France

11h : rencontre avec le ministère de la Sécurité de la construction

14h30 : visite du Musée de la victoire dans la guerre de libération de la patrie

16h30 : visite du métro

18h30 : rencontre avec les professeurs de l'Université d'architecture et des matériaux de construction de Pyongyang

Jeudi 6 septembre 2018

8h : départ pour Kaesong

10h30 : visite de Panmunjom, dans la zone démilitarisée

12h30 : déjeuner traditionnel coréen

14h : visite du Musée de Koryo

16h : retour à Pyongyang

Vendredi 7 septembre 2018

9h30 : visite du Musée de la révolution coréenne

11h : visite de l'usine textile Kim Jong-suk

14h30 : visite du quartier sportif de la rue Chongchun

16h : visite du centre de tir Meari

17h30 : visite du supermarché Potonggang

Samedi 8 septembre 2018

8h : grand monument de Mansudae

9h : réunion internationale des participants aux cérémonies du 70e anniversaire de la fondation de la République populaire démocratique de Corée

11h : visite de Mangyongdae, maison natale du Président Kim Il-sung

15h : visite du Musée national des cadeaux

18h30 : banquet pour les participants aux cérémonies du 70e anniversaire de la fondation de la République populaire démocratique de Corée

20h : concert

Dimanche 9 septembre 2018

9h : défilé militaire et parade civile

20h : spectacle de gymnastique de masse

Lundi 10 septembre 2018

Deux programmes alternatifs le matin pour les membres de la délégation de l'AAFC

10h : Cérémonie d'ouverture de la Foire internationale des livres scientifiques et techniques

ou 9h30 : tour aux idées du Juche

10h30 : arc de triomphe

11h : exposition artistique Wolhyang

14h30 : centre informatique de musique Hana

15h40 : exposition de timbres

20h : défilé aux flambeaux

Mardi 11 septembre 2018

10h : marche internationale pour la paix, la prospérité et la réunification de la Corée

14h30 : école normale de Pyongyang

16h : réunion des associations d'amitié avec la Corée

18h30 : banquet pour les donateurs à la la Foire internationale des livres scientifiques et techniques

Mercredi 12 septembre 2018

9h30 : usine de panneaux solaires de la compagnie Mokran Kwangmyong

15h : hôpital ophtalmologique de Ryukong

16h : exposition de produits artisanaux

19h : visite de la rue Ryomyong et dîner en ville

Jeudi 13 septembre 2018

Départ pour Pékin
 

Intervention de Benoît Quennedey, président de l'AAFC,
lors d'un échange-discussion entre associations d'amitié sur leurs activités
(hôtel Yanggakdo, Pyongyang, 11 septembre 2018)

Au nom de l'Association d'amitié franco-coréenne, permettez-moi tout d'abord de remercier le Comité coréen pour les relations culturelles avec les pays étrangers pour accueillir notre délégation, et de féliciter le Maréchal Kim Jong-un pour le 70e anniversaire de la fondation de la République populaire démocratique de Corée.

Mon propos répondra à une question simple : quel peut être le rôle d'une association d'amitié ? Les exemples que je développerai sont fondés sur l'expérience de l'Association d'amitié franco-coréenne, créée en 1969, mais je tiens également à saluer la diversité et la richesse des actions conduites par les associations d'amitié de par le monde, ici représentées : nous en avions d'ailleurs rendu compte lors d'une conférence internationale pour la paix et la réunification en Corée, organisée par l'AAFC et qui s'était tenue à Paris les 23 et 24 juin 2017, à une date qui coïncidait avec le 40e anniversaire de la fondation du Comité international de liaison pour la paix et la réunification en Corée (CILRECO) en 1977. Guy Dupré, président d'honneur de l'AAFC et secrétaire général du CILRECO, s'est engagé inlassablement depuis plus de quarante ans dans les actions de solidarité internationale avec la Corée, en France et dans le monde : que son dévouement exemplaire soit ici salué à sa juste mesure !

Dès sa fondation, l'AAFC s'est ainsi attachée à faire connaître la réalité de la situation dans la péninsule coréenne en réunissant des personnalités issues d'horizons politiques très divers : communistes, socialistes, gaullistes, chrétiens, radicaux... Nous avons compté dans nos rangs des ambassadeurs de France, comme André Lewin, d'anciens ministres, tels que le gaulliste Louis Terrenoire qui a présidé l'AAFC, et d'anciens parlementaires, comme André Aubry, aujourd'hui président d'honneur de l'AAFC, et Bernard Hugo, vice-président. Aujourd'hui encore, l'AAFC peut s'enorgueillir de compter parmi ses membres des élus en fonctions, des universitaires, des chefs d'entreprise, des étudiants... il s'agit de représenter la société française dans toute sa diversité, pour en sensibiliser les différentes composantes. En 2017 et 2018, nous avons ainsi pu nous exprimer dans de nombreux médias français ou étrangers en France : des chaînes d'information continue françaises et étrangères, des quotidiens nationaux, ou encore des journaux de sensibilité souverainiste. Nous avons ainsi contribué, à notre mesure, à l'inflexion de la position des médias français sur la question coréenne.

Au regard de la profonde méconnaissance en Occident des idées du Juche et de la politique de Songun, l'AAFC a créé en son sein un Comité d'étude des sciences politiques et sociales de la Corée et nos adhérents sont à l'origine de plusieurs articles sur ces questions dans les meilleures revues françaises de sciences politiques.

Au-delà des actions de communication, qui passent par la publication régulière d'articles sur nos différents sites Internet, la publication d'ouvrages et la parution depuis 1972 d'un bulletin trimestriel, nous soulignons aussi la nécessité d'être solidaires du peuple coréen en menant des actions concrètes qui conduisent à une élévation réelle du niveau de vie du peuple coréen, notamment :

- dans le domaine universitaire, nous avons initié des coopérations dans les secteurs de l'architecture ou encore des mathématiques, en contribuant à la venue en Corée d'universitaires français et étrangers ; des sujets plus pointus sont également dans notre champ d'actions, comme la défense de la francophonie et la promotion de l'Espéranto, tout en faisant des donations régulières à la Foire du livre scientifique et technique ;

- au plan culturel, nous avons notamment accueilli en France en février 2015, en collaboration avec l'ONG britannique DULA, une délégation de membres de la Fédération coréenne des personnes handicapées ;

- la solidarité s'exerce par le recueil de dons et le soutien aux populations frappées par les catastrophes naturelles (inondations, sécheresses), en liaison étroite avec des ONG françaises et étrangères implantées en Corée ; nous faisons ainsi nôtre le proverbe coréen selon lequel il vaut mieux apprendre à quelqu'un à pêcher que lui donner du poisson ; c'est pourquoi, en liaison avec des agriculteurs membres de l'association, nous avons fait parvenir des semences diverses en Corée, qui ont permis des expérimentations par les scientifiques coréens pour améliorer les rendements et diversifier la production ;

- s'agissant des échanges économiques, malgré l'embargo et les sanctions, des chefs d'entreprise français sont présents en Corée ou cherchent à s'y implanter ; il est actuellement envisagé de mettre en place un comité économique au sein de l'AAFC pour coordonner les échanges d'expériences et créer une plateforme d'informations.

Mettant ainsi en relation les responsables coréens avec personnalités françaises, l'AAFC est structurée en dehors de Paris en comités régionaux.

Enfin, nous avons initié ou participé à des manifestations pour la paix en Corée, pour refuser la révision de la Constitution japonaise dans un sens militariste, contre les manœuvres militaires américaines, pour la libération des prisonniers politiques sud-coréens, pour défendre les victimes du naufrage du ferry Sewol ou encore obtenir le départ du pouvoir de la présidente sud-coréenne Park Geun-hye. Pour ce faire, nous avons pratiqué l'unité, en particulier avec les différentes composantes des progressistes sud-coréens en France, tout en soutenant les Sud-Coréens de France victimes de la répression du régime Park, au sein notamment d'un Comité international pour les libertés démocratiques en Corée du Sud, fondé à Paris en avril 2017. Des militants de l'AAFC se sont aussi engagés personnellement auprès de Sud-Coréens de France qui ont obtenu le statut de réfugié politique.

Le nouveau contexte international est pour nous riche de promesses, marqué par des progrès diplomatiques sans précédent incarnés par la déclaration de Panmunjom, le 27 avril 2018, entre les Présidents Kim Jong-un et Moon Jae-in. Mais de nombreux combats restent à mener : levée des sanctions ; mise en place d'un régime de paix permanent autour de la péninsule coréenne ; abrogation de la loi de sécurité nationale en Corée du Sud... Nous savons que nous ne serons qu'une des composantes de ces nouveaux combats, mais nous nous y engagerons résolument, en nous plaçant à l'avant-garde de la solidarité avec le peuple coréen – comme nous nous sommes efforcés de l'être depuis près de cinquante ans.

Je vous remercie pour votre attention.

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15 juillet 2018 7 15 /07 /juillet /2018 13:53

La petite salle du restaurant coréen Morann, dans le 15e arrondissement, était pleine ce jeudi 12 juillet 2018 (et la majorité des participants français, parmi eux des membres de l'AAFC), pour entendre Mme Kim Jung-hee, Sud-Coréenne naturalisée française, faire le récit de son quatrième voyage en République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), du 19 au 26 mai 2018. Une présentation suivie d'une discussion qui a également montré l'attachement des Coréens d'outre-mer à être pleinement acteurs du processus de rapprochement intercoréen en cours. 

Mme Kim Jung-hee

Mme Kim Jung-hee

D'emblée, Mme Kim a dû préciser que s'intéresser à la Corée du Nord, en Corée du Sud, n'est jamais neutre, et s'y rendre encore moins : le poids de l'éducation, longtemps marquée par un fort anticommuniste, fait soupçonner tout visiteur de sympathies communistes. Kim Jung-hee répond très simplement qu'aller en Corée du Nord consiste pour elle à s'intéresser à la moitié de son pays, certes divisé mais partageant une même culture et une même langue. Se déclarant très touchée par la rencontre à Panmunjom, le 27 avril 2018, entre les présidents Moon Jae-in et Kim Jong-un, elle est convaincue de la possibilité d'un avenir de paix si la réconciliation se poursuit.

S'appuyant sur les nombreuses photos qu'elle a pu prendre au cours de son récent séjour en mai 2018, elle a mis en évidence les changements qu'elle a observés depuis sa première visite en 2014 : un usage qui se généralise du vélo, un code vestimentaire marqué par un recours accru aux couleurs vives et la coquetterie de plus en plus prononcée des femmes...

C'est sur la vie quotidienne qu'elle a choisi de mettre l'accent, chacune de ses visites étant marquée par la conduite d'actions de coopération dans les domaines agricole et alimentaire : elle a ainsi visité la ferme-prairie de Sepodeungpan, au nord de la zone démilitarisée (acronyme anglais : DMZ), où les pluies abondantes du printemps 2018 ont été la promesse de bonnes récoltes cette année. La ferme de Sepodeungpan s'étend sur 50 000 hectares, entre 450 et 600 mètres d'altitude, et met l'accent sur l'élevage caprin et bovin en comptant aujourd'hui 100 000 têtes de bétail - l'objectif étant de porter ce nombre à 500 000 têtes. La ferme est caractérisée par un degré élevé de mécanisation (avec un système de contrôle central permettant notamment d'échanger des informations sur les bêtes malades, les paysans étant en outre très fiers que les machines à peser les bêtes soient fabriquées en RPD de Corée, de même selon eux que 90 % des tracteurs qu'ils utilisent) et un recours intensif aux énergies renouvelables (éolienne et solaire, des petits panneaux solaires - ici d'origine chinoise - étant installés sur les toits des différentes habitations). La ferme tire profit de son environnement naturel, mais elle le subit également : certains endroits trop ventés sont impropres à l'agriculture et à l'élevage - pour mémoire, un sixième seulement de la superficie totale de la Corée du Nord est constituée de terres arables. Un important effort est consacré à diminuer le taux d'acidité des terres.

La ferme constitue une agroville, disposant de son propre Institut de recherche vétérinaire, sanitaire et alimentaire, qui a été visité par des équipes originaires d'Allemagne, de Belgique et des Pays-Bas. Pour sa part, l'Italie a fourni des plants de pommiers.

Si la ferme-prairie de Sepodeungpan a constitué l'élément le plus original de la visite de Mme Kim Jung-hee en Corée du Nord, sur lequel ce compte rendu met l'accent, elle a pu se déplacer largement dans le reste du pays : à Wonsan, en cours d'aménagement de manière à devenir une station balnéaire de première importance, à Gosong (port desservant les monts Kumgang, où le dynamique tourisme intercoréen s'est brutalement arrêté en juillet 2008 et où les installations hôtelières sud-coréennes - comme l'hôtel Haekeumgang - se dégradent fortement), la zone démilitarisée - où elle a pu voir l'arbre planté par les deux présidents le 27 avril 2018 - et bien sûr Pyongyang, où la construction de nouvelles avenues témoigne du renouveau architectural en cours. 

Interrogée sur la nature des actions de coopération qu'elle conduit, Kim Jung-hee a précisé collecter des dons avec une demi-douzaine d'amis Coréens de par le monde, notamment des Coréens des Etats-Unis, les sommes recueillies ayant permis l'achat de pompes, de canalisations ou encore de filets pour protéger les plantations de jeunes arbres. 

L'exposé de Mme Kim, puis les réponses claires aux questions qui lui ont été posées, toujours dans un très bon français, a été empreint de cet enthousiasme qui témoigne combien la réunification fait toujours vibrer de nombreux Coréens, du Nord, du Sud et de la diaspora, même après 70 ans d'une cruelle séparation. 

Photo AAFC

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5 juillet 2018 4 05 /07 /juillet /2018 17:27

Journaliste, écrivain et réalisateur, ancien résistant et directeur de la revue Les Temps Modernes de 1986 jusqu'à sa mort, Claude Lanzmann s'est éteint à Paris le 5 juillet 2018, à l'âge de 92 ans. L'auteur de Shoah et de Tsahal avait eu d'autres engagements, moins médiatisés : son avant-dernier film, Napalm, sorti en 2017, revenait sur son séjour en République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) près de six décennies plus tôt, en 1958.

Disparition de Claude Lanzmann : l'AAFC salue la mémoire du réalisateur de "Napalm"

Il ne fait pas bon ne pas se mettre au diapason de l'opinion dominante : Claude Lanzmann en avait fait l'expérience, en voyant son film Napalm être l'objet de critiques souvent agressives, fondées non pas sur ses qualités cinématographiques mais sur une mise en cause du point de vue qu'il aurait dû - forcément - adopter : celui de la dénonciation d'une Corée du Nord (nécessairement) inhumaine.

Pourtant, pas plus dans son film de 2017 que lors de sa première visite dans le pays en 1958 Claude Lanzmann n'avait fait l'apologie de la République populaire démocratique de Corée - bien au contraire, les critiques nombreuses qu'il formulait en 1958 avaient le don d'agacer ses autres compagnons de voyage, qui en ont tiré d'autres témoignages : Moranbong de Jean-Claude Bonnardot (sur un scénario d'Armand Gatti), ou Coréennes de Chris Marker. 

Esprit indépendant, Claude Lanzmann était sans doute mal à l'aise entre une critique fleurant bon l'anticommunisme le plus primaire et un plaidoyer pro domo qui n'était pas dans son caractère. Et de fait, il lui aura fallu plus d'un demi-siècle pour qu'il en parle ouvertement et librement, déjà dans son livre autobiographique Le lièvre de Patagonie (Gallimard, 2009), puis dans le film Napalm qui rappelait la destruction systématique de la Corée par les troupes des Nations unies sous commandement américain pendant la guerre de Corée (1950-1953), et l'usage d'armes de destruction massives, biologiques et chimiques. Indéniablement, Claude Lanzmann avait de l'admiration pour la résistance héroïque du peuple coréen, lui, l'ancien résistant de la Seconde guerre mondiale - tout en mêlant le souvenir d'une courte idylle, fortement romancée, avec une infirmière nord-coréenne, qui a fait grincer des dents ses détracteurs mais tellement en accord avec l'hypersensibilité romantique propre aux Coréens - à tous les Coréens.

Car en 1958, déjà, Claude Lanzmann s'engageait dans un des autres grands combats de sa vie militante : le rejet du colonialisme et de l'impérialisme, sous toutes leurs formes, de Pyongyang à Alger. Il reviendra dans la péninsule coréenne en 2004, et à nouveau plus de dix ans plus tard, pour y tourner les images du fascinant film Napalm.

L'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) salue la mémoire d'un homme de combats et d'engagements, en présentant ses condoléances à sa famille, ses amis et ses proches. 

Lire aussi : 

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4 avril 2018 3 04 /04 /avril /2018 11:35

Le professeur Edmond Jouve, président du groupement européen d'étude des idées du Juche, est un des meilleurs connaisseurs de la question coréenne en France. S'étant rendu à de nombreuses reprises en République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), il a ainsi pu en apprécier les évolutions depuis plus de 30 ans. Du 15 au 24 novembre 2017, alors que les tensions internationales atteignaient leur paroxysme, il a effectué son dix-septième séjour dans le pays : il a rédigé le compte rendu que nous reproduisons ci-après, en attendant la publication prochaine de son prochain ouvrage sur la RPD de Corée - qui sera annoncée sur le blog de l'AAFC et sera notamment illustré par des photos prises par l'auteur, reproduites ci-après avec son autorisation.

Le Professeur Edmond Jouve à la cathédrale Jangchung de Pyongyang

Le Professeur Edmond Jouve à la cathédrale Jangchung de Pyongyang

La Corée du Nord entend marcher sur ses deux jambes

Politique du Byungjin

(compte rendu de mon 17e séjour à Pyongyang, du 15 au 24 novembre 2017)

Depuis mon premier voyage, en juillet 1983, à Pyongyang, capitale de la République populaire et démocratique de Corée, de l’eau a coulé sous les ponts du fleuve Taedong. Si les assises du régime n’ont pas fondamentalement changé, il n’en est pas de même de la vie quotidienne. Un seul exemple en témoigne. Voilà 34 ans, j’occupais une petite chambre, dans une enceinte destinée aux hôtes étrangers. Pour mon dix-septième séjour, du 15 au 24 novembre 2017, j’ai logé, comme les autres délégations étrangères, dans le très confortable Koryo Hotel. Dans la vaste suite qui m’a été attribuée, j’ai capté, sans problème,TV5 Monde Asie, en français. Lors de mon premier voyage, je ne disposais que d’un petit poste de radio et je devais me contenter de la Voix de l’Amérique brouillée. Pendant trois semaines, ce fut mon seul contact avec le monde occidental.

 

Apparemment, le fondement idéologique de la République n’a pas changé. Comme nous le rappelle la constitution socialiste de la RPDC du 27 décembre 1972, la Corée du Nord est « la patrie socialiste du Juche », étant entendu que le président Kim Il-sung « a créé les Idées immortelles du Juche et entrepris, sous leur drapeau, la lutte révolutionnaire antijaponaise, instaurant ainsi de glorieuses traditions révolutionnaires et faisant triompher la cause historique de la libération du pays ».

 

Par ailleurs, « il a posé de solides assises à l’identification d’un Etat indépendant dans les domaines politique, économique, culturel et militaire, avant de fonder la République populaire démocratique de Corée ».

 

Quant au Dirigeant Kim Jong-il, il a « approfondi et développé, sur tous les plans, les Idées du Juche et celles du Songun, autrement dit, il a transformé la RPDC « en puissance politique et idéologique invincible, ainsi qu’en pays nucléaire et puissance militaire sans rivale ».

 

Le Maréchal Kim Jong-un, commandant suprême de l’Armée de la RPDC, n’est en aucune manière revenu sur ces principes, mais il a souhaité les porter à un stade suprême, sous la bannière du kimilsounisme et du kimilsounisme-kimjongilisme dont l’idée directrice nous paraît être que la Corée doit marcher sur ses deux jambes. Autrement dit, elle doit faire l’objet d’un développement parallèle appelé Byungjin.

 

Ainsi le développement militaire du pays couronné par sa force nucléaire, doit, en même temps, promouvoir une édification économique et sociale, destinée, finalement, à assurer le bonheur du citoyen.

 

Un programme de cette envergure ne saurait être accompli sans l’adhésion du peuple tout entier : les ouvriers, les paysans et les intellectuels. C’est pourquoi une troisième conférence nationale des hommes de sciences sociales a été réunie à Pyongyang les 16 et 17 novembre 2017 au Palais de la Culture du peuple en présence de 3000 participants dont certains venaient de la Chongryon (Coréens du Nord résidant au Japon) et de plusieurs pays du monde, dont la France.

 

Il s’agissait d’une conférence historique. Trois de ce type seulement se sont tenues en Corée depuis sa naissance : en septembre 1953 ; à la fin de la guerre (commencée en 1950) en vue de la remobilisation des intellectuels ; en 1972 pour marquer la transformation de la société selon le kimilsounisme. Celle qui vient de se tenir avait pour objet d’inviter les intellectuels à mettre en œuvre les principes contenus dans le kimilsounisme en vue d’apporter la réponse la plus appropriée aux besoins de notre époque.

"La Corée du Nord entend marcher sur ses deux jambes" (Edmond Jouve)
"La Corée du Nord entend marcher sur ses deux jambes" (Edmond Jouve)

- En matière militaire

 

Il s’agit d’une réponse, notamment aux Américains et à leurs alliés qui, pendant la guerre de Corée, ont effectué plus de 1500 raids aériens et qui, avec plus de 420 000 bombes, ont tenté de réduire la capitale en cendres.

 

En réalité, les impératifs de la défense nationale ont toujours été au cœur des préoccupations des dirigeants de la RPDC. Ce fut le cas de « l’Union pour abattre l’impérialisme » créée le 17 octobre 1926. C’est encore le cas pour le « Parti du Travail de Corée » fondé le 10 octobre 1945. Comme l’a écrit le Maréchal Kim Jong-un, « l’histoire du Parti du Travail de Corée est celle des éminentes activités révolutionnaires du président King Il-sung, son fondateur et du général King Jong-il qui a continué brillamment les idées et l’œuvre du Président ».

 

Dès lors, la politique du Songun repose sur le postulat que la défense de la paix passe par la possession d’un important arsenal militaire destiné à faire de l’armée révolutionnaire la force principale du pays et la forme de lutte la plus élevée permettant d’accéder à l’indépendance.

 

L’amendement à la constitution, du 1er avril 2013, a adapté la Loi fondamentale à cette politique. Il met au point un nouveau système politique organisant la vie étatique et sociale à partir de l’importance des affaires militaires. Dès lors, c’est le Comité de la Défense nationale qui tient en main, dirige et gère toutes les forces armées du pays et l’ensemble des questions relatives à la Défense nationale.

 

Selon l’article 106 de la constitution, le « Comité de Défense nationale » est l’organe suprême du pouvoir d’Etat pour la direction de la Défense nationale, étant entendu (article 100) que « le Premier Président du Comité est son dirigeant suprême ». A l’heure actuelle, c’est le Maréchal Kim Jong-un qui détient ces pouvoirs considérables, suite à son élection à ce poste par l’Assemblée populaire suprême (article 91).

 

On peut donc dire que la Constitution socialiste de la RPDC, suite à sa révision de 2013, est la Constitution du Songun. Pour marquer la continuité de cette politique, feu le général Kim Jong-il a été institué Président du Comité de la Défense nationale. Les dirigeants coréens ne tarissent pas d’éloges à l’égard de cette politique. Ils estiment que c’est grâce à elle que la RPDC a pu se doter de constructeurs et de lanceurs de satellites artificiels et posséder l’arme nucléaire. Ils se félicitent que la politique du Songun ait mis à l’honneur la volonté de réunification sur le mot d’ordre « entre nous Coréens ».

 

Ainsi qu’il est apparu lors du 70e anniversaire du Parti, la RPDC entend montrer au monde – spécialement aux Etats-Unis – qu’elle serait en mesure de riposter si, par malheur, certains voulaient interrompre sa marche vers un authentique socialisme.

 

Le 9 octobre 2006, Pyongyang a ainsi effectué son premier essai nucléaire. Le 13 février 2007, la RPDC consent à l’arrêt de son réacteur.

 

Les négociations à six (RPDC, République de Corée, Etats-Unis, Chine, Russie, Japon) ayant échoué, la RPDC réalise son deuxième essai nucléaire le 25 mai 2009. Il est suivi d’un troisième le 12 février 2013. Le 6 janvier 2016, Pyongyang annonce le succès d’un premier test de bombe à hydrogène. Le 29 novembre 2017, la Corée du Nord a effectué un nouveau tir de missile balistique qui aurait atteint une altitude de 4 475 km avant de s’abimer à 950 km du site de lancement.

 

Le 6 janvier 2016, le gouvernement de la RPDC avait publié une déclaration indiquant que le premier essai de bombe H était « une mesure auto-défensive pour défendre fermement la souveraineté du pays et le droit à l’existence de la Nation contre la menace et les chantages nucléaires terribles des forces hostiles conduites par les Etats-Unis et garantir sûrement la paix dans la péninsule et la sécurité de la région ». Par ailleurs, « en tant que possesseur nucléaire responsable, elle n’emploiera pas la première les armes nucléaires, si les forces hostiles ne violent pas sa souveraineté, ni ne transférera en aucun cas les moyens et techniques en la matière ».

Fière de ses réalisations, la RPDC a installé dans le récent complexe des Sciences et Techniques de Pyongyang, le 16 août 2017, une réplique en grandeur réelle de la fusée Unha-3. Parallèlement, les spécialistes coréens ne manquent jamais de rappeler que, depuis 1945, 2054 essais de l’arme nucléaire (1032 pour les seuls Etats-Unis) ont été effectués dans le monde. Ils indiquent aussi que la Corée du Sud détient plus d’un millier de bombes nucléaires, tandis que dans le ciel existent 1120 satellites dont 70 % à usage militaire.

 

Chaque fête, chaque commémoration, chaque défilé, chaque parade sont l’occasion, pour la RPDC, de démontrer sa force. Nous avons pu l’observer le 17 avril 2017 à Pyongyang lors du défilé célébrant le 105e anniversaire de la naissance du Président Kim Il Sung. Nous avons pu constater de visu la présence de missiles intercontinentaux avec, inscrit sur leur dos, le mot pukkuksong.

 

- En matière socio-économique

 

Sans aucun doute, le renforcement de la défense est, désormais, un acquis du régime. Il est assurément une « jambe » solide sur laquelle peut s’appuyer celui-ci. Mais, ce que nous avons pu constater, c’est que, parallèlement, en application de la politique du Byungjin, déjà formulée par le Président Kim Il-sung, l’autre jambe ne saurait être ignorée. Mieux même, le Maréchal Kim Jong-un s’efforce, jour après jour, de lui donner une force égale en dépit des sanctions qui pèsent sur l’économie du pays.

 

De manière générale, le Maréchal souhaite améliorer de façon substantielle le niveau de vie de la population tout entière sujette à tant de privations. Au même moment, des efforts considérables sont déployés pour améliorer le sort de quatre catégories déterminées : les intellectuels, les enfants, les femmes et les paysans. Pour un observateur comme moi, qui n’était pas venu depuis sept mois, les progrès m’ont paru remarquables. Pas à pas, avec les caractéristiques qui sont les siennes, le pays accomplit des efforts incessants pour entrer dans le concert des Nations. C’est peut-être cela que certains voient d’un mauvais œil, craignant que le régime se stabilise et – qui sait ? – donne des idées à d’autres.

 

Certes, tous les problèmes sont loin d’être résolus, spécialement en matière de transports. Les files d’attente existent toujours, même si elles sont moins denses. Il n’échappe à personne que Pyongyang est la vitrine du régime. Les contrées les plus lointaines ne bénéficient pas toujours des mêmes avantages, même si, à leur tour, elles sont dotées d’usines, de fermes collectives prospères et même d’immenses vergers.

 

La vie quotidienne est, elle-même, bousculée. En avril dernier, j’ai pu offrir à mon guide et à mon chauffeur de la bonne bière coréenne dans un bistrot qui aurait pu trouver sa place à Paris. Certes, les marques étrangères étaient représentées, mais mes invités ont souhaité me faire goûter la bière Taedonggang, « made in North Korea ». Nous avons pris deux bouteilles de 640 ml chacune et les avons dégustées accompagnées de poisson séché dont raffolent les Coréens.

 

Cette fois-ci nous avons réédité la même opération au bar du Koryo Hotel au 44e étage, du restaurant tournant. Pour régler, j’ai pu le faire en euro, sans le moindre problème. En sortant, nous avons affronté une circulation particulièrement dense qui n’avait rien à voir avec ce que j’avais observé lors de mes premiers voyages. Certes, notre habituelle Mercédès nous attendait, mais elle était en concurrence avec de nombreux taxis. Ils se comptent par centaines et appartiennent à des sociétés différentes. Dans les embouteillages, j’ai pu observer des Ford, des Toyota et même quelques Peugeot. D’autres voitures ont été construites en coopération avec la Chine, soit sur son territoire, soit en RPDC : les Pyonghwa (qui signifie Paix), les Jaju (Indépendance) et les Sunri (Victoire).

 

Dès que l’on se trouve dans la voiture, place au portable. On me dit qu’il en existe 3 millions dans le pays. Je dispose du mien, mais je ne peux l’utiliser que pour faire des photos et appeler des correspondants à l’intérieur du pays. J’apprends (un peu tard) qu’en changeant de puce, je pouvais appeler où bon me semblait, en particulier en France. Il m’en coûterait plus de 100 euros. Ce sera donc pour la prochaine fois.

 

En attendant, nous nous rendons dans la rue Changjon où je suis ébloui par ce que je vois.

 

Depuis 2012, l’année du centenaire de la naissance du président Kim Il-sung, des dizaines de gratte-ciels plus beaux les uns que les autres, montent la garde sur la route qui conduit au mausolée du Président. Les résidents - travailleurs, professeurs et savants – coulent ici des jours heureux dans des appartements mis gratuitement à leur disposition. Mon guide m’en désigne un qui reçoit les professeurs de l’Université Kim Il-sung, et cela sans bourse déliée. Ces immeubles sont entourés d’écoles, de crèches, de jardins d’enfants, de pharmacies et autres services. J’apprends aussi que l’un des immeubles a été édifié sous la direction d’un architecte coréen formé à Paris.

 

En cette période difficile durant laquelle la RPDC doit se défendre contre ceux qui sont hostiles à la force nucléaire, les plus hautes autorités du régime font bloc avec les intellectuels. On vient d’en voir plusieurs exemples avec la tenue de la troisième conférence nationale, avec l’ouverture du musée des Sciences et Techniques, avec l’attribution d’un immeuble à des enseignants. On pourrait trouver bien d’autres situations illustrant la faveur nouvelle rencontrée par les intellectuels coréens, en particulier la très grande statue en forme de stylo. Certains vivent même de leur plume. C’est le cas, semble-t-il du père de ma guide, M. Kim Hung -ik, qui vient de publier un gros livre sur le « Départ historique ».

 

Autres changements dont bénéficient les femmes coréennes : leurs tenues s’éloignent de plus en plus de l’uniforme, si bien qu’il m’arrive de parler de révolution vestimentaire. Il suffit, pour s’en convaincre, de se rendre dans les locaux du Koryo Hotel. Sont proposés à la vente des dizaines de modèles d’escarpins et d’élégants bottillons. Les collants – noirs de préférence – ont également fait leur apparition. Dans l’avion, d’élégantes hôtesses de l’air arborent des sortes de seyantes jupes qui, autrefois, auraient été qualifiées d’audacieuses. Mon interprète, toujours très soignée, portait généralement une robe noire et une veste blanche. Des décolletés commencent à apparaître ici ou là. Nous voici loin du costume national dissimulant les formes féminines. Certes, cet habit est souvent présent, mais adapté au goût de chacune d’elles. La mode « occidentale » commence à faire quelques ravages et les « deux-pièces » l’emportent souvent sur les autres vêtements. L’épouse du président donne l’exemple, ce qui facilite l’évolution. Signe des temps : à la « une » du Pyongyang Times (n° 44), en date du 4 novembre 2017, figure ce titre : « Kim Jong-un visits cosmetics factory ». Voilà donc les produits de beauté presque entrés dans les mœurs.

 

Les enfants sont également favorisés par le régime. Parmi les visites d’usines qui nous ont été proposées figurait en première ligne, l’usine des cartables dont il nous a été souvent dit qu’elle avait été voulue par le Maréchal Kim Jong-un. Ainsi, pour une somme de 1 à 2 euros, chaque enfant peut disposer d’un sac-à-dos aux couleurs chatoyantes et aux motifs particulièrement modernes.

 

Dans l’usine de chaussures que nous avons visitée, à ma demande, figurent des modèles ressemblant à tous égards, y compris avec leurs couleurs, à ceux que nous trouvons dans nos vitrines.

 

Dans cette évolution, les paysans ne sont pas oubliés. Certes, on peut encore voir des bœufs tirant des charrettes évoluer dans les rizières, mais des tracteurs commencent à apparaître. Le n° 46 du Pyongyang Times (18 novembre 2017) consacre sa « une » à la visite par Kim Jong Un d’une usine de tracteurs, dont la production révolutionnera la situation.

 

En bas : aperçu du bureau français de coopération à Pyongyang
En bas : aperçu du bureau français de coopération à Pyongyang

En bas : aperçu du bureau français de coopération à Pyongyang

Et les étrangers ? Sont-ils nombreux en RPDC ?

 

Ceux qui ne connaissent pas la situation nous expliquent qu’il s’agit d’un pays fermé. Au cours de mes 17 voyages, j’ai pu me faire accompagner par un certain nombre d’amis et, chaque fois, surtout durant les célébrations, nous avons pu rencontrer des collègues de très nombreux pays, soit à Pyongyang, soit dans les sites que nous visitions. Quelques touristes apparaissent même ici ou là. Parmi les hôtels les plus modernes, citons le Koryo Hotel, le Yanggakdo International Hotel, le Hyangsan Hotel, le Majon Hotel, le Chongnyon Hotel et le Masikryong Hotel. En province, un équipement hôtelier convenable permet de visiter les endroits les plus célèbres, en particulier les monts Kumgang et Myohyang.

 

A condition de ne pas être trop éloigné de Pyongyang, l’invité ou le touriste peut assister à différents cultes : bouddhiste, catholique, protestant, orthodoxe... Selon l’article 68 de la Constitution « le citoyen jouit de la liberté de religion. Ce droit est assuré par la possibilité de disposer d’édifices religieux et d’y tenir des cérémonies ». Je me suis rendu à plusieurs reprises en la cathédrale catholique où j’ai pu assister à des assemblées présidées par des laïcs, étant entendu que des offices sont célébrés par des prêtres de passage. Peu d’hommes composent ces assemblées formées par des femmes d’un certain âge, portant des mantilles. Un détail m’a frappé : l’effigie des deux présidents est absente du revers de leur vêtement. Ils m’ont expliqué qu’ils avaient obtenu cette dérogation en se fondant sur cette constatation que l’on ne peut servir deux maîtres à la fois.

 

Les sites à visiter sont nombreux mais il est habituel, pour les délégations officielles, de faire plusieurs visites pour exprimer son respect aux fondateurs de la RPDC. Au fond, les Coréens du Nord ont réinventé, à leur manière, la visite au Soldat inconnu sous l’Arc de Triomphe à Paris, le dépôt de gerbes, le ravivage de la flamme et même la descente des Champs-Elysées.

 

On se rend d’abord à Mangyongdae où est né et a grandi le président Kim Il-sung. Il s’agit de maisons modestes, couvertes de chaume, contenant des objets nécessaires à la vie journalière – en particulier une jarre bosselée dont on nous dit que le prix fut réduit en raison de son état. Quelques mètres plus loin, les visiteurs ont la faculté, avec une calebasse, de recueillir de l’eau issue d’une source dont je n’avais pas noté l’existence lors de mes premiers voyages. Devant ce phénomène, on pense nécessairement à Lourdes. Au fond, tout est divinisé dans ce lieu. J’en fis l’expérience en avril dernier. Souhaitant ramener un peu de cette terre dans mon village de Nadaillac, mon guide m’en a dissuadé fermement, déclarant qu’il s’agissait d’une terre sacrée non exportable.

 

Après Mangyongdae, Kumsusan, le Palais du Soleil. A deux reprises, je m’étais autrefois rendu dans ce qui était la Présidence de la République. J’ai même assisté à deux fabuleux dîners de 1000 couverts chacun. Cet édifice est devenu un mausolée qui abrite les dépouilles des Présidents Kim Il-sung et Kim Jong-il. Pour aller saluer les deux fondateurs de la RPDC, il convient d’observer un cérémonial très strict. On ne saurait se rendre directement dans ce qu’il faut bien appeler un sanctuaire. On est transporté, en silence, sur des centaines de mètres sur un escalier mécanique ; on est précédé et suivi par de nombreux groupes (souvent des militaires), tandis que des vestales vêtues de noir, longent les murs en silence. A deux reprises, passage obligé sous des portiques qui, en quelque sorte, purifient les visiteurs, de manière à les préparer à faire face, comme il convient, d’abord au président Kim Il-sung, ensuite, à l’étage inférieur, au dirigeant Kim Jong-il.

 

Nous voici enfin face au Fondateur de la Corée moderne. La pièce est vaste et sombre. Des soldats en grand uniforme montent la garde. Par groupe de trois, les visiteurs saluent « le Grand Leader » par des hochements de tête. Ce geste est renouvelé sur les deux côtés. Après quoi, on se retire pour s’incliner devant une autre cage en verre, celle de Kim Jong-il. La visite n’est pas terminée. Il convient de se rendre encore dans deux salles où figurent les décorations et les distinctions des deux présidents.

 

Ensuite, ceux qui le veulent, signent l’un des multiples Livre d’Or exposés dans une salle spéciale. Le retour s’effectue plus simplement, chaque visiteur étant invité, grâce à des tableaux, à suivre les principales étapes de la vie des présidents et parfois à observer leur moyen de transport (locomotive, navire, voiture).

 

Il n’est pas rare que les invités ou les visiteurs accomplissent leur séjour à l’occasion d’une commémoration. En 1984, j’ai participé à la célébration du 36e anniversaire de la République populaire et démocratique de Corée. En 1987, j’ai assisté au 75e anniversaire du Président Kim Il-sung (qui, à cette occasion m’a reçu en audience). En 1988, j’étais présent aux cérémonies anniversaire de la Fondation de la RPDC. Du 29 juin au 9 juillet 1989, je fus invité, comme observateur, au 13e Festival mondial de la Jeunesse et des Etudiants, au côté de Mlle Rim Su-Kyong, alors âgée de 22 ans et déléguée de l’Alliance Nationale des Conseils Etudiants de Corée du Sud (Chondachyop), en présence de 22 000 personnes venues de 177 pays. En 1990 (45e anniversaire de PT de Corée), en 1991 (80e anniversaire du Président Kim Il-sung), en 2010 (68e anniversaire de la fondation du Parti), etc. j’ai rencontré de nombreux invités des cinq parties du monde. Chaque fois, d’immenses défilés, d’inoubliables mouvements d’ensemble, de gigantesques feux d’artifice sont présentés à la foule, comme signes avant-coureurs de la Société nouvelle qui nous est promise.

 

La RPDC ne vit, en aucune manière, en circuit fermé. De très nombreux Etats ont établi des relations diplomatiques avec elle, dont 26 européens. Deux, dont la France, se bornent à entretenir ces relations à un degré inférieur.

 

Chez nous, la Délégation générale siège au 3 rue Asseline, 75014 Paris. Depuis la visite du ministre Jack Lang à Pyongyang, la France dispose, dans le quartier des ambassades, d’un Bureau de coopération dirigé par M. Jean-François Fitou, avec rang d’ambassadeur. J’ai eu l’avantage de lui rendre visite à son bureau. Après un intéressant tour d’horizon, j’ai été invité le lendemain à l’Hôtel Pochonggang où la mission archéologique de Kaesong présentait le résultat de ses travaux pour l’année 2017, en présence des plus hautes autorités du pays.

 

J’apprends que l’Ecole Française d’Extrême-Orient (France) et l’Autorité Nationale pour la Protection du Patrimoine Culturel (RPD de Corée) ont effectué conjointement trois campagnes de relevés de la forteresse de Kaesong et trois campagnes de fouilles de sa Porte Namdae entre 2011 et 2014 D’importantes découvertes ont été faites et un matériel et des données archéologiques ont été récoltés.

 

En 694, ce site abritait une forteresse dénommée Songak. En 896, s’y dressait la Muraille Palocham de 8,2 km de long. Lorsque Kaesong devint la capitale du Koryo, a été construite une forteresse qui comprend la Muraille impériale, la Muraille palatiale, la Muraille extérieure et la Muraille intérieure. 12 monuments et sites de Kaesong, dont le Mausolée du roi Wang Kon, ont été inscrits le 23 juin 2013 sur la Liste du patrimoine mondial au cours de la 37è session du Comité du Patrimoine mondial de l’UNESCO.

 

Ainsi donc, la France et la RPDC entretiennent depuis longtemps des relations suivies. J’ai d’ailleurs appris que Paris accordait, chaque année, une dizaine de bourses à des étudiants et des professeurs pour améliorer leur français. J’ai évoqué la formation des architectes. Un hôtel a bénéficié du concours de la France. Mon guide, Mlle Kim, m’a indiqué qu’elle avait effectué un stage important à l’ENA. Dans les magasins, le vin de Bordeaux et le cognac Camus sont à l’honneur. J’ai même rencontré un voyagiste français organisant des séjours privés dans ce pays.

 

Au vu des évolutions qui viennent d’être énumérées, je pense que le moment est venu d’établir des relations diplomatiques complètes entre nos deux pays. Il favoriserait une plus grande ouverture de ce pays au monde.

 

Une fois de plus, la France serait fidèle à la noble mission que l’Histoire lui a assignée.

Edmond Jouve

Professeur émérite de l’Université

Paris Descartes Sorbonne Paris Cité.

Commandeur de la Légion d’Honneur

 

 

Paris, le 24 décembre 2017

"La Corée du Nord entend marcher sur ses deux jambes" (Edmond Jouve)
"La Corée du Nord entend marcher sur ses deux jambes" (Edmond Jouve)
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18 novembre 2017 6 18 /11 /novembre /2017 18:56

Hachette Tourisme a publié cette année, dans la collection "Guides bleus", un Petit guide des usages et coutumes consacré à la Corée de James Hoare, traduit de l'anglais. Ce petit ouvrage (170 pages) en format poche a le mérite rare de ne pas tomber dans deux travers habituels des écrits consacrés à la culture et aux coutumes de la Corée : l'européocentrisme (voyant la Corée sous l'angle d'un exotisme de bon aloi, défaut habituel des guides de voyage sur l'Asie), et une approche fragmentaire, tendant à ignorer qu'il existe aujourd'hui deux Etats coréens partageant néanmoins une histoire et une culture communes.

"Le petit guide des usages et coutumes" sur la Corée de James Hoare : une synthèse utile et de qualité

James Edward Hoare, né en 1943, est un diplomate et un universitaire britannique spécialiste de la Chine et de la Corée, qui a notamment été en poste à Séoul (1981-1984), Pékin (1988-1991) et Pyongyang où il a occupé les fonctions de chargé d'affaires en vue de l'ouverture de l'ambassade britannique après l'établissement de relations diplomatiques entre le Royaume-Uni et la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) en 2000.

Fort de son expérience diplomatique et de son bagage universitaire, c'est en connaissance de cause qu'il apporte une synthèse claire et intelligente de la culture et des coutumes propres à la Corée, abordant successivement le pays et ses habitants (chapitre 1), ses valeurs culturelles (chapitre 2), ses croyances, coutumes et tabous (chapitre 3), les règles sociales (chapitres 4 et 5), les loisirs (chapitre 6), le voyage en Corée (chapitre 7), les règles à suivre dans les affaires (chapitre 8) et la communication (chapitre 9).

Plus que les quelques aperçus sur l'histoire et la diplomatie de la Corée, où fleure souvent le point de vue du diplomate britannique (qui n'a pas vocation à être neutre et impartial) mais avec cet art de la nuance et du sous-entendu tellement british, l'ouvrage a cette qualité rare de permettre à l'Occidental en relation avec des Coréens (Nord comme Sud) ou visitant la péninsule coréenne (que ce soit Séoul ou Pyongyang) d'apprendre ce qu'il doit savoir pour éviter les impairs liés aux différences culturelles. Ainsi par exemple James Hoare consacre un paragraphe très juste et précis sur la question importante, dans toute l'Asie de l'Est, des cartes de visite (p. 139-140) :

Après s'être présenté, il est d'usage d'offrir sa carte de visite. On les utilise beaucoup au Sud comme au Nord, et il peut être utile d'en avoir sur vous, même si vous ne restez pas longtemps. Vous pouvez bien sûr les imprimer avant de partir, mais il y a certains avantages à attendre d'être sur place. On vous les fabriquera rapidement, et les imprimeurs coréens pourront ajouter nom, adresse et nom de l'entreprise en coréen. Les cartes doivent être présentées des deux mains, si possible, et si ce n'est pas possible de la main droite. Au moment de recevoir une carte, il est de bon ton de l'étudier un moment avant de la ranger. Un petit portefeuille en cuir ou en peau d'anguille, pour conserver vos cartes et celles que vous aurez reçues, est un bon achat à faire sur place. Vous pouvez aussi acquérir un carnet dans lequel conserver vos cartes et transférer vos cartes à mesure que votre collection grandit. Les cartes sud-coréennes sont souvent très complètes et détaillées et les cartes avec images sont de plus en plus courantes. Les cartes nord-coréennes, au contraire, sont plutôt minimalistes : nom, titre, organisation et adresse, ainsi qu'un numéro de téléphone général. Il est très difficile d'obtenir un numéro personnel en Corée du Nord.
Attachant une grande importance à leur propre hiérarchie, les Coréens s'intéresseront naturellement à la vôtre. Les cartes professionnelles sont très importantes ici, et ce serait une grande erreur que de vouloir s'en passer. Les Coréens s'empareront de la vôtre avec avidité, celle-ci leur conférant, ils l'espèrent, des informations importantes sur vous et vos attributions. Les diplômes peuvent faire impression, surtout s'ils viennent d'établissements prestigieux. N'omettez pas rangs et titres, qui sont aussi très importants. En plus de ce qu'ils pourront apprendre de votre carte, les Coréens vous questionneront parfois à propos de votre passé, de votre éducation et de vos croyances. Tous ces détails ont pour but de vous situer et de voir comment vous pouvez vous insérer dans leur système.

James Hoare aurait pu ajouter que les Coréens vous demandent aussi souvent votre âge, afin de vous positionner dans une hiérarchie où le plus jeune doit le respect au plus ancien. Par ailleurs, il a omis que, au Nord, une adresse email (également générale) figure désormais fréquemment sur les cartes de visite.

Les principales faiblesses de l'ouvrage concernant d'ailleurs la Corée du Nord. Il y a des informations datées (probablement dues au fait que James Hoare était en poste à Pyongyang il y a plus de 15 ans) : aujourd'hui il est par exemple possible de se déplacer seul, au moins dans la capitale, sans ses guides, et suivant des règles fixées au cas par cas, contrairement à ce qui est affirmé. On relève aussi quelques rares erreurs - ainsi, pour se procurer un visa pour la Corée du Nord, la délégation générale de la RPD de Corée rue Asseline (Paris 14e) est l'interlocuteur naturel (et pas l'ambassade de France en Chine ou le consulat général de France à Shenyang). Mais le petit guide de très bonne facture de James Hoare, tout en étant nettement supérieur aux guides de voyage sur la Corée du Nord aujourd'hui disponibles en français, n'entend pas se substituer aux informations à jour figurant sur les sites d'agences de voyage spécialisées (comme Koryo Tours ou Korea Consult). Il constitue, en tout de cause, un livre abordable (7,90 €) riche d'informations de qualité que se doit de connaître toute personne intéressée par la Corée et les Coréens.

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10 septembre 2017 7 10 /09 /septembre /2017 20:31

Le 9 septembre 2017, l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) a organisé une réception à Paris à l'occasion du 69e anniversaire de la fondation de la République populaire démocratique de Corée, le 9 septembre 1948. Après une discussion ayant porté sur le récent déplacement d'une délégation de l'AAFC en RPD de Corée du 12 au 19 août 2017, ainsi que sur l'actualité coréenne, les membres de l'AAFC présents ont été rejoints par S.E. M. Kim Yong-il, délégué général de la RPD de Corée en France, ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire auprès de l'UNESCO, et son collaborateur M. Jong Chang-gwon, conseiller, autour d'un buffet franco-coréen. L'AAFC remercie toutes celles et tous ceux de ses membres, ainsi que les épouses des diplomates, qui se sont investis dans la participation à l'organisation matérielle de cette manifestation conviviale.

L'Association d'amitié franco-coréenne a organisé une réception à l'occasion de la fondation de la RPD de Corée

Organisée à l'occasion de la célébration, le 15 août, de l'anniversaire de la libération de la Corée de l'occupation japonaise, la visite en RPD de Corée des représentants de l'AAFC, aux côtés de délégations d'autres associations d'amitié et d'organisations originaires de plus de 60 pays dans le monde, coïncidait avec un inquiétant regain des tensions dans la péninsule coréenne. A cet égard, la sérénité dont faisaient preuve les Nord-Coréens tranchait singulièrement avec le climat d'inquiétude international dont rendaient compte au même moment les médias du monde entier. Le fait que la RPD de Corée dispose désormais d'une dissuasion nucléaire complète (y compris les vecteurs balistiques d'armes nucléaires) peut s'interpréter comme incitant les Nord-Coréens à une plus grande confiance, ouvrant la voie à une reprise ultérieure du dialogue multilatéral et à une levée des sanctions - ce qui favoriserait le développement du pays, alors que l'élévation du niveau de vie constitue plus que jamais l'objectif majeur des autorités nord-coréennes.

Au cours de son déplacement marqué par la participation à de nombreux événements officiels, la délégation de l'AAFC a également évoqué de possibles pistes concrètes de coopération - dans les domaines de l'architecture, de la francophonie ou encore de la viticulture - traduisant la priorité organisée par l'association à développer une solidarité en actes, et pas seulement verbale. 

Les discussions qui ont suivi ont porté, notamment, sur l'homogénéité culturelle du peuple coréen qui se traduit par une même volonté de figurer aux premiers rangs de la compétition internationale, le développement architectural de Pyongyang, les écarts entre la ville et la campagne ainsi que l'approvisionnement en énergie et la situation agricole. 

Les échanges se sont poursuivis avec les diplomates nord-coréens en poste en France, à l'occasion de la fête nationale du 9 septembre, jour de fondation de la République populaire démocratique de Corée. Benoît Quennedey, président de l'AAFC, a rappelé la solidarité de l'association avec le peuple coréen pour la construction du socialisme et la sauvegarde de la paix. S.E M. Kim Yong-il a remercié l'AAFC pour son soutien constant à la cause du peuple coréen, engagé dans l'édification d'un pays puissant et prospère soucieux de sauvegarder sa souveraineté nationale.

L'Association d'amitié franco-coréenne a organisé une réception à l'occasion de la fondation de la RPD de Corée
L'Association d'amitié franco-coréenne a organisé une réception à l'occasion de la fondation de la RPD de Corée
L'Association d'amitié franco-coréenne a organisé une réception à l'occasion de la fondation de la RPD de Corée
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22 août 2017 2 22 /08 /août /2017 14:18

Du 12 au 19 août 2017, une délégation de l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC), constituée notamment de son président, Benoît Quennedey, et de son secrétaire général, Patrick Kuentzmann, a visité la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), à l'occasion de l'anniversaire de la libération de la Corée de l'occupation japonaise, le 15 août 1945. Répondant à l'invitation du Comité des relations culturelles avec les pays étrangers de la RPD de Corée, cette visite coïncidait avec l'organisation du 5e Festival international en l'honneur des grands hommes du mont Paektu (après les rassemblements internationaux de février 2002, août 2005, février 2007 et avril 2012). Des délégations de plus de 60 pays ont participé au festival, dans un contexte marqué par un regain de tensions internationales autour de la péninsule coréenne. L'AAFC remercie les diplomates de la délégation générale de Corée en France ainsi que le Comité des relations culturelles, et tout particulièrement Mme Jong Un-a, secrétaire générale de l'Association d'amitié Corée-France, pour l'excellente organisation de leur séjour.

Situé à la frontière sino-coréenne, le mont Paektu, point culminant de la péninsule (2 744 m), occupe une place particulière pour la légitimité historique et politique de la République populaire démocratique de Corée en tant que lieu de naissance du Dirigeant Kim Jong-il et théâtre d'affrontements entre les troupes d'occupation japonaises et les partisans coréens menés par le Président Kim Il-sung, qui devait ensuite fonder la RPD de Corée le 9 septembre 1948. Le rassemblement international qui s'est tenu au sommet du Paektu, lors de la matinée du 14 août, puis la visite le même jour à l'ancien camp secret établi au pied de la montagne, lieu de naissance de Kim Jong-il le 16 février 1942, ont ainsi constitué des temps forts des manifestations.

Le lac Chon, au sommet du mont Paektu (photo : AAFC)

Le lac Chon, au sommet du mont Paektu (photo : AAFC)

Rassemblement international au sommet du mont Paektu, le 14 août 2017 (photo : AAFC)

Rassemblement international au sommet du mont Paektu, le 14 août 2017 (photo : AAFC)

Visite au camp secret du mont Paektu, le 14 août 2017 (photo : AAFC)

Visite au camp secret du mont Paektu, le 14 août 2017 (photo : AAFC)

La délégation de l'AAFC a aussi participé à une réunion internationale de célébration du 15 août, anniversaire de la libération de la Corée, au Palais de la culture de Pyongyang, en présence du président du praesidium de l'Assemblée populaire suprême de la RPD de Corée Kim Yong-nam, et à une réunion de solidarité avec le peuple coréen le 16 août, à l'issue de laquelle les participants ont adopté une lettre au secrétaire général des Nations unies. Rappelant l'attachement à la paix et à la sécurité internationale, la lettre des participants à la réunion de solidarité du 16 août a dénoncé la résolution 2371 du Conseil de sécurité des Nations unies ainsi que les manœuvres militaires et les sanctions impulsées par les Etats-Unis qui aggravent les tensions et font courir le danger d'une nouvelle guerre dans la péninsule coréenne. Intervenant à la tribune lors de cette réunion de solidarité, le vice-président du Front uni national pour un Cambodge indépendant, neutre, pacifique et coopératif (FUNCINPEC) a apporté le plein soutien de son parti à la déclaration gouvernementale de la RPD de Corée du 7 août 2017 adoptée à la suite de la résolution 2371, et rappelé les liens étroits entre Coréens de la RPDC et Cambodgiens fondés sur les relations d'amitié entre le Président Kim Il-sung et le Prince Norodom Sihanouk. Parmi les autres invités de marque lors des cérémonies, la présence de l'ancien Premier ministre (communiste) népalais Madhav K. Nepal témoignait du soutien constant de la RPD de Corée aux mouvements de libération nationale et d'émancipation du Tiers-monde.

Retour de la délégation de l'AAFC de Corée du Nord : priorité à la construction du socialisme dans le respect de la souveraineté nationale
Retour de la délégation de l'AAFC de Corée du Nord : priorité à la construction du socialisme dans le respect de la souveraineté nationale
Réunion internationale au Palais de la culture de Pyongyang, le 15 août 2017 (photos : TV coréenne)

Réunion internationale au Palais de la culture de Pyongyang, le 15 août 2017 (photos : TV coréenne)

Le déplacement de la délégation de l'AAFC à la zone démilitarisée (DMZ), ainsi que la visite au Musée de la victoire dans la guerre de libération de la patrie (selon l'expression consacrée en Corée du Nord pour désigner la guerre de Corée), ont rendu compte du lien fondamental entre la constitution aujourd'hui par la RPD de Corée d'une force de dissuasion nucléaire autonome pour faire face aux Etats-Unis et les combats qui ont été menés hier contre le Japon impérial, qui a occupé la Corée de 1910 à 1945, puis les troupes des Nations unies sous commandement américain, de 1950 à 1953.

Déplacement dans la zone démilitarisée séparant les deux Corée, le 18 août 2017 (photo : AAFC)

Déplacement dans la zone démilitarisée séparant les deux Corée, le 18 août 2017 (photo : AAFC)

Zone démilitarisée, le 18 août 2017 (photo : AAFC)

Zone démilitarisée, le 18 août 2017 (photo : AAFC)

Plus que jamais, les autorités nord-coréennes poursuivent la ligne dite byeongjin de développement simultané d'une force de dissuasion nucléaire et de l'économie pour élever le niveau de vie de la population. En ouverture de la réunion internationale du 15 août, un film diffusé aux participants rappelait qu'en RPD de Corée, sur la base des idées du Juche (autonomie) créées par le Président Kim Il-sung et de la politique de Songun (priorité aux affaires militaires) suivie par le Dirigeant Kim Jong-il qui avait permis de préserver le système socialiste après la disparition de l'URSS et des démocraties populaires, le pays dirigé par le Maréchal Kim Jong-un mettait l'accent sur la construction du socialisme en Corée, la notion de socialisme à la coréenne revenant ainsi de manière récurrente dans les discours et les slogans. Symbole de cette orientation mettant l'accent sur le progrès technique, après le lancement réussi du satellite artificiel Kwangmyongsong-4 en février 2016, une maquette en grandeur réelle de la fusée Unha-3 figure au centre du nouveau complexe consacré aux sciences et aux techniques qui, sur un site de 106 600 m2 implanté sur l'île Suk à Pyongyang, est à la fois un lieu d'études et un outil de vulgarisation des connaissances.

Le Complexe des sciences et techniques de Pyongyang, le 16 août 2017 (photo : AAFC)

Le Complexe des sciences et techniques de Pyongyang, le 16 août 2017 (photo : AAFC)

Réplique en grandeur réelle de la fusée Unha-3 au Complexe des sciences et techniques de Pyongyang, le 16 août 2017 (photo : AAFC)

Réplique en grandeur réelle de la fusée Unha-3 au Complexe des sciences et techniques de Pyongyang, le 16 août 2017 (photo : AAFC)

 Au Complexe des sciences et techniques de Pyongyang, le 16 août 2017 (photo : AAFC)

Au Complexe des sciences et techniques de Pyongyang, le 16 août 2017 (photo : AAFC)

Les membres de la délégation de l'AAFC ont eu un entretien le 16 août avec le département des relations internationales du Parti du travail de Corée et rencontré le 17 août le président du praesidium de l'Assemblée populaire suprême Kim Yong Nam, lequel exerce les fonctions de chef de l'Etat, La délégation française a aussi profité de ce séjour pour faire progresser les coopérations concrètes entre la France et la RPD de Corée, notamment lors d'une rencontre avec les professeurs de l'Université d'architecture de Pyongyang auxquels ils ont remis de la documentation.

Rencontre entre Benoît Quennedey, président de l'AAFC, et Kim Yong-nam, président du praesidium de l'Assemblée populaire suprême, au Palais des congrès de Mansudae à Pyongyang, le 17 août 2017 (photo : TV coréenne)

Rencontre entre Benoît Quennedey, président de l'AAFC, et Kim Yong-nam, président du praesidium de l'Assemblée populaire suprême, au Palais des congrès de Mansudae à Pyongyang, le 17 août 2017 (photo : TV coréenne)

L'AAFC rendra compte ultérieurement de ce déplacement, auprès de ses adhérents et sympathisants et de toutes celles et tous ceux qui souhaitent disposer d'un témoignage direct différent des témoignages médiatiques à charge sur le pays le plus décrié au monde.

La rue Mirae à Pyongyang, le 18 août 2017 (photo : AAFC)

La rue Mirae à Pyongyang, le 18 août 2017 (photo : AAFC)

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20 août 2017 7 20 /08 /août /2017 22:31

En annonçant le 15 août 2017 qu'il renonçait - tout au moins pour l'instant - à procéder à des exercices de tir de missiles à proximité de l'île américaine de Guam, le Maréchal Kim Jong-un de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) a permis de faire baisser d'un cran les tensions autour de la péninsule, ce qui a été salué même par le président américain Donald Trump comme une décision "sage". De l'avis des experts occidentaux, les tensions avaient atteint leur point de paroxysme depuis 1994. Cette volonté de désescalade n'apparaît cependant pas nécessairement partagée par toutes les parties, puisque les exercices militaires annuels américano - sud-coréens Ulji Freedom Guardian, dénoncés par Pyongyang comme la préparation d'une invasion militaire, commencent comme prévu le 21 août 2017. Dans ce contexte, une délégation de l'AAFC était présente en RPD de Corée du 12 au 19 août - entraînant d'ailleurs la suspension de ses activités éditoriales, qui reprennent à compter de ce jour. En attendant la publication du compte rendu de ce déplacement, nous rendons compte de la sérénité qui prévalait alors en RPD de Corée.

Une famille à Pyongyang, le 16 août 2017

Une famille à Pyongyang, le 16 août 2017

Des Nord-Coréens vaquant à leurs occupations et profitant du 15 août, jour de la libération de l'occupation japonaise et qui est férié dans l'ensemble de la péninsule coréenne : l'atmosphère n'était pas celle d'une veillée d'armes à Pyongyang. Les mesures de sécurité n'étaient pas non plus particulièrement renforcées lors de notre visite de la DMZ, le 18 août - mais celle-ci intervenait, il est vrai, trois jours après les déclarations des autorités nord-coréennes affirmant attendre avant de procéder à d'éventuels exercices balistiques à proximité de Guam, siège d'une importante base militaire américaine dans le Pacifique.

Comment expliquer une telle différence de traitement médiatique avec l'Occident, où d'aucuns étaient prompts à voir la crise dégénérer en conflit ouvert très rapidement ? Car les exercices militaires américano - sud-coréennes sont tout aussi proches de la RPD de Corée que le serait de Guam un tir de missile nord-coréen. Si l'on considérait qu'il y avait une menace dans les deux cas, celle-ci serait alors équivalente tant pour la RPD de Corée que pour les Etats-Unis

Si les Nord-Coréens, toujours prêts à faire face à une attaque, affichaient le calme des vieilles troupes, la vérité est que la RPDC disposant à présent d'une dissuasion nucléaire complète (la miniaturisation des têtes nucléaires étant maîtrisée selon la plupart des experts occidentaux) se trouve au contraire plus en sécurité qu'auparavant, l'histoire récente faisant apparaître que jamais une puissance nucléaire n'attaque une autre puissance nucléaire. L'écart entre le traitement médiatique en Occident et en RPDC peut alors s'expliquer par le fait que, désormais, la Corée du Nord est en capacité de dissuader toute invasion étrangère - quand les Etats-Unis découvrent au contraire que leur territoire n'est plus sanctuarisé.

Les échanges qu'a eus la délégation de l'AAFC en RPDC, notamment avec le département des relations internationales du Parti du travail de Corée, confirment que les autorités nord-coréennes se préparent à toute éventualité - aujourd'hui comme hier et demain - tout en voulant préserver la paix et la stabilité. Il y a là la base d'un accord global. Mais les Etats-Unis et leurs alliés sauront-ils saisir cette opportunité, ou continueront-ils sur le chemin des sanctions et de l'escalade ? Dans l'immédiat, le maintien des exercices militaires Ulji Freedom Guardian n'apparaît pas comme le signal d'une volonté de reprendre le dialogue et de signer  - enfin - un traité de paix en lieu et place de l'accord d'armistice de 1953. Il est plus que temps de garantir la paix et la prospérité en Corée et en Asie du Nord-Est.

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