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29 avril 2016 5 29 /04 /avril /2016 16:31

Le procès de l'ancien chef des services de renseignement sud-coréens (National Intelligence Service, NIS) Won Sei-hoon, condamné suite à la manipulation de l'opinion publique organisée par ses services lors de l'élection présidentielle de décembre 2012, n'en finit pas d'apporter son lot de révélations. Lors de l'audition de Won Sei-hoon le 25 avril 2016, on a appris que des organisation conservatrices prétendument non-gouvernementales reçoivent - encore et toujours - leurs instructions du NIS, bénéficient de la publicité des médias conservateurs pro-gouvernementaux et touchent des fonds de l'argent public (ou des subsides des conglomérats financiers et industriels liés au pouvoir), toujours dans le même but de manipuler l'opinion publique : organisation de contre-manifestations, instrumentalisation des défecteurs nord-coréens pour appuyer la politique des conservateurs sud-coréens de changement de régime au Nord,  appui aux procès truqué contre les opposants, notamment pour l'interdiction du Parti progressiste unifié, que les autorités sud-coréennes ont justifiée comme reflétant le sentiment public général - en fait la volonté d'activistes d'extrême-droite à la solde des services de renseignement. C'est le propre d'un régime totalitaire d'être tout, en étant à la fois le pouvoir, les prétendus contre-pouvoirs et les organisations "civiques" (pro-gouvernementales). L'AAFC apporte des éclairages sur la mise en oeuvre de ce projet fasciste, dont le NIS constitue le bras armé, par Mme Park Geun-hye et son parti, le Saenuri.

Siège de l'Agence nationale de renseignement (NIS), coeur du pouvoir du régime autoritaire de Séoul.

Siège de l'Agence nationale de renseignement (NIS), coeur du pouvoir du régime autoritaire de Séoul.

Lors du procès Won Sei-hoon, les procureurs ont établi une implication directe du NIS dans la manipulation de l'opinion publique sud-coréenne via de pseudo-ONG conservatrices :

Un agent du nom de Park, qui faisait partie de l'équipe de guerre psychologique du NIS, a soutenu et supervisé les activités d'organisations conservatrices de droite et d'organisation de jeunesse orientées à droite.

Ces activités ont commencé en juin 2011, sous le mandat du prédécesseur de Mme Park, le Président (conservateur) Lee Myung-bak, en portant sur sept organisations. Elles consistaient notamment en le paiement de publicités dans les journaux et des prises de position soutenant les ultras du parti gouvernemental et, plus encore, critiquant (tous) les opposants - par exemple, la dénonciation des "bus de l'espoir", apparus pour soutenir la syndicaliste Kim Jin-suk - qui avait passé 309 jours en haut d'une grue pour protester contre les conditions de son licenciement par Hanjin Heavy Industries (HHI). Les organisations parapluie du NIS avaient aussi lancé une campagne pour l'interdiction du Parti démocratique du travail, à l'origine du Parti progressiste unifié dont les autorités sud-coréennes devaient finalement obtenir l'interdiction, en décembre 2014, à l'issue d'un procès truqué, fomenté par le NIS et soutenu par une campagne de diffusion orchestrée par ses organisations satellites.

Le 25 avril, les procureurs du procès de Won Sei-hoon ont aussi établi l'implication directe du NIS - par la formulation de conseils écrits (dont on a retrouvé les preuves par mél) dans la création d'organisations de jeunesse de droite :
 

Il est établi que l'Agence nationale de renseignement a proposé le slogan "Nous sommes la fière jeunesse de la République de Corée" quand une organisation de jeunesse de droite a été mise en place. Elle a aussi fourni les photos qu'une organisation de jeunesse de droite a présentées dans une exposition de photos patriotiques.

Naturellement, le NIS était aussi à la manoeuvre, toujours selon les juges, dans la médiatisation de ces mêmes organisations conservatrices par des médias acquis au pouvoir :

L'examen du travail effectué par le NIS a montré que le NIS était impliqué à la fois de manière générale et précisément dans le soutien et la supervision des groupes conservateurs de droite, en ce qui concerne non seulement leurs activités (qu'elles soient ou non sur Internet) mais aussi l'utilisation des médias conservateurs pour fabriquer l'opinion publique.

Dans ce contexte, on ne sera pas surpris d'apprendre que la très médiatique Fédération coréenne des parents (Korea Parent Federation, KPF), qui a le statut de fondation (bien pratique pour les affaires), reçoit à la fois des subventions publiques et des fonds des magnats de l'industrie, via des circuits complexes de financement qu'on croirait issus des conseils d'un manuel à l'usage de ceux qui pratiquent au quotidien le blanchiment d'argent.

La KPF joue un rôle indispensable pour le pouvoir autoritaire à Séoul. On la retrouve, par exemple, derrière des événements avec les "jeunes défecteurs nord-coréens" - alors que la manipulation de l'opinion publique, non seulement sud-coréenne mais occidentale, à partir des récits fabriqués de quelques défecteurs nord-coréens (de préférence jeunes et à la plastique parfaite, c'est mieux pour les photos) est un des sports favoris du NIS et de ses sbires.

La droite sud-coréenne et son bras armé, le NIS, se considèrent en guerre - en guerre contre la Corée du Nord, la subversion gauchiste (politique et syndicale) et l'opposition, tous amalgamés pour les besoins de la propagande. Cest une guerre menée au profit d'intérêts privés (ceux des conservateurs au pouvoir et, au-delà, de conglomérats financiers enrichis par la collaboration avec l'occupant japonais, puis avec la junte militaire naguère au pouvoir à Séoul). C'est une guerre qui détourne l'argent public, soit par l'octroi de subventions à de pseudo-ONG, soit par l'utilisation illégale de fonctionnaires (comme ceux du NIS), le financement provenant bien sûr in fine de la poche du contribuable sud-coréen. Enfin, à côté des fonctionnaires (dotés d'un statut légal), il y a la myriade d'organisations conservatrices, qui ne sont donc pas des combattants de l'armée régulière dans la guerre contre le Nord, la gauche et l'opposition démocrate. Leur statut et leurs fonctions portent un nom précis dans le vocabulaire militaire : ce sont des mercenaires, qui ne connaissent ni les fins de mois difficiles, ni la peur du chômage. Et quand le vent tournera, ils sauront vendre leurs services ailleurs, dans l'appareil gouvernemental, les médias de droite, certaines églises protestantes ou, plus certainement, parmi les cadres des conglomérats financiers.

Sources :

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