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26 mai 2023 5 26 /05 /mai /2023 15:14

Fondé en 1957, le mouvement Pugwash rassemble des personnalités universitaires et politiques pour réduire les dangers de conflits armés - notamment de conflits nucléaires, ce qui a valu à l'organisation internationale d'obtenir le Prix Nobel de la Paix en 1995 pour son action en faveur du désarmement nucléaire. En étant animé par des personnalités venant à la fois de l'Ouest de de l'Est, Pugwash a acquis une réputation d'impartialité qui lui a permis d'intervenir efficacement lors de plusieurs épisodes de tension liés aux armes nucléaires. En particulier, Pugwash a joué un rôle de médiation dans la péninsule coréenne, ainsi que l'a souligné Venance Journé dans un article intitulé "Pugwash ou la diplomatie scientifique contre les armes nucléaires", publié dans le numéro 225 (avril 2023, p. 69-79) de la revue Raison présente de l'Union rationaliste, et que nous avons analysé ci-après.

Le physicien polonais Józef Rotblat, spécialiste de physique nucléaire, qui a cofondé Pugwash

Le physicien polonais Józef Rotblat, spécialiste de physique nucléaire, qui a cofondé Pugwash

Lors de la première crise nucléaire nord-coréenne, lors de laquelle les Etats-Unis envisagèrent une option militaire contre les installations nucléaires nord-coréennes, Józef Rotblat joua un rôle pour l'engagement des discussions : en effet, il écrivit personnellement à Kim Il-sung pour exhorter le président nord-coréen à ce que son pays ne quitte pas le Traité de non-prolifération (TNP). Les échanges entre Washington et Pyongyang  aboutirent à l'accord-cadre de Genève en 1994 : en contrepartie de la fourniture par les Etats-Unis de deux réacteurs à eau légère et d'une normalisation des relations diplomatiques avec la République populaire démocratique de Corée, cette dernière resta membre du TNP.

L'annulation de l'accord par les Etats-Unis en 2002 - après que le Président George W. Bush eut classé la Corée du Nord parmi les pays de "l'Axe du mal" - conduisit toutefois la RPD de Corée à quitter le TNP en janvier 2003 et à mener six essais nucléaires (de bombes A et H) entre 2006 et 2017. Dans ce contexte, plusieurs délégations de Pugwash furent invitées en Corée du Nord et l'organisation internationale s'est affirmée comme un canal de dialogue, notamment entre les deux Etats coréens, ainsi que l'a souligné Venance Journé dans l'article de Raison présente précité :

Depuis 2001, de nombreuses délégations Pugwash se sont rendues en Corée du Nord et ont maintenu des contacts à haut niveau. Les Nord-Coréens participent aux conférences annuelles depuis les années 1990 et ont établi un groupe national. Le Conseil organise régulièrement des conférences sur le développement énergétique et économique, la coopération en matière de sécurité en Asie du Nord-Est et du Sud-Est, la sécurité alimentaire ou la médecine, qui se tiennent en Chine, au Vietnam ou en Mongolie, leur objectif principal étant de réunir des experts des deux pays de la péninsule pour résoudre des problèmes communs et établir la confiance entre les deux Corées. Pugwash a aussi favorisé la création du Centre international de Pyongyang sur la nouvelle économie et la technologie en 2003.

Lors de la crise internationale de 2017 autour de la Corée, Pugwash fut sollicité par la Corée du Sud et la Corée du Nord pour jouer un rôle de médiateur. En particulier, le président sud-coréen Moon Jae-in demanda à Pugwash, en décembre 2017, de convaincre les Nord-Coréens de participer aux Jeux olympiques de Pyeongchang - et, de fait, la Corée est apparue former une seule nation lors de cette trêve olympique.  S'était ainsi enclenché un mouvement de rapprochement et de rencontres diplomatique entre la Corée du Nord, la Corée du Sud et les Etats-Unis.

Venance Journé conclut que Pugwash n'a certes pas empêché le développement d'armes nucléaires en Corée du Nord, mais qu'elle a permis d'abaisser les tensions et a su s'affirmer à Pyongyang comme un interlocuteur respecté car neutre : 

Bien que Pugwash n'ait pu empêcher le programme nucléaire militaire nord-coréen, son action a été décisive en 1994 puis a contribuer à retarder de dix années la mise au point des armes. Pugwash est considéré en Corée du Nord avec respect et comme une organisation neutre. Ses possibilités sont bien entendu contraintes par les changements politiques dans les pays concernés, quand les nouveaux dirigeants sont moins enclins à la négociation. Cependant, dans une situation aussi tendue, délicate, changeante et où l'incompréhension prévaut, le maintien de contacts confidentiels réguliers a sans doute permis d'éviter des développements militaires beaucoup plus dangereux de part et d'autre.

Source : 

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27 avril 2023 4 27 /04 /avril /2023 21:25

Dans le cadre de la visite du président de la République de Corée (Corée du Sud) Yoon Seok-yeol aux Etats-Unis, le président sud-coréen et son homologue américain Joe Biden ont signé le 26 avril 2023 une déclaration, la déclaration de Washington, qui renforce l'alliance entre les deux pays - notamment dans le domaine nucléaire. Si les deux chefs d'Etat entendent ainsi répondre aux menaces nord-coréennes, c'est de fait à une escalade des tensions que tend la déclaration de Washington, sans d'ailleurs satisfaire les préoccupations sécuritaires d'une majorité de Sud-Coréens favorables à ce que leur pays se dote de l'arme nucléaire. 

 

La déclaration de Washington, un texte qui attise les tensions

Le point le plus saillant de la déclaration bilatérale américano-sud-coréenne est que "des sous-marins américains à armement nucléaire accosteront pour la première fois en Corée du Sud depuis plus de quarante ans", comme l'a indiqué CNBC. Ainsi placée sous le "parapluie nucléaire" américain, la République de Corée doit continuer à s'abstenir de développer un programme nucléaire militaire autonome, en réaffirmant son engagement en ce sens au sein du Traité de non-prolifération nucléaire (TNP) - alors que le refus de voir d'autres Etats que ceux possessionnés se doter de l'arme nucléaire constitue l'une des constantes de la diplomatie américaine, d'autant plus qu'une telle évolution justifierait a contrario le programme nucléaire militaire nord-coréen.  

Un sondage indique pourtant que 64 % des Sud-Coréens sont favorables à ce que la République de Corée se dote de l'arme nucléaire, ce qui témoigne d'une volonté de disposer de moyens de dissuasion nucléaire autonomes de ceux des Etats-Unis. 

La déclaration de Washington envisage également de renforcer l'entraînement commun des troupes sud-coréennes et américaines - mais c'est déjà à ce quoi tendent des exercices militaires conjoints de plus en plus fréquents et de plus en plus longs. Enfin, un groupe de consultation nucléaire doit être constitué entre Washington et Séoul pour élaborer une planification stratégique nucléaire dans l'hypothèse d'une attaque nord-coréenne.

La Chine a vivement réagi à ces annonces, en exhortant à ne pas "provoquer une confrontation" avec la République populaire démocratique de Corée. Selon la porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères,

Toutes les parties doivent faire face au nœud du problème de la péninsule [coréenne] et jouer un rôle constructif dans la promotion d'un règlement pacifique de la question. [Il ne faut pas] attiser délibérément les tensions, provoquer la confrontation et brandir des menaces.

Ces déclarations resituent, une nouvelle fois, la montée des tensions en Asie du Nord-Est dans le cadre d'une confrontation plus globale entre les Etats-Unis et leurs alliés, d'une part, la Chine et ses alliés, d'autre part. 

Sources : 

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23 avril 2023 7 23 /04 /avril /2023 13:59

Si la situation en Ukraine concentre les regards de l'opinion publique occidentale, celle en Asie du Nord-Est connaît de nouveaux développements potentiellement porteurs de risque de conflit - que l'AAFC appelle à prévenir par la voie du dialogue, afin d'éviter une course aux armements. Des déclarations récentes du président sud-coréen ont par ailleurs associé les questions de Taïwan et de la Corée, créant d'importantes tensions entre Séoul et Pékin. 

Kim Jong-un visitant l'agence spatiale nord-coréenne NADA, le 18 avril 2023

Kim Jong-un visitant l'agence spatiale nord-coréenne NADA, le 18 avril 2023

En annonçant avoir réussi le lancement d'un missile balistique Hwasong-18 à combustible solide (en l'occurrence, du propergol), le 14 avril 2023, la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) dispose d'un certain avantage stratégique, puisqu'un missile à combustible solide est plus simple à déployer et offre davantage de liberté quant au délai de lancement qu'un missile à combustible liquide, lequel doit être tiré en un laps de temps plus court.

L'agence de presse nord-coréenne KCNA a réitéré la position classique de Pyongyang, selon laquelle cette composante de la force de dissuasion nucléaire de la RPD de Corée visait à prévenir un conflit nucléaire :

La dissuasion nucléaire militaire de la RPDC se développe rapidement (...) pour accroître de manière continue la puissance de la force stratégique de la RPDC et qu'elle devienne une entité dotée d'une superpuissance et d'une force absolue, une grande force capable de prévenir l'holocauste nucléaire et toutes sortes de potentielles et dangereuses invasions ennemies, ainsi qu'un glaive puissant pour défendre la justice et la paix.

Par ailleurs, après l'essai concluant d'un prototype en décembre 2022, le lancement d'un satellite de reconnaissance a été un objectif réaffirmé par le Président Kim Jong-un lors d'une visite de l'agence spatiale nord-coréenne NADA, qui célébrait ses dix ans, ce 18 avril 2023. Cette perspective a été accueillie fraîchement à Tokyo : le 22 avril, le Japon a annoncé avoir mis son armée en état d'alerte pour abattre un potentiel missile balistique nord-coréen qui mettrait en orbite un satellite d'observation. 

La veille, le 21 avril, la Corée du Nord avait rejeté l'appel des pays du G7 l'appelant à "s'abstenir" de tout nouvel essai nucléaire ou tir de missile balistique intercontinental (prohibé par les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies, CSNU).  Pyongyang a fustigé ce qu'elle considère comme relevant de sa politique intérieure.

De fait, la nouvelle partition bipolaire, entre les Etats-Unis et les Occidentaux d'une part (ainsi que le Japon et la Corée du Sud), la Chine et la Russie d'autre part, rend peu probable l'adoption de nouvelles sanctions par le CSNU en cas d'essai nucléaire ou de tir d'un missile ICBM par la RPD de Corée.

Dans ce contexte, les déclarations du président sud-coréen Yoon Seok-yeol, selon lesquelles les prétentions chinoises sur Taïwan présentent des similarités avec la situation dans la péninsule coréenne, ont lié les deux thèmes et entraîné une dégradation des relations bilatérales avec Pékin : après une protestation de la Chine, la République de Corée a convoqué l'ambassadeur chinois. Puis Pékin a annoncé avoir déposé plainte contre Séoul, à la veille d'une rencontre entre les présidents américain et sud-coréen prévue du 24 au 26 avril 2023. 

Sources : 

- Ouest France

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3 avril 2023 1 03 /04 /avril /2023 22:23

Sans même attendre la fin des exercices Freedom Shield le 23 mars 2023, les manoeuvres maritimes Ssangyong ont débuté le 20 mars pour se terminer le 3 avril, témoignant de la volonté des Etats-Unis et de leurs alliés sud-coréens de maintenir un état de tension permanent autour de la péninsule coréenne. Pis, les exercices de guerre en mer ont été étendus au Japon - qui a rejoint les forces combinées américano-sud-coréennes pendant deux jours. Ces initiatives sont d'autant plus inquiétantes qu'elles pourraient conduire la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) à mettre fin au moratoire sur les essais nucléaires qu'elle observe depuis septembre 2017. 

Le porte-avions américain à propulsion nucléaire USS-Nimitz, au départ de la base de Pusan, le 2 avril 2023

Le porte-avions américain à propulsion nucléaire USS-Nimitz, au départ de la base de Pusan, le 2 avril 2023

Occultée par l'actualité de la guerre en Ukraine, la montée des tensions en Extrême-Orient présente pourtant de dangereuses similitudes avec l'escalade militaire qui avait été observée à l'est de l'Europe avant l'offensive russe de février 2022. Les premiers exercices militaires conjoints menés depuis six mois entre les Etats-Unis, la République de Corée (Corée du Sud) et le Japon en constituent l'une des manifestations les plus dangereuses - sur fond de remilitarisation du Japon. Ces manoeuvres, menées notamment au large de l'île de Jeju, impliquent le porte-avions américain polyvalent à propulsion nucléaire USS Nimitz et des contre-torpilleurs sud-coréens, américains et japonais.

Pour sa part, la Corée du Nord affirme avoir récemment testé un drone sous-marin à capacité nucléaire et a réagi vivement à ces nouveaux exercices, en dénonçant une "hystérie de guerre" et des préparatifs de "guerre totale". Le 1er avril, le site spécialisé 38 North a rendu publiques des images satellitaires montrant une forte activité autour de la centrale nucléaire de Yongbyon, augmentant la probabilité d'un nouvel essai nucléaire en représailles. Par ailleurs, le ministère de la défense sud-coréen estime que Pyongyang a accompli d'importants progrès dans la miniaturisation de têtes nucléaires qui seraient placées sur des missiles de courte portée. Il s'agit d'une des limites identifiées du programme nucléaire et balistique nord-coréen - avec la rentrée des missiles dans l'atmosphère.

Face aux menaces de conflit, l'Association d'amitié franco-coréenne continuera de combattre pour la paix - pour que plus jamais le fracas des armes n'endeuille les hommes, les femmes et les enfants de la Corée - de toute la Corée. 

Sources : 

Military Times ;

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29 mars 2023 3 29 /03 /mars /2023 13:05

Alors que les tensions se poursuivent en Corée, des pacifistes coréens et des militants de l'Association d'amitié franco-coréenne ont déployé des banderoles et des drapeaux et distribué des tracts en marge de la manifestation contre la réforme des retraites qui s'est tenue à Paris le mardi 28 mars 2023. Le très bon accueil des manifestants, qui s'est traduit par des demandes de contact avec l'AAFC, traduit que la montée des tensions militaires, partout dans le monde, est indissociable des luttes sociales - les restrictions liées à la guerre pesant directement sur la situation économique et sociale des ménages. 

Corée : refuser les exercices de guerre, revenir aux négociations

Alors que les manoeuvres militaires américano-sud-coréennes sont devenues le plus grand exercice de guerre au monde en temps de paix, l'AAFC continue à porter haut le flambeau du combat pour la paix en Corée, le retour au dialogue et aux négociations pour stopper la marche à la guerre. 

La nouvelle initiative du 28 mars 2023 est intervenue alors que les Etats-Unis et la Corée du Sud viennent de relancer les exercices de débarquement amphibie Ssangyong (double dragon) pour la première fois en cinq ans. Pour leur part, les Nord-Coréens ont testé un nouvel missile intercontinental de type Hwasong-17 le 16 mars 2023. 

Dans ce contexte lourd de menaces de guerre en Asie et dans le monde, l'AAFC reste à l'avant-garde du combat pour la paix. 

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15 mars 2023 3 15 /03 /mars /2023 20:58

Le samedi 11 mars 2023, à l’initiative de l’association URI Korea, s’est tenu place du Trocadéro un rassemblement pour la paix et l’arrêt définitif des manœuvres militaires conjointes des forces armées américaine et sud-coréenne se déroulant du 13 au 23 mars. À cette occasion, l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) a réaffirmé son engagement pour le dialogue, la réunification pacifique de la Corée, ainsi que pour la levée des sanctions qui frappent les populations nord-coréennes.

Manifestation parisienne contre la reprise des exercices militaires américano-sud-coréens

Le rassemblement fut ponctué de prises de parole en coréen tout comme en français.

Madame Kim, présidente de URI Korea a ouvert le tour de paroles par un discours empreint d'émotion contre le bellicisme du gouvernement de Séoul et de ses alliés américains, rappelant l’ampleur inégalée depuis 2017 de ces manœuvres, ainsi que la menace diffuse que font peser les médias atlantistes sur l’âme des Coréens.

« Nous avons constaté que les Nord-Coréens n’arrêteront jamais le développement de leurs armes nucléaires ou d’armes encore plus puissantes parce qu’ils savent que quand on est faible, on est anéanti. […] L’intention des manœuvres américano-sud-coréennes est de détruire la Corée du Nord et d’affamer les Nord-Coréens en empêchant leur production d’atteindre le niveau nécessaire à l’autosuffisance. »

Au nom du Mouvement de la Paix, Gérard Halie a rappelé l’exigence du retrait de toute force militaire étrangère de la péninsule coréenne. Il a aussi exprimé le regret du manque de prise de responsabilité de l’État français, lequel, selon lui, devrait activement œuvrer pour le dialogue entre les deux États coréens.

« Nous devons laisser le peuple coréen, qu’il soit en République de Corée ou en République populaire démocratique de Corée, décider librement de son avenir. »

De jeunes Coréens présents ont souligné le caractère autoritaire et militariste du gouvernement sud-coréen actuel, lequel réprime les opposants au régime ou les syndicalistes en lutte en Corée du Sud.

Hugo de Sousa, du comité « Jeunes et étudiants » de l’AAFC, enfin, a pris la parole pour insister sur le rôle déterminant de la jeunesse dans le combat pour la paix en Corée face aux années de luttes qui s’annoncent.

Le rassemblement s’est ensuite déplacé, longeant le jardin de la Tour Eiffel jusqu’au bassin du Champ de Mars. Les manifestants ont alors réitéré leur détermination à faire advenir un climat de paix durable dans la péninsule coréenne, enjeu vital pour la paix du monde.

Photos Dominique de Miscault

Manifestation parisienne contre la reprise des exercices militaires américano-sud-coréens
Manifestation parisienne contre la reprise des exercices militaires américano-sud-coréens
Manifestation parisienne contre la reprise des exercices militaires américano-sud-coréens
Manifestation parisienne contre la reprise des exercices militaires américano-sud-coréens
Manifestation parisienne contre la reprise des exercices militaires américano-sud-coréens
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6 mars 2023 1 06 /03 /mars /2023 11:13

Lors d'une conférence de presse qui s'est tenue le 6 mars 2023, Park Jin, ministre des Affaires étrangères de la République de Corée (Corée du Sud), a annoncé la création prochaine d'une fondation pour indemniser des Coréens victimes de travail forcé pendant l'occupation japonaise de la péninsule (1910-1945). Même si des discussions avaient éte engagées sur le sujet entre les deux parties, cette décision manifestement unilatérale, prise sans contrepartie immédiate du Japon, a été vivement saluée à Tokyo - mais a déjà engendré des critiques parmi des victimes, alors que les stigmates de la colonisation japonaise restent un sujet très sensible dans l'opinion publique coréenne.

Le ministre des Affaires étrangères Park Jin peut avoir le sourire : partisan résolu d'un front renforcé Washington-Tokyo-Séoul contre la Corée du Nord, il a satisfait les deux alliés de la République de Corée au-delà de leurs espérances en annonçant la création d'un fonds d'indemnisation des Coréens victimes du travail forcé pendant la colonisation japonaise

Le ministre des Affaires étrangères Park Jin peut avoir le sourire : partisan résolu d'un front renforcé Washington-Tokyo-Séoul contre la Corée du Nord, il a satisfait les deux alliés de la République de Corée au-delà de leurs espérances en annonçant la création d'un fonds d'indemnisation des Coréens victimes du travail forcé pendant la colonisation japonaise

Alors que des décisions de justice de tribunaux sud-coréens, en 2018, avaient prévu l'indemnisation de victimes coréennes de travail forcé pendant la colonisation japonaise, la question du versement des compensations était devenue un point de désaccord majeur entre Tokyo et Séoul. En effet, pour le Japon, l'accord de 1965 établissant les relations diplomatiques avec la République de Corée a réglé les contentieux historiques - dont l'indemnisation des travailleurs forcés - et ce n'est pas aux entreprises japonaises ni au gouvernement japonais de procéder à des versements décidés par la justice sud-coréenne. Finalement, selon l'annonce faite par le ministre Park Jin ce lundi 6 mars 2023, c'est une tierce partie - aux acteurs japonais et au gouvernement sud-coréen - qui procèdera à l'indemnisation : une fondation spécifiquement mise en place, dont les modalités de mise en place restent à établir.

Plus que les montants en jeu (si 780 000 Coréens ont été victimes de travail forcé, les décisions de justice ne concernent que quelques dizaines de personnes), la symbolique est forte, au moment où les tensions dans la péninsule coréenne imposent, selon Tokyo et Washington, de régler les différends entre alliés pour opposer un front commun face à Pyongyang.

Park Jin a d'ailleurs reconnu que tel était le sens de son annonce : 

La coopération entre la Corée et le Japon est très importante dans tous les domaines de la diplomatie, de l’économie et de la sécurité, dans le contexte actuel de grave situation internationale et de difficile crise mondiale (...) Je crois que le cercle vicieux doit être brisé pour le bien [des] peuples au niveau de l’intérêt national, plutôt que de laisser [nos] relations [ainsi] distendues pendant longtemps.

Séoul espère des excuses du Japon, ainsi qu'une contribution des entreprises nippones. Mais le gouvernement nationaliste japonais estime s'être déjà suffisamment excusé. La Corée du Sud a manifestement cédé sans contrepartie à une demande pressante du Japon - et des milieux d'affaires des deux pays - ainsi que des Etats-Unis, soucieux que les contentieux nippo-sud-coréens soient réglés face à la Corée du Nord et à la Chine. 

La décision prise risque d'être d'autant plus mal acceptée dans l'opinion publique sud-coréenne que le Japon accélère sa remilitarisation, en ayant décidé de porter de 1 % à 2 % la part de son PIB consacrée aux dépenses militaires. Si la création d'une fondation permet à quelques-unes des victimes, toutes très âgées, d'espérer une indemnisation, était-il pertinent de céder aussi facilement à un gouvernement japonais animé de sentiments fortement nationalistes et tenté par le révisionnisme historique ? L'escalade des tensions, qui accroît les risques de guerre, est aussi encouragée par des décisions telles que celle du gouvernement du Président Yoon Seok-yeol, défenseur du resserrement des liens avec le Japon - quoi qu'il en coûte.

Sources :  

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21 février 2023 2 21 /02 /février /2023 22:53

Ayant participé à une conférence sur la blockchain en République populaire démocratique de Corée (Corée du Nord), le Britannique Christopher Emms est lourdement menacé par le FBI. Bien qu'il se soit réfugié en Russie, la nouvelle s'est répandue qu'il aurait été arrêté à son hôtel et placé en détention le mardi 21 février 2023, pour être interrogé par le bureau de Moscou d'Interpol. Mais l'intéressé a démenti lui-même ces rumeurs. Christopher Emms est soumis à un procès politique et doit pleinement bénéficier des garanties offertes aux personnes qui ont fui leur pays et craignent avec raison d'être persécutées en raison de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un groupe social ou (dans le cas d'espèce) de leurs opinions politiques. A ce titre, Christopher Emms a confirmé qu'il avait engagé la procédure requise pour obtenir l'asile politique en Russie.

PS : article mis à jour le 23 février 2023, à la suite du démenti apporté par Christopher Emms lui-même sur sa détention

URGENT : Christopher Emms nie avoir été placé en détention en Russie et menacé d'extradition

La nouvelle selon laquelle Chistopher Emms aurait été arrêté, à la suite d'une notice rouge d'Interpol, l'aurait exposé à un sort comparable à celui de Virgil Griffith - alors même que, en tant que citoyen britannique, il ne devrait en aucun cas être soumis à la compétence territoriale des tribunaux américains. 

Faut-il également le rappeler, les présomptions d'une violation des sanctions contre la Corée du Nord au regard de sa participation (ancienne) à une conférence à Pyongyang ne reposent sur rien de solide. Comme l'a rappelé Radha Stirling, fondateur de l'ONG Due Process International qui aide à défendre les droits humains face aux gouvernements :

Précisément parce qu'il n'a rien fait de mal : il n'a fourni aucune information à la Corée du Nord qui n'apparaisse déjà clairement sur la première page de Google.

Le démenti de la rumeur de l'arrestation de Christopher Emms ne permet toutefois pas d'identifier la source de la désinformation, manifestement d'origine occidentale.

Source : 

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19 février 2023 7 19 /02 /février /2023 23:33

Le 18 février 2023, la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) a entendu réagir aux prochaines manoeuvres américano - sud-coréennes Freedom Shield, prévues en mars, en procédant au lancement d'un missile balistique intercontinental (ICBM) Hwasong-15 - suivant un modèle testé pour la première fois en 2017. Le précédent lancement d'un missile ICBM par la RPD de Corée datait du 18 novembre 2022

Exercices militaires américano-sud-coréens : la Corée du Nord réagit en lançant un ICBM

Selon l'agence nord-coréenne KCNA, il s'agit d'un exercice - et non d'un essai - mené "sans préavis" pour que la RPD de Corée se tienne prête à "mener un combat en urgence". Effectué sur l'ordre de Kim Jong-un, président de la Commission militaire centrale, le missile, lancé à 17h22, a atteint une altitude maximale de 5 768,5 kilomètres et a parcouru 989 kilomètres. Toujours selon la RPD de Corée, il s'agit de pouvoir faire face à une contre-attaque et de garantir l'effectivité de la dissuasion nucléaire - alors que la dégradation de la situation sécuritaire et la montée des tensions ont été attribuées aux Etats-Unis et à la République de Corée (Corée du Sud) par Kim Yo-jong, membre de la commission des Affaires d'Etat, directrice adjointe du département de la propagande et de l'agitation.

Washington et Séoul - à l'instar de l'ensemble des membres du G7 et de l'Union européenne ont, pour leur part, dénoncé une nouvelle "provocation" de Pyongyang, violant les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies. Sans attendre les manoeuvres militaires prévues début mars, les Etats-Unis et la République de Corée ont réagi en procédant, dès le dimanche 19 février, à des exercices aériens conjoints impliquant des chasseurs sud-coréens F-35A, un bombardier stratégique américain B-1B et des chasseurs américains F-22 et F-35B. 

Si la Chine et la Russie n'avaient pas immédiatement réagi, ces deux pays ont refusé par le passé un alourdissement des sanctions contre la RPD de Corée, pointant les responsabilités selon eux des Etats-Unis.

L'Association d'amitié franco-coréenne réaffirme sa conviction que le retour au dialogue constitue la meilleure garantie d'une désescalade alors que la situation actuelle est porteuse de risques de conflit dans la péninsule coréenne, dans un contexte sécuritaire international dégradé qui rend la situation dangereusement volatile.

Sources : 

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1 janvier 2023 7 01 /01 /janvier /2023 16:32

Du 26 au 31 décembre 2022, le huitième Comité central du Parti du travail de Corée (PTC) a tenu sa sixième réunion plénière élargie. Dans une dépêche du 1er janvier 2023, l'agence officielle nord-coréenne KCNA a rendu compte en détail des travaux ainsi menés qui soulignent les priorités données au développement de l'économie et à l'autodéfense pour, selon une formule de l'agence KCNA, "conduire le socialisme à la coréenne vers de nouveaux changements et développements", dans un contexte de montée des tensions dans la péninsule coréenne faisant courir le risque d'un nouveau conflit dévastateur. 

"Conduire le socialisme à la coréenne vers de nouveaux changements et développements"

A l'instar d'autres dirigeants dans le monde, Kim Jong-un, président de la Commission des affaires d'Etat de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) et secrétaire général du Parti du travail de Corée (PTC), avait choisi par le passé de s'adresser à la nation dans un discours de Nouvel An pour faire le bilan de l'année passée et tracer les priorités de l'année à venir. Mais la RPDC a choisi, fin 2022, de réunir la plus haute instance plénière du PTC (après le Congrès) pour débattre et adopter des orientations pour 2023 - traduisant ainsi une volonté, constante depuis l'accession au pouvoir du Président Kim Jong-un en 2011, de mettre en avant le rôle moteur du Parti.

"Conduire le socialisme à la coréenne vers de nouveaux changements et développements"

Sur le premier point à l'ordre du jour de la réunion (les politiques menées en 2022 et le plan de travail pour 2023), le rapport présenté par le secrétaire général Kim Jong-un a tout d'abord mis l'accent sur le "développement des capacités de défense", face aux forces ennemies identifiées comme l'impérialisme américain. Avant de revenir plus en détail sur la situation internationale et la politique nationale de défense, le rapport a toutefois développé le bilan économique et social de l'année 2022 - témoignant de la priorité toujours accordée au développement du pays. Ont ainsi été cités, dans le domaine de la construction, l'achèvement de l'aménagement des zones de Hwasong et Ryonpho, projets majeurs pour "l'amélioration du niveau de vie de la population", et la construction de logements modèles dans les zones rurales. Pour l'avenir, dans la poursuite de la réalisation des objectifs du plan quinquennal, le développement de la production en 2023 doit viser à atteindre l'autosuffisance, tout en appelant à combattre une approche étroitement techniciste et scientiste ("la croyance mystique dans la technologie") qui consiste notamment à dépendre des technologies d'autres puissances. Plus précisément, ont été affirmés les objectifs de construire 10 000 logements dans la deuxième phase d'aménagement à Hwasong et 50 000 logements à Pyongyang. L'agriculture a été présentée comme un secteur économique prioritaire. 

"Conduire le socialisme à la coréenne vers de nouveaux changements et développements"

En politique étrangère, le renforcement des capacités de dissuasion nucléaire a été justifié par la pression militaire exercée par les Etats-Unis et leurs alliés : 

En 2022, les États-Unis ont fréquemment déployé divers moyens de frappe nucléaire en Corée du Sud dans un déploiement constant, augmentant au maximum le niveau de pression militaire sur la RPDC. Et, en même temps, ils ont fait avancer la réalisation d'une coopération triangulaire avec le Japon et la Corée du Sud à grande échelle tout en travaillant dur pour établir un nouveau bloc militaire comme la version asiatique de l'OTAN sous le signe d'une "alliance renforcée".

Dans ce contexte, la Corée du Sud n'est pas menacée elle-même (le discours évoque le "prétexte de faire face à toute "menace" ", les guillemets étant employés dans la dépêche de KCNA) et ce sont bien les Etats-Unis qui sont présentés comme l'ennemi de la RPDC - et pas la Corée du Sud.  Mais il est reproché aux autorités sud-coréennes de s'inscrire dans une logique d'escalade militaire et de confrontation.

Toujours selon le rapport, le développement de la puissance militaire de la RPDC a comme objectif de "prévenir la paix et de sauvegarder la paix et la stabilité" - tout en précisant que, en cas d'échec, "la force nucléaire permettra de réaliser sa seconde mission, qui ne sera pas pour la défense". Implicitement, c'est l'idée de contre-attaque préventive qui est suggérée - mais sans être formulée ouvertement, contrairement à certaines doctrines militaires avancées par d'autres puissances, au premier rang desquelles les Etats-Unis, en particulier lors de la "guerre préventive" contre l'Irak en 2003

Dans une logique restant toutefois fondamentalement celle de la dissuasion nucléaire, le système de défense antimissile nord-coréens doit disposer de missiles balistiques intercontinentaux (ICBM) permettant une "contre-attaque nucléaire rapide". Mi-décembre, KCNA avait rendu compte d'un essai souterrain pour que la RPDC dispose d'un moteur de missile balistique à combustible solide. On retrouve ici l'idée,  développée notamment dans la doctrine française de la dissuasion nucléaire, qu'une frappe en second doit prévenir une attaque en premier, dans la logique de dissuasion du faible au fort. En outre, le rapport adopté lors de la réunion du PTC préconise d'augmenter la production de forces nucléaires tactiques et le lancement, dès que possible en 2023, du premier satellite militaire de reconnaissance. 

Sans faire explicitement allusion à la guerre en Ukraine ou d'autres conflits dans le monde, le PTC observe que la structure des relations internationales a évolué vers un système de "nouvelle Guerre froide", impliquant de placer au premier rang la défense de la souveraineté nationale dans la "consolidation" du socialisme à la coréenne.

Les objectifs ainsi définis devront être mis en oeuvre dans les sections du PTC, en particulier lors de réunions de travail de deux jours et de réunions consultatives.

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