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7 avril 2022 4 07 /04 /avril /2022 11:11

A l'occasion de l'élection présidentielle française, dont le premier tour est le 10 avril 2022, l'Association d'amitié franco-coréenne a interrogé les candidats. A ce jour, seule Nathalie Arthaud, candidate de Lutte ouvrière, a répondu, alors que quatre candidats à l'élection présidentielle avaient répondu à l'AAFC en 2017 (Nathalie ArthaudNicolas Dupont-AignanJean Lassalle et Philippe Poutou). Il est vrai que l'intérêt pour les questions internationales, traditionnel parent pauvre des campagnes présidentielles en France, se porte actuellement majoritairement, si ce n'est quasi-exclusivement, vers le conflit en Ukraine. Au moins, les positions des candidats sur le dossier ukrainien permettent de savoir qui sont ceux privilégiant une politique de sanctions à l'égard de la Russie, même au prix d'un impact sur l'économie française infiniment plus fort que les conséquences des sanctions prises contre la République populaire démocratique de Corée.

"Réponse de Nathalie Arthaud à l'Association d'amitié franco-coréenne

Je dois tout d'abord vous préciser qu'en tant que communiste internationaliste. Je suis opposée à toutes les frontières et à toutes les divisions entre les peuples et bien sûr à fortiori au sein d'un même peuple. C'est pourquoi je suis fondamentalement et totalement favorable à la paix et a la réunification des deux Corées. Et comme je suis par ailleurs pour le droit des peuples à disposer deux mêmes, je pense que c'est aux deux parties de s'entendre pour trouver une solution. Je ne vous cacherais pas que je reste très pessimiste dans la mesure où cette division découle de la lutte que mène l'impérialisme américain dans sa domination mondiale.

Je comprends votre souci d'obtenir du gouvernement français qu'il agisse en faveur d'une réunification bien que les chances d'y réussir soient très faibles étant donné les complicités qui lient ces deux puissances impérialistes, France et USA.

Rétablir des  relations « normales » avec la RPDC, voudrait dire commencer par supprimer tout embargo dont les premières victimes sont les populations.

Cela dit, même réunifié le peuple coréen n'en sera pas pour autant libre. Les deux dictatures actuelles peuvent s'entendre un jour mais ce sera pour une dictature unique sur un peuple unique. Seule une unité des travailleurs du Nord et du Sud contre leurs classes dirigeantes pourra en faire un peuple libre… pour peu que le reste du monde le soit aussi !!"

L'AAFC remercie Nathalie Arthaud pour sa réponse et se félicite du soutien de la candidate de Lutte ouvrière à la paix et à la réunification en Corée, même si elle se montre pessimiste, et de son opposition aux sanctions qui frappent la population nord-coréenne. La candidate fait ainsi part de ses réserves quant aux chances d'un engagement de la France, "puissance impérialiste"  liée aux Etats-Unis, en faveur du dialogue entre les deux Corée.

Il est à noter que la réunification préconisée par Nathalie Arthaud est une réunification par les Coréens eux-mêmes ("c'est aux deux parties de s'entendre pour trouver une solution"), dans la droite ligne de la déclaration inter-coréenne du 15 juin 2000.

Enfin, on peut ne pas partager l'appréciation peu nuancée de Nathalie Arthaud sur les systèmes politiques et sociaux prévalant au Nord et au Sud, notamment son souhait de ne pas faire de différences entre eux en les qualifiant l'un et l'autre de "dictatures". Cette appréciation est néanmoins conforme à la vision d'une candidate internationaliste prônant l'unité des travailleurs du monde entier "contre leurs classes dirigeantes".

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3 février 2022 4 03 /02 /février /2022 18:29

L’Association d’amitié franco-coréenne (AAFC) défend, depuis sa création en 1969, la paix en Corée, enjeu vital pour la paix du monde, et l'unité du peuple coréen, divisé contre son gré à l'issue de la Seconde Guerre mondiale. L'AAFC considère que les solutions aux questions posées dans la péninsule coréenne doivent être avant tout réglées par les Coréens, et par eux seuls, et que la communauté internationale doit aller dans cette direction. L'élection présidentielle française aura lieu les 10 et 24 avril 2022, et le choix des électeurs se fera en fonction de différents paramètres, dont les questions internationales. L’AAFC a donc interrogé le 27 janvier 2022 les candidats déclarés à ce jour afin de connaître leur opinion sur les questions coréennes, le président de la République étant l'acteur principal dans la politique étrangère de la France. Les premiers candidats interrogés ont été : Nathalie Arthaud, François Asselineau, Nicolas Dupont-Aignan, Anne Hidalgo, Yannick Jadot, Jean Lassalle, Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon, Valérie Pécresse, Florian Philippot, Philippe Poutou, Fabien Roussel, Christiane Taubira et Éric Zemmour.

Les quatre questions posées aux candidats sont les suivantes :

1) Malgré l’armistice de 1953, les deux Corée sont toujours « techniquement » en guerre, et la péninsule coréenne connaît régulièrement des tensions. Alors que les médias et certains pays se plaisent à souligner le programme nucléaire de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), les exercices militaires américains menés en République de Corée (Corée du Sud) ne soulèvent aucune réprobation, alors qu’ils simulent clairement une invasion de la RPDC. Aux termes de l’article 39 de la Charte des Nations unies, de telles manœuvres peuvent pourtant être qualifiées de « menace contre la paix ». Estimez-vous nécessaire que la situation dans la péninsule coréenne soit traitée dans sa globalité et que les comportements sensibles ou intimidants d’autres acteurs – à commencer par les États-Unis d’Amérique - soient soulignés ?

2) Les sanctions adoptées contre la RPDC n’ont nullement entamé la détermination des autorités de ce pays à développer une force de dissuasion nucléaire, tout en pénalisant en premier lieu la population nord-coréenne avec un embargo privant cette dernière de certains biens essentiels. Depuis des années, ces sanctions ont démontré leur inefficacité et ne font que détériorer la situation, au risque d’une nouvelle crise humanitaire. Quelle est votre position sur les sanctions dont la RPDC fait l’objet ?

3) À l’exception de la France et de l’Estonie, tous les pays de l'Union européenne entretiennent des relations diplomatiques normales avec la RPDC. Cette situation va à l'encontre de la tradition diplomatique française, laquelle est de reconnaître des États et non des régimes politiques. Elle contribue à l'effacement de la France dans la zone indo-pacifique et à la placer à la remorque d'autres pays, alors que la France pourrait jouer un rôle moteur pour la résolution des crises. Après l'ouverture, en 2011, d’un premier bureau français de coopération à Pyongyang, comment comptez-vous faire évoluer cette situation pour normaliser les relations entre la République française et la RPDC, dans l'intérêt de la France et conformément à la pratique de ses principaux partenaires européens ?

4) Le dialogue inter-coréen reste peu connu et encouragé à l’étranger. L’AAFC soutient ce dialogue comme seule voie possible pour le règlement des différends entre Coréens et l'apaisement des tensions dans la péninsule coréenne. Comment la France peut-elle appuyer le dialogue entre les deux Corée, seul moyen de trouver une solution pérenne à la crise coréenne ?

L'Association d'amitié franco-coréenne publiera les réponses reçues.

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3 avril 2019 3 03 /04 /avril /2019 19:48

Les éditions Le Petit Futé ont publié le 27 mars 2019 leur premier guide touristique consacré à la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), avec l'ambition d’offrir aux touristes francophones (des guides existent déjà en d'autres langues) qui envisagent de visiter la RPDC des informations sur les sites touristiques majeurs, l’histoire de la Corée, sa culture ainsi qu’un certain nombre d’informations pratiques. Sollicitée par le Petit Futé en 2016, au début du projet, l'Association d'amitié franco-coréenne a toujours encouragé le développement des échanges touristiques, lesquels sont les mieux à même de permettre aux visiteurs occidentaux, français en particulier, d’acquérir une vision moins caricaturale que celle habituellement véhiculée dans les médias au sujet de la RPDC. Mais si l'AAFC salue l'initiative du Petit Futé, elle relève aussi plusieurs insuffisances et erreurs, volontaires ou non, dans ce guide sur la Corée du Nord.

Si les sanctions internationales et autres embargos ont pour conséquence de freiner la plupart des secteurs d’activités de la RPDC, le secteur du tourisme reste quant à lui épargné, si on fait abstraction de la décision prise en septembre 2017 par le gouvernement des Etats-Unis d'interdire aux citoyens américains de voyager en Corée du Nord. Le tourisme constitue une source de développement intéressante, tant sur le plan économique évidemment, avec la création de nouvelles infrastructures, que sur le plan culturel, avec la formation par exemple de guides et d’accompagnateurs disposant de capacités en langues étrangères.

Ces dernières années, sous l’impulsion du dirigeant de la RPDC Kim Jong-un, on a assisté à la multiplication des grands chantiers visant à permettre la venue d’un nombre plus important de visiteurs, dont les plus emblématiques sont la station de ski de Masikryong ou encore une immense station balnéaire sur la côte orientale, à Wonsan, dont l'inauguration est prévue en 2020.

Aujourd’hui, malgré tout le potentiel de la RPDC, on estime que, chaque année, seulement 4 000 à 6 000 touristes occidentaux visitent le pays. Le nombre de touristes chinois est bien sûr beaucoup plus élevé. Pour l’avenir, l’ambitieux objectif d’accueillir 1 million de touristes a été plusieurs fois avancé. Si les chiffres actuels sont relativement décevants, ils s’expliquent en grande partie par un contexte international tendu, même si la détente observée à partir de 2018, entre la RPDC et la Corée du Sud d'une part et entre la RPDC et les Etats-Unis d'autre part, devrait permettre un accroissement du nombre de touristes dans le Nord de la péninsule.

Hélas, le Petit Futé « Corée du Nord » n’échappe pas, dès l'introduction, aux tournures relevant davantage des articles à sensation d'une certaine presse que du guide touristique : « tyrannie communiste », « Etat communiste totalitaire », « un des régimes les plus totalitaires de la planète », etc.

Surtout, l’ouvrage ressemble souvent à une compilation de poncifs, clichés et autres racontars. On retrouve ainsi ce qu'il faut bien qualifier de fantasmes, avec la référence à la prétendue existence d’une « brigade de plaisir », ou « division de la joie », qui serait constituée « d’environ 2 000 femmes et jeunes filles mises à disposition du dirigeant nord-coréen dans le but de servir aux ardeurs sexuelles et aux désirs du cher dirigeant » (p. 26).

C’est encore la référence à la non moins hypothétique « Division 39 » dont le rôle serait, d’après les auteurs, d’ « alimenter la caisse noire de Kim Jong-un, actuel dirigeant de Corée du Nord […] par des activités légales (vente d’armes entre autres), mais également illégales telles que la contrefaçon monétaire et le trafic de drogue » (p. 120).

Aucune source fiable ni élément concret ne vient accréditer la réalité de telles choses. Des experts occidentaux reconnus ont même depuis longtemps tordu le cou à certaines rumeurs continuant pourtant de circuler à propos de la Corée du Nord.

D’autres passages du Petit Futé « Corée du Nord » font davantage sourire. On rassurera donc les lecteurs en leur apprenant qu’il n’existe pas seulement deux stations de métro en exploitation à Pyongyang (p. 108) mais que, sauf exception et comme dans n'importe quelle grande ville, toutes les stations sont utilisées chaque jour par les habitants de la capitale nord-coréenne. Et, contrairement à ce qu'indique Le Petit Futé, il est autorisé d’avoir un chien à Pyongyang et il est totalement faux d’affirmer que « la seule manière pour que la population puisse voir un chien est d’aller au zoo » (p. 132). De tels exemples d’âneries (pour rester dans le champ lexical animalier) ne manquent pas et pourraient ici être multipliés.

D'autres importantes erreurs d’appréciation de la part des auteurs du guide sont aussi à relever. Il est ainsi indiqué au sujet du Cimetière des martyrs de la Révolution que « chaque pierre tombale est surmontée d’un buste en bronze représentant le héros décédé, supposément du moins (cela signifierait qu’une photo de chaque personne enterrée sur place ait été disponible à l’époque... Difficile à croire) » (p. 128). En vérité, ces bustes ont été réalisés sur la base des souvenirs du Président Kim Il-sung qui mena la guérilla contre l’occupation japonaise jusqu'en 1945.

Au-delà, on regrettera que l’ouvrage se focalise à l’extrême sur Pyongyang et ses environs en y consacrant 37 pages, tout en ne faisant que survoler le reste du pays en 25 pages seulement, donnant l'impression que les auteurs ont passé l’essentiel de leur séjour dans leur hôtel de Pyongyang sans avoir eu l’opportunité de se rendre dans les différentes régions accessibles aux étrangers, ou alors beaucoup trop rapidement.

Quelques bonnes idées sont toutefois à relever dans ce guide touristique, comme, par exemple, de courtes interviews du chercheur spécialiste de l'Asie Théo Clément et de Dorian Malovic, chef du service Asie au quotidien français La Croix, dont les articles se distinguent par leur objectivité, leur mesure... et une connaissance du terrain.

Les informations pratiques sont quant à elles d’une grande utilité et permettront aux lecteurs de préparer au mieux leur voyage.

On appréciera aussi les petites biographies d’« enfants du pays », bien qu’elles aient souvent tendance à reprendre les éléments fournis par la presse sud-coréenne ou Wikipédia, avec tous les biais que de telles sources induisent... Enfin, les pages réservées à la culture coréenne (gastronomie, histoire, etc) sont fournies et plutôt bien faites, offrant aux lecteurs un bon aperçu de la Corée avant et pendant leur voyage. Cependant, dans le cas de l’histoire coréenne, c’est trop souvent une perspective sud-coréenne qui est préférée à celle de la Corée du Nord, les deux versions différant souvent sur des sujets aussi importants que la responsabilité du déclenchement de la guerre de 1950-1953, les incidents frontaliers, ou les attaques attribuées au Nord… Donner le point de vue nord-coréen, ou simplement relativiser le point de vue sud-coréen, permettrait pourtant de donner aux lecteurs deux visions d'événements toujours débattus par les spécialistes, et ainsi assurer un minimum d'objectivité.

Pour n'évoquer qu'un seul cas, récent, le guide impute à la Corée du Nord « l'attaque contre la navette (sic) Cheonan, au cours de laquelle plusieurs dizaines de militaires sud-coréens sont tués » en mars 2010 (p. 49). S'il est exact que l'enquête officielle américano-sud-coréenne a conclu à la responsabilité de la Corée du Nord dans l'affaire du naufrage de la corvette (et non navette) Cheonan, la RPDC a toujours nié toute implication. Surtout, les conclusions de l'enquête officielle ont été remises en question, entre autres, par un ancien membre du groupe d'enquête, par des chercheurs indépendants d'universités américaines, et par les experts de la marine russe invités à examiner les « preuves » de la culpabilité nord-coréenne... Malheureusement, les lecteurs du Petit Futé les moins avertis des méandres de la situation dans la péninsule coréenne ne le sauront jamais.

En résumé, si l’idée de rédiger un guide touristique sur la RPDC est excellente et répond sans doute à un véritable besoin, le Petit Futé « Corée du Nord », malgré quelques bonnes idées, pêche par trop d'erreurs et approximations. Ces erreurs peuvent relever d’une incompréhension d’une situation très complexe ou d’un manque de travail (manque de temps ?), ce qui reste, dans une certaine mesure, excusable, tant il convient de reconnaître que la RPDC est un pays difficile à appréhender même après plusieurs voyages. Cependant, face à tant d’informations non vérifiées, voire mensongères, le voyageur connaissant un minimum le pays pourra légitimement se demander en quoi un tel guide touristique se distingue d’un énième brûlot suintant une hostilité primaire envers la Corée du Nord.

 

Corée du Nord, Le Petit Futé, mars 2019 (192 pages)

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30 janvier 2019 3 30 /01 /janvier /2019 20:38

Il y a 55 ans, le 27 janvier 1964, un bref communiqué était publié simultanément à Paris et à Pékin : « Le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République populaire de Chine ont décidé, d'un commun accord, d'établir des relations diplomatiques. Ils sont convenus à cet effet de désigner des ambassadeurs dans un délai de trois mois. » Pourquoi l'Association d'amitié franco-coréenne choisit-elle d'évoquer cet événement concernant les relations franco-chinoises, fût-il un moment capital de l'histoire des relations internationales de la seconde moitié du vingtième siècle? Parce que la France, premier grand pays occidental à nouer des relations diplomatiques avec la République populaire de Chine (le Royaume-Uni avait nommé un chargé d'affaires en 1950 mais des ambassadeurs seront échangés seulement en 1972) reste aujourd'hui le seul pays européen, avec l'Estonie, à ne pas avoir établi de telles relations avec la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord). La France a bien ouvert un bureau commercial de la RPDC à Paris en 1968, élevé en 1984 au rang de délégation générale abritant aussi l'ambassade de la RPDC auprès de l'UNESCO dont le siège est à Paris, et un bureau français de coopération culturelle et humanitaire a été ouvert à Pyongyang en 2011, mais il n'existe pas de relations au niveau d'ambassades entre les deux pays. Pour l'Association d'amitié franco-coréenne, cette « anomalie » marque un effacement de la France dans cette partie du monde et tourne délibérément le dos à la tradition diplomatique française, laquelle est de reconnaître des Etats et non des gouvernements. Ainsi, le général de Gaulle ne dissimulait pas son peu de sympathie pour le système politique en place à Pékin depuis 1949. Mais, malgré l'aggravation des tensions militaires en Asie du Sud-Est, dans un monde divisé en deux blocs, le Président Charles de Gaulle plaça l'intérêt national de la France avant tout et, refusant tout alignement, eut le courage d'établir en premier des liens solides avec un pays de grande civilisation appelé à devenir une superpuissance. De même, une Corée réunifiée serait une puissance de premier plan et les pays qui auront su nouer des relations équilibrées avec les deux parties de la péninsule coréenne y auront une place privilégiée. Malheureusement, la France ne semble pas disposée à en faire partie et a raté plusieurs occasions « historiques » de normaliser ses relations avec la RPD de Corée, notamment après les déclarations Nord-Sud du 15 juin 2000 et du 4 octobre 2007, ou encore celles des 27 avril et 19 septembre 2018, étapes décisives du rapprochement inter-coréen. La déclaration du Président Charles de Gaulle reproduite ci-après est extraite de sa conférence de presse du 31 janvier 1964. Ce 55ème anniversaire d'une décision majeure pour la diplomatie française est aussi l'occasion de rappeler que l'Association d'amitié franco-coréenne compte parmi ses fondateurs des gaullistes et a été présidée de 1977 à 1982 par Louis Terrenoire, ancien résistant et ministre du général de Gaulle.

Le 6 juin 1964, le Président Charles de Gaulle reçoit les lettres de créance du nouvel ambassadeur de la République populaire de Chine , S.E.M. Huang Chen, en présence du ministre des Affaires étrangères Maurice Couve de Murville. (STRINGER/AFP)

Le 6 juin 1964, le Président Charles de Gaulle reçoit les lettres de créance du nouvel ambassadeur de la République populaire de Chine , S.E.M. Huang Chen, en présence du ministre des Affaires étrangères Maurice Couve de Murville. (STRINGER/AFP)

Nous allons parler de la Chine. Beaucoup m'ont posé des questions, multiples en réalité. Je crois que je répondrai à tout le monde, en même temps, en expliquant ce qu'il en est, et les raisons pour lesquelles ce qui est fait est fait.

La Chine. Un grand peuple, le plus nombreux de la terre, une race où la capacité patiente, laborieuse, industrieuse des individus a, depuis des millénaires, compensé le défaut collectif de cohésion et de méthode et a bâti une très particulière et très profonde civilisation. Un très vaste pays, géographiquement compact et pourtant sans unité. Etendu depuis l'Asie mineure et les marches de l'Europe jusqu'à la rive immense du Pacifique, et puis des glaces sibériennes jusqu'aux régions tropicales de l'Inde et du Tonkin. Un Etat, plus ancien que l'histoire, toujours résolu à l'indépendance, qui s'est constamment efforcé à la centralisation, d'instinct replié sur lui-même et dédaigneux des étrangers, mais conscient et orgueilleux d'une immuable pérennité, telle est la Chine de toujours.

L'entrée en contact de ce pays là avec les nations modernes lui a été très dure et très coûteuse. Les multiples sommations, interventions, expéditions, invasions, européennes, américaines, japonaises lui ont été autant d'humiliations et de démembrements. Alors, tant de secousses nationales, et aussi la volonté des élites de transformer, coûte que coûte, leur pays pour qu'il atteigne à la condition et à la puissance des peuples qui l'avaient opprimée, ont conduit la Chine à la révolution. Sans doute, le maréchal Tchang Kai-chek à la valeur, au patriotisme, à la hauteur d'âme de qui j'ai le devoir de rendre hommage, certain que l'histoire et le peuple chinois en feront un jour autant, le maréchal Tchang Kai-chek, après avoir conduit la Chine à la victoire alliée qui, dans le Pacifique, scella la Deuxième Guerre mondiale, avait essayé de canaliser le torrent. Mais les choses en étaient à ce point qu'elles excluaient tout sauf l'extrême, et dès que les Américains eurent retiré au maréchal le concours direct de leurs forces qu'ils lui donnaient sur le continent, il dut se replier sur Formose, et le régime communiste, longuement préparé par Mao Tse-toung, établit sa dictature, il y a quinze ans de cela.

Depuis lors, un énorme effort qui s'imposait, de toute façon, au sujet de la mise en valeur des richesses naturelles, du développement industriel, de la production agricole, de l'instruction de la nation, de la lutte contre les fléaux inhérents à ce pays, la faim, les épidémies, l'érosion des sols, le débordement des fleuves, etc., cet immense effort a été entrepris sur l'ensemble du territoire. Comme toujours en système communiste, ce qui put être réalisé a comporté de terribles souffrances humaines, une implacable contrainte des masses, d'immenses pertes et gaspillages de biens, l'écrasement et la décimation d'innombrables valeurs humaines. Cependant au prix de tant de sacrifices, des résultats ont été atteints qui sont dus pour une partie à l'action de l'appareil totalitaire, et aussi à l'ardeur d'un peuple fier qui veut s'élever, en tous les cas, et qui est capable de déployer des trésors de courage et d'ingéniosité quelles que soient les circonstances. Il est vrai que la Russie soviétique a d'abord prêté à la Chine un assez large concours : ouverture de crédit pour l'achat d'outillages et d'approvisionnement, équipements miniers et industriels, installations d'usines entières, formation directe d'étudiants et de spécialistes, envoi sur place d'ingénieurs, de techniciens, d'ouvriers qualifiés, etc. C'était le temps où le Kremlin, utilisant, là comme ailleurs, la prépondérance rigoureuse qu'il s'est donné à l'intérieur de l'église communiste pour soutenir la suprématie de la Russie vis-à-vis de tous les peuples qu'un régime semblable au sien lui a subordonnés, comptait garder la Chine sous sa coupe et, par là, dominer l'Asie. Mais les illusions se sont dissipées. Sans doute demeure entre Moscou et Pékin une certaine solidarité doctrinale qui peut se manifester dans la concurrence des idéologies mondiales, mais, sous ce manteau de plus en plus déchiré, apparaît la différence des politiques nationales.

Le moins qu'on puisse dire à ce sujet, c'est qu'en Asie, où la frontière qui sépare les deux Etats, depuis l'Indoukouch jusqu'à Vladivostok, est la plus longue qui soit au monde, l'intérêt de la Russie, qu'il conserve et qu'il maintient, et celui de la Chine, qui a besoin de croître et de prendre, ne sauraient être confondus. Et c'est pourquoi l'attitude et l'action d'un pays de 700 millions d'habitants ne sont réglées que par son propre gouvernement.

Du fait que, depuis quinze ans, la Chine presque tout entière se trouve rassemblée sous un gouvernement qui lui applique sa loi, et qu'elle se manifeste au dehors comme une puissance indépendante et souveraine, la France était disposée, en principe et depuis des années, à nouer des relations régulières avec Pékin. D'ailleurs, certains échanges économiques et culturels étaient déjà pratiqués et nous avons été amenés, avec l'Amérique, l'Angleterre, l'Union soviétique, l'Inde et d'autres Etats, en 1954, à la conférence de Genève, quand on a réglé le sort de l'Indochine, à négocier avec les représentants chinois. Et il en fut de même en 1962, sous la même forme et dans la même ville, quand la situation du Laos a été quelque peu définie. Mais le poids de l'évidence et de la raison, pesant chaque jour davantage, la République française a décidé de placer ses rapports avec la République populaire de Chine sur un plan normal, autrement dit diplomatique. Nous avons rencontré à Pékin une intention identique, et on sait qu'à ce sujet le président Edgar Faure, chargé et prié d'effectuer sur place des sondages officieux, a rapporté des indications positives. C'est alors que les deux gouvernements se sont accordés pour accomplir le nécessaire.

J'ai parlé du poids de l'évidence et de la raison. Et en effet, en Asie, il n'y a aucune réalité politique concernant le Cambodge, le Laos, le Vietnam, ou bien l'Inde, le Pakistan, l'Afghanistan, la Birmanie, la Corée, ou bien la Russie soviétique, ou bien le Japon, etc., qui n'intéresse et ne touche la Chine. Sur ce continent, il n'y pas une paix et il n'y a pas une guerre imaginable sans qu'elle y soit impliquée. Et il est inconcevable de supposer qu'on puisse jamais conclure un traité de neutralité concernant les Etats du sud-est asiatique auxquels nous, Français, portons une attention toute spéciale et cordiale, sans que la Chine en soit partie. Neutralité qui devrait comporter de la part de ces Etats, naturellement, leur acceptation, qui devrait être garantie sur le plan international, qui devrait exclure à la fois toute action armée soutenue par tels de ces Etats vis-à-vis ou chez tel ou tel autre, et excluant aussi les multiformes interventions extérieures. Neutralité qui paraît bien, dans la période où nous sommes, être la seule situation qui soit compatible avec la vie paisible et le progrès des populations. Mais aussi, la masse propre à la Chine, sa valeur et ses besoins présents, et la dimension de son avenir pour qu'elle se manifeste de plus en plus aux intérêts et aux soucis de l'univers tout entier. En vérité, il est clair que la France doit pouvoir entendre directement la Chine et aussi s'en faire écouter.

Et puis, pourquoi ne pas évoquer, qui sait, ce qu'il pourra y avoir de fécond dans les rapports entre les deux peuples, à la faveur des relations entre les deux Etats. Ce qui est fait déjà au point de vue économique à l'égard de la Chine, qui est fait par nous, et ce qui peut d'ailleurs être amélioré sera sans doute longtemps limité. Et il en est de même des investissements que nous apportons déjà au développement industriel chinois. Mais le cas de la technique est sans doute très différent. De la technique dont les sources en France sont de plus en plus valables et à laquelle la Chine offre un champ, pour ainsi dire, infini. Et puis, qui sait si les affinités qui existent entre les deux nations pour tout ce qui concerne les choses de l'esprit, et compte tenu aussi du fait que, dans leurs profondeurs, elles se portent l'une à l'autre, depuis toujours, sympathie et considération, ne les conduiront pas à une coopération culturelle croissante. En tout cas, ici, cela est sincèrement souhaité.

Pékin et Paris sont donc convenus d'échanger les ambassadeurs. Il n'y a évidemment là, de notre part, rien qui implique aucune sorte d'approbation à l'égard du régime qui domine actuellement la Chine. En nouant avec ce pays, avec cet Etat, des relations officielles, comme maintes autres nations libres l'ont fait auparavant, et comme nous l'avons fait avec d'autres pays qui subissent des régimes analogues, la France ne fait que reconnaître le monde tel qu'il est. Mais il se peut aussi que dans l'immense évolution actuelle du monde, en multipliant les contacts directs, de peuple à peuple, on serve la cause des hommes, c'est-à-dire celle de la sagesse, du progrès et de la paix. Il se peut que ces contacts contribuent à l'atténuation, déjà commencée, des contrastes et des oppositions dramatiques entre les camps qui divisent l'univers. Il se peut qu'ainsi les âmes, partout où elles sont sur la Terre, se retrouvent, un peu moins tard, au rendez-vous que la France a donné à l'univers, voici 175 ans, celui de la liberté, de l'égalité et de la fraternité.

Conférence de presse du Général de Gaulle à l'Elysée du 31 janvier 1964 (à partir de 1h12)

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22 novembre 2018 4 22 /11 /novembre /2018 21:32

C'est avec beaucoup de tristesse que l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) a appris la disparition d'Etienne Huchet le 31 août 2018 à Paris, à l'âge de 92 ans. Ancien rapporteur pour l'Asie au sein de la commission internationale du Parti socialiste - auparavant il avait été un militant radical, avant de rejoindre les rangs socialistes à la suite du référendum de 1969 - Etienne Huchet a oeuvré inlassablement pour la paix et la réconciliation en Asie de l'Est - au Cambodge, dont il était l'un des meilleurs connaisseurs français, mais aussi en Corée. A ce titre, sans adhérer à l'AAFC, Etienne Huchet, homme de grande valeur et de parole, était l'un de nos interlocuteurs réguliers et fidèles - abonné d'ailleurs à notre bulletin trimestriel. Nous saluons sa mémoire, en adressant nos condoléances à son épouse, Colette, à ses proches et à ses camarades. 

Etienne Huchet, au centre, avec S. E. Yun Yong-il, délégué général de la RPD de Corée en France, ambassadeur auprès de l'UNESCO, et Guy Dupré, président d'honneur de l'AAFC.

Etienne Huchet, au centre, avec S. E. Yun Yong-il, délégué général de la RPD de Corée en France, ambassadeur auprès de l'UNESCO, et Guy Dupré, président d'honneur de l'AAFC.

Né en 1926, honoré de la Croix du combattant pour sa participation à la Résistance durant la Seconde guerre mondiale (et par ailleurs chevalier de la Légion d'honneur), Etienne Huchet avait ensuite vécu six ans au Cambodge et au Vietnam entre 1950 et 1956, en tant que cadre dans une plantation d'hévéa. A son retour en France, il s'était orienté vers le secteur du BTP, faisant de la sécurité sur les chantiers l'un de ses chevaux de bataille. Elu local en Saône-et-Loire (à Saint-Vincent-en-Bresse entre 1965 et 1977, puis en tant que maire de Montret de 1977 à 1982), où il avait soutenu dans ses débuts politiques Arnaud Montebourg, Etienne Huchet était aussi l'une des voix les plus écoutées sur l'Asie de la commission internationale du Parti socialiste. Familier de Norodom Sihanouk (qu'il avait notamment rencontré à Pyongyang lors de son exil), il avait activement participé au retour à la paix au Cambodge entre 1990 et 1993 - ce qui lui vaudra d'ailleurs le titre d'officier dans l'ordre royal du Cambodge. Il avait aussi contribué à faire adhérer à l'Internationale socialiste plusieurs partis d'Asie de l'Est partageant les valeurs de la social-démocratie et du socialisme. 

C'est cette même volonté d'ouverture réciproque entre la France et l'Asie qui l'avait conduit à s'intéresser à la question coréenne, et singulièrement à la situation au nord de la péninsule. En 1986, il avait ainsi conduit une délégation du Parti socialiste en Corée du Nord, avant d'être l'un des artisans des relations entre le Parti socialiste et le Parti du travail de Corée. Dans la période la plus récente, il avait plaidé - malheureusement sans être suivi - auprès du Quai d'Orsay et du Parti socialiste pour une compréhension de la question coréenne dans sa spécificité et en respectant la souveraineté coréenne, ce qui selon lui impliquait l'établissement de canaux d'échanges et de dialogue, ainsi que l'établissement de relations diplomatiques complètes entre la République française et la République populaire démocratique de Corée, nonobstant les divergences sur la question nucléaire ou celle des droits de l'homme. Humaniste, Etienne Huchet savait mieux que d'autres qu'il faut respecter les autres cultures pour que naisse un dialogue fécond. 

L'AAFC remercie grandement Etienne Huchet pour avoir établi des contacts avec des spécialistes de l'Asie, y compris au sein du ministère des Affaires étrangères, et mis à disposition la très riche documentation qu'il avait recueillie, notamment des documents d'archives personnels. 

Photo : Alain Noguès (archives AAFC)

Sources : 

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8 novembre 2018 4 08 /11 /novembre /2018 13:59

Le 7 novembre 2018, dans les locaux de la Fondation Deutsch de la Meurthe à la Cité internationale universitaire de Paris, Kim Deok-ryong, vice-président exécutif du Comité consultatif pour la réunification national (acronyme anglais : NUAC) de la République de Corée (Corée du Sud), est intervenu pour encourager les Coréens de France à "rassembler l'opinion publique" concernant la réunification, en soulignant qu'il était de leur "rôle et responsabilité" d'intervenir en ce sens, y compris auprès des autorités françaises. Des membres de l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) ont répondu favorablement à l'invitation qui leur avait été donnée par la section française du NUAC d'assister aux discussions, qui se sont adressées en priorité à un public composé des associations des Coréens vivant en France, dont la très officielle Association des résidents coréens en France et les Jeunes actifs coréens en France, qui développent aujourd'hui une activité particulièrement importante dans la communauté coréenne de France. 

M. Kim Deok-ryong, vice-président exécutif du NUAC

M. Kim Deok-ryong, vice-président exécutif du NUAC

Un vent nouveau se lève sur la péninsule coréenne, rendant à nouveau tangible l'espoir d'une réunification pacifique après les graves tensions de l'année 2017. Les Coréens de l'étranger doivent ainsi jouer un rôle auprès des opinions publiques de leurs pays respectifs pour montrer les opportunités du contexte actuel. Tel est le message qu'a délivré Kim Deok-ryeong, vice-président exécutif du NUAC (qui a rang de ministre), qui était à Paris avant de poursuivre en Allemagne son déplacement sur le continent européen. 

Organisme officiel créé en 1980, le Comité consultatif pour la réunification nationale a développé des propositions qui ont suivi les évolutions du gouvernement sud-coréen. Le NUAC regroupe 228 organisations en Corée du Sud, et 43 autres dans le monde. 

M. Kim Deok-ryeong faisait ainsi partie de la délégation qui a accompagné le Président Moon Jae-in en République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) du 18 au 20 septembre 2018. Il a fait part de son émotion quand les Nord-Coréens réunis dans le stade du 1er mai à Pyongyang avaient alors applaudi le Président Moon Jae-in - dont une telle intervention en public au Nord de la Corée était sans précédent. Il a également exprimé sa confiance dans les engagements du Président Kim Jong-un à engager la dénucléarisation de son pays, la priorité étant désormais donnée au développement économique. Cette nouvelle situation nécessite également l'aide de la communauté internationale pour encourager le processus conduisant à la paix et à la réunification de la Corée, après que les Jeux olympiques de Pyeongchang eurent marqué l'avènement d'une ère nouvelle : "le climat de guerre froide qui a persisté entre les deux Corée commence aujourd'hui à se dissiper".

M. Kim Deok-ryeong a estimé que toutes les sanctions contre la Corée du Nord devaient être levées - une appréciation que partage pleinement l'AAFC - tout en mentionnant par ailleurs que la RPD de Corée devait procéder à sa dénucléarisation.

Ayant rappelé que le gouvernement provisoire coréen avait été hébergé dans les locaux de la concession française à Shanghaï, puis que l'année 2019 marquerait le centième anniversaire du mouvement pour l'indépendance du 1er mars 1919 (qui est commémoré dans toute la Corée), il a fait un parallèle avec la Révolution française de 1789 en exhortant la diaspora coréenne à l'étranger à diriger un nouveau mouvement révolutionnaire, conduisant le monde vers un régime de paix permanente, en Asie du Nord-Est et au-delà. 

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20 octobre 2018 6 20 /10 /octobre /2018 17:49

Les diplomaties de la République de Corée (Corée du Sud) et du Japon ont toujours été marquées par une approche différente du contentieux historique qui oppose les deux pays, du fait de la brutale colonisation japonaise de la péninsule (1910-1945) - et qu'exprime le drame des "femmes de réconfort", anciennes esclaves sexuelles de l'armée japonaise sur le sort desquelles le très conservateur Shinzo Abe refuse de présenter des excuses au nom du gouvernement japonais, le révisionnisme servant plus que jamais de boussole diplomatique à Tokyo. Mais la question nord-coréenne constitue aussi un important point de divergence entre les deux pays qui multiplient les efforts pour rallier d'autres pays à leur cause. Quand le Président Moon Jae-in, en visite en Europe, a reçu des soutiens plus ou moins affirmés à sa politique de dialogue avec le Nord qui suppose de considérer la levée d'une partie des sanctions contre la République populaire démocratique de Corée (en contrepartie des efforts déjà accomplis par la Corée du Nord sur la voie de sa dénucléarisation, avec de nouveaux engagements au point 5.1 de la déclaration conjointe Nord-Sud du 19 septembre 2018, tandis que Moscou et Pékin plaident quant à eux ouvertement pour une levée partielle des sanctions), le Premier ministre Shinzo Abe se pose en leader du front de refus - à savoir le refus de lever la moindre sanction envers Pyongyang avant la fin définitive du processus de dénucléarisation, ce qui aurait pour effet de ruiner le dialogue qui se met en place entre Washington et Pyongyang. En effet, la renonciation unilatérale et sans contreparties de la Corée du Nord à sa force de dissuasion nucléaire est perçue par cette dernière comme un diktat inacceptable et un marché de dupes (d'autres pays ont, par le passé, désarmé unilatéralement, avant de connaître un changement de régime à l'initiative des Etats-Unis et de leurs alliés : l'Irak en 2003 et la Libye en 2011). 

Le Président Moon Jae-in et le pape François, le 18 octobre 2018

Le Président Moon Jae-in et le pape François, le 18 octobre 2018

Le Vatican, l'Italie et la Thaïlande soutiennent ouvertement et sans réserves les efforts de Séoul pour la paix dans une péninsule coréenne sans armes nucléaires

Après la déconvenue de sa rencontre avec le très fermé Emmanuel Macron, insensible à son appel à la paix et au dialogue, le Président Moon Jae-in a trouvé dans le Premier ministre italien Giuseppe Conte un homme plus ouvert que le président français, car plus en phase avec la conception progressiste de la société internationale défendue par le Président Moon. Selon la présidence sud-coréenne citée par l'agence Yonhap, 

Le Premier ministre Conte a grandement apprécié le pouvoir d'influence de notre gouvernement, qui a apporté des changements positifs sur la péninsule coréenne, et a exprimé son soutien indéfectible à la politique nord-coréenne de notre gouvernement.

Yonhap

Les deux dirigeants ont signé un communiqué conjoint défendant l'approche du Président Moon Jae-in pour la paix et la dénucléarisation de la Corée, et saluant ouvertement les trois rencontres au sommet Nord-Sud de l'année 2018 : 

Le Premier ministre Conte a salué et exprimé son soutien total aux initiatives diplomatiques entreprises par le président Moon dans le cadre des trois sommets intercoréens afin de faire progresser les relations intercoréennes et de parvenir à la dénucléarisation complète et à une paix permanente dans la péninsule coréenne.

Le président Moon a grandement apprécié la contribution et le soutien constants de l'Italie au processus de résolution pacifique du problème nucléaire nord-coréen et d'établissement de la paix dans la péninsule coréenne. Les deux dirigeants ont estimé que la dénucléarisation doit être réalisée de manière complète, vérifiable et irréversible.

Communiqué conjoint Moon-Conte (cité par l'agence Yonhap)

Les deux dirigeants ont signé des accords de coopération dans les domaines de la défense, des services aériens et du commerce.

L'entretien qu'a ensuite eu le Président Moon Jae-in avec le Pape François a été exceptionnel à plus d'un titre - par sa durée et son horaire, et par le fait que certains éléments des échanges ont été rendus publics, contrairement à l'usage. Selon l'agence Yonhap, le Pape François a déclaré au Président Moon Jae-in, qui s'est par ailleurs présenté à lui comme catholique : 

Je soutiens fermement les efforts du gouvernement sud-coréen qui cherchent un processus de paix sur la péninsule coréenne.

Yonhap

De fait, le Vatican a toujours soutenu une solution à la question coréenne dans le cadre de la paix et du dialogue - y compris au plus fort des tensions à l'été et à l'automne 2017.

Concernant la possibilité d'une visite du Pape François en Corée du Nord, le souverain pontife a déclaré attendre une invitation formelle, écrite, des autorités nord-coréenne, après avoir reçu l'invitation orale du Président Moon Jae-in, que le Président Kim Jong-un lui avait donnée lors du sommet entre les deux hommes en RPDC (du 18 au 20 septembre 2018). Le pape a fait état de sa disponibilité à honorer cette invitation - selon son agenda - ce qui serait une première en Corée du Nord (il était prévu que le pape Jean-Paul II se rende à Pyongyang, mais cette visite n'avait finalement pas eu lieu).

Enfin, le Président Moon Jae-in a poursuivi sa recherche de soutiens à sa politique de dialogue avec le Nord lors de rencontres bilatérales en marge du sommet du dialogue Europe-Asie (ASEM), qui se tenait pendant son séjour à Bruxelles.


Dans ce cadre, lors d'un entretien avec le Premier ministre thaïlandais Prayut Chan-o-cha, le Président Moon Jae-in a obtenu une promesse de soutien à sa politique de dialogue et de la paix en Corée dans le cadre de l'ASEAN, lorsque la Thaïlande en assurera la présidence en 2019 :  

Le Premier ministre thaïlandais a affiché son soutien à l'initiative de paix de Séoul et a promis que son pays qui assumera la présidence de l'Asean l'année prochaine prendra les mesures nécessaires pour soutenir cette initiative.

Yonhap

Egalement en marge du sommet de l'ASEM, le Président Moon Jae-in a obtenu un soutien de la chancelière allemande Angela Merkel. Selon l'agence Yonhap, elle aurait alors déclaré : 

J'apprécie le courage et la détermination dont le président Moon a fait preuve et salue les progrès accomplis dans le processus de dénucléarisation rendu possible grâce à la détermination du président et du président (Donald) Trump.

Yonhap

Front du refus : Emmanuel Macron en zélé défenseur de l'ultra-nationaliste Shinzo Abe

Le front du refus rassemble des éléments disparates : des chrétiens évangélistes, notamment américains, des partisans de la guerre (hier en Irak, demain en Iran... ou en Corée du Nord ?) et et de sa version soft (les sanctions qui tuent femmes et enfants en mettant à genoux des populations entières), très en cour dans certains milieux américains qui ont obtenu de Donald Trump qu'il s'engage - même s'il rencontre et parle avec les Nord-Coréens - à ne pas lever les sanctions avant la dénucléarisation complète de Pyongyang (que, dans leur jargon, ces va-t-en-guerre qualifient de "dénucléarisation complète, vérifiable et irréversible" ou CVID, suivant son acronyme anglais, la pertinence du distinguo étant pour le moins douteuse). Le front du refus rallie aussi des gouvernements, au premier rang desquels les ultra-nationalistes au pouvoir au Japon, engagés dans une politique de discrimination raciale tous azimuts. Shinzo Abe et ses acolytes ont applaudi aux bruits de bottes dans la péninsule coréenne en 2017, y voyant aussi une bonne occasion de provoquer des législatives anticipées, largement remportées en dépit des scandales de corruption. Tous ont besoin que le dialogue échoue,nécessairement, pour continuer à engranger les dividendes politiques des tensions et des crises. 

Les motivations de cet attelage de nationalistes, de fondamentalistes religieux, d'atlantistes en mal de nouvelle guerre sainte pour répandre les valeurs occidentales dites universelles, en font aussi les porteurs de valises du lobby militaro-industriel (pour lesquels les crises d'aujourd'hui sont les guerres de demain et les profits d'après-demain).  

Une des figures moins médiatisée du front de refus, malgré ses positions sans ambiguïté, est le Président Emmanuel Macron, qui s'était déjà distingué en répondant sèchement "non", de manière très peu diplomatique, au Président Moon Jae-in venu plaider un soutien français à sa politique de paix et de dialogue. Quelques jours plus tard, le jeune président a enfoncé le clou, en applaudissant des deux mains le plaidoyer du très droitier Shinzo Abe, rencontré en marge du dialogue Europe Asie à Bruxelles : dans un article de Brice Pedroletti, le quotidien Le Monde titre sans ambiguïté que "Shinzo Abe trouve en Macron un allié sur les sanctions contre la Corée du Nord". En soutenant sans réserves Shinzo Abe dans sa douteuse politique inspirée par le racisme anti-coréen, Emmanuel Macron, qui prétend lutter contre les nationalismes en Europe, approuve ouvertement un chef d'Etat sur lequel planent de forts relents de révisionnisme et de racisme, partisan bon teint du réarmement et du militarisme japonais. 

En haut : Emmanuel Macron étreignant l'ultra-nationaliste japonais Shinzo Abe. En bas : simple poignée de mains et sourire forcé d'Emmanuel Macron avec le progressiste sud-coréen Moon Jae-in (le 9 juillet 2017).
En haut : Emmanuel Macron étreignant l'ultra-nationaliste japonais Shinzo Abe. En bas : simple poignée de mains et sourire forcé d'Emmanuel Macron avec le progressiste sud-coréen Moon Jae-in (le 9 juillet 2017).

En haut : Emmanuel Macron étreignant l'ultra-nationaliste japonais Shinzo Abe. En bas : simple poignée de mains et sourire forcé d'Emmanuel Macron avec le progressiste sud-coréen Moon Jae-in (le 9 juillet 2017).

Si Emmanuel Macron soutient la politique "en même temps" de droite et d'extrême-droite de Shinzo Abe, cette complicité vient de loin : elle est le fruit d'une pénétration lente et ancienne de l'appareil d'Etat français par les réseaux japonais sur la question coréenne, ayant déjà permis au drapeau japonais, symbole des crimes de guerre de l'empire nippon, de flotter sur les Champs Elysées le 14 juillet 2018. 

Vu le 14 juillet 2018 à Paris : le drapeau de guerre japonais (un disque solaire rouge rayonnant sur fond blanc), un symbole des atrocités de guerre japonaises

Vu le 14 juillet 2018 à Paris : le drapeau de guerre japonais (un disque solaire rouge rayonnant sur fond blanc), un symbole des atrocités de guerre japonaises

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18 octobre 2018 4 18 /10 /octobre /2018 20:28
 

Le 15 octobre 2018, à l'issue de sa rencontre avec le président sud-coréen Moon Jae-in, Emmanuel Macron a déclaré que la France « n'envisage pas d'établir des relations diplomatiques à ce stade » avec la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) et que ces relations « sont évaluées à l'aune des progrès sur le dossier nucléaire et balistique, des relations inter-coréennes et la situation des droits de l'homme ». « C'est en fonction des évolutions qui seront constatées sur le terrain que nous envisagerons d'une part des évolutions en terme de relations bilatérales diplomatiques et d'autre part des évolutions en terme de politique des sanctions », a ajouté le président français. Ces déclarations sont dans la droite ligne de celles faites depuis au moins dix ans par le ministère français des Affaires étrangères, notamment en réponse aux questions de l'Association d'amitié franco-coréenne.

La France rate ici une troisième occasion d'établir des relations diplomatiques avec la RPDC (après 1994 et 2000). Outre son caractère parfaitement contraire à la tradition diplomatique française - qui est de reconnaître des États et non des gouvernements ou des régimes politiques -, cette attitude marque la difficulté de la diplomatie française à appréhender l'évolution de la situation en Corée, marquée par les sommets d'avril, de mai et de septembre 2018 entre les dirigeants des Corée du Nord et du Sud, et par le sommet de juin 2018 entre les dirigeants de la Corée du Nord et des États-Unis d'Amérique. Les propos d'Emmanuel Macron sont totalement décontextualisés et marginalisent un peu plus la France parmi les acteurs pouvant exercer une influence positive dans la résolution de la crise coréenne et, plus généralement, dans la zone Asie-Pacifique.

La France a voulu s'aligner sur la position américaine de « pression maximum » à l’égard de la Corée du Nord en votant toutes les sanctions économiques à l’ONU. Or, aujourd'hui, la levée des sanctions n'est pas seulement une exigence logique de réponse aux efforts déjà accomplis par la RPDC, à commencer par l'arrêt des tests nucléaires et balistiques et le démantèlement de ses sites d'essais : la levée des sanctions est une nécessité pour ne pas faire de la vie des populations la variable d'ajustement des besoins diplomatiques du moment.

Au moment où le Président Moon Jae-in effectue une tournée en Europe, il est déplorable que la France continue une diplomatie d’agressivité contre la RPDC, héritée de la période de la guerre de Corée (1950-1953). La France, dernier pays de l'Union européenne (avec l'Estonie) à ne pas reconnaître la RPDC, va jusqu'à se retrouver à contre-courant des autres pays de l'Union et, de fait, au moins officiellement, des États-Unis eux-mêmes ! Ce cavalier seul d'une France tournant le dos à ses meilleures traditions diplomatiques pour obéir aux pires logiques néo-conservatrices ne saurait toutefois être qualifié de politique authentiquement indépendante.

L'Association d'amitié franco-coréenne salue les déclarations inter-coréennes des 27 avril 2018 et 19 septembre 2018, lesquelles posent des bases solides pour établir une paix durable, promouvoir les échanges et favoriser la réunification entre les deux parties divisées de la péninsule coréenne, et appelle l'ensemble des acteurs de la communauté internationale à favoriser effectivement la mise en place d'un système de sécurité collective, corollaire indispensable à une prévention efficace des conflits, au désarmement et à la démilitarisation.

Militant depuis près de cinquante ans pour la paix et la réunification de la Corée, l'Association d'amitié franco-coréenne a toujours refusé la voie de l'escalade militaire et de l'isolement de la République populaire démocratique de Corée sur la scène internationale. Aujourd'hui confortée dans ses choix pour la paix et la réunification de la Corée, l'Association d'amitié franco-coréenne réitère son appel aux autorités françaises pour que la France ait - enfin - dans cette partie du monde une politique à la hauteur de son rang. Cela passe nécessairement par la prise en compte du caractère historique du processus en cours dans la péninsule coréenne, par la levée des sanctions et par l'établissement de relations diplomatiques complètes avec la République populaire démocratique de Corée.

 

Contact : M. Benoît Quennedey, président de l'AAFC - 06 87 24 93 00

Télécharger la déclaration du bureau national de l'AAFC

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17 octobre 2018 3 17 /10 /octobre /2018 20:50

Si les échanges entre le président sud-coréen Moon Jae-in et son homologue français ont été particulièrement décevants pour les autorités sud-coréennes et pour la paix dans la péninsule, compte tenu de la position ultra-conservatrice d'Emmanuel Macron, les autres rencontres inscrites au programme de la visite en France du président de la République de Corée, le 16 octobre 2018, ont été nettement plus prometteuses pour l'avenir des relations franco-coréennes. Retour sur ces échanges.

Avec Edouard Philippe : cap sur les coopérations économiques vecteurs de modernisation technologique

Edouard Philippe, Anne Hidalgo, Audrey Azoulay : le contenu de leurs échanges avec Moon Jae-in

Si l'augmentation du nombre de vols directs entre la France et Séoul a été l'aspect le plus commenté par l'agence officielle Yonhap des échanges entre le Président Moon Jae-in et le Premier ministre Edouard Philippe, c'est plus largement l'essor des relations économiques qui a été mis en avant, en étant resituées dans une perspective historique (introduction de la technologie du TGV à Séoul, développement conjoint d'un satellite). Selon les services de la présidence sud-coréenne,

En notant que l'introduction du train à grande vitesse (TGV) en Corée du Sud durant les années 1990 et d'autres projets économiques conjoints, tels que le développement conjoint d'un satellite au cours des années 2000, ont fourni de grands avantages aux peuples des deux pays, le président Moon et le Premier ministre Philippe ont convenu de continuer à explorer de nouveaux domaines de coopération en étendant continuellement le commerce et les investissements entre les deux pays.

Parmi les nouveaux secteurs de coopération ont ainsi été mentionnés le changement climatique, l'intelligence artificielle et les technologies de l'information et de la communication. Toujours selon les autorités sud-coréennes, il s'agit de secteurs clés pour la "quatrième révolution industrielle". Dans un contexte de ralentissement de la croissance économique en Corée du Sud, cette approche s'inscrit dans une conception du progrès économique telle qu'analysé par Joseph Schumpeter - selon laquelle les innovations technologiques déterminent les cycles de croissance.

Lors de ses rencontres avec les milieux économiques, le Président Moon Jae-in a aussi observé que l'établissement d'un régime de paix durable dans la péninsule coréenne sera un facteur de croissance économique.

Anne Hidalgo a apporté son soutien à l'organisation conjointe des Jeux olympiques de 2032 par toute la Corée

Edouard Philippe, Anne Hidalgo, Audrey Azoulay : le contenu de leurs échanges avec Moon Jae-in

Si la réception dans les salons de l'hôtel de ville de Paris d'un chef d'Etat en visite officielle en France fait partie des usages protocolaires, la maire de Paris Anne Hidalgo a appuyé le projet du Président Moon Jae-in d'une candidature conjointe des deux Etats coréens à l'organisation des Jeux olympiques de 2032. La première édile parisienne a observé que ce projet était conforme à l'esprit de l'olympisme.

Tout en témoignant de sa connaissance du rôle de la France et de Paris dans le mouvement de libération de la Corée alors soumise à la colonisation japonaise, le Président Moon Jae-in a aussi plaidé pour un soutien de la ville de Paris à la participation conjointe d'athlètes nord et sud-coréens aux Jeux Olympiques de Paris en 2024, alors que la constitution d'équipes conjointes inter-coréennes lors de récents événements sportifs est l'une des manifestations les plus éclatantes du renouveau du dialogue et des échanges Nord-Sud.

Avec Audrey Azoulay : augmentation du soutien de l'Unesco aux programmes éducatifs à destination de la RPDC

Lors de leur rencontre, le Président Moon Jae-in et la directrice générale de l'Unesco, la Française Audrey Azoulay, ont convenu de favoriser la coopération et la paix dans la péninsule coréenne, par une augmentation des aides à la Corée du Nord dans le domaine de l'éducation et en promouvant la désignation de la zone démilitarisée (DMZ) entre les deux Corée comme réserve mondiale de biosphère.

Sources :

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15 octobre 2018 1 15 /10 /octobre /2018 18:33

Le 15 octobre 2018, le Président Moon Jae-in a été reçu par son homologue Emmanuel Macron dans le cadre de sa visite en France. Le président français a adopté une position de fermeture particulièrement nette (refus de considérer tout allègement des sanctions contre Pyongyang, refus d'envisager l'établissement de relations diplomatiques complètes entre la France et la République populaire démocratique de Corée - Corée du Nord) qui s'inscrivent dans le droit fil des déclarations hostiles à tout dialogue de certains de ses collaborateurs. Sur le dossier coréen, Emmanuel Macron s'est posé en émule de John Bolton, qui souhaite l'échec du dialogue entre Washington et Pyongyang et a été, à ce titre, mis à l'écart sur le dossier nord-coréen par le président Donald Trump.

Rencontre Moon Jae-in - Emmanuel Macron : le président français se pose en émule de John Bolton

Emmanuel Macron a-t-il les moyens de faire échouer le dialogue, la réconciliation et la marche vers la paix dans la péninsule coréenne ? Sollicité par le président sud-coréen Moon Jae-in pour soutenir sa politique de discussion avec le Nord, le président français s'est en tout cas posé en Monsieur Niet, refusant de prendre en compte les évolutions diplomatiques en cours autour de la péninsule coréenne depuis neuf mois.

Pour ce faire, le jeune président français n'a pas hésité à travestir la réalité. Ainsi, il a cru judicieux d'affirmer devant son visiteur sud-coréen que Pyongyang n'aurait pris aucun engagement précis ou concret sur la voie de sa dénucléarisation, ce qui est un mensonge. Selon lui, 

Nous attendons maintenant des engagements précis de Pyongyang démontrant sa volonté réelle de s'engager dans un processus de démantèlement de ses programmes nucléaire et balistique.

Pour enfoncer le clou, Emmanuel Macron a "martelé" (dixit l'AFP) que dans l'attente de ces engagements vers une "dénucléarisation complète, vérifiable et irréversible", la communauté internationale doit maintenir les sanctions contre Pyongyang, en se montrant hermétique aux arguments du Président Moon Jae-in, qui a observé à juste titre que Pyongyang n'a aucune raison de s'engager dans un désarmement unilatéral sans garanties de sécurité :

La Corée du Nord, en plus de laisser de côté l'arme nucléaire, doit pouvoir garantir sa sécurité. Ils doivent être assurés qu'ils aient fait le bon choix en acceptant la destruction de l'arme nucléaire.

Conséquence de cette politique de fermeture catégorique et ne méritant aucune discussion : non à l'établissement de relations diplomatiques complètes entre la France et la Corée du Nord, alors que la France est le dernier pays de l'Union européenne - avec l'Estonie - à ne pas avoir franchi le cap de la reconnaissance diplomatique. Toujours selon le Président Emmanuel Macron,

La France n'envisage en revanche pas "à ce stade" de reconnaître la Corée du Nord. "Il est bon de garder des leviers pour s'assurer qu'il y ait des changements", a-t-il insisté.

Emmanuel Macron feint ainsi de croire que la France disposerait de leviers pour faire évoluer la Corée du Nord sur la voie de la dénucléarisation et de l'amélioration des droits de l'homme, alors qu'elle a choisi une politique de retrait sur le dossier coréen (souligné par des parlementaires de tous bords politiques) qui restreint définitivement toute marge de manoeuvre.

Les arguments du président français n'ont rien de nouveau : ce sont ceux que martèle le néo-conservateur John Bolton, partisan hier de la guerre en Irak au nom d'armes de destruction massive... qui n'existaient pas. Ce qui n'empêche pas John Bolton de défendre, encore aujourd'hui, une guerre dévastatrice qui a aussi nourri le terreau du terrorisme islamique qui frappe l'Occident.

Source :




 

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