A plusieurs reprises, l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) a dénoncé les atteintes aux droits des Coréens qui résident au Japon et protesté auprès des autorités japonaises sur la répression contre l'Association générale des résidents coréens au Japon (Chongryon). En particulier, les Coréens du Japon continuent de lutter pour que leurs écoles (qui offrent un cursus complet d'études en coréen, jusqu'à l'université) ne soient plus exclus du champ des avantages fiscaux dont bénéficient les autres établissements d'enseignement de l'archipel : la lutte pour l'égalité des droits implique de mener la solidarité à l'échelle internationale. Afin d'éclairer les termes de ce combat pour les droits humains, l'AAFC présente et analyse le dernier rapport périodique, consacré au Japon, du Comité de l'ONU pour l'élimination de la discrimination raciale (acronyme anglais : CERD), adopté lors de sa soixante-neuvième session (en août 2018).
Rassemblement organisé par les Coréens du Japon en 2018, pour célèbrer l'anniversaire du soulèvement du 1er mars 1919 contre la colonisation japonaise
Composé de 18 experts indépendants, le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale est chargé de la surveillance de l’application de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Fondé en 1969, le CERD examine les rapports que doivent présenter les Etats parties à la Convention tous les deux ans.
Lors du dernier examen périodique de la situation au Japon, en août 2018, sur la base du rapport présenté par les autorités nippones, le CERD (dans les paragraphes 21 et 22 de sa recommandation) a rappelé ses recommandations de 2004 pour mettre fin aux discriminations à l'encontre des Coréens vivant au Japon (qui vivent dans l'archipel "depuis de nombreuses générations"), en demandant notamment qu'ils bénéficient du droit de vote aux élections locales et qu'ils puissent accéder à la fonction publique nationale :
Rappelant sa recommandation générale n° 30 (2004) sur les discriminations contre les non-citoyens, le Comité recommande que l'Etat partie assure aux Coréens qui vivent au Japon depuis de nombreuses générations se voient accorder le droit de vote aux élections locales, et de servir comme fonctionnaires publics nationaux pouvant également exercer l'autorité publiques ou participer au processus de décision.
Réitérant ensuite sa recommandation déjà formulée lors du précédent examen périodique de la situation au Japon, le Comité des Nations unies souligne ensuite que l'exclusion des écoles coréennes du dispositif de subventions scolaires pour les établissements secondaires porte atteinte au principe d'égalité d'accès à l'éducation (l'AAFC rappelle que - tous niveaux d'enseignements confondus - la Chongryon gère 65 établissements fréquentés par des dizaines de milliers d'élèves) :
Le Comité réitère sa précédente recommandation (CERD/C/JPN/CO/7-9, paragraphe 19) que l'Etat partie assure aux "écoles coréennes" de ne pas être discriminée dans le financement par le Fonds de Soutien à l'Education aux Lycées, afin d'assurer aux étudiants coréens les mêmes possibilités d'éducation, sans discrimination.
Enfin, le Comité rappelle que les autorités japonaises doivent prendre des mesures spécifiques pour protéger les femmes et les enfants coréens contre de multiples formes de discrimination, et notamment un discours haineux :
Le Comité recommande que l'Etat partie fasse des efforts pour assurer une protection aux femmes et aux enfants coréens contre de multiples formes de discrimination et les discours de haine.
Les discriminations basées sur l'origine sont particulièrement fortes vis-à-vis des femmes. Elles sont aussi le fait de groupes d'extrême-droite qui ciblent les enfants mineurs (notamment les primo-apprenant de la langue coréenne) afin de les effrayer, créer des sentiments d'anxiété et les dissuader de fréquenter les écoles coréennes. Le discours de haine ("hate speech") méconnaît les obligations internationales du Japon de réprimer les discriminations fondées sur la nationalité et le genre.
Dans son rapport, le Comité de l'ONU pour l'élimination de la discrimination raciale mentionne d'autres groupes victimes de discriminations : les Aïnous, les habitants de Ryukyu/Okinawa, les burakumin (descendants des castes de parias ouvertement discriminés à l'époque féodale), les musulmans, les femmes victimes de discriminations et de violence, les "femmes de réconfort" (anciennes esclaves sexuelles de l'armée japonaise avant et pendant la Seconde guerre mondiale), les non-citoyens, les migrants, les demandeurs d'asile et les victimes du trafic des êtres humains.
Le paragraphe 47 de la recommandation du CERD attend des autorités japonaises des réponses plus particulièrement sur les observations formulées dans ses paragraphes 14 (mise en place d'un dispositif plus effectif de lutte contre les discriminations, en amendant la loi sur l'élimination des discours de haine), 22 (recommandations relatives aux Coréens du Japon) et 34 (fin des discriminations contre les non-citoyens et les résidents étrangers - ce qui inclut les Coréens du Japon - y compris l'accès aux retraites et aux pensions d'invalidité, la mise en place d'une législation contre les discriminations dans les lieux publics contre les personnes étrangères ou d'apparence étrangère et d'envisager la ratification de la convention de 1954 sur le statut des personnes sans Etat et de la convention de 1961 pour réduire le nombre de cas des personnes sans Etat).
Ce programme pour l'égalité des droits doit être une préoccupation, qui nécessité également de favoriser l'évolution des mentalités dans la société japonaise.
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