Le 25 septembre 2015, l'IUT de Saint-Dié a organisé une conférence-débat intitulée "La Corée du Nord, au-delà des idées reçues", animée par le grand reporter Claude Vautrin, avec les interventions de Damien Jamet, maître de conférences à l'Université de Lorraine, et Benoît Quennedey, vice-président de l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) chargé des actions de coopération. Cette conférence faisait suite à un séjour - préparé par l'AAFC à partir de juillet 2014 - de Damien Jamet en République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) au début de l'été 2015, afin de jeter les bases d'une future coopération universitaire en mathématiques avec l'Université Kim Il-sung, l'une des plus prestigieuses universités de la RPD de Corée. L'AAFC remercie l'IUT de Saint-Dié et l'Université de Lorraine, dont relève l'IUT, pour leur invitation et l'organisation de cette conférence. Les très riches discussions, couvertes par différents médias locaux, ont permis de chasser plusieurs idées reçues sur la Corée du Nord, en montrant l'intérêt et la pertinence de coopérations universitaires pour jeter des ponts entre la France et la RPDC et contribuer ainsi au rapprochement des peuples et à la paix dans cette région du monde.
Si l'on mesure le succès d'une conférence par le nombre de participants rapporté à la population du lieu d'accueil, l'IUT de Saint-Dié - implanté dans une ville de 21 000 habitants au coeur des Vosges - peut s'enorgueillir d'avoir établi une sorte de record s'agissant d'un événément lié à la Corée : plus de 70 personnes présentes, dont le directeur de l'IUT, Olivier Caspary, par ailleurs maître de conférences en informatique, différents médias locaux, ou encore des étudiants que n'avait pas rebuté l'heure tardive à laquelle nombre de leurs congénères avaient définitivement mis le cap vers d'autres activités extra-universitaires en cette veille de week-end...
Car la Corée du Nord fascine et intrigue. Comme l'a souligné l'animateur des débats, le grand reporter Claude Vautrin (auteur de Grand reporter, le pas de côté, publié en 2015 par Kairos), dès un exposé liminaire clair, dense et ouvrant la porte à la confrontation d'idées, le pays est sous le feu des différentes propagandes. Tout au long de la conférence débat, illustrée par les photos prises cet été par Damien Jamet, aucun des aspects qui fait la singularité de la Corée n'a été éludé : économie, société, politique, diplomatie et, bien évidemment, échanges universitaires, conformes à l'objectif de la mise en place - depuis septembre 2011 - d'un bureau français de coopération à Pyongyang, et dont Damien Jamet a logiquement rencontré le directeur, Emmanuel Rousseau lors de son séjour en RPD de Corée. Il s'agit de la première représentation diplomatique française jamais établie dans le pays avant, espérons-le, que se nouent des relations diplomatiques complètes. En effet, la France est l'un des deux derniers pays de l'Union européenne (avec l'Estonie) à ne pas avoir franchi le cap de l'établissement de relations diplomatiques complètes, ce qui a contribué au recul de son influence en Asie du Nord-Est par rapport à d'autres pays occidentaux, au premier rang desquels l'Allemagne.
Mais, au-delà de la singularité toute relative (car largement façonnée par les médias) de la Corée du Nord, c'est déjà un intérêt scientifique qui a motivé la volonté de Damien Jamet d'approfondir les échanges entre l'IUT de Lorraine et l'Université Kim Il-sung à Pyongyang : tout a commencé par la lecture, dans une revue internationale, d'un article relevant de sa spécialité écrit par un confrère nord-coréen, confirmant le haut niveau de la RPDC en mathématiques, et qui a donné lieu à un échange de correspondances. Comme Damien Jamet n'avait pas de connaissance préalable de la Corée du Nord, il s'est tourné vers l'AAFC qui, lors du voyage de la délégation de l'association qui s'est rendue en RPDC en août 2014, a discuté directement des modalités d'une coopération universitaire - qui n'est pas la première (ni sans doute la dernière) qu'a favorisée l'AAFC. Pour le lancement réussi de cet échange (le premier à notre connaissance, en France, avec la RPDC dans le domaine des sciences fondamentales) à maints égards prometteur, l'AAFC remercie par ailleurs M. Ri Tok-son, conseiller à la délégation générale de la RPD de Corée en France, et Mme Jong Un-a, secrétaire générale de l'Association d'amitié Corée-France au sein du Comité des relations culturelles avec les pays étrangers, qui ont été des intermédiaires efficaces.
Pendant près de deux heures, les clichés sont tombés les uns après les autres : tout d'abord, il est possible de voyager en Corée du Nord, dont la culture confucéenne a façonné un respect de l'autorité (y compris celle des enseignants) devenue largement étrangère à nos modes de pensée. Il y a chez les Nord-Coréens une appétence pour les connaissances techniques et scientifiques occidentales, afin d'accomplir un nécessaire bond en avant dans le développement et la modernisation du pays. Quand les Français moroses font grise mine, les Coréens (et pas seulement du Nord) manifestent la volonté prométhéenne d'un peuple il y a encore peu soumis au joug d'une domination étrangère, aspirant à la réunification de sa patrie, et se projetant vers l'avenir avec la ferme conviction que l'homme est et doit rester maître de son destin. Par-delà l'échange universitaire entre la Lorraine et Pyongyang, qui n'en est qu'à ses débuts, c'est de la rencontre entre deux univers de pensées et deux sociétés très différentes dont a rendu compte une conférence-débat mémorable.
commenter cet article …