Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
22 février 2011 2 22 /02 /février /2011 00:07

Des documents américains récemment déclassifiés indiquent que, de 1958 à 1991, les Etats-Unis ont déployé des centaines de têtes nucléaires dans le sud de la péninsule coréenne - un maximum ayant été atteint en 1967, date à laquelle on comptait 950 têtes nucléaires. Si, depuis 1991, l'armée américaine affirme avoir retiré toutes ses armes nucléaires du sol coréen, la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) exige toujours une réciprocité américaine, vérifiable, dans le cadre des accords de dénucléarisation de la péninsule coréenne - alors que les inspections de l'AIEA visent le seul programme nord-coréen qui porte sur un nombre d'armes très inférieur à celles qu'a reconnu déployer l'armée américaine pendant plus de trois décennies, après que le général MacArthur eut envisagé l'utilisation des armes nucléaires en Corée pendant la guerre (1950-1953). L'AAFC publie ci-après la traduction d'un article du quotidien sud-coréen de langue anglaise The Korea Times.

 

honest_john.jpgDes armes nucléaires ont été déployées pendant 33 ans dans la péninsule coréenne, de 1958 à 1991 quand les Etats-Unis ont retiré leurs dernières 100 armes nucléaires tactiques, selon un journal local.

 

En janvier 1958, les Etats-Unis ont déployé pour la première fois des armes nucléaires tactiques, avec de petites têtes nucléaires sur la fusée Honest John et des obusiers de 8 pouces. Les obusiers de 8 pouces ont été déployés pendant 33 ans jusqu'à leur retrait en 1991 (...).

 

En mars 1958, des têtes nucléaires qui pouvaient être lâchées par des avions de combat ont été déployées, tandis que les missiles Lacrosse, Davy Crockett et Sergeant avec de petites têtes nucléaires ont fait leurs débuts en Corée entre juillet 1960 et septembre 1963.

 

Jusqu'à 950 têtes nucléaires ont été déployées jusqu'en 1967, alors qu'un nombre croissant d'armes nucléaires tactiques étaient introduites. Au total, 11 sortes d'armes nucléaires tactiques ont été déployées pendant 10 ans.

 

L'entraînement dans l'utilisation des têtes nucléaires s'est poursuivi jusqu'en 1991. Selon des documents américains déclassifiés, les derniers exercices sont intervenus sur la base aérienne de Gunsan durant la première moitié de l'année, avec les avions de combat 48 F-16C de la 8ème Unité Tactique.

 

Source : " Korea had 950 nuclear warheads till 1991", in The Korea Times, 20 février 2011 (traduit de l'anglais par l'AAFC)

 

 

Sur la doctrine d'emploi de l'arme nucléaire par les Etats-Unis en Corée, lire aussi :

La politique anti-nucléaire en trompe-l'oeil de l'administration Obama, 17 avril 2010 

Quand les Etats-Unis détruisaient un pays pour le sauver, 25 juin 2010

Tirer les enseignements de l'histoire ou tirer profit de la situation?, 2 juillet 2010



Partager cet article
Repost0
18 février 2011 5 18 /02 /février /2011 21:14

La fin de l'année 2010 a vu les médias occidentaux mettre en lumière un site Internet, WikiLeaks, qui a notamment divulgué le contenu de nombreux télégrammes diplomatiques américains. L'AAFC n'a pas qualité pour participer au débat sur l'origine des fuites ni sur leurs conséquences politiques et diplomatiques, ne pouvant que se borner à constater que les difficultés du site et les poursuites intentées à l'encontre de son principal porte-parole, Julian Assange, portent un regard cru sur les limites de la démocratie au sens où l'entendent les gouvernements occidentaux. Spécialisée sur les questions coréennes, l'AAFC souhaite plus modestement faire le point sur ce que nous apprennent les télégrammes diplomatiques américains rendus publics de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), et des moyens de la diplomatie américaine elle-même.

 

Julian_Assange_cropped_-Norway-_March_2010-.jpg"WikiLeaks nous aide à comprendre, après tout, que le renseignement n'est parfois pas fiable et peut même être amusant", selon le constat d'un spécialiste russe de la Corée du Nord, Leonid Petrov, dans un message posté sur Facebook le 1er décembre 2010. "Il nous apprend aussi ce qui peut arriver quand vous n'avez pas d'accès direct à la Corée du Nord. Les personnes qui connaissent réellement la Corée du Nord n'envoient pas des télégrammes à leurs gouvernements depuis les pays voisins [de la Corée du Nord]", ce qui suppose d'avoir des diplomates en poste à Pyongyang - comme ce n'est pas le cas des Etats-Unis, du Japon ou de la France.

 

De fait, de révélations sur la Corée du Nord, il n'y en a pas eu : qu'il s'agisse des (nombreuses) spéculations sur le pouvoir nord-coréen ou des positions sur la question coréenne des autres gouvernements que celui des Etats-Unis, tout avait déjà été dit par des fuites dans la presse, y compris sur des rumeurs qui devaient finalement s'avérer fausses. Ce qui a été présenté comme la principale nouveauté serait les interrogations au sein du gouvernement chinois sur la possibilité, ou non, d'une remise en cause de l'alliance sino - nord-coréenne. Mais là encore, le débat relevait du domaine public, au moins depuis l'essai nucléaire nord-coréen du 25 mai 2009 qui avait entraîné la publication d'articles, dans plusieurs médias chinois officiels, appelant à réviser la position de la Chine à l'égard de la RPDC. Pourtant, le raffermissement de l'entente sino - nord-coréenne, patent au second semestre de l'année 2010 après la multiplication des exercices conjoints américano - sud-coréens, a montré la différence qu'il faut établir entre la position du gouvernement chinois et les débats à l'intérieur de la société chinoise. Les diplomates américains semblent avoir d'autant plus volontiers amplifié les voix chinoises critiques à l'égard de la RPDC qu'elles ne pouvaient que conforter leurs secrets espoirs d'une dégradation des relations entre Pyongyang et Pékin.

 

Parmi les télégrammes diplomatiques rendus publics, on notera la faible place qu'occupent les sujets militaires, indiquant par là-même qu'il s'agit d'extraits des documents présentant le plus faible degré de confidentialité, et qui sont aussi les plus largement diffusés. On ne saura ainsi rien des coopérations militaires, réelles ou supposées, entre la Corée du Nord et l'Iran, la Syrie ou la Birmanie.

 

Malgré cette limite d'accès aux télégrammes diplomatiques américains, le contenu des documents rendus publics est surtout révélateur des centres d'intérêt du renseignement américain sur la RPDC, de ses sources et, avouons-le, de ses faiblesses. Les questions économiques et sociales sont réduites à la portion congrue. En revanche, les spéculations sur les dirigeants nord-coréens sont légion, sans réel effort pour comprendre le système politique ni les enjeux de pouvoir entre les différents acteurs - contrairement, par exemple, aux analyses assez fines conduites par des chercheurs étrangers sur la période de mise en place des institutions nord-coréennes après 1945.

 

Généralement dépourvus d'accès à des sources nord-coréennes (en tout cas, pour ceux qui se sont exprimés dans WikiLeaks), les diplomates américains se prêtent au jeu des spéculations fondées sur les sources les plus faibles : des témoignages oraux de personnes tierces ayant accès à la Corée du Nord. Mais quel crédit accorder à des discussions de fin de repas (arrosé ?) avec tel ou tel acteur chinois ou russe, surtout quand elles proviennent de diplomates manifestement néophytes en matière de renseignement ? La Corée du Nord apparaît ainsi comme le révélateur des failles diplomatiques de l'hyperpuissance américaine.

 

 

 

 

Partager cet article
Repost0
12 décembre 2010 7 12 /12 /décembre /2010 20:05

Même auréolé du Prix Nobel de la Paix, Le président américain Barack Obama semble marcher sur les traces de son prédécesseur George W. Bush. Suite aux incidents du 23 novembre sur l'île de Yeonpyeong, et loin de contribuer à mettre fin à un conflit de plus de 60 ans dans la péninsule coréenne, l'administration américaine n'a de cesse de jeter de l'huile sur le feu pour mieux justifier une présence militaire massive dans la zone Asie-Pacifique. Tout démontre que les moyens militaires déployés par les États-Unis en Corée et dans ses environs immédiats sont moins destinés à contrer la prétendue menace de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) qu'à contenir la montée en puissance de la Chine identifiée comme le principal adversaire stratégique des États-Unis depuis le début des années 2000.

Manœuvres à répétition

USS George WashingtonLe 1er décembre 2010, les États-Unis et leur allié sud-coréen ont achevé quatre jours de manœuvres navales en mer Jaune (mer de l'Ouest) où la Chine revendique une zone économique exclusive des 200 miles. Pour cet exercice, les États-Unis ont déployé le super porte-avions à propulsion nucléaire de 97 000 tonnes USS George Washington ainsi que son groupe de combat aéronaval composé d'un croiseur et de trois destroyers lance-missiles. Le déploiement américain consistait en 6 000 marins et 75 avions. La Corée du Sud a, elle, fourni des destroyers, des corvettes, des frégates, des navires de soutien, des avions de lutte anti-sous-marine et un nombre non révélé de soldats.

Cette simulation de guerre, avec exercices de bombardement et de tir à balles réelles, était la dernière en date d'une série de manœuvres entamée en juillet de cette année par les États-Unis dans la péninsule coréenne et sur les mers qui l'entourent.

f22.jpg

Du 25 au 28 juillet, les États-Unis et la Corée du Sud ont effectué l'exercice militaire Invicible Spirit en mer du Japon (mer de l'Est), en y engageant 20 bâtiments de guerre, dont le super porte-avions USS George Washington, 200 avions de combat, y compris des chasseurs furtifs F-22 Raptor, et 8 000 soldats.

En août, les armées américaine et sud-coréenne ont mené en Corée du Sud l'exercice militaire annuel Ulji Freedom Guardian, le plus vaste exercice de simulation de commandement et de contrôle au monde, mobilisant 30 000 soldats américains et 56 000 soldats sud-coréens.

En septembre, Washington et Séoul on effectué un exercice de guerre anti-sous-marine en mer Jaune, auquel participaient deux destroyers lance-missiles américains ainsi qu'un sous-marin d'attaque rapide et deux destroyers sud-coréens.

Seul l'exercice du mois d'août était de routine, dernier de la série de manœuvres Ulji Freedom Guardian qui ont lieu depuis plusieurs décennies.

Le 6 décembre, l'armée sud-coréenne a entamé cinq jours d'exercices de tirs d’artillerie sur 29 sites le long des côtes est, sud et ouest de la péninsule coréenne, « afin d'affirmer ses engagements pour des représailles fermes contre toute provocation future de la Corée du Nord »,  ont déclaré les responsables sud-coréens. L’île de Yeonpyeong, victime du duel d'artillerie du 23 novembre entre la Corée du Sud et la Corée du Nord, a néanmoins été exclue de ces exercices.

L'armée sud-coréenne a prévu d'effectuer de nouveaux exercices de tir à partir du 13 décembre, sur 27 sites. Les îles frontalières de la côte ouest de la péninsule coréenne, et notamment l'île de Yeonpyeong, sont toujours exclues du périmètre de ces exercices.

La RPDC a publié le 5 décembre une déclaration dénonçant ces manœuvres à munitions réelles, en accusant le Sud de «conduire la situation dans la péninsule coréenne à rapidement devenir extrêmement incontrôlable» après que le nouveau ministre de la Défense sud-coréen Kim Kwan-jin, successeur de Kim Tae-young, démissionnaire, eut promis des représailles, déclarant que l'armée sud-coréenne allait «prendre des mesures fortes pour que la Corée du Nord n'ose pas faire de nouvelles provocations».

Le 6 décembre, alors que commençaient les exercices sud-coréens, la secrétaire d'État américaine Hillary Clinton rencontrait à Washington les ministres des Affaires étrangères de la Corée du Sud Kim Sung-hwan et du Japon Seiji Maehara. Tout comme la Russie et la Chine ont été exclues de l'enquête dirigée par les États-Unis sur le naufrage de la corvette sud-coréenne Cheonan, elles n'étaient pas invitées à la réunion de Washington. Pourtant, la Chine et la Russie participent depuis 2003 aux pourparlers à Six – avec les États-Unis, le Japon, la Corée du Sud et la Corée du Nord – sur la dénucléarisation de la péninsule coréenne. Suite aux affrontements inter-coréens du 23 novembre en mer Jaune, la Chine a même appelé à une réunion d'urgence des représentants des six pays parties aux pourparlers, la Corée du Nord étant d'accord pour une reprise des pourparlers à six interrompus depuis 2009. Dès le 2 décembre, la Russie s'est déclarée prête à se joindre à une éventuelle session d'urgence de négociations à six sur la situation dans la péninsule coréenne.

standard_missile_3_.jpgLes demandes de la Chine et de la Russie ont été écartées par les États-Unis et leurs alliés sud-coréens et japonais au profit d'initiatives moins apaisantes. Le 3 décembre, deux jours après la fin des manœuvres navales en mer Jaune dirigées par les États-Unis, ces-derniers ont commencé un exercice d'une semaine avec le Japon à proximité des côtes sud-coréennes. Ces manœuvres Keen Sword 2011 ont mobilisé 60 navires de guerre, 400 avions et 44 000 soldat, ce qui en fait le plus grand exercice militaire conjoint jamais organisé par les États-Unis et le Japon. Au cours de ces manœuvres, ont été utilisés les intercepteurs Standard Missile-3 (SM-3) embarqués à bord des destroyers américains et japonais de classe Aegis déployés en mer du Japon, et les missiles anti-balistiques Patriot Advanced Capability-3 (PAC-3) implantés du nord au sud du Japon, de Hokkaido à Okinawa. L'agence de presse Kyodo News a expliqué que « ces manœuvres constituent un entraînement pour la protection contre les attaques de missiles balistiques et pour la défense des îles japonaises reculées », cette dernière allusion faisant référence à une dispute entre la Chine et le Japon au sujet des îles Senkaku/Diaoyu situées en mer de Chine orientale.

Des militaires sud-coréens ont été invités à observer cet exercice. Avant eux, rapporte l'Australian Associated Press, des officiers australiens, britanniques et français avaient embarqué à bord de l'USS George Washington pour observer les manœuvres organisées du 28 novembre au 1erdécembre en mer Jaune.

Ce n'est pas seulement la menace de représailles conventionnelles qui est agitée devant la Corée du Nord. Le 22 novembre, le ministre sud-coréen de la Défense Kim Tae-young répondait par l'affirmative à un député demandant « si le gouvernement a l'intention d'envisager le redéploiement d'armes nucléaires américaines tactiques en Corée du Sud ».

Résurrection des alliances de la Guerre froide

dod_admiral_mullen_300_01Dec10.jpgLe naufrage de la corvette sud-coréenne Cheonan, le 26 mars 2010, a été avancé pendant plusieurs mois pour expliquer les manœuvres militaires des États-Unis et de leurs alliés au large de l'Asie de l'Est. Mais l'incident du 26 mars peine à justifier les manœuvres navales américano-vietnamiennes organisées en août en mer de Chine méridionale ou les visites effectuées en Australie et dans neuf autres pays de la zone Asie-Pacifique par le Président Barack Obama, le secrétaire à la Défense Robert Gates, la secrétaire d'État Hillary Clinton et le chef d'état-major des armées des États-Unis l'amiral Michael Mullen au cours du mois de novembre.

Trois mois après le naufrage du Cheonan, le Président Obama accusait son homologue chinois, Hu Jintao, d'« aveuglement délibéré » dans les relations avec la Corée du Nord au cours de ce qui fut rapporté comme une conversation « franche » pendant le sommet du G20 de Toronto, le 27 juin.

Depuis le bombardement nord-coréen de l'île sud-coréenne de Yeonpyeong le 23 novembre, les États-Unis ont multiplié les pressions sur la Chine pour que celle-ci fasse pression sur la Corée du Nord. Le chef d'état-major américain Mullen a déclaré le 1er décembre devant un think tank de Washington que « l'appel de Pékin à des consultations ne sera pas un substitut à l'action », et, évoquant le programme de modernisation de l'armée chinoise :« Je suis préoccupé par certains moyens haut de gamme que [les Chinois] sont clairement en train de développer. Je ne les sous-estime pas en termes de capacités. Certaines de ces capacités spécifiques sont clairement concentrées et pointées vers les États-Unis d'Amérique, et il s'agit de capacités anti-accès. » En d'autres termes, les États-Unis reprochent à la Chine de se doter de moyens défensifs face à la présence militaire américaine croissante au large de ses côtes.

Les États-Unis utilisent la Corée du Nord comme un leurre pour viser la Chine et soutiennent le Japon dans ses différends territoriaux avec la Chine et la Russie dans le cadre d'une stratégie plus vaste de renouvellement, d'élargissement et d'intégration des alliances militaires nouées par Washington dans la zone Asie-Pacifique.

Washington reconnaît que les îles Senkaku (ou Diaoyu pour la Chine), administrées par le Japon, sont japonaises, mais considère aussi les îles Kouriles du sud, lesquelles appartiennent depuis 1945 à la Russie (et avant elle à l'Union soviétique), comme territoires japonais.

La visite de Hillary Clinton en Nouvelle-Zélande, en novembre, a abouti à la signature de la Déclaration de Wellington par laquelle les deux pays s'engagent à un nouveau partenariat stratégique, à des consultations militaires annuelles et à une reprise des exercices militaires en commun. Les États-Unis ont ainsi ressuscité le Traité de sécurité conclu par l'Australie, la Nouvelle-Zélande et les États-Unis (ANZUS) pendant la Guerre de Corée et invoqué par la suite pour envoyer des soldats australiens et néo-zélandais se battre aux côtés des Américains pendant la Guerre du Vietnam.

Kevin Rudd, ministre des Affaires étrangères d'Australie, a affirmé le 28 novembre que « l'Australie pourrait être entraînée dans un conflit militaire dans la péninsule coréenne en application de son alliance avec les États-Unis ».

De manière similaire, une note de synthèse préparée pour le ministre de la Défense du Canada Peter MacKay stipulait que « si une guerre éclate dans la péninsule coréenne, le Canada pourrait se trouver impliqué en raison d'une alliance militaire d'un demi-siècle avec les Nations Unies », le Commandement des Nations Unies formé par les États-Unis et leurs alliés de la Guerre de Corée après l'armistice signé en 1953. Toujours selon cette note, il est prévu que le Commandement des forces combinées (CFC) réunissant les États-Unis et la Corée du Sud mène les opérations militaires contre la Corée du Nord, et le CFC « inclut sous son parapluie stratégique organisationnel l'ancien Commandement des Nations Unies ».

Outre le Canada et les États-Unis, le Commandement des Nations Unies réunit des pays membres de l'OTAN - Grande-Bretagne, France, Pays-Bas, Belgique, Grèce, Turquie et Luxembourg -, les pays membres de l'ANZUS - Australie et Nouvelle-Zélande -, et les Philippines et la Thailande, pays avec lesquels les États-Unis ont noué des alliances – avec obligations d'assistance militaire – comparables à celles passées avec l'Australie, la Corée du Sud, le Japon et la Nouvelle-Zélande.

A l'instar du traité ANZUS, l'accord d'assistance militaire mutuelle américano-japonais de 1960 a été réactivé. Le 27 octobre, à Hawaï, la secrétaire d'État américaine et le ministre japonais des Affaires étrangères ont tenu ensemble une conférence de presse au cours de laquelle, interrogée au sujet de l'archipel des Senkaku/Diaoyu revendiqué à fois par Tokyo et par Pékin, Hillary Clinton a répondu : « Les Senkaku entrent dans le champ de l'article 5 du Traité de coopération mutuelle et de sécurité signé en 1960 par les États-Unis et le Japon. Cela concerne de manière plus générale l'engagement des États-Unis pour la sécurité du Japon. Nous considérons l'alliance entre les États-Unis et le Japon comme un des plus importants partenariats que nous ayons dans le monde et nous nous engageons à respecter nos obligations quant à la protection des Japonais. »

Senkaku-Diaoyu.jpg

La secrétaire d'État américaine a aussi déclaré que l'alliance entre Washington et Tokyo constitue « la pierre angulaire de l'engagement stratégique américain en Asie-Pacifique. »

Deux semaines plus tard, le Président Obama, en visite au Japon pour le sommet du Forum de coopération économique Asie-Pacifique (APEC), a tenu des propos similaires. Pour Barack Obama, « l'engagement des États-Unis dans la défense du Japon est inébranlable ».

Au mois de novembre 2010, avant les manœuvres militaires américano-japonaises Keen Sword, le lieutenant-général Hawk Carlisle, dirigeant l'exercice du côté américain, a pu déclarer : « En 1960, le Japon et les États-Unis ont signé le Traité de coopération mutuelle et de sécurité. Une participation à Keen Sword améliore encore l'alliance entre le Japon et les États-Unis, laquelle demeure une relation stratégique essentielle dans la région Asie-Pacifique. »

Et le 2 novembre, le porte-parole du département d'État américain Philip Crowley a soutenu les revendications territoriales du Japon sur les île Kouriles du sud appartenant à la Russie, en faisant référence aux « Territoires du nord », soit le terme employé par le gouvernement japonais pour parler de ces îles. Mais Crowley n'est pas allé aussi loin que Hillary Clinton qui, cinq jours auparavant, promettait d'appliquer l'article 5 du Traité américano-japonais de 1960, lequel stipule : « Chaque Partie reconnaît qu'une attaque armée contre l'une ou l'autre Partie dans les territoires administrés par le Japon constituerait un danger pour ses propres intérêts et sécurité et déclare qu'elle agira pour affronter le danger commun. » Il est donc tout à fait imaginable que Washington et Tokyo invoquent le Traité de 1960 contre la Russie.

Des blocs militaires, traités et accords d'assistance mutuelle vieux de plusieurs décennies et apparemment en sommeil sont en train d'être ressuscités et même élargis dans la région Asie-Pacifique. Les alliances militaires calquées sur le modèle de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord dans les années 1950 et leurs descendantes du 21ème siècle sont intégrées au sein d'une version orientale de l'OTAN, qui en est aussi un prolongement par bien des aspects.

 

Au moins huit pays d'Asie et du Pacifique – Australie, Kazakhstan, Malaisie, Mongolie, Nouvelle-Zélande, Singapour, Corée du Sud et Tonga – ont déjà des soldats participant à la Force internationale d'assistance à la sécurité de l'OTAN en Afghanistan. Et, dans le cadre de son effort de guerre en Afghanistan, l'OTAN maintient une présence militaire dans cinq pays frontaliers de la Chine : l'Afghanistan, le Kazakhstan, le Kirghizistan, le Pakistan et le Tadjikistan.

En novembre 2010, le Japon a annoncé le déploiement de troupes « dans son île la plus à l'ouest en réponse aux manœuvres navales chinoises en mer de Chine orientale ». Les cent premiers soldats seront envoyés sur l'île de Yonaguni, la plus au sud des îles Ryukyu/Nansei à moins de 160 kilomètres de l'archipel des Senkaku/Diaoyu. Le ministère japonais de la Défense « envisage aussi d'envoyer des soldats sur les îles de Miyako et d'Ishigaki à l'ouest d'Okinawa pour renforcer la sécurité des frontières », Ishigaki étant aussi située à environ 160 kilomètres des Senkaku/Diaoyu.

Revenant sur le grand nombre de visites effectuées par de hauts responsables diplomatiques et militaires des États-Unis dans la région Asie-Pacifique au cours du mois de novembre 2010, le quotidien indien The Hindu a écrit : « Les visiteurs américains [...]ont déclaré que Washington est résolu à étendre son empreinte en Asie du Sud-Est. Clinton a appelé à renforcer la présence militaire américaine à Singapour, ce qui implique une plus forte emprise sur le détroit stratégique de Malacca, une coopération plus étroite en matière de défense avec la Thailande et les Philippines [...] et une interaction grandissante avec le Vietnam. »

L'élément le plus ambitieux du plan américain de création d'un équivalent asiatique de l'OTAN est le recrutement de l'Inde. Les États-Unis veulent prendre la place de la Russie en tant que principal fournisseur d'armes et allié militaire historique de l'Inde. Les pays de l'Asie du Sud-Est sont ainsi embarqués dans la stratégie américaine visant à empêcher l'émergence de la Chine comme puissance régionale et mondiale.

Washington utilise la crise de la péninsule coréenne pour polariser politiquement et militairement l'Asie de l'Est. Voilà pourquoi les tentatives de la Chine et de la Russie pour désamorcer le conflit coréen, relancer les négociations et aboutir à une solution pacifique sont méprisées par les responsables gouvernementaux et militaires américains.

La cible chinoise désignée par Bush et validée par Obama

Quand on analyse les motivations profondes de la politique américaine en Asie, on ne voit aucune différence entre l'administration Obama et l'administration Bush qui l'a précédée. En janvier 2001, l’administration Bush est entrée en fonction avec un objectif clair : ressusciter la doctrine de domination permanente énoncée dans les Directives pour le plan de défense (Defense Planning Guidance, DPG) pour les années 1994-1999, premier exposé formel des buts stratégiques des États-Unis après la disparition de l’Union soviétique. Selon la première version de ce document, sortie dans la presse au début de 1992, le premier objectif stratégique des États-Unis est d’empêcher l’apparition d’un futur concurrent susceptible de défier la supériorité militaire américaine. « Notre premier objectif est de prévenir la réapparition d’un nouveau rival [...] qui présente une menace de l’ordre de celle présentée autrefois par l’Union soviétique »,est-il écrit dans ce document. En conséquence, « nous devons nous efforcer d’empêcher toute puissance hostile de dominer une région dont les ressources, contrôlées ensemble, suffiraient à donner une puissance mondiale. »

En 1992, la doctrine de domination permanente ne spécifiait pas l’identité des futurs concurrents dont il fallait empêcher l’émergence par une action coercitive. Les stratèges américains s’inquiétaient alors d’un ensemble de rivaux potentiels, parmi lesquels la Russie, l’Allemagne, l’Inde, le Japon et la Chine ; chacun d’entre eux, pensaient-ils, pouvait devenir en quelques décennies une superpuissance, et ils devaient donc tous en être dissuadés. Cependant, quand George W. Bush fut élu président des États-Unis en 2000, le nombre des rivaux potentiels s’était réduit. Aux yeux des stratèges de Washington, seule la République populaire de Chine possédait la capacité économique et militaire de défier les États-Unis et d’aspirer à la superpuissance. Dorénavant, perpétuer la supériorité américaine dans le monde impliquait de contenir la puissance chinoise.

Pendant la campagne présidentielle de 2000, Condoleezza Rice, alors conseillère pour la politique étrangère du candidat républicain George W. Bush, signa dans la revue Foreign Affairs, publiée par le Council on Foreign Relations, influent think tank américain, un article suggérant que la République populaire de Chine défierait inévitablement les intérêts vitaux des États-Unis.

« la Chine n’est pas une puissance du ‘statu quo’, mais une puissance qui aimerait changer en sa propre faveur l’équilibre du pouvoir en Asie. Cela seul suffit à en faire un concurrent stratégique, et non pas ce que l’administration Clinton a qualifié une fois de ‘partenaire stratégique’ », écrivait Condoleezza Rice en 2000. Elle insistait sur l'importance d’adopter une stratégie prévenant l’émergence de la Chine comme puissance régionale. En particulier, écrivait Rice, « les États-Unis doivent approfondir leur coopération avec le Japon et la Corée du Sud et s’engager à maintenir une forte présence militaire dans la région », Washington devant aussi « prêter davantage attention au rôle de l’Inde dans l’équilibre régional », et intégrer ce pays dans un système d’alliance contre la Chine.

En 2006, pendant le second mandat du président Bush, l’Examen quadriennal de la Défense (Quadrennial Defense Review, QDR), réaffirmant le précepte général énoncé dans les DPG de 1992, identifia la Chine comme la superpuissance concurrente la plus probable et la plus dangereuse : « Parmi les puissances émergentes majeures, la Chine a le plus fort potentiel pour rivaliser militairement avec les États-Unis et capter des techniques militaires perturbatrices qui pourraient au bout d’un certain temps contrebalancer les avantages militaires traditionnels des États-Unis. »

Le QDR en appelait donc à un renforcement des moyens de combat dans la zone Asie-Pacifique, insistant particulièrement sur les moyens navals : « La flotte sera davantage présente dans l’océan Pacifique », note le document. Pour y parvenir, « la Marine envisage d’ajuster la position et l’implantation de ses forces pour fournir dans le Pacifique au moins six porte-avions opérationnels et disponibles ainsi que 60% de ses sous-marins à des fins d’engagement, de présence et de dissuasion ».

Chaque porte-avions étant au centre d’un large déploiement de navires de soutien et d’avions de protection, une concentration des forces navales américaines était à prévoir dans l’ouest du Pacifique, nécessitant également une extension substantielle du complexe des bases américaines dans la région. On sait aujourd'hui que,  prenant prétexte du naufrage du Cheonan et de la prétendue implication de la Corée du Nord, l’armée américaine conservera au moins jusqu’en 2015 le contrôle opérationnel de l’armée sud-coréenne en temps de guerre, et non jusqu’en 2012 comme négocié en 2007, ainsi que sa base militaire sur l’île japonaise d’Okinawa, contrairement à ce qu’avait promis l’ancien Premier ministre nippon Yukio Hatoyama; lequel a été poussé à la démission pour ce reniement.

BasesUSenAsie.jpg

 

 

 

La Russie et la Chine partagent chacune une frontière avec la Corée du Nord et un conflit dans la péninsule coréenne les affecterait. Les États-Unis sont, eux, loin de la Corée, et exploitent donc l'aggravation des tensions dans la péninsule afin d'accroître leur présence dans la zone Asie-Pacifique, notamment par l'intermédiaire du Japon et de la Corée du Sud. Les États-Unis entendent constituer une alliance militaire triangulaire avec le Japon et la Corée du Sud. Une telle alliance serait conforme aux vœux du président sud-coréen Lee Myung-bak qui a manifesté dès son élection, en décembre 2007, sa volonté de resserrer les liens entre la Corée du Sud et les États-Unis, d'une part, et le Japon, d'autre part. Mais cette alliance serait à bien des égards contre-nature compte tenu de contentieux historiques et territoriaux non résolus entre le Japon et la Corée.

Et la France? Jusqu'à présent, elle se contente de suivre la politique des États-Unis en Corée. Le fait le plus saillant de cette politique suiviste est son refus persistant d'établir des relations diplomatiques complètes avec la République populaire démocratique de Corée, alors qu'elle est le dernier pays de l'Union européenne – avec l'Estonie – à ne pas l'avoir fait. Pendant les manœuvres américano-sud-coréennes du 28 novembre au 1er décembre, des militaires français étaient observateurs. Quelle sera la prochaine étape? En tant que pays membre du Commandement des Nations Unies en Corée, la France pourrait-elle aussi être entraînée dans un conflit majeur dans la péninsule? La France nourrit de grande ambitions pour ses relations avec la Chine comme l'a montré la visite d'État effectuée en France par le président chinois Hu Jintao du 4 au 6 novembre 2010. La Déclaration conjointe des présidents Hu et Sarkozy adoptée lors de cette visite prône une « approche stratégique et de long terme, le respect mutuel et la prise en considération de la souveraineté, de l'intégrité territoriale et des intérêts fondamentaux des deux pays pour faire progresser encore davantage le partenariat global stratégique entre la France et la Chine ». Il n'est pas certain que, en appuyant la stratégie anti-chinoise des États-Unis en Asie, et particulièrement en Corée, la France serve ses propres intérêts.

 

Partager cet article
Repost0
4 décembre 2010 6 04 /12 /décembre /2010 19:49

Les affrontements entre la Corée du Nord et la Corée du Sud du 23 novembre 2010 étaient malheureusement parfaitement prévisibles, compte tenu de contentieux territoriaux non résolus et d'un état de guerre qui perdure depuis 60 ans dans la péninsule coréenne. En France, les principaux médias n'ont que très rarement rendu compte de la situation exacte qui prévaut en Corée et des moyens de prévenir des crises futures. Car de tels moyens existent. L'Association d'amitié franco-coréenne les aide à y voir plus clair en proposant la traduction française du dossier rédigé à ce sujet par National Campaign to End the Korean War (Campagne nationale pour mettre fin à la Guerre de Corée) qui, aux États-Unis, regroupe des organisations de citoyens d'origine coréenne, de vétérans, de défense des droits de l'homme et toutes les personnes désireuses de promouvoir un traité de paix dans la péninsule coréenne et une nouvelle politique des États-Unis à l'égard de la Corée. Parallèlement, l'Association d'amitié franco-coréenne continue de diffuser une pétition pour un traité de paix en Corée. Les derniers événements démontrent qu'il est plus que jamais nécessaire de signer et de faire signer cette pétition.

 

 

Des eaux disputées : contexte d'une crise

 

NLL-YeonpyeongLe 23 novembre 2010, les militaires de la République de Corée (RC, Corée du Sud) et des États-Unis effectuaient les exercices de simulation de guerre « Hoguk » [« Défendre le pays »], une mobilisation conjointe massive impliquant 70 000 soldats, 600 chars, 500 avions, 90 hélicoptères, et 50 navires. Il était prévu qu'ils s'étalent sur neuf jours.

 

La République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) a envoyé plusieurs avertissements à la Corée du Sud, demandant que l'armée sud-coréenne stoppe ses manœuvres militaires et arrête ses tirs d'artillerie dans les eaux territoriales nord-coréennes.

 

Les unités d'artillerie sud-coréennes positionnées sur les îles en mer de l'Ouest, à seulement 12 kilomètres des côtes nord-coréennes, ont commencé leurs exercices de tir le 23 novembre 2010, lesquels ont duré quatre heures. Selon le ministère sud-coréen de la Défense nationale, les unités basées sur ces îles, dont l'île de Yeonpyeong, ont tiré 3 657 fois, soit 900 obus par heure, dans des eaux disputées revendiquées à la fois par Pyongyang et Séoul près de la ligne de limite nord (NLL). Fixée de manière unilatérale par la Marine américaine en 1953, la NLL n'est pas reconnue au niveau international et n'a jamais été acceptée par la Corée du Nord.

 

Les unités d'artillerie nord-coréennes ont répliqué en bombardant l'île de Yeonpyeong. L'armée sud-coréenne a répondu en tirant sur les bases nord-coréennes. Sur l'île de Yeonpyeong, où se trouvent des bases militaires sud-coréennes et 1 300 résidents d'une communauté de pêcheurs, l'artillerie nord-coréenne a tué deux marines sud-coréens et deux civils qui étaient des contractuels travaillant à la construction de nouveaux baraquements sur une installation militaire. L'attaque a fait au moins seize autres blessés. Il est rapporté que les tirs sud-coréens ont fait au moins deux victimes en Corée du Nord.

 

Le Président Obama a envoyé le porte-avions à propulsion nucléaire USS George Washington (emportant 75 avions et un équipage de plus de 6 000 hommes) et d'autres navires de guerre pour effectuer des manœuvres militaires conjointes supplémentaires avec l'armée sud-coréenne à partir du 28 novembre. 

 

Au milieu des récentes hostilités, de modestes gestes d'apaisement ont été faits, bien que compromis par l'ambiance conflictuelle régnant dans la région. La Corée du Nord a publié un communiqué qualifiant de « très regrettables » les décès de civils, mais a aussi critiqué la Corée du Sud pour avoir mis en place ce que le Nord a appelé « un bouclier humain en plaçant des civils autour des positions d'artillerie et à l'intérieur des installations militaires ». Le 29 novembre, la Corée du Sud a annulé une série d'exercices d'artillerie prévus à partir de l'île de Yeonpyeong, sans donner d'explication pour ce changement. Les manœuvres militaires conjointes américano-sud-coréennes ont recommencé en mer Jaune (mer de l'Ouest), mais elles ont eu lieu hors de la zone maritime disputée, à environ 200 kilomètres au sud de la NLL.

 

 

Des accrochages navals dans un état de guerre persistant

 

La Guerre de Corée n'a jamais officiellement pris fin. Un simple armistice provisoire a suspendu les hostilités militaires en 1953, mais les négociations de Genève pour un traité de paix ont échoué en 1954. Des millions de Coréens restent séparés des autres membres de leur famille en raison de la poursuite de l'état de guerre et de la division de la Corée.

 

En l'absence de traité pour une paix permanente, les deux Corée ne s'accordent pas sur la reconnaissance mutuelle de leurs frontières maritimes, et elles manquent des canaux diplomatiques officiels qui contribueraient à empêcher une escalade des accrochages frontaliers tant sur sur terre que sur mer, particulièrement dans les eaux disputées au large de la côte ouest de la Corée. D'après Leon Sigal, ancien membre du comité éditorial du New York Times, « la situation est tendue depuis... 1953, quand la Marine des États-Unis a imposé unilatéralement une ligne de cessez-le-feu maritime au nord de la ligne de démarcation militaire (MDL) terrestre. La Corée du Nord s'oppose depuis longtemps à cette ligne de limite nord (NLL), laquelle n'est pas reconnue au niveau international. Elle souhaite que la MDL soit prolongée en mer. » (Arms Control Today,novembre 2010)

 

Les batailles navales se sont intensifiées sur la NLL au cours des dernière années. En juin 1999, un accrochage de ce type a provoqué le naufrage d'un navire de Corée du Nord, tuant « entre 17 et 80 marins nord-coréens ».  (Reuters, 26 janvier 2010) En Juin 2002, « un accrochage entre navires du Sud et du Nord en mer Jaune[a coulé] une frégate sud-coréenne et [a tué] six marins sud-coréen ainsi que, estime-t-on, 13 Nord-Coréens ». (Reuters, 26 janvier 2010) En 2009, les deux camps se sont affrontés une troisième fois en mer de l'Ouest.

 

Les gouvernements sud-coréens précédents avaient progressé sur la voie d'une solution aux revendications mutuelles sur les eaux disputées, mais ces efforts ont été abandonnés par l'actuelle administration Lee Myung-bak, laquelle a adopté une attitude hostile à l'égard de la Corée du Nord.

 

En octobre 2007, un sommet inter-coréen entre Roh Moo-hyun, le précédent président de Corée du Sud (2003-2008), et Kim Jong-il, dirigeant de la RPDC, avait abouti à une déclaration par laquelle ils s'engageaient à prendre des mesures concrètes pour améliorer les relations entre les deux Corée. Les deux parties promettaient de discuter d'une zone de pêche commune et s'accordaient sur un projet de création d'une « zone de paix et de coopération » en mer de l'Ouest. De manière significative, la Corée du Nord acceptait par cette déclaration de ne pas toucher à la NLL.

 

Pourtant, en quelques mois, le président Lee Myung-bak nouvellement élu a cassé la Déclaration du 4 Octobre avant d'abroger tous les accords inter-coréens conclus depuis l'historique sommet de 2000 qui avait permis à la Corée du Nord et à la Corée du Sud de travailler selon une approche commune à leur réconciliation jusqu'à la réunification finale.

 

Les relations se sont encore détériorées en 2009 lorsque la Corée du Nord a protesté contre la décision de la Corée du Sud de participer totalement à une initiative d'interdiction navale lancée par les États-Unis et considérée par la Corée du Nord comme une violation de sa souveraineté. En réponse, la Corée du Nord a dénoncé tous les accords diplomatiques et militaires signés avec la Corée du Sud.

 

En novembre 2009, « un patrouilleur nord-coréen a franchi la NLL dans les eaux disputées – précisément ce que le sommet de 2007 avait cherché à prévenir – et un navire sud-coréen a effectué des tirs de semonce. Le Nord a répliqué et le Sud a tiré, endommageant gravement le navire nord-coréen et causant un nombre indéterminé de victimes. » (Leon Sigal, Arms Control Today,novembre 2010)

 

En mars 2010, le Cheonan, corvette de 1 200 tonnes de la Marine sud-coréenne, a été brisé en deux et a coulé au large de l'île de Baengnyeong, l'île située la plus au nord en mer de l'Ouest dans les eaux disputées proches de la NLL. Quarante-six marins sud-coréens ont péri dans ce naufrage.

 

NLL Baengnyeong

 

Le groupe d'enquête mixte (JIG) civil et militaire, une commission multinationale conduite par la Corée du Sud, a conclu au bout de presque deux mois de travail qu'une torpille nord-coréenne a coulé le Cheonan. Cette explication a été acceptée, à peu d'exceptions près, comme un fait irréfutable par la plupart des principaux médias.

 

Cependant, la plausibilité des conclusions du JIG a été remise en question par les analyses empiriques et scientifiques rigoureuses de spécialistes tels que le physicien Seunghun Lee (Université de Virginie) et le politologue Jae-Jung Suh (Université Johns Hopkins) ainsi que par les enquêtes indépendantes menées par le groupe de presse sud-coréen Hankyoreh et par des organisations civiques comme People's Solidarity for Participatory Democracy. Ils ont découvert des preuves de falsifications et une longue liste d'incohérences factuelles.

 

Pour une synthèse détaillée des nombreuses enquêtes indépendantes sur le naufrage du Cheonan, on peut se référer au documentaire de HaniTV, Beneath the Surface (http://bit.ly/cheonan).

 

La preuve la plus incontestable jetant un doute sur les résultats du JIG réside peut-être dans le fait que, malgré la perte tragique de 46 vies, presque tous les 58 membres survivants de l'équipage n'ont pas de blessures graves et le matériel embarqué à bord du navire est demeuré intact. En revanche, les modélisations scientifiques ont montré que l'explosion d'une torpille aurait dû « faire voler comme des balles » les membres de l'équipage contre le matériel environnant, en fracturant leurs os, et que la force de l'explosion aurait probablement dû entraîner des décès par commotion. Pourtant, les autopsies ont révélé que toutes les victimes du Cheonan étaient mortes par noyade, et non à cause des blessures subies. Comme l'ont expliqué Lee et Suh, « ni l'état du navire ni celui de l'équipage ne correspondent aux dommages attendus d'une explosion extérieure » provoquée par une torpille, laquelle aurait généré une énorme onde de choc. (Asia-Pacific Journal, 12 juillet 2010)

 

Dans un article paru en juillet et évaluant les preuves concernant le naufrage du Cheonan, l'historien Mark E. Caprio (Université Rikkyo, Tokyo) a écrit : « Les conditions d'un conflit sont réunies dans la péninsule coréenne depuis sa division à la fin de la Deuxième Guerre mondiale en 1945. La posture extraordinairement agressive adoptée par le régime sud-coréen actuel accroît la probabilité d'autres incidents tragiques – planifiés ou accidentels – entre les deux Corée, lesquels pourraient aussi entraîner les alliés des deux camps. Les États-Unis et la République de Corée, en refusant de participer à des négociations jusqu'à ce que Pyongyang s'excuse pour un incident qu'il nie avec insistance avoir commis, et en décidant de faire pression sur la RPDC en organisant de nouveaux et massifs exercices militaires conjoints et en lui infligeant davantage de sanctions économiques, font preuve de virilité mais augmentent aussi considérablement la possibilité que surviennent d'autres incidents de type Cheonan et, dans le pire des scénarios, une seconde Guerre de Corée. » (Asia-Pacific Journal,26 juillet 2010)

 

 

Une nouvelle Guerre froide ?

 

Certains analystes croient en l'émergence d'une « nouvelle Guerre froide » en Asie du Nord-Est. Le Président Obama a identifié la Corée du Sud comme étant « une pierre angulaire de la sécurité des États-Unis dans la région du Pacifique », une expression qu'il a déjà employée pour décrire le Japon. En même temps, la Corée du Sud, le Japon et les États-Unis ont refusé d'entamer de nouvelles négociations avec la Corée du Nord, tandis que les dirigeants nord-coréens ont resserré les liens avec leur homologues chinois.

 

Depuis 1945, les États-Unis maintiennent une présence militaire en Corée du Sud, avec aujourd'hui 28 500 soldats américains stationnés dans ce pays. Soixante-cinq ans après, les États-Unis gardent toujours le contrôle opérationnel des forces sud-coréennes en temps de guerre, et les armées américaine et sud-coréenne conduisent régulièrement des exercices de simulation de guerre en commun près de la zone démilitarisée (DMZ) et dans les eaux disputées au large de la péninsule coréenne. Ces manœuvres combinées constituent une évidente démonstration de force, étalant la sophistication de la technologie militaire américaine et sud-coréenne. La Corée du Nord condamne ces exercices militaires comme étant des provocations et voit ces manœuvres comme une possible couverture pour une attaque réelle.

 

 

La voie à suivre

 

Ces incidents tragiques récurrents au large de la côte occidentale de la Corée sont le résultat d'un état de guerre qui n'a jamais pris fin et d'une division de la péninsule coréenne qui continue.

 

Ils mettent en évidence la fragilité de l'Accord d'armistice de 1953 et confirment le besoin urgent de remplacer une trêve provisoire par un traité pour une paix permanente.

 

Alors que les tensions continuent de croître, il est essentiel de presser le Président Barack Obama, lauréat du Prix Nobel de la Paix en 2009, de mettre fin aux exercices militaires conjoints américano-sud-coréens et d'admettre que de telles manœuvres simulant une guerre augmentent inévitablement le risque d'une escalade inacceptable et incontrôlable menaçant des millions de vies.

 

Les États-Unis doivent ouvrir de nouvelles négociations pour aboutir à un accord de paix qui mettrait un terme à la Guerre de Corée.

 

La Corée du Sud doit relancer le processus de paix avec la Corée du Nord afin de réduire la très grande instabilité de la péninsule coréenne qui met en danger toute la région.

 

Des négociations directes, en tant que premier pas vers un traité de paix ou un accord, sont la seule option viable dans une région lourdement militarisée qui voit des affrontements navals récurrents, des frontières contestées et des contentieux non résolus.

 

Les enjeux de la paix en Corée sont immenses, et le moment du processus pour une paix véritable est arrivé.

 

 

Les voix de la raison

 

DPGregg.jpg« Nous faisons [de Kim Jong-il] un démon en le considérant comme 'fou', mais j'ai parlé à des Russes, à des Chinois, à des Sud-Coréens et à des Américains qui l'ont rencontré longuement, et tous disent qu'il est extrêmement intelligent. Ce que veut Kim, ce sont des discussions sérieuses et suivies avec les États-Unis, menant à un traité de paix exhaustif. […] Notre problème est que, à chaque fois que nous élisons un nouveau président, nous paraissons éprouver le besoin de repartir de zéro avec la Corée du Nord. »

Donald P. Gregg 

Ambassadeur des États-Unis en Corée du Sud (1989-1993)

Conseiller pour la sécurité nationale du Vice-président George H. W. Bush

 

JLaney.jpg« […] Un point devrait figurer en haut de l'ordre du jour, cependant, afin de lever tous les obstacles inutiles empêchant d'avancer, c'est l'instauration d'un traité de paix pour remplacer la trêve en vigueur depuis 1953. Un des éléments ayant contrarié toutes les négociations jusqu'à maintenant est le statut non résolu de la Guerre de Corée. Un traité de paix fournirait une base de référence pour nos relations, éliminant la question de la légitimité de l'autre et de son droit à exister. »

James Laney 

Ambassadeur des États-Unis en Corée du Sud (1993-1997)

Président émérite de l'Université Emory

 

JCarter.jpg« Pyongyang envoie un message constant selon lequel, en cas de négociations directes avec les États-Unis, il est prêt à conclure un accord pour mettre fin à ses programmes nucléaires, à tous les soumettre aux inspections de l'AIEA et à signer un traité pour une paix permanente afin de remplacer le cessez-le-feu 'provisoire' de 1953. »

Jimmy Carter 

39ème Président des États-Unis

 

 

 

 

Source : National Campaign to End the Korean War (photos et liens ajoutés par l'AAFC)


Télécharger le dossier en anglais

Télécharger le dossier en français

Partager cet article
Repost0
21 octobre 2010 4 21 /10 /octobre /2010 22:08

L'île de Jeju, au sud de la péninsule coréenne, possède des traits historiques et culturels propres qui ont nourri un particularisme unique dans le monde coréen. Ayant hérité d'une volonté d'indépendance farouche, ses habitants refusent, depuis de longs mois, l'implantation d'une base navale américaine qui menacerait les ressources naturelles inestimables de l'île volcanique, formée par l'éruption du volcan de Hallasan, aujourd'hui le point culminant de la Corée du Sud. L'Association d'amitié franco-coréenne soutient le combat des habitants de Gangjeong contre le projet d'implantation d'une base américaine. Non, Jeju ne doit pas être à la Corée ce que Okinawa est au Japon !

 

jeju-coastline.jpg

 

Disposant de ressources provenant de la pêche, de l'agriculture et du tourisme (notamment pour les voyages de noces, non seulement de Coréens mais aussi de Chinois et de Japonais), les habitants de Gangjeong, sur l'île de Jeju, refusent l'implantation d'une base américaine, que le président sud-coréen Lee Myung-bak semble déterminé à installer en ignorant délibérément les populations locales : d'ores et déjà, la zone retenue a été déforestée et un périmètre de sécurité établi.

 

Le combat des habitants de Gangjeong tient compte des dommages irréparables causés par l'installation de bases navales américaines dans tout le Pacifique, à Okinawa, Guam, Hawaï et aux Philippines. Outre la destruction des zones de pêche, l'abandon de déchets toxiques et les problèmes sociaux créés par la présence militaire causent invariablement les mêmes dégâts sur les richesses naturelles . Forts d'une consultation indiquant l'opposition de 94 % d'entre eux, les habitants de Gangjeong ont déposé une plainte devant le tribunal régional, faisant état des conséquences économiques irréversibles qu'entraînerait un tel projet. Mais le drame du Cheonan, manipulé par les autorités sud-coréennes, a servi de prétexte au report sine die du jugement du tribunal.

 

Le choix de Jeju apparaît non seulement comme une atteinte à l'environnement naturel exceptionnel de l'île et au libre choix de ses habitants, mais encore comme une provocation au regard de leur passé douloureux. Le soulèvement de Jeju contre le pouvoir autoritaire de Syngman Rhee, le 3 avril 1948, a entraîné l'élimination brutale de dizaines de milliers de ses habitants, jusqu'à l'écrasement des résistants en mai 1949, des combats s'étant poursuivis jusqu'en 1953. 170 villages furent détruits, ouvrant une plaie toujours béante. Jeju a toutefois pu acquérir un statut spécial de province autonome, qui s'appuie sur une tradition culturelle propre dont l'une des expressions les plus connues est celle de ses plongeuses qui pratiquent la pêche sous-marine : les dernières filles de la mer ou Haenyo pêchent toujours sans masque ni combinaison.

 

Les habitants de Jeju doivent pouvoir préserver leurs traditions propres dans un écosystème exceptionnel : aucune base navale américaine ne doit s'implanter dans l'île !

 

Sources : AAFC ; Matthew Reiss, "Séoul se voit en shérif régional", in Le Monde diplomatique, octobre 2010, p. 14.

 

Plus d'informations sur le mouvement de protestation contre l'implantation d'une base navale américaine à Jeju sur le site "No base stories of Korea"

Partager cet article
Repost0
5 septembre 2010 7 05 /09 /septembre /2010 23:02

Les éléments naturels auront finalement eu raison de l'agenda militaire des faucons américains et sud-coréens : la troisième série d'exercices militaires conjoints des deux pays, en l'espace de moins de six semaines, devait avoir lieu du 5 au 9 septembre 2010 ; elle a finalement dû être reportée sine die à l'approche du typhon Malou. Alors que Washington et Séoul attisent dangereusement les tensions, l'AAFC appelle chacune et chacun à s'engager pour un traité de paix dans la péninsule coréenne.

 

exercices_US_sud_coreens.jpg

 

Dans une fuite en avant qui rappelle les pires heures de l'administration George W. Bush, les Etats-Unis de Barack Obama  et la Corée du Sud de Lee Myung-bak ont choisi la réponse militaire aux offres de dialogue de la Chine et de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord).

 

Du 5 au 9 septembre devait en effet se tenir la troisième série de manoeuvres militaires conjointes américano-sud-coréennes en l'espace de moins de six semaines : après de précédents exercices navals du 25 au 28 juillet, les manoeuvres Ulchi Freedom Guardian ont mobilisé pas moins de 86.000 soldats (56.000 Sud-Coréens et 30.000 Américains) du 16 au 26 août. Toutefois, l'approche du typhon Malou au sud de la péninsule a conduit à reporter sine die les execices prévus début septembre.

 

Du 5 au 9 septembre, les Américains devaient envoyer deux destroyers à missiles téléguidés USS Curtis D. Wilbur (DDG 54) et USS Fitzgerald (DDG 62), le navire de surveillance de l'océan USNS Victorious (T-AGOS 19), un sous-marin d'attaque rapide et un avion de surveillance P-3C Orion. De son côté, la Corée du Sud entendait mobiliser quatre destroyers, au moins une frégate, des avions P-3C planes et un sous-marin. Par ailleurs, 1.700 hommes devaient participer à ces exercices navals en mer de l'Ouest. 

 

Ces exercices militaires à répétition sont présentés par les commandements américain et sud-coréens comme des mesures de dissuasion dans l'hypothèse d'une attaque nord-coréenne, après le naufrage de la corvette Cheonan. Mais ils ne répondent à aucune manoeuvre militaire similaire du côté nord-coréen, et ils interviennent des mois après non seulement la tragédie du Cheonan, mais encore les conclusions d'une enquête conjointe américano - sud-coréenne qui ne repose pas sur des bases scientifiques solides.

 

Dénoncées par la Corée du Nord comme des provocations militaires tendant à la guerre, les manoeuvres conjointes américano - sud-coréennes poursuivent assurément des buts plus politiques que militaires. En effet, elles auraient dû coïncider avec la fête nationale de la République populaire démocratique de Corée, le 9 septembre, et aux dates attendues d'une conférence d'une Parti du travail de Corée - laquelle constituera la plus importante réunion du Parti depuis 1980. Elles permettent également d'entretenir un climat de tensions, dont les faucons américains et sud-coréens savent qu'elles sont le plus sûr moyen, sinon de torpiller toute reprise d'une solution pacifique négociée à la question nucléaire en Corée, telle que l'ont encore proposée récemment Pékin et Pyongyang, du moins de ne revenir à la table des négociations qu'avec de puissants instruments de chantage en termes de sanctions et de menace d'exercices militaires.

 

L'Association d'amitié franco-coréenne appelle à déjouer ce scénario de la guerre qui vient : la Corée de 2010 ne doit pas être l'Irak de 2003 ! Par dizaines de millliers, des citoyens en Corée du Sud et dans le monde entier ont déjà dit "non" aux exercices militaires conjoints, "non" aux armes nucléaires dans la péninsule coréenne, "oui" à un traité de paix, "oui" à la normalisation des relations entre les Etats-Unis d'Amérique et la République populaire démocratique de Corée. Pour faire vivre cet espoir, l'AAFC appelle chacune et chacun à signer et faire signer la pétition en faveur d'un traité de paix en Corée. Notre mobilisation est le meilleur garant pour que cesse enfin le bruit des armes dans la péninsule coréenne.

 

Sources :

- The Korea Times, "Typhoon forces delay in S. Korea-US drills", 5 septembre 2010 ;

- Aljazeera, "Joint US-South Korea drill delayed", 5 septembre 2010 (dont photo).

Partager cet article
Repost0
2 juillet 2010 5 02 /07 /juillet /2010 14:46

La République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) a annoncé le 28 juin qu'elle allait renforcer sa capacité de dissuasion nucléaire, alors que des documents récemment rendus publics aux Etats-Unis ont révélé que l'administration américaine avait envisagé des frappes nucléaires contre la Corée du Nord en 1969. Ces révélations sont intervenues dans un contexte d'hostilité persistante, voire croissante, des Etats-Unis à l'égard de la RPDC accusée d'avoir torpillé une corvette sud-coréenne, le Cheonan, le 26 mars dernier. La volonté des Etats-Unis et de leurs alliés, Corée du Sud en tête, de maintenir la pression sur Pyongyang – qui nie toute implication dans le naufrage du Cheonan - s'oppose aux appels à la retenue de la Russie et de la Chine qui demeurent sceptiques face aux preuves avancées contre la RPDC. Pour ce qui concerne la Chine, les appels à la retenue se doublent d'une inquiétude face à divers développements indiquant une volonté des Etats-Unis de renforcer ou, au moins, de ne pas renoncer à leur position militaire en Asie du Nord-Est suite à la crise ouverte par le naufrage du Cheonan et les accusations lancées contre Pyongyang.

 

La RPDC va « renforcer sa force de dissuasion nucléaire à l’aide d’une nouvelle méthode plus développée», a déclaré le 28 juin 2010 à l'agence officielle KCNA le porte-parole du ministère nord-coréen des Affaires étrangères. Si le porte-parole ne précise pas par quelle « nouvelle méthode » sera renforcée la capacité de dissuasion de la RPDC, il est à noter que cette déclaration vient après l'annonce, le 12 mai, d'une expérience réussie de fusion nucléaire par les scientifiques nord-coréens. En 2006 et 2009, la RPDC a déjà procédé à l'essai de deux bombes atomiques à fission (bombes A). Plus puissante que la bombe A, la bombe à hydrogène (bombe H) utilise précisément le principe de la fusion nucléaire.

 

« Les faits historiques confirment que notre choix était bien le bon, lorsque nous avons décidé de répondre aux armes nucléaires par une force de dissuasion nucléaire »,a encore dit le porte-parole.

 

En effet, des documents déclassifiés rendus publics le 23 juin 2010 aux Etats-Unis par le département des Archives de la sécurité nationale de l'université George Washington révèlent que l’administration Nixon a mis au point un plan d’urgence incluant l’utilisation d’armes nucléaires contre la RPDC juste après qu'un avion espion américain EC-121 fut abattu au-dessus de la mer de l'Est (mer du Japon) le 15 avril 1969. 

 

Le plan « Freedom drop » prévoyait ainsi que les Etats-Unis utilisent des armes nucléaires tactiques d'une puissance comprise entre 0,2 et 70 kilotonnes pour détruire des centres de commandement militaires et des bases aériennes et navales en Corée du Nord. Les pertes civiles se seraient élevées «entre environ 100 et quelques milliers», selon une note adressée au conseiller à la sécurité nationale du président Nixon, Henry Kissinger, par le secrétaire à la Défense, Melvin Laird. Selon un autre document, Kissinger a déclaré lors d'une réunion à la Maison Blanche que, face à la Corée du Nord, « il faut paraître déterminé et, si le but est d'empêcher une réponse [militaire], l'action devrait consister à frapper un grand coup ».

 

President-Nixon-Kissinger-Laird-Earle-Wheeler610.jpg

Le chef d'état-major Earle Wheeler, le président Richard Nixon, le secrétaire à la Défense Melvin Laird

et le conseiller pour la sécurité nationale Henry Kissinger, en janvier 1969

(Photo : secrétariat à la Défense des Etats-Unis)

 

Pour le porte-parole du ministère nord-coréen des Affaires étrangères, ces documents sont « la preuve que les Etats-Unis ont tenté d'utiliser l’arme nucléaire à chaque fois qu’ils souhaitaient faire une "démonstration de force" contre la Corée du Nord ». Dans la nouvelle doctrine nucléaire (Nuclear Posture Review, NPR) publiée par l'administration Obama en avril 2010, la RPDC figure sur la liste des pays contre lesquels l’utilisation d'armes nucléaires est envisagée. « Cela veut donc dire que l’actuelle administration américaine n’a pas changé de position par rapport à ses prédécesseurs », a déclaré le porte-parole nord-coréen.

 

L'hostilité de l'administration américaine est d'autant plus vivement ressentie à Pyongyang que les Etats-Unis sont à la pointe du combat visant à faire condamner la RPDC par la «  communauté internationale » pour avoir torpillé la corvette sud-coréenne Cheonan le 26 mars dernier. La RPDC rejette toute responsablité dans le naufrage du Cheonan et les efforts de l'administration américaine se heurtent au scepticisme de la Russie et de la Chine face aux preuves réunies contre la RPDC par un groupe d'experts venus des Etats-Unis et de pays alliés. Or, la Chine et la Russie sont membres permanents du Conseil de sécurité des Nations Unies, saisi le 4 juin par la Corée du Sud, et disposent à ce titre d'un droit de veto pour bloquer une résolution assortie de sanctions contre la RPDC.

 

La Russie a déjà envoyé sa propre équipe d'experts en Corée du Sud pour enquêter sur le naufrage du Cheonan. Cette équipe devrait rendre les conclusions de son enquête dans le courant du mois de juillet.

   

La Chine veut, elle, éviter une escalade des tensions dans la péninsule coréenne. Or, le représentant nord-coréen auprès des Nations Unies a déjà prévenu qu'un débat du Conseil de sécurité au vu des seules preuves « fabriquées unilatéralement » par les Etats-Unis et leurs alliés, « constituerait très clairement une atteinte à la souveraineté et à la sécurité de la République populaire démocratique de Corée et nul n’ose imaginer la gravité des conséquences d’un tel acte sur la paix et la sécurité dans la péninsule coréenne. »

 

ObamaToronto27062010.jpgLe 27 juin, à l'issue du sommet des pays du G20 [1] à Toronto, le président américain Barack Obama n'a pas masqué son agacement en appelant encore la Chine à se joindre aux efforts de la « communauté internationale » contre la Corée du Nord. « Je comprends pourquoi [les Chinois] adoptent une attitude de retenue », a déclaré le président américain. « Mais je pense qu'il y a une différence entre la retenue et un aveuglement délibéré face à des problèmes persistants. »

 

La veille, les pays du G8 [2] réunis à Huntsville, Canada, avaient publié un communiqué qui, tout en n'établissant pas de lien direct entre la Corée du Nord et le naufrage du Cheonan (sous l'influence de la Russie?), prenait note des résultats de l'enquête du groupe international d'experts civils et militaires imputant le naufrage à la RPDC. Pour cette référence aux résultats d'une enquête internationale suscitant de plus en plus de doutes en Corée du Sud et dans le monde, le communiqué du G8 a été rejeté par le ministère nord-coréen des Affaires étrangères qui a réitéré sa demande d'envoyer en Corée du Sud un groupe d'enquêteurs de la Commission de la Défense nationale de la RPDC, une proposition toujours refusée par les autorités sud-coréennes.

 

A la place, le commandement des forces de l’ONU en Corée, conduit par les Etats-Unis, a proposé à la RPDC de participer à des pourparlers militaires pour informer Pyongyang des résultats de l’enquête et déterminer si le naufrage représentait une violation de l’accord d'armistice qui a mis fin à la Guerre de Corée (1950-53). La RPDC a refusé à son tour cette proposition qui considère comme définitifs les résultats de l'enquête menée par les Etats-Unis et leurs alliés.


La Chine, qui fait partie du G20 mais pas du G8, a réfuté les critiques américaines sur un quelconque
« aveuglement délibéré », indiquant qu'il ne fallait pas « mettre d'huile sur le feu » au moment où les parties concernées doivent faire preuve de calme afin d'éviter toute aggravation de la situation dans la péninsule coréenne.


« La position et les efforts de la Chine sont justes et irréprochables », a indiqué le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Qin Gang, lors d'une conférence de presse le 29 juin. « La Chine est un voisin proche de la péninsule coréenne et sur cette question nous avons des sentiments complètement différents par rapport à ceux qui se trouvent à des dizaines des milliers de miles. Nous avons des inquiétudes beaucoup plus directes et sérieuses », a déclaré Qin Gang.

 

AsiedelEstLa Chine se montre également nerveuse face à un projet d'exercice militaire conjoint entre les Etats-Unis et la Corée du Sud en mer de l'Ouest (mer Jaune). Cet exercice militaire naval américano-sud coréen fait partie des mesures annoncées le 24 mai par le ministère sud-coréen de la Défense en réaction au naufrage du Cheonan imputé à la RPDC. Initialement prévu pour le 28 juin, il a été repoussé au mois de juillet.

 

Suite à l'annonce de ce projet, le gouvernement chinois a décidé d'avancer au 30 juin un exercice de tir à balles réelles, prévu pour durer six jours en mer de Chine orientale à 800 km de la Corée du Sud. La Chine estime en effet que les manoeuvres des Etats-Unis et de la Corée du Sud qui prétendent préparer les forces navales des deux pays à de possibles intrusions de sous-marins nord-coréens, visent en réalité la Chine. En particulier, les autorités chinoises ont souligné le déploiement du porte-avions américain George Washington (97 000 tonnes), d’un sous-marin à propulsion nucléaire et de destroyers furtifs américains au cours de cet exercice qui semble avoir pour but de recueillir des informations sur le dispositif militaire chinois en mer Jaune.

 

Outre des manoeuvres navales en mer Jaune, deux développements majeurs semblent indiquer un renforcement de la position américaine en Asie du Nord-Est consécutivement au naufrage du Cheonan et aux accusations lancées à l'encontre de la RPDC.

 

D'abord, le Premier ministre japonais Yukio Hatoyama a accepté, le 28 mai, un simple transfert de la base militaire américaine de Funtenma du sud de l'île d'Okinawa vers la baie protégée de Henoko, plus au nord.  Le déménagement de cette base militaire américaine hors d'Okinawa était une promesse électorale et, en y renonçant sous la pression des Etats-Unis, Hatoyama a été poussé à la démission le 2 juin. 

 

Ensuite, au cours d'une rencontre bilatérale entre les présidents américain et sud-coréen lors du sommet du G20 de Toronto, il a été décidé de repousser à 2015 le transfert à l'armée sud-coréenne du contrôle des opérations militaires en temps de guerre dans la péninsule coréenne, contrôle actuellement détenu par l'armée américaine qui maintient près de 30 000 hommes en Corée. L'accord signé en 2007 par la Corée du Sud et les Etats-Unis prévoyait pourtant ce transfert dès 2012.

 

Pendant que la RPDC tire les enseignements de l'histoire pour sa propre défense, les Etats-Unis semblent donc tirer profit de la situation pour « avancer leurs pions » (ou les garder) en Asie du Nord-Est, face à la Chine notamment. On peut légitimement se demander qui attise les tensions en Corée et à qui profite le naufrage du Cheonan. Deux questions pour une même réponse.

 

[1] Pays membres du G20 : Afrique du Sud, Allemagne, Arabie saoudite, Argentine, Australie, Brésil, Canada, Chine, Corée du Sud, Etats-Unis, France, Inde, Indonésie, Italie, Japon, Mexique, Royaume-Uni, Russie, Turquie, Union européenne

[2] Pays membres du G8 : Allemagne, Canada, Etats-Unis, France, Italie, Japon, Royaume-Uni, Russie

 

Sources :

AAFC

KCNA, "Foreign Ministry Vows to Bolster Nuclear Deterrent in New Way", 28 juin 2010

Robert Wampler, "New Archive Document Collection Sheds Light on Nixon's Frustrating Search for Military Options", National Security Archive Electronic Briefing Book, No. 322, 23 juin 2010

Yonhap, « Obama presse la Chine à condamner la Corée du Nord pour avoir coulé le Cheonan », 28 juin 2010

KCNA, "Foreign Ministry Totally Refutes G-8 Declaration", 29 juin 2010

KCNA, "Telephone Message to US Forces Side", 27 juin 2010

Le Quotidien du Peuple en ligne, « La Chine réfute les critiques sur sa position sur la Péninsule coréenne », 30 juin 2010

Le Quotidien du Peuple en ligne, « L'Armée Populaire de Libération va procéder à des exercices en mer », 29 juin 2010

Voice of America, "US, South Korea Postpone Transfer of Wartime Force Control", 27 juin 2010

 

 

 

 

 

 

Partager cet article
Repost0
7 mai 2010 5 07 /05 /mai /2010 16:02

Nucleaire_RPDC-USA.JPGDu 3 au 28 mai 2010, se tient à New York la 8eme Conférence de révision du Traité de non-prolifération nucléaire (TNP), à laquelle participent quelque 150 pays et destinée à examiner le fonctionnement du TNP et, selon le site Internet de l'Organisation des Nations unies, « aboutir à un accord sur une déclaration finale qui évaluerait l'application des dispositions du Traité et contiendrait des recommandations sur les mesures à prendre afin de consolider cette application. » Parmi les questions que doit aborder la Conférence de 2010 : le caractère universel du Traité; le désarmement nucléaire, y compris des mesures pratiques spécifiques; la non-prolifération des armes nucléaires, y compris la promotion et le renforcement des garanties; des mesures pour faire avancer l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire, la sûreté et la sécurité; le désarmement et la non-prolifération à l’échelle régionale; l’application de la résolution de 1995 sur le Moyen-Orient; des mesures pour gérer le retrait du Traité; des mesures pour renforcer davantage le processus d’examen; et des moyens pour promouvoir l’engagement auprès de la société civile en renforçant les normes du TNP et en faisant la promotion d'une éducation centrée sur le désarmement. Avant l'ouverture de la conférence, et en réponse à la nouvelle posture nucléaire des Etats-Unis, le ministère des Affaires étrangères de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) a publié le 21 avril un mémorandum destiné à « donner une idée précise de la nature de dénucléarisation [de la péninsule coréenne] et trouver des moyens judicieux à emprunter pour y parvenir ». Voici des extraits de ce mémorandum dans la version française donnée par le site nord-coréen Naenara. 

 

« Il n'y a pas dans le monde de nation qui ait subi la menace nucléaire de la façon si cruelle et si constante depuis si longtemps comme la nation coréenne.

 

« Les Coréens ont vécu directement les affres des bombardements atomiques américains de Hiroshima et de Nagasaki et en ont eu le plus grand nombre de victimes après les Japonais.

 

« Pour notre peuple qui a subi les horribles calamités de la bombe A, le chantage nucléaire exercé sur lui par les Etats-Unis lors de la guerre de Corée a été vraiment le pire cauchemar.

 

« Le chantage nucléaire américain a alors provoqué même un exode de 'réfugiés de la bombe atomique' du Nord au Sud.

 

« Ce sont les Etats-Unis qui ont introduit les armes nucléaires pour la première fois dans la péninsule coréenne. Dans la seconde moitié des années 1950, comme le mouvement antinucléaire ne cessait de gagner en virulence au Japon et que le pouvoir japonais pro-américain d'alors en était mis à péricliter, les Etats-Unis ont choisi de déplacer en Corée du Sud leurs armes nucléaires déployées au Japon. Ainsi, en 1957, ils ont introduit en Corée du Sud leur première panoplie d'armes nucléaires tactiques qui avait été au Japon. Depuis, ils n'ont cessé d'accroître leur arsenal d'armes nucléaires en Corée du Sud de telle façon que le nombre de ces armes a atteint au milieu des années 1970 un millier.

 

« Depuis la fin des années 1960, ils se sont mis à effectuer fiévreusement des exercices militaires conjoints américano-sud-coréens pour l'essai de leurs armes nucléaires placées en Corée du Sud en vue d'une guerre d'agression contre notre République.

 

« La RPD de Corée a consenti d'intenses efforts pour éliminer la menace nucléaire américaine, ce par trois étapes.

 

« A une première étape, le gouvernement de notre République s'est efforcé de dissiper la menace nucléaire des Etats-Unis par voie de dialogue et de négociation et au moyen de la création d'une zone dénucléarisée.

 

« A la deuxième, il a travaillé dans le même temps à y parvenir par voie de recours au droit international.

 

« La dernière option qui nous restait a été de riposter par les 'armes nucléaires aux armes nucléaires'.

 

« Ainsi, c'est la menace nucléaire constante des Etats-Unis qui a poussé notre République à penser à disposer de ses propres armes nucléaires.

 

Yongbyon_5MWe_Magnox_reactor.jpg« Le 10 janvier 2003, le gouvernement de notre République a arrêté une mesure d'autodéfense résolue, celle de mise en vigueur de son retrait du Traité de non-prolifération des armes nucléaires qu'il a suspendu pendant dix ans, pour quitter définitivement ce traité.* Et libre de toute contrainte du traité, il a mis légitimement et au vu et au su de tout le monde à la fabrication d'armes toute la quantité de plutonium sortie au cours de la production d'électricité de sa centrale nucléaire-pilote [de Yongbyon].

 

« En octobre 2006, trois ans après son retrait du traité, il a effectué un premier essai nucléaire, puis, en mai 2009, un second.

 

« De cette façon, a été mis enfin un terme au déséquilibre de forces nucléaires prévalant en Asie du Nord-Est bourrée d'armes nucléaires et sous des parapluies nucléaires excepté seulement la RPD de Corée exempte de toute arme nucléaire. Grâce à la force de dissuasion de notre République, soit sa détention d'armes nucléaires, a diminué sensiblement le danger de nouvelle guerre dans la péninsule coréenne. C'est là les efforts que nous tendons pour éliminer la menace nucléaire à l'étape actuelle, non seulement par les paroles, mais aussi par des actions réelles en opposant aux armes nucléaires américaines les nôtres propres.

 

« Etablir un système de paix durable et réaliser la dénucléarisation de la péninsule coréenne, c'est la position invariable du gouvernement de notre République.

 

« Comme il est indiqué dans la déclaration commune du 9 septembre adoptée et publiée lors des pourparlers à six de 2005 [RPDC, Corée du Sud, Etats-Unis, Chine, Russie, Japon], la dénucléarisation de la péninsule coréenne consiste à éliminer complètement la menace nucléaire réelle provenant de l'extérieur, ce avec tous les moyens de vérification possibles, et à transformer la péninsule coréenne en une zone sans armes nucléaires. Or, cela présuppose la création d'une confiance mutuelle. Plus tôt est conclu un traité de paix dans la péninsule coréenne en état d'armistice, plus rapidement sera créée cette confiance nécessaire à la dénucléarisation.

 

« Les forces armées nucléaires de la RPD de Corée n'ont pour mission que de dissuader et de refouler l'agression et l'attaque nucléaire étrangère contre notre pays et notre nation tant que ne soit réalisée la dénucléarisation de la péninsule coréenne et du reste du monde.

 

« Nous sommes prêts à nous joindre sur un pied d'égalité avec les autres pays nucléaires à l'effort international de non-prolifération des armes nucléaires, à celui de gestion sécuritaire des matières nucléaires et de réduction des armes nucléaires.

 

« Nous ne fabriquerons qu'une quantité strictement nécessaire d'armes nucléaires et nous ne participerons pas à la course aux armements nucléaires.

 

« Nous participerons à l'égal des autres pays nucléaires à l'effort international de démantèlement des armes nucléaires.

 

« A l'avenir comme par le passé, la RPD de Corée consentira des efforts inlassables pour réaliser la dénucléarisation de la péninsule coréenne et du reste du monde, indifféremment à ce que les pourparlers à six soient repris ou non. »


Nombre d'essais nucléaires effectués dans le monde entre 1945 et 2010

Israël et l'Afrique du Sud auraient effectué un essai en commun en 1979

  (source : Wikipedia - photo : test atomique XX-12 GRABLE effectué le 25 mai 1953 dans le Nevada)

 

Le 3 mai 2010, lors de la Conférence de révision du TNP, les  Etats-Unis ont annoncé que l'arsenal américain était composé de 5 113 têtes nucléaires à fin septembre 2009,  une information jusqu'ici « secrète ». Le 9 avril 2010, par la voix de la secrétaire d'Etat Hillary Clinton, l'administration américaine affirmait que la RPDC possédait « entre une et six armes nucléaires ».

 

Compte tenu du déséquilibre des forces en présence, face aux  nouvelles menaces proférées l'encontre de la RPDC par les Etats-Unis dans leur nouvelle posture nucléaire, et gardant en mémoire l'histoire tourmentée de la Corée au 20eme siècle, l'Association d'amitié franco-coréenne appuie les principes énoncés dans le mémorandum du ministère des Affaires étrangères de RPDC. Alors qu'approche le soixantième anniversaire du déclenchement de la Guerre de Corée (25 juin 1950), l'Association d'amitié franco-coréenne appelle une fois de plus à mettre un terme définitif à cette guerre en remplaçant l'accord d'armistice de 1953 par un véritable traité de paix entre les Etats-Unis et la RPDC, ce que refusent toujours les Etats-Unis sous les prétextes les plus divers. La négociation d'un tel traité de paix est pourtant de nature à rétablir la confiance entre les anciens belligérants, et constitue un nécessaire premier pas vers la dénucléarisation totale de la péninsule coréenne.

 

* Le retrait d'un pays du Traité de non-prolifération est prévu dans l'article 10 dudit traité : « Chaque Partie, dans l'exercice de sa souveraineté nationale, aura le droit de se retirer du Traité si elle décide que des événements extraordinaires, en rapport avec l'objet du présent Traité, ont compromis les intérêts suprêmes de son pays. » En se retirant du TNP en 2003, la RPDC entendait donc préserver ce qu'elle considérait être ses « intérêts suprêmes » face aux Etats-Unis qui refusaient de remplacer l'accord d'armistice de 1953 par un véritable traité de paix en Corée, maintenaient des moyens aéronavals - y compris nucléaires - en Asie du Nord-Est, et usaient d'une rhétorique hostile à l'égard de la RPDC (cf discours du président Bush sur l' « axe du mal » en janvier 2002).

 

Sources :

« Mémorandum du ministère des AE de la RPD de Corée à propos du problème nucléaire », Naenara, 24 avril 2010

« Armes nucléaires : le Pentagone dévoile le nombre de ses ogives ». RIA-Novosti, 4 mai 2010

« Pour Hillary Clinton, la Corée du Nord aurait 'entre une et six armes nucléaires' », Libération, 10 avril 2010

Site de la Conférence des Parties chargée de l’examen du Traité de non-prolifération des armes nucléaires (3-28 mai 2010)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Partager cet article
Repost0
17 avril 2010 6 17 /04 /avril /2010 11:00

Le 8 avril 2010, le président américain Barack Obama et le président russe Dmitri Medvedev signaient à Prague un accord de réduction des arsenaux nucléaires stratégiques des Etats-Unis et de la Russie, présenté comme historique. Le 6 avril, l'administration américaine révélait la nouvelle doctrine nucléaire des Etats-Unis, lesquels s'engagent désormais à ne pas utiliser l'arme atomique contre un adversaire qui ne la détient pas et qui respecte les règles du Traité de non- prolifération nucléaire. Les annonces quasi-simultanées de la réduction – relative - de l'arsenal nucléaire américain et des nouvelles règles d'emploi de l'arme atomique par les Etats-Unis sont-elles de bon augure pour la péninsule coréenne? Sans doute pas. En effet, si les Etats-Unis poursuivent le développement d'un système antimissile susceptible de menacer la sécurité nationale de la Russie, cette dernière se déclare prête à dénoncer le traité de réduction des arsenaux stratégiques - dont la ratification par le Sénat américain n'est d'ailleurs pas acquise. Surtout, présentant la nouvelle doctrine nucléaire américaine, le secrétaire à la Défense Robert Gates a déclaré que « toutes les options sont sur la table » concernant la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord). Face à une menace américaine persistante et en l'absence de véritable traité de paix dans la péninsule, la RPDC pourra difficilement renoncer à sa force de dissuasion.

 

Le 6 avril 2010, l'administration Obama a rendu publique sa nouvelle posture nucléaire (Nuclear Posture Review, NPR), selon laquelle « les Etats-Unis n'utiliseront pas ni ne menaceront d'utiliser des armes nucléaires contre des pays qui n'en sont pas dotés, adhèrent au Traité de non-prolifération nucléaire (TNP) et respectent leurs obligations en matière de non-prolifération nucléaire. »

 

En application de ces garanties de sécurité négatives, la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) qui s'est retirée du Traité de non-prolifération en 2003 - comme le prévoit l'article 10 du TNP - et a effectué deux essais nucléaires en 2006 et 2009, devient la cible d'éventuelles attaques préventives américaines. Les Etats-Unis peuvent désormais frapper la Corée du Nord avec des armes nucléaires même si celle-ci utilise des armes conventionnelles contre les Etats-Unis ou leurs alliés.

 

Minuteman.jpg

Missile intercontinental américain Minuteman dans son silo de lancement. A l'heure actuelle, les Etats-Unis possèdent environ 500 missiles Minuteman, équipés d'ogives nucléaires, d'une portée de 9 600 km   

(source : Federation of American Scientists)

 

Dans un entretien accordé au New York Times le 5 avril, le président Barack Obama a décrit la Corée du Nord et l'Iran comme des pays « en marge » (« outlier »), signifiant clairement que ces deux pays sont, dans la situation actuelle, exclus des garanties de sécurité  négatives  offertes par la nouvelle doctrine américaine d'emploi de l'arme atomique. Le secrétaire américain à la Défense Robert Gates a réaffirmé cette position en présentant la NPR le 6 avril, affirmant que toutes les « options sont sur la table » concernant la Corée du Nord et l'Iran, une allusion à peine voilée à des frappes préventives, y compris nucléaires, contre ces deux pays.

 

Les nouvelles menaces proférées par l'administration américaine sont une source d'inquiétude tant elles nuisent à une résolution rapide de la « crise nucléaire » dans la péninsule coréenne. En effet, la RPDC soutient depuis longtemps que ses armes nucléaires constituent une force de dissuasion face à la puissance militaire américaine et en l'absence de traité de paix avec les Etats-Unis - un traité de paix demandé par la RPDC mais que les Etats-Unis refusent de négocier. Cette force de dissuasion devient d'autant plus nécessaire, voire vitale, pour la RPDC que ce pays constitue désormais la cible quasi-exclusive d'une éventuelle attaque préventive américaine.

 

Avant son élection à la présidence des Etats-Unis, le candidat Barack Obama s'était engagé à conduire une « diplomatie agressive et directe » pour résoudre les questions nucléaires nord-coréenne et iranienne. Aujourd'hui, ces promesses se sont transformées en pressions et sanctions à l'encontre d'un pays qui a quitté le Traité de non-prolifération nucléaire (la RPDC) et d'un autre accusé de violer le TNP (Iran).

 

CSNU.jpgLa nouvelle doctrine américaine d'emploi de l'arme nucléaire fait craindre que la RPDC perde toute confiance dans l'administration américaine en place depuis le début de l'année 2009. Après les discours sur un « changement de régime en Corée du Nord » tenus par l'administration Bush (2001-2008), la RPDC pouvait espérer une amélioration de ses relations avec les Etats-Unis. Malheureusement, l'administration Obama a jusqu'ici suivi une politique très hostile vis-à-vis de la RPDC : élaboration du Plan opérationnel 5029 d'attaque préventive contre la Corée du Nord, exercices militaires Key Resolve et Foal Eagle menés avec l'armée sud-coréenne, saisine du Conseil de sécurité des Nations Unies suite au lancement d'un satellite par la RPDC, adoption de sanctions, refus de discussions bilatérales. Aujourd'hui, l'annonce de possibles attaques préventives contre la Corée du Nord risque de porter un coup fatal au peu de confiance existant encore entre la RPDC et les Etats-Unis. En réaction à la nouvelle doctrine nucléaire américaine, un porte-parole du ministère nord-coréen des Affaires étrangères cité par l'agence officielle KCNA a même déclaré que la NPR « prouve que la politique américaine actuelle à l'égard de la RPDC n'est en rien différente de la politique suivie par l'administration Bush au début de son mandat quand elle tenait à faire peser une menace nucléaire sur la RPDC désignée comme 'cible de frappes nucléaires préventives'. »

 

Avec les accusations lancées sans preuves contre la Corée du Nord par les milieux médiatiques et politiques les plus conservateurs de Corée du Sud suite au naufrage d'une corvette sud-coréenne le 26 mars 2010, la dégradation des relations entre la RPDC et les Etats-Unis amoindrit encore les chances d'une reprise rapide des pourparlers à six pays (deux Corée, Etats-Unis, Chine, Russie, Japon) sur la dénucléarisation de la péninsule coréenne. Dans son discours de Prague du 5 avril 2009, Barack Obama déclarait vouloir « un monde sans armes nucléaires » . Mais souhaite-t-il seulement que les pourparlers sur la dénucléarisation de la péninsule coréenne reprennent?

 

Le mois d'avril 2010 a vu l'accélération de la mise en oeuvre de la nouvelle stratégie américaine de lutte contre la prolifération nucléaire, prolifération dont la Corée du Nord serait, d'après les Etats-Unis, une des premières responsables. 

 

Le 6 avril 2010, l'administration américaine a publié sa Nuclear Posture Review exposant la nouvelle doctrine d'emploi de l'arme atomique par les Etats-Unis, lesquels s'engagent à désormais « récompenser » les pays vertueux, non dotés de l'arme atomique, en ne les menaçant plus de frappes nucléaires, ce qui laisse de nombreuses « options sur la table »...

 

Le 8 avril, les Etats-Unis et la Russie on signé un nouvel accord de réduction de leurs arsenaux stratégiques, START III (Strategic Arms Reduction Treaty): à terme, les deux pays ne devraient conserver chacun « que » 1.550 têtes nucléaires et 800 vecteurs.  Il est à noter que la Russie se réserve le droit de dénoncer START III « si le développement du système antimissile américain prend des proportions susceptibles de menacer sa sécurité nationale » (Viktor Essine, chef d'état-major des Troupes de missiles stratégiques russes). Or, pour ses promoteurs, le bouclier antimissile américain doit notamment parer à la prétendue menace de missiles intercontinentaux  venus de Corée du Nord. 

 

START2010

 

Enfin, avant la conférence de révision du Traité de non-prolifération qui doit se tenir début mai à New York, l'administration américaine organisait les 12 et 13 avril à Washington un premier « Sommet sur la sécurité nucléaire » réunissant 47 pays. Une convention sur la protection physique des matières nucléaires et une convention internationale pour la suppression des actes de terrorisme nucléaire figuraient à l'ordre du jour du sommet. La RPDC et l'Iran - qui n'avaient pas été invités - furent les principaux accusés, dans une tentative grossière d'établir un parallèle entre un hypothétique « terrorisme nucléaire » et la légitime aspiration d'un pays tel que la RPDC à défendre sa souveraineté et à garantir ses intérêts vitaux, au besoin en se retirant du TNP comme le prévoit l'article 10 dudit traité.

 

La Corée du Sud a obtenu le droit d'organiser le prochain « Sommet sur la sécurité nucléaire » en 2012. Le nouvel alignement de administration sud-coréenne sur les Etats-Unis, après l'arrivée au pouvoir du président Lee Myung-bak en février 2008, semble avoir déterminé ce choix comme l'a reconnu Cho Hyun, délégué du ministère sud-coréen des Affaires étrangères pour les affaires multilatérales et globales : « La désignation de Séoul pour le prochain sommet réaffirme l'alliance solide entre la Corée du Sud et les Etats-Unis, la confiance mutuelle et l'amité entre les présidents Lee Myung-bak et Barack Obama. » Déjà, en 2009, le gouvernement sud-coréen avait rejoint l'Initiative de sécurité contre la prolifération, lancée en 2003 par l'administration Bush et destinée à renforcer le blocus contre la RPDC, ce qu'avaient toujours refusé de faire ses prédécesseurs.

 

Réunir les conditions d'une reprise des pourparlers à six sur la dénucléarisation de la péninsule coréenne ne fait donc apparemment pas partie du nouveau dispositif américain anti-prolifération. Comme l'a remarqué Cheong Wook-sik, du Réseau civil pour une Corée pacifique, les menaces américaines de frappe nucléaire préventive contre la Corée du Nord constituent une violation de la déclaration conjointe adoptée le 19 septembre 2005 à l'issue de la 4eme série de pourparlers à six. De la déclaration du 19 septembre, les grandes puissances, Etats-Unis en tête, ne retiennent que l'engagement de la RPDC à abandonner ses armes et programmes nucléaires et à revenir rapidement au TNP et à l’AIEA (Agence internationale de l'énergie atomique). Or, par cette même déclaration,  « les Etats-Unis affirment qu'ils ne possèdent aucune arme atomique sur la péninsule coréenne et qu’ils n’ont pas l’intention d’attaquer ou d’envahir la République populaire démocratique de Corée, an moyen d'armes nucléaires ou conventionnelles. »Tour_Yongbyon-copie-1.jpg Cheong Wook-sik observe à juste titre que cette déclaration a été adoptée alors que la RPDC s'était déjà retirée du TNP (2003) et alors qu'elle affirmait déjà posséder des armes nucléaires. Depuis 2005, cette situation n'a que peu évolué, et la RPDC a même commencé à démanteler certaines installations nucléaires [photo : destruction de la tour de refroidissement de la centrale nucléaire nord-coréenne de Yongbyon, le 27 juin 2008]. Par conséquent, en envisageant officiellement des attaques nucléaires préventives contre la RPDC, les Etats-Unis ne respectent pas la déclaration du 19 septembre 2005.

 

En l'absence de traité de paix dans la péninsule coréenne, et maintenant sans les garanties de sécurité négatives offertes par la nouvelle posture nucléaire américaine, la RPDC peut difficilement renoncer à sa force de dissuasion et risque même de la renforcer. Comment s'enthousiasmer pour la vision du « monde sans armes nucléaires » prôné par Barack Obama quand les Etats-Unis équipés – à terme – de 1.550 ogives et 800 vecteurs menacent ouvertement d'une confrontation nucléaire dans la péninsule coréenne?

 

Sources :

AAFC

Département de la Défense des Etats-Unis, Nuclear Posture Review Report, avril 2010

Département d'Etat des Etats-Unis, "North Korea Agrees To Abandon Its Nuclear Weapons Programs", 19 septembre 2005

KCNA, "Foreign Ministry Dismisses US Nuclear Plan" , 9 avril 2010

Réseau civil pour une Corée pacifique, "Nuclear Posture Review and North Korea", 13 avril 2010

RIA-Novosti, « START: le nouveau traité lie bouclier antimissile et armes stratégiques », 9 avril 2010

Yonhap, « L’organisation du prochain sommet sur la sécurité nucléaire pèsera lourd sur la Corée du Nord », 14 avril 2010

Yonhap, « Séoul cherche à ratifier les conventions internationales afin de mettre en œuvre l’accord du sommet sur la sécurité nucléaire », 15 avril 2010

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Partager cet article
Repost0
7 mars 2010 7 07 /03 /mars /2010 16:07
John FefferPourquoi une Amérique affirmant aimer la paix refuse toujours de signer un traité avec la Corée du Nord et de mettre ainsi un terme définitif à la guerre de Corée? C'est à cette question que tente de répondre John Feffer, spécialiste américain des relations internationales, interrogé par le Korea Times. On sait que la RPDC veut un traité de paix avec les Etats-Unis et en fait une des conditions pour retourner aux pourparlers sur son programme nucléaire. Selon John Feffer, les Etats-Unis ne sont pas disposés à signer un tel traité, non parce qu'ils s'inquiètent d'être désavantagés dans des négociations avec la Corée du Nord, mais pour des raisons liées à la politique intérieure américaine.


Ce qui interpelle le public ordinaire spectateur de la crise nucléaire en Corée c'est le refus permanent des Etats-Unis - qui se présentent comme le bastion de la défense de la paix dans le monde - de signer un traité de paix avec la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), traité de nature à réduire les tensions dans la péninsule coréenne.


La RPDC a déclaré à de multiples reprises qu'un traité de paix est une des conditions requises pour qu'elle rejoigne les pourparlers à six pays (deux Corée, Etats-Unis, Chine, Russie, Japon) consacrés à son programme nucléaire, la RPDC s'étant retirée de ces négociations en avril 2009.


Pyongyang soutient que la question nucléaire est fondamentalement due à l'absence de traité de paix après la guerre de Corée (1950-1953), dont les combats ont pris fin grâce à un simple armistice, laissant les deux camps face à face et « techniquement » en état de guerre.


« En apparence, c'est une décision très facile à prendre », déclare John Feffer co-directeur de Foreign Policy in Focus,  groupe de réflexion basé à Washington, interrogé par le quotidien sud-coréen de langue anglaise Korea Times. Cela semble aussi être une proposition de simple bon sens.


Certains observateurs affirment que l'absence de traité de paix est due aux négociateurs américains qui verraient un tel traité comme une « récompense » accordée à une Corée du Nord accusée de mal se conduire. Mais, selon John Feffer, une analyse plus approfondie de la situation révèle que c'est bien la situation politique intérieure des Etats-Unis qui leur interdit de négocier et signer un traité de paix avec la RPDC.


US-Senate« La loi américaine dispose qu'un traité de paix doit recueillir les deux tiers des voix au Sénat. Le problème est qu'un certain nombre de sénateurs, surtout républicains, ne veulent pas signer un traité de paix avec la Corée du Nord. Ces considérations d'ordre intérieur doivent être prises en compte », déclare Feffer, ajoutant même qu'il s'agit de la « véritable raison » pour laquelle l'administration américaine est peu disposée à conclure un traité de paix en Corée.


En conséquence, la Corée du Nord devrait d'abord s'adresser à l'opinion publique américaine, les membres du Congrès des Etats-Unis étant des élus appelés à servir les intérêts de leur circonscription.


La tâche s'annonce difficile car, dans un sondage effectué en 2009 par l'institut américain Rasmussen, les électeurs américains considéraient la Corée du Nord comme un des pays faisant peser la plus grande menace sur la sécurité nationale des Etats-Unis. Un sondage effectué en février 2010 par l'institut Gallup montre que cette opinion n'a pas évolué. Pour le public américain, la Corée du Nord figure toujours, avec l'Iran, au premier rang des pays représentant « une menace critique pour les intérêts vitaux des Etats-Unis ».

 

D'après ces enquêtes, la Corée du Nord reste donc perçue de manière négative par le public américain. Or, c'est l'opinion du public américain, pas celle de l'administration américaine, qui déterminera si un traité de paix doit être signé ou non avec la RPDC.


Il se peut qu'en demandant la signature d'un traité de paix, Pyongyang néglige ce facteur. La RPDC négocie avec les envoyés de l'administration américaine chargés du dossier nucléaire, mais derrière eux se trouvent les parlementaires américains, et derrière eux se trouve encore le grand public, lequel influence les négociations en dernier ressort.


« Aux Etats-Unis, les gens ont tendance à considérer un traité de paix avec la Corée du Nord comme une sorte de concession, observe Feffer. C'est pourquoi il est si difficile de faire avancer cette question au niveau national. »


En vertu de cette analyse, pour qu'un traité de paix ait des chances d'aboutir en Corée, la RPDC devrait pratiquer un genre de « diplomatie publique » et engager une offensive de charme destinée à gagner les coeurs et les esprits du peuple américain.

 

Source : Korea Times (article du 4 mars 2010).

 

Voir aussi :

le site Foreign Policy in Focus

le site de John Feffer

Partager cet article
Repost0

Présentation

  • : Association d'amitié franco-coréenne
  • : Soutenir la paix en Corée, conformément à l'aspiration légitime du peuple coréen et dans l’intérêt de la paix dans le monde
  • Contact

"Les leçons sympathiques et utiles"

Recherche

D'où venez-vous?