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21 mars 2023 2 21 /03 /mars /2023 17:48

Il y a 101 ans, le 19 mars 1921, Na Hye-seok devenait la première femme à exposer comme peintre en Corée dans les bureaux du quotidien Kyeongseong Ilbo, présentant des peintures à l'huile de style occidental. Devenue un symbole du féminisme au pays du Matin calme, elle a également été écrivaine sous le nom de plume de Jeongwol (lune brillante), graveuse et sculptrice.

Na Hye-seok, une féministe pionnière de la peinture coréenne

Née le 28 avril 1896, diplômée du lycée de jeunes filles Jinmyeong, Na Hye-seok a eu la possibilité de suivre des études artistiques à Tokyo (la Corée étant alors sous occupation japonaise) en étant issue d'une famille privilégiée de Suwon, alors que son frère aîné étudiait déjà dans la capitale japonaise.  C'est dans les milieux étudiants au pays du Soleil Levant qu'elle épouse la cause féministe, écrivant un article intitulé "Une femme idéale" où elle dénonce le patriarcat. 

De retour à Séoul en 1918, elle devient professeur d'art, s'oppose à un mariage forcé et participe au soulèvement du 1er mars 1919, qu'elle paie d'une incarcération pendant plusieurs mois. Elle co-fonde le journal P-yeho en 1920.

Commençant à exposer dès 1920, lauréate de nombreux prix, elle visite l'Europe à partir de 1927 avec son époux - le diplomate Kim Woo-young - et ses enfants. Elle étudie plus particulièrement la peinture en France, tout en s'intéressant aux cultures des pays visités.

Elle poursuit parallèlement son engagement féministe : dans une nouvelle intitulée Gyeonghee, elle plaide pour la libération de la femme et participe au journal féministe coréen Sinyoja. Mais une affaire d'adultère avec un dirigeant du mouvement cheondoïste, Choi Rin, fait d'autant plus scandale que Choi décrit avec des détails crus leur relation. Son mari obtient le divorce en 1931 ainsi que la garde de leurs enfants. Sa réputation et sa carrière sont ruinées. Revenant sur cette affaire dans un texte publié en 1934, Na Hye-seok plaide pour les relations sexuelles avant le mariage afin que les époux puissent se connaître, mais cette prise de position accentue la réprobation d'une société profondément conservatrice et la déchéance sociale de Na, qui continue toutefois à publier - notamment sur le féminisme et ses voyages - dans la revue Samcholli. Elle meurt à Séoul, dans un hôpital pour sans-abri, le 10 décembre 1948, âgée de 52 ans.

Si le destin de Na Hye-seok a longtemps été utilisée pour dissuader les jeunes Coréennes de devenir écrivaine ou artiste, elle est aujourd'hui reconnue à juste titre comme l'une des pionnières de la peinture moderne en Corée, à l'instar de Kim Kwan-ho

Na Hye-seok, Porte de la forteresse Hwaseong, à Suwon (années 1920)

Na Hye-seok, Porte de la forteresse Hwaseong, à Suwon (années 1920)

Sources : 

Patrick Maurus, "Na Hye-seok", in Béatrice Didier, Antoinette Fouque et Mireille Caille-Gruber (dir.), Dictionnaire universel des créatrices, éditions des Femmes, 2013, p. 3118. 

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8 mars 2023 3 08 /03 /mars /2023 17:04

Alors que le droit à l'interruption volontaire de grossesse (IVG) a été remis en cause dans plusieurs pays - aux Etats-Unis, l'arrêt de 1973 de la Cour suprême Roe v. Wade a été abrogé en 2022, laissant à chaque Etat le soin de légiférer en la matière - la garantie de ce droit constitue l'un des thèmes de mobilisation dans le monde à l'occasion de la Journée internationale des droits des femmes, le 8 mars. Nous revenons sur l'état du droit - et la pratique - dans les deux Etats coréens, où les progrès réalisés se sont heurtés à une tradition patriarcale puis, au Sud, à l'opposition toujours vive des églises, notamment évangéliques. Par ailleurs, le contrôle des naissances, commun à l'ensemble de la péninsule, doit être pris en compte pour comprendre la mise en oeuvre effective, et débattue, du droit à l'IVG.

Le droit à l'IVG dans le monde (juillet 2022)

Le droit à l'IVG dans le monde (juillet 2022)

En République populaire démocratique de Corée (RPDC), le droit à l'IVG a été consacré dans le Code pénal dès mars 1950, dans le prolongement de la loi du 30 juillet 1946 sur l'égalité des sexes, alors l'une des plus libérales d'Asie.

A l'occasion du rapport présenté en avril 2016 au Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, les autorités nord-coréennes apportaient les précisions suivantes sur la légalité de l'avortement en RPDC : 

193. L’avortement est légal en République populaire démocratique de Corée. Il est
pratiqué à la demande de la femme concernée en raison de risques pour sa vie, pour
sa santé physique et mentale et ou de malformation du fœtus. Conformément à la
directive du Ministère de la santé publique, publiée en juillet 2015, des mesures
appropriées ont été prises pour assurer la prise en charge dans de bonnes conditions
des femmes qui ont eu des avortements spontanés ou provoqués.

194. Le taux d’avortement était de 9,9 pour 1000 femmes mariées d’après les
résultats de l’enquête CAP sur la santé de la procréation, effectuée en 2011.

195. La prévention des complications dues à l’avortement grâce à la fourniture par
les établissements de santé de services d’avortement médicalisé et à la prise en
charge après l’avortement a été l’un des objectifs de la stratégie de santé de la
procréation (2011-2015). Le personnel sanitaire local a été formé à l’utilisation de
ventouses et le matériel et les instruments nécessaires ont été distribués. Les
conseils après l’avortement, les services de planification familiale et d’aiguillage
sont également fournis le cas échéant. La participation des hommes à la santé de la
procréation et aux soins à donner aux femmes et aux enfants a été promue.

Ces données corroborent celles obtenues auprès d'autres sources, y compris des défecteurs nord-coréens, selon lesquelles les motifs pour appliquer le droit à l'IVG sont interprétés de manière large (on note par exemple que le § 193 n'évoque pas l'hypothèse du viol ou les motifs économiques et sociaux, tandis que le Code pénal, en mars 1950, évoquait, de manière vague des "raisons importantes") et que la pratique de l'IVG serait socialement acceptée et répandue. L'association Women on waves a aussi observé que l'IVG serait autorisée, pratiquement sur demande, jusqu'au septième mois de grossesse, et s'inscrit dans le cadre de mesures de planning familial, d'accès à des méthodes contraceptives modernes et de protection de la santé de la mère. 

En République de Corée (Corée du Sud), le droit à l'IVG a été strictement limité, entre 1953 et 2020, à des motifs liés à la santé de la mère, le viol, l'inceste et la transmission de maladies héréditaires et infectieuses. Les personnels médicaux pratiquant l'avortement s'exposaient à l'application d'une peine de deux ans de prison. Si les politiques de limitation des naissances avaient donné lieu à une application laxiste de la loi dans les années 1960 et 1970, parallèlement à une sélection des naissances jusqu'au début des années 1990, l'effondrement du taux de natalité avait ensuite conduit à un retour aux politiques répressives dans les années 2000. En 2005, il était toutefois estimé que 330 000 avortements illégaux avaient été pratiqués en Corée du Sud - ce chiffre étant tombé à 50 000 en 2017, après la légalisation de la contraception.

Le 11 avril 2019, la Cour constitutionnelle a déclaré anticonstitutionnelle l'interdiction de l'avortement, laissant au Gouvernement jusqu'à fin 2020 pour modifier la loi. En l'absence d'adoption de la loi qui prévoyait de légaliser l'avortement jusqu'à 14 semaines de grossesse, le droit à l'IVG est garanti sans limites depuis le 1er janvier 2021. 

Une partie des médecins demandent une reconnaissance du droit à l'objection de conscience de pratiquer une IVG. Par ailleurs, des mouvements féministes souhaitent qu'un cadre soit fixé, alors que des limitations existent en pratique. Comme l'a observé Nicolas Rocca pour La Croix en janvier 2021 : 

La société d’obstétrique et de gynécologie a assuré que pour « protéger la sécurité des femmes, l’avortement ne sera pratiqué qu’avant dix semaines de grossesse ».

Principales sources :

(Pour le droit à l'IVG en RPD de Corée)

(Pour le droit à l'IVG en République de Corée)

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3 mars 2023 5 03 /03 /mars /2023 23:05

La pasteure Lim Bora nous a quittés à l'âge de 55 ans. Dans une société sud-coréenne toujours très conservatrice, elle s'était engagée avec courage, bravant l'hostilité viscérale des chrétiens conservateurs qui lui avait valu d'être la cible de très nombreux messages de haine. Si elle avait défendu les droits des personnes handicapées, le bien-être animal ou encore s'était encore opposée à la construction de la base navale militaire sur l'île de Jeju, c'est son combat en faveur des droits des personnes LGBT qui l'avait distinguée comme une Juste au sein des églises protestantes. Nous saluons la mémoire d'une militante exemplaire des droits de l'homme et pour la justice sociale, en adressant nos condoléances à sa famille, ses amis et ses proches.

La pasteure Lim Bora (photo Yang Chien-hao)

La pasteure Lim Bora (photo Yang Chien-hao)

Le combat pour la démocratie et les droits de l'homme a été une constante des engagements de Lim Bora. Dans les années 1980, alors qu'elle étudiait la théologie, elle n'hésitait déjà pas à affronter avec courage et détermination les forces de l'ordre dans des batailles de rue où succombèrent des militants pour la démocratie, tels que Yi Han-yeol

Elle considérait que son devoir pastoral devait la conduire aux côtés des opprimés et des délaissés. L'église Soemdol Hyangrin, qu'elle a fondée à Séoul en 2013, offre un refuge aux personnes LGBT rejetées par leurs familles et leurs proches. C'est au sein de la communauté sud-coréenne LGBT que les messages les plus émouvants de condoléances ont été écrits pour saluer la pasteure Lim Bora, trop tôt disparue, et qui reste un modèle. Mentionnons notamment sa condamnation des discriminations contre les personnes LGBT dans l'armée sud-coréenne, qui n'hésite pas à piéger les soldats pour découvrir leur orientation sexuelle, ou encore son engagement en mars 2021, après le suicide de la sergente Byun Hee-soo, qui avait été révoquée de l'armée car transgenre. La pasteure Lim Bora nous a montré le chemin pour la construction d'une société plus juste, plus tolérante, plus fraternelle.

Sources : 

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24 février 2023 5 24 /02 /février /2023 22:13

Fruit du plaqueminier du Japon (il est considéré comme un fruit national au pays du Soleil Levant), originaire de Chine où il a été cultivé depuis au moins 2 500 ans et aujourd'hui perçu en Occident comme méditerranéen, le kaki est aussi l'un des fruits typiques de la péninsule coréenne - la République de Corée (Corée du Sud) étant le deuxième producteur mondial, loin derrière la Chine, alors que les statistiques de production manquent pour la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord).  De fait, le kaki est très présent non seulement dans la cuisine, mais aussi la médecine et le folklore du pays du Matin calme.

Kaki oriental (Diospyros kaki)

Kaki oriental (Diospyros kaki)

Mentionné pour la première fois en Occident par le Jésuite Matteo Ricci qui l'a découvert lors d'un séjour en Chine au début du XVIIe siècle, le kaki, à la teinte orangée caractéristique, était alors déjà cultivé en Corée depuis le XIVe siècle. 

Si le kaki peut être sucré ou amer, les cultivars propres à la Corée font prédominer les fruits amers. Il est récolté à l'automne, en octobre-novembre. On peut le laisser mûrir, ce qui donnera le hongsi, ou kaki mûr, de consistance moelleuse. Les fruits séchés, pendant soixante jours, sont appelés gotgam (kaki séché). Un troisième mode de préparation consiste à percer le kaki avec une aiguille, puis à le faire tremper dans une jarre contenant de l'eau salé et à le laisser ensuite fermenter. Le kaki acquiert ainsi un goût sucré.

Plaqueminier chargé de fruits, à l'automne, dans la région d'Anbyeon (source : KCNA et Explore DPRK)

Plaqueminier chargé de fruits, à l'automne, dans la région d'Anbyeon (source : KCNA et Explore DPRK)

Au Sud, le kaki est surtout cultivé et récolté dans la région de Sangju, dans la province du Gyeongsang du Nord - qui représente 70 % de la production. Au Nord, le kaki est réputé être propre au comté d'Anbyeon, dans la province de Kangwon.

Le fruit du plaqueminier est reconnu pour ses qualités nutritives, étant riche en vitamines A, B et surtout C, en carbohydrates et en acides organiques. Il a également des vertus curatives : selon le proverbe coréen, "rester sous un plaqueminier vous apportera une meilleure santé". Le fruit sert à traiter les problèmes de digestion... et à se dégriser après avoir consommé de l'alcool. Par ailleurs, les feuilles du plaqueminier sont utilisées pour combattre l'hypertension artérielle et le diabète.

Récolte et préparation du kaki à Sangju (source : KBS)

Récolte et préparation du kaki à Sangju (source : KBS)

Le kaki peut être mangé cru, séché ou encore servir pour des confitures. Mélangé à de la poudre de riz, le hongsi permet de préparer une soupe appréciée. Les kakis abîmés sont épluchés et coupés en tranches fines séchées (gamttogae) pendant quelques jours : le gamkkeopjil beomuri est préparé à partir de gamttogae, de la peau séchée du fruit, assaisonné d'un peu de sucre et de sel, le tout mélangé avec de la farine et cuit à la vapeur pendant une demi heure.

Le kaki permet de préparer un punch, le sujeonggwa. Les tiges de kaki servent à fabriquer un thé, gamggokjicha. Les fruits mûrs fermentés donnent un vinaigre, le gamsikcho.

Enfin, le kaki séché (gotgam) était réputé, dans la tradition coréenne, éloigner le tigre - qui joue un rôle analogue à celui du loup dans le folklore européen.

Principales sources : 

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15 février 2023 3 15 /02 /février /2023 21:39

Pendant la guerre du Vietnam, la République de Corée (Corée du Sud) a envoyé 320 000 soldats combattre aux côtés des Sud-Vietnamiens, soit le plus important contingent étranger (ex aequo avec la Chine) après celui des Etats-Unis. Si des atrocités ont été commises, dont a notamment rendu compte l'ancien combattant Hwang Sok-yong dans L'ombre des armes (édité en France par Zulma en 1992), il a fallu attendre 2023 pour que, pour la première fois, un tribunal sud-coréen décide d'indemniser une victime - comme l'a indiqué Shin Hyon-hee, dans une dépêche de l'agence Reuters du 7 février 2023 - traduite ci-après de l'anglais et reproduite avec leur autorisation par Les nouveaux carnets du Viêt Nam.

Soldats sud-coréens au Vietnam appartenant à la 9e division d'infanterie (photo Phillip Kemp)

Soldats sud-coréens au Vietnam appartenant à la 9e division d'infanterie (photo Phillip Kemp)

La justice sud-coréenne ordonne une première indemnisation pour une victime de la guerre du Vietnam

Un tribunal sud-coréen a ordonné mardi au gouvernement d'indemniser une victime d'atrocités pendant la guerre du Vietnam dans les années 1970, quand environ 300 000 soldats sud-coréens combattaient aux côtés des forces américaines. [entre 1965 et 1973, note des Carnets]

Cette décision a marqué une première reconnaissance juridique de la responsabilité de la Corée du Sud pour les atrocités commises pendant la guerre et pourrait potentiellement ouvrir la voie à d'autres demandes de réparation de la part de victimes

Le tribunal du district central de Séoul a ordonné au gouvernement de fournir environ 30 millions de wons (23 800 dollars) en compensation ainsi que des fonds supplémentaires à cause du retard à Nguyen Thi Thanh, une survivante des meurtres de civils commis par les troupes sud-coréennes.

Nguyen Thi Thanh, 63 ans, a déposé une plainte contre le gouvernement sud-coréen en 2020 pour obtenir environ 30 millions de won en compensation, affirmant qu'elle a perdu des membres de sa famille et qu’elle-même a été blessée lorsque des marines sud-coréens ont tué environ 70 civils dans village de la province de Quang Nam en 1968.

A l'époque, les militaires ont forcé la famille de la plaignante à sortir de chez elle, "sous la menace de fusils à balles réelles et, avant de leur tirer dessus", selon l'agence de presse Yonhap.

En conséquence, il est reconnu que la famille de la requérante est décédée sur les lieux et qu’elle et d'autres personnes ont subi de graves blessures.

Un responsable du tribunal a confirmé la décision, mais a déclaré que le verdict complet n'était pas immédiatement disponible pour publication.

Nguyen Thi Thanh, lors d'un appel vidéo depuis le Vietnam organisé par ses avocats après la décision, a salué la décision et a déclaré que ce serait "un réconfort pour les âmes victimes du drame".

Le ministère de la Défense de Séoul n'a pas immédiatement commenté. Le ministère a déclaré que les deux pays avaient eu des consultations étroites sur les questions en suspens pour l'avancement "orienté vers l'avenir" des relations diplomatiques, qui ont été officiellement établies en 1992.

"La Corée et le Vietnam, au cours des 30 dernières années, ont atteint un développement sans précédent de leurs relations sur la base du principe "laissons les événements malheureux du passé et allons vers l'avenir" ", a-t-il déclaré dans un communiqué.

Le ministère des Affaires étrangères de Hanoï n'a pas immédiatement répondu à une demande de commentaire

(1 dollar = 1 261,74 won)

Reportage de Hyonhee Shin; Reportage supplémentaire de Khanh Vu à Hanoi; Montage par Raju Gopalakrishnan.

Source : 

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9 février 2023 4 09 /02 /février /2023 23:50

Le paysage religieux coréen, s'il est aujourd'hui dominé par le bouddhisme, le protestantisme et le catholicisme, comporte aussi des religions indigènes, ancrées dans l'histoire nationale. L'une des principales religions nationales est l'église Cheondogyo (ou cheondoïsme), dont le nom signifie littéralement "Religion de la voie céleste", et qui est toujours implantée tant au sud qu'au nord de la péninsule.

Le Temple central Cheondogyo, à Séoul

Le Temple central Cheondogyo, à Séoul

La religion Cheondogyo s'est fondée sur les révoltes paysannes, à la fois antiféodales et anti-occidentales, qui marquent la Corée au XIXe siècle. Se voulant une religion purement orientale, par opposition aux croyances occidentales - au premier rang desquelles le christianisme - elle inclut des éléments provenant du confucianisme, du bouddhisme et du taoïsme. Comme dans le confucianisme, les fidèles de cette religion monothéiste vénèrent le Ciel (Cheon) comme le principe ultime du bien et de la justice. La divinité (haneullim) et l'homme se confondent : l'homme, les autres êtres vivants et les choses sont engendrés par une divinité présente en chacun d'eux - et ils ne sont donc pas créés par un dieu surnaturel. Une conséquence est que tous les hommes naissent égaux, ce principe démocratique étant l'une des causes de la popularité du cheondoïsme.

La religion cheondogyo tire ses origines du mouvement Donghak développé à partir de 1860 par le lettré Choe Je-u (condamné à mort pour sédition et exécuté en 1864), et ayant inspiré la guerre paysanne de 1894. Plus exactement, Cheondogyo en tant que religion se structure au début du XXe siècle en reprenant les enseignements de Choe Je-u. Les révoltes paysannes refusèrent l'exploitation des couches les plus pauvres de la société et s'opposèrent au gouvernement, en éliminant les fonctionnaires locaux.

Choe Je-u

Choe Je-u

Comme pour le confucianisme, le nombre de fidèles est difficile à évaluer précisément, car les pratiquants sont moins nombreux que les Coréens se revendiquant du cheondoïsme  : si l'église Cheondogyo revendiquait plus de 5 millions de fidèles au Sud et près de 3 millions au Nord dans les années 2000, selon les recensements officiels sud-coréens le nombre de fidèles s'élevait à 65 000 en 2015, en hausse (puisque seulement 28 000 fidèles étaient recensés en 1995). Au Nord, les autorités évaluent à environ 15 000 les fidèles cheondoïstes. Un des partis alliés au Parti du travail de Corée, le parti Cheondogyo-Chong-u se fonde sur le cheondoïsme. Dans ses mémoires A travers le siècle, le Président Kim Il-sung salue la contribution de la religion Cheondogyo, religion "progressiste" intrinsèquement populaire, à la lutte pour la libération nationale contre la colonisation japonaise.

Plusieurs des dirigeants de Cheondogyo au sud de la péninsule, engagés dans la réunification, ont par ailleurs rejoint la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) : en 1986, l'ancien ministre des Affaires étrangères de Park Chung-hee (1961-1963) Choe Deok-sin (1914-1989) et son épouse Ryu Mi-yong (1921-2016) (auparavant, ils avaient émigré aux Etats-Unis en 1977 où ils avaient obtenu l'asile politique) ; en 1994, Oh Ik-jae. Choe Deok-sin était le fils du militant pour l'indépendance Choe Dong-o (1892-1963), qui dirigeait en Mandchourie l'école Hwaseong où Kim Il-sung était scolarisé. En 2019, un des enfants sud-coréens de Choe Deok-sin et Ryu Mi-yong, Choe In-guk, a annoncé s'installer à Pyongyang. 

Sources :

- Suh Cheong-soo, An encyclopaedia of Korean culture, Hansebon, Séoul, 2004, p. 246-249.

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30 janvier 2023 1 30 /01 /janvier /2023 22:32

Dans une dépêche publiée le 10 janvier 2023, l'agence officielle nord-coréenne KCNA a rendu compte de l'aide apportée par les étudiants d'université, pendant leurs vacances d'hiver, aux ouvriers et paysans "dans des établissements industriels, des fermes, des stations électriques et des chantiers d'importance majeure". La mise en exergue de ces initiatives s'inscrit dans une démarche visant à valoriser des activités bénévoles qui contribuent à renforcer la solidarité entre les étudiants, appelés à devenir des cadres, et les ouvriers et paysans.

Lorsqu'arrive le moment du repiquage du riz, tous les Nord-Coréens sont invités à contribuer à l'effort collectif - souvent rejoints par les diplomates étrangers en poste. Suivant la même logique, les autorités valorisent les initiatives par lesquelles les étudiants d'université soutiennent les travailleurs et - par conséquent - une économie nationale qui reste soumise à un embargo sévère

Dans une dépêche du 10 janvier 2023, KCNA a ainsi rendu compte que les étudiants de l'Université du commerce de Pyongyang Jang Chol Gu avaient aidé les travailleurs de l'usine thermique de Pyongyang. Les étudiants de l'Université de l'industrie légère de Pyongyang Han Tok Su s'étaient pour leur part rendus dans l'Usine d'impression des livres d'éducation. 

Ces efforts s'incrivent également dans le cadre d'un soutien au secteur du bâtiment, alors que l'accent est désormais porté également sur la rénovation et l'amélioration du logement dans les zones rurales - alors que le manque de logements avait longtemps conduit à mettre en lumière les programmes de construction à Pyongyang et dans les principaux centres urbains, plus dynamiques démographiquement. 

Principale source : KCNA.

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20 décembre 2022 2 20 /12 /décembre /2022 19:54

« Attention, des pickpockets sévissent actuellement dans notre station. Pour votre sécurité, surveillez bien vos effets personnels » : ce message familier aux usagers du métro parisien peut désormais être entendu sur la ligne 1... en coréen. Le fruit d'une initiative entre la Régie autonome des transports parisiens (RATP) et l'ambassade de la République de Corée (Corée du Sud) en France, alors qu'augmente le nombre de touristes coréens en France.

Rame à la station Nation, sur la ligne 1

Rame à la station Nation, sur la ligne 1

Loi Toubon de 1994 oblige, les annonces officielles dans le métro parisien doivent être faites en français. Mais d'autres langues sont également utilisées - dans la limite de quatre langues et à condition que les contenus soient suffisamment courts : si initialement l'anglais et l'espagnol étaient le plus souvent entendus, des messages ont également été entendus en italien et en allemand. Tous prononcés par des confrères des agents de la RATP natifs des langues ainsi représentées.

Puis les langues se sont diversifiées : le chinois et le japonais ont aussi été employés, notamment sur les lignes les plus utilisées par les touristes - comme la ligne 1, qui dessert le Louvre et les Champs-Elysées, et passe à proximité de la Tour Eiffel. 


C'est dans ce contexte qu'il a été décidé de diffuser également des messages en coréen, enregistrés grâce à la participation de Coréens vivant en France - un homme et une femme, et qu'on peut entendre pendant la saison touristique - en hiver et en été.

Sources : 

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12 décembre 2022 1 12 /12 /décembre /2022 23:53

Alors que la mobilisation se poursuit après la bousculade mortelle ayant causé 158 morts à Itaewon le 29 octobre 2022, l'Assemblée nationale - où l'opposition est majoritaire - a voté le 11 décembre 2022 une motion visant à la révocation du ministre de l'Intérieur Lee Sang-min. Le président conservateur Yoon Seok-yeol s'y est de facto opposé, en appelant à ce que prenne d'abord fin l'enquête de police sur les origines de la tragédie.

Itaewon, le soir du drame

Itaewon, le soir du drame

Les députés conservateurs (minoritaires) avaient quitté l'hémicycle au moment du vote, où la motion a ainsi été adoptée par 182 voix "pour" et un vote invalidé - l'Assemblée nationale comptant 300 sièges. 

Les parlementaires proches du chef de l'Etat avaient brandi auparavant des pancartes où ils mettaient en cause Lee Jae-myung, l'adversaire malheureux (battu d'une courte tête : 47,83 % contre 48,56 %) de Yoon Seok-yeol à l'élection présidentielle du 9 mars 2022, L'un des proches de Lee Jae-myung, Jeong Jin-sang, est impliqué dans une affaire de corruption. Les démocrates ont dénoncé une manoeuvre pour éviter que toutes les conséquences ne soient tirées de la bousculade mortelle survenue à Itaewon, où les familles des victimes demandent que les responsables soient sanctionnés.

La position des conservateurs - et du président Yoon - est qu'il convient d'attendre la fin de l'enquête de police - ainsi que d'une enquête parlementaire - avant de se prononcer sur le maintien à son poste du ministre de l'intérieur. L'administration présidentielle considère ainsi que ce n'est pas à proprement parler un veto du chef de l'Etat.

Alors que les prochaines élections législatives sont prévues en avril 2024, Yoon Seok-yeol est devenu le président le plus rapidement impopulaire de la Corée du Sud, et la perte de confiance de l'opinion publique a encore grandi après la catastrophe d'Itaewon. Lors de la deuxième semaine de décembre 2022, il est crédité de 38 % d'opinions favorables et de 59 % d'opinions défavorables selon l'institut de sondages Realmeter. En cas d'élections législatives, et d'après le même institut, les démocrates (principale formation d'opposition) obtiendraient 45 % des voix et les conservateurs 39 %.

Sources :

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8 décembre 2022 4 08 /12 /décembre /2022 21:48

Si les nouilles froides (appelées raengmyon au nord de la péninsule, et naengmyon au sud) font partie du patrimoine culinaire de l'ensemble de la péninsule coréenne, celles de Pyongyang sont emblématiques de la cuisine du nord et sont inscrites dans les compétitions culinaires. Elles ont d'ailleurs été servies lors de la rencontre au sommet entre le Sud-Coréen Moon Jae-in et le Nord-Coréen Kim Jong-un, en avril 2018, entraînant alors un engouement nouveau pour ce plat à Séoul. En novembre 2022, la coutume du raengmyon de Pyongyang a été inscrite au patrimoine culturel immatériel de l'UNESCO. Nous reproduisons ci-après la notice publiée par l'UNESCO, soulignant le rôle social de ce plat dégusté notamment lors du Jongwoldaeborum et composé de farine de sarrasin avec différentes garnitures, dont de la viande, du kimchi et des légumes.

© Ryu Tok In, République populaire démocratique de Corée, 2020

© Ryu Tok In, République populaire démocratique de Corée, 2020

Le raengmyon de Pyongyang (nouilles froides principalement composées de farine de sarrasin) est un plat traditionnel associé aux événements sociaux et culturels en Corée du Nord. Servies dans un bol en laiton, les nouilles sont couvertes de morceaux de viande, de kimchi, de légumes, de fruits et d’autres garnitures. La touche finale de la préparation consiste à verser sur les nouilles du bouillon froid de viande ou du jus de kimchi de radis. Tradition culinaire populaire profondément ancrée dans la vie des Pyongyangais, ce plat est associé avec la longévité, le bonheur, l’hospitalité, la convivialité et l’amitié. Il favorise par ailleurs le respect, la proximité et l’unité.

La veille du Jongwoldaeborum (une fête populaire coréenne célébrée pendant l’hiver), les habitants se rassemblent en famille ou entre voisins et partagent ce plat dans l’espoir que leurs vies soient aussi longues que le sont les nouilles. Lors de célébrations telles que les anniversaires ou les mariages, les Pyongyangais servent le raengmyon à leurs proches, à leurs voisins et à leurs amis en les bénissant. La coutume veut que les convives boivent un peu d’alcool avant de déguster ce plat. Aujourd’hui, il est servi même en dehors de ces occasions particulières, dans des restaurants spécialisés.

Dans le cadre familial, les grands-mères et les mères transmettent fièrement leur savoir-faire et leurs connaissances à leurs enfants, considérant cette transmission comme un devoir moral. La pratique est également transmise par le biais de programmes d’études et de formations dans les restaurants, de concours de cuisine, de festivals et d’expositions, ainsi que dans les médias et les établissements d’enseignement.

Source : 

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