Alors que le droit à l'interruption volontaire de grossesse (IVG) a été remis en cause dans plusieurs pays - aux Etats-Unis, l'arrêt de 1973 de la Cour suprême Roe v. Wade a été abrogé en 2022, laissant à chaque Etat le soin de légiférer en la matière - la garantie de ce droit constitue l'un des thèmes de mobilisation dans le monde à l'occasion de la Journée internationale des droits des femmes, le 8 mars. Nous revenons sur l'état du droit - et la pratique - dans les deux Etats coréens, où les progrès réalisés se sont heurtés à une tradition patriarcale puis, au Sud, à l'opposition toujours vive des églises, notamment évangéliques. Par ailleurs, le contrôle des naissances, commun à l'ensemble de la péninsule, doit être pris en compte pour comprendre la mise en oeuvre effective, et débattue, du droit à l'IVG.
En République populaire démocratique de Corée (RPDC), le droit à l'IVG a été consacré dans le Code pénal dès mars 1950, dans le prolongement de la loi du 30 juillet 1946 sur l'égalité des sexes, alors l'une des plus libérales d'Asie.
A l'occasion du rapport présenté en avril 2016 au Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, les autorités nord-coréennes apportaient les précisions suivantes sur la légalité de l'avortement en RPDC :
193. L’avortement est légal en République populaire démocratique de Corée. Il est
pratiqué à la demande de la femme concernée en raison de risques pour sa vie, pour
sa santé physique et mentale et ou de malformation du fœtus. Conformément à la
directive du Ministère de la santé publique, publiée en juillet 2015, des mesures
appropriées ont été prises pour assurer la prise en charge dans de bonnes conditions
des femmes qui ont eu des avortements spontanés ou provoqués.
194. Le taux d’avortement était de 9,9 pour 1000 femmes mariées d’après les
résultats de l’enquête CAP sur la santé de la procréation, effectuée en 2011.
195. La prévention des complications dues à l’avortement grâce à la fourniture par
les établissements de santé de services d’avortement médicalisé et à la prise en
charge après l’avortement a été l’un des objectifs de la stratégie de santé de la
procréation (2011-2015). Le personnel sanitaire local a été formé à l’utilisation de
ventouses et le matériel et les instruments nécessaires ont été distribués. Les
conseils après l’avortement, les services de planification familiale et d’aiguillage
sont également fournis le cas échéant. La participation des hommes à la santé de la
procréation et aux soins à donner aux femmes et aux enfants a été promue.
Ces données corroborent celles obtenues auprès d'autres sources, y compris des défecteurs nord-coréens, selon lesquelles les motifs pour appliquer le droit à l'IVG sont interprétés de manière large (on note par exemple que le § 193 n'évoque pas l'hypothèse du viol ou les motifs économiques et sociaux, tandis que le Code pénal, en mars 1950, évoquait, de manière vague des "raisons importantes") et que la pratique de l'IVG serait socialement acceptée et répandue. L'association Women on waves a aussi observé que l'IVG serait autorisée, pratiquement sur demande, jusqu'au septième mois de grossesse, et s'inscrit dans le cadre de mesures de planning familial, d'accès à des méthodes contraceptives modernes et de protection de la santé de la mère.
En République de Corée (Corée du Sud), le droit à l'IVG a été strictement limité, entre 1953 et 2020, à des motifs liés à la santé de la mère, le viol, l'inceste et la transmission de maladies héréditaires et infectieuses. Les personnels médicaux pratiquant l'avortement s'exposaient à l'application d'une peine de deux ans de prison. Si les politiques de limitation des naissances avaient donné lieu à une application laxiste de la loi dans les années 1960 et 1970, parallèlement à une sélection des naissances jusqu'au début des années 1990, l'effondrement du taux de natalité avait ensuite conduit à un retour aux politiques répressives dans les années 2000. En 2005, il était toutefois estimé que 330 000 avortements illégaux avaient été pratiqués en Corée du Sud - ce chiffre étant tombé à 50 000 en 2017, après la légalisation de la contraception.
Le 11 avril 2019, la Cour constitutionnelle a déclaré anticonstitutionnelle l'interdiction de l'avortement, laissant au Gouvernement jusqu'à fin 2020 pour modifier la loi. En l'absence d'adoption de la loi qui prévoyait de légaliser l'avortement jusqu'à 14 semaines de grossesse, le droit à l'IVG est garanti sans limites depuis le 1er janvier 2021.
Une partie des médecins demandent une reconnaissance du droit à l'objection de conscience de pratiquer une IVG. Par ailleurs, des mouvements féministes souhaitent qu'un cadre soit fixé, alors que des limitations existent en pratique. Comme l'a observé Nicolas Rocca pour La Croix en janvier 2021 :
La société d’obstétrique et de gynécologie a assuré que pour « protéger la sécurité des femmes, l’avortement ne sera pratiqué qu’avant dix semaines de grossesse ».
Principales sources :
(Pour le droit à l'IVG en RPD de Corée)
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https://documents-dds-ny.un.org/doc/UNDOC/GEN/N16/154/30/PDF/N1615430.pdf?OpenElement
Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Examen des rapports soumis par les États parties en application de l’article 18 de la Convention. Deuxième, troisième et quatrième rapports périodiques des États parties attendus en 2014. République populaire démocratique de Corée [Date de réception : 11 avril 2016].
No regulation on abortion Background The Criminal Code of March 1950 states that abortion is allowed in the Democratic People's Republic of Korea "for important reasons". The particulars of these ...
https://www.womenonwaves.org/en/page/4888/abortion-law-north-korea
(Pour le droit à l'IVG en République de Corée)
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