Dès sa réélection le 17 juin 2012, le député communiste du Nord Jean-Jacques Candelier a interrogé le nouveau Gouvernement de Jean-Marc Ayrault sur les relations diplomatiques entre la France et la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord). Dix mois après l'ouverture d'un bureau français de coopération à Pyongyang, le ministère français des Affaires étrangères réaffirme, comme en mai 2011 en réponse à de précédentes questions du député Jean-Jacques Candelier, que "l'établissement de relations diplomatiques entre la France et la RPDC n'est pas d'actualité", en invoquant les mêmes arguments avancés depuis 2000 : les relations intercoréennes, la question nucléaire et les droits de l'homme, à propos desquels les formulations utilisées - très fermes - sont comparables à celles déjà employées en 2011.
Si la continuité sur la question coréenne prévaut dans la diplomatie française, malgré le changement de majorité, quelques évolutions peuvent être relevées : ainsi, si la France se déclare favorable "à toute initiative permettant de contribuer à la détente, la paix et la stabilité", elle souligne qu'il faut une volonté en ce sens des "différentes parties impliquées" - ce qui est une façon de reconnaître que la Corée du Sud et les Etats-Unis, notamment, doivent aussi souhaiter s'engager, tout en rappelant que la position de la France dépendra aussi de celle de ses partenaires. Alors que la France a de nouveau souligné - en réponse à chacune des deux questions - sa ferme condamnation du lancement du satellite artificiel nord-coréen, le 13 avril 2012 (qu'elle qualifie de "provocation" et de "tir" pris, selon elle, en contradiction avec les résolutions 1718 et 1874 du Conseil de sécurité des Nations unies), elle ne fait toutefois plus allusion aux sanctions internationales adoptées contre la RPD de Corée, à la différence de sa réponse du 24 mai 2011.
Il n'est pas fait référence au changement de direction à la tête de la RPD de Corée, ce qui nous semble prudent sur un sujet éminemment sensible en RPD de Corée, alors que les spéculations vont bon train. En décembre 2011, la réaction française après la mort du dirigeant Kim Jong-il avait surpris le ministère des Affaires étrangères de la RPD de Corée. Un article de l'AAFC à ce sujet avait ensuite permis au Quai d'Orsay d'apporter les explications attendues à la délégation générale de la RPD de Corée en France, ce dont nous nous félicitons pour le bon développement des relations bilatérales dans un esprit de compréhension mutuelle. Nous renouvelons nos pleins voeux de succès à Olivier Vaysset, directeur du bureau français de coopération, que nous avions rencontré avant son entrée en fonctions. L'AAFC a toujours plaidé pour qu'Olivier Vaysset soit considéré comme un interlocuteur de premier rang des Nord-Coréens, malgré le handicap que constitue son absence de titre d'ambassadeur - faute de relations diplomatiques complètes entre la France et la RPD de Corée. A cet égard, nous nous réjouissons qu'Olivier Vaysset ait été reçu récemment, au début de cet été, par le ministère des Affaires étrangères de la RPD de Corée.
En ce qui concerne la coopération franco - nord-coréenne, le Quai d'Orsay souligne qu'elle a un objectif d'abord culturel et humanitaire, en observant qu'il "garde la porte du dialogue ouverte avec Pyongyang" - sans qu'il ne soit fait référence à de nouvelles initiatives, déjà prises ou à l'étude, depuis l'ouverture du bureau français de coopération à Pyongyang en octobre 2011. En particulier, la - courte - réponse du ministère français des Affaires étrangères ne mentionne pas la venue à Paris de l'orchestre nord-coréen Unhasu en mars 2012, ce qui est de nature à confirmer que le gouvernement français n'a pas été à l'initiative de cet événement, même s'il en a permis le bon déroulement, notamment pour l'octroi des visas. Dans le domaine de l'aide publique au développement, l'aide aux deux ONG françaises présentes en Corée du Nord, Triangle génération humanitaire et Première urgence, augmentée en 2010, a été reconduite en 2011 à hauteur de 500.000 euros, comme le précise le réponse à la question écrite n° 323. L'AAFC ajoute que, si le programme d'accueil de professeurs nord-coréens de français à Grenoble n'a, pour sa part, pas été poursuivi depuis 2011, en revanche un nouveau programme pluriannuel d'accueil de dix étudiants nord-coréens en architecture a commencé en septembre 2011, un an après l'achèvement du précédent programme (2002-2010) ; la participation française concerne la prise en charge de la protection sociale des étudiants.
Il y a tout lieu de conclure que, en l'absence d'évolution de la situation diplomatique dans la péninsule coréenne - alors que les regards sont aujourd'hui tournés vers les futures échéances électorales aux Etats-Unis et en Corée du Sud - les relations diplomatiques entre la France et la République populaire démocratique de Corée ne devraient pas connaître de changement majeur dans les prochains mois. Ce statu quo n'est pas à la hauteur des attentes des Nord-Coréens, qui avaient adressé leurs félicitations à la fois au Président François Hollande et au Premier ministre Jean-Marc Ayrault, alors que l'usage n'est d'adresser des félicitations qu'aux dirigeants des Etats avec lesquels la RPD de Corée a établi des relations diplomatiques complètes. Pour sa part, alors que vingt-cinq des vingt-sept gouvernements des Etats membres de l'Union européenne ont reconnu la RPD de Corée, l'Association d'amitié franco-coréenne continue de plaider pour l'établissement de relations diplomatiques complètes entre la France et la RPD de Corée, qu'elle estime le plus à même de favoriser la paix et la stabilité dans la péninsule coréenne. Cette étape nouvelle dans les relations bilatérales de la France faciliterait également une pleine insertion de la RPDC sur la scène internationale, tout en s'inscrivant dans la tradition française de reconnaissance des Etats et non des régimes.
Nous reproduisons ci-après les deux questions posées par Jean-Jacques Candelier à Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères, le 3 juillet 2012, et les réponses apportées par le Quai d'Orsay le 7 août 2012, dans des délais nettement plus brefs qu'en 2010-2011, ce qui mérite d'être salué. Les réponses apportées en mai 2011 sur les mêmes sujets peuvent être consultées sur le site de l'AAFC.
Question écrite du député Jean-Jacques Candelier (N° 324) publiée au Journal officiel (JO) du 3 juillet 2012
M. Jean-Jacques Candelier attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la question d'un projet de traité de paix en Corée rédigé par l'organisation civique sud-coréenne « Solidarité pour la paix et la réunification de la Corée » (Spark selon les initiales anglaises). Le 27 juillet 1953, après trois années et des millions de morts, les combats de la guerre de Corée prirent fin avec la conclusion d'un simple accord d'armistice. Aucun traité de paix n'a été signé, la péninsule coréenne étant virtuellement toujours en état de guerre. Le 19 septembre 2005, au cours des pourparlers sur la dénucléarisation de la péninsule coréenne, les deux Corées, les États-unis, la Chine, la Russie et le Japon avaient publié une déclaration affirmant la nécessité de conclure un traité de paix et d'établir une structure de paix dans la péninsule. Ces pourparlers à six sont au point mort. Désireux de leur donner une suite, des spécialistes et des juristes sud-coréens ont rédigé en 2008 un projet de traité de paix en Corée. Il s'agit d'une démarche concrète proposant des objectifs atteignables, pour peu que les six aient la volonté sincère de parvenir à la paix. Un appel et une pétition ont été lancés par l'organisation civique Spark. Estimant urgent d'établir la paix dans la péninsule coréenne, il lui demande son avis sur cet appel-pétition et sur le projet de traité de paix mentionné [Note de la rédaction : et que l'AAFC appelle à signer].
Réponse du ministère des Affaires étrangères publiée au JO du 7 août 2012
Réponse du ministère des Affaires étrangères publiée au JO du 7 août 2012
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