L'annonce par la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) du lancement d'un satellite artificiel Kwangmyongsong-3, entre le 12 et le 16 avril 2012, a suscité une levée de boucliers et des propos d'une violence inouïe de la part des responsables de plusieurs puissances étrangères, au premier rang desquelles les Etats-Unis, la Corée du Sud et le Japon - ce dernier n'hésitant pas à déclarer qu'il pourrait abattre le satellite nord-coréen s'il survolait son territoire. L'Association d'amitié franco-coréenne déplore vivement ces réactions, en affirmant le droit pour la RPD de Corée, comme pour tout Etat souverain, de conduire un programme de recherches spatiales à des fins scientifiques et technologiques.
Jamais, dans l'histoire de la conquête spatiale, un Etat ne s'était vu refuser par un autre Etat le droit de procéder au lancement d'un satellite artificiel. C'est pourtant le tour de force que tentent d'opérer les Etats-Unis et plusieurs de leurs alliés, dont la Corée du Sud et le Japon, à l'encontre de la RPD de Corée - qui a annoncé le lancement, entre le 12 et le 16 avril prochains (suivant les conditions météorologiques) - d'un satellite "de travail" Kwangmyongsong-3, après les satellites "expérimentaux" Kwangmyonsong-1 en 1998 (photo) et Kwangmyongsong-2 en 2009. D'ores et déjà, Washington a annoncé la suspension unilatérale des livraisons alimentaires prévues dans le cadre d'un accord signé, le 29 février dernier, avec Pyongyang.
Le Traité sur l'espace, dont la RPD de Corée est signataire, stipule dans son premier article que l'exploration de l'espace doit se faire dans l'intérêt de tous les pays, quel que soit le stade de leur développement économique ou scientifique, et proclame l'espace extra-atmosphérique patrimoine commun de l'humanité.
L'argument américain serait que le lancement d'un satellite artificiel utiliserait des technologies trop proches de celles du lancement d'un missile de longue portée (voire qu'il s'agirait d'un tir de missile déguisé), qu'ont interdit à la RPD de Corée les résolutions 1718 et 1874 du Conseil de sécurité des Nations Unies. L'argument ne tient pas, car si la technologie utilisée est en partie comparable, les trajectoires d'un satellite et d'un missile ne sont pas les mêmes. Il avait déjà été utilisé par Washington en 2009, lors du lancement du satellite Kwangmyongsong-2, avant de devoir être abandonné face aux preuves dont disposaient les services de rensignement des Etats-Unis que la fusée de lancement comportait bien un satellite. M. Dennis Blair, directeur des services de renseignements américains, avait ainsi déclaré à la commission de la défense du Sénat américain, dès le 9 mars 2009, près d'un mois avant le lancement du satellite Kwangmyongsong-2 : "Je tends à croire que les Nord-Coréens ont annoncé qu'ils allaient faire un lancement spatial et mon sentiment est que c'est ce qu'ils ont l'intention de faire. Je peux me tromper mais c'est ce que je prévois."
Pour preuve de sa bonne foi, Pyongyang a d'ailleurs invité les journalistes et les experts étrangers - y compris ceux de la NASA - à assister au lancement de son satellite artificiel.
Si les appréciations avaient divergé entre la RPD de Corée et d'autres pays sur la réussite ou non du lancement des satellites Kwangmyongsong-1 et Kwangmyongsong-2, la publicité faite par Pyongyang du lancement du satellite Kwangmyonsong-3, ainsi que le choix d'un nouveau site de lancement, sont des indices d'une confiance de la RPD de Corée dans la capacité à réussir la mise sur orbite de son nouveau satellite, devant l'opinion publique internationale.
Le fameux signal du Spoutnik américain avait effrayé les milieux anticommunistes, en signalant l'avancée scientifique et technologique d'une Union soviétique décrite par la propagande anticommuniste comme un Etat arriéré. Six décennies plus tard, un autre Etat, la République populaire démocratique de Corée, s'apprête à conforter son rang parmi les puissances engagées dans la conquête spatiale.