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28 décembre 2014 7 28 /12 /décembre /2014 00:45

Normalien agrégé d'histoire, ayant travaillé à l'ambassade de France à Séoul, Pascal Dayez-Burgeon s'est imposé en quelques années comme l'un des principaux invités des médias français sur la Corée - et tout spécialement sur la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) - après avoir écrit plusieurs livres sur la péninsule coréenne. Son dernier ouvrage, La dynastie rouge. Corée du Nord 1945-2014, édité par Perrin à l'automne 2014, s'inscrit également dans la veine des livres grand public, en jouant sur un registre où le succès de librairie est attendu : établir la biographie croisée des trois dirigeants de la RPD de Corée (Kim Il-sung, Kim Jong-il et Kim Jong-un). En soi, l'exercice est original - du moins, en langue française - et le livre, ainsi que la thèse qu'il défend (la Corée du Nord aurait effectué une mutation d'un régime de démocratie populaire en une monarchie), mérite qu'on s'y attarde.

A propos de "La dynastie rouge" de Pascal Dayez-Burgeon

Un ouvrage témoignant d'une volonté didactique et agréable à lire, mais relevant de la catégorie des ouvrages grand public sans répondre aux critères formels des travaux de référence s'agissant du traitement des sources et de l'exactitude des données


Ayant la plume facile, jamais avare de bonnes formules qui feraient rougir d'envie un journaliste ou un publicitaire (voir notamment les têtes de chapitre : "Le prince qu'on attendait", "La monarchie 2.0"...), Pascal Dayez-Burgeon a le mérite d'avoir écrit des ouvrages sur la Corée agréables à lire et faciles d'accès pour le néophyte. Par ailleurs, sans doute de par sa formation, l'auteur manifeste un souci didactique, qui le conduit notamment à resituer le système politique de la RPDC dans son contexte historique et culturel, auquel est consacrée toute la première partie du livre. Assurément, les chapitres de La dynastie rouge où il parle de la culture coréenne commune à l'ensemble de la péninsule sont, de notre point de vue, parmi les plus intéressants, parce qu'ils savent rester dans une épure factuelle tout en mettant l'accent sur des aspects qu'ignorent la plupart des "pyongyangologues" qui, par facilité ou paresse intellectuelle, préfèrent chausser les grosses lunettes de l'anticommunisme.

Figurant en tête d'ouvrage, l'arbre généalogique de la famille du Président Kim Il-sung, certes simplifié, a le mérite d'être exact, quand beaucoup de journalistes s'essaient à l'exercice tout en ne parvenant même pas à orthographier correctement les noms coréens (quel que soit le mode de translittération du coréen retenu).

La bibliographie (p. 428-443) a le mérite d'être relativement exhaustive, du moins pour les sources en langues occidentales, tendant ainsi à combler une lacune des précédents ouvrages de Pascal Dayez-Burgeon où beaucoup d'informations n'étaient pas sourcées (ou du moins pas directement). Néanmoins, le parti pris d'accumuler les références en fin d'ouvrage, avec très peu de mentions dans le corps même du livre, est déconcertant, car il devient impossible de savoir si nombre des (excellentes) formules de l'auteur et de ses conclusions sont inspirées de ses sources, si elles sont le fruit d'une analyse ou de la synthèse de plusieurs sources, ou encore si elles proviennent de sources directes sud-coréennes. Nous reviendrons sur ce point. 

Comme dans ses précédents ouvrages, Pascal Dayez-Burgeon n'exclut pas de ses sources le site de l'AAFC ni les livres écrits par plusieurs de ses membres, ce dont nous lui savons gré  - même s'il semble méconnaître La Corée vers la réunification de Robert Charvin et Guillaume Dujardin. Au demeurant, il est piquant de voir le site de l'AAFC décrit (p. 441) comme un site de "La Corée du Nord en ligne". L'auteur serait sans doute surpris d'apprendre combien les articles du blog de l'AAFC ont pu susciter de réactions diverses des autorités nord-coréennes, en France comme en RPDC, justement car ils ne correspondaient pas à la doxa accessible sur KCNA ou Naenara.

Par rapport aux critères universitaires, La dynastie rouge présente cependant un certain nombre de faiblesses sur lesquelles nous ne ferons que citer des exemples, l'intention de Pascal Dayez-Burgeon ayant manifestement été d'écrire un livre grand public, et pas un ouvrage de référence (au sens où il servirait de base à des futurs travaux de recherche) :

- sur la forme, le choix de transcrire certains noms nord-coréens sous la graphie sud-coréenne (par exemple, "Ri", qui devient "Lee" au Sud, s'agissant du patronyme, ou "Yi" s'agissant de la dernière dynastie royale coréenne) surprend et est maladroite, car c'est comme si l'ancien président sud-coréen Lee Myung-bak était appelé Ri Myung-bak dans la littérature occidentale, au motif que son nom serait transcrit "Ri" au Nord alors qu'on parle bien d'un dirigeant de la Corée du Sud ; ce faisant, Pascal Dayez-Burgeon suit un usage qui n'existe qu'en Corée du Sud (et très partiellement), et n'est en tout cas suivi par aucun spécialiste occidental de la Corée ;

- il y a lieu de relever des erreurs factuelles, heureusement peu nombreuses : ainsi, l'agence Koryo Tours a été créée par des Britanniques, et pas par des Américains comme l'affirme l'auteur ; évoquer la surmortalité due à la famine des années 1990 entre 500.000 et 1,5 million de morts, soit entre 3 % et 6 % de la population d'un pays qui comptait alors 22 millions d'habitants, est mathématiquement faux (le taux exact serait compris entre 2,3 % et 7 %, à supposer que la très large fourchette proposée soit exacte, ce qui fait débat chez les spécialistes mais n'est du reste pas discuté ou étayé dans l'ouvrage) (p. 257) ; ou encore, l'Américain Liberace, qu'on peut à la rigueur décrire comme un pianiste, était homosexuel, mais pas travesti (p. 324) ;

- enfin, La dynastie rouge n'est pas exempt de contradictions internes, par exemple sur la date de naissance de l'actuel dirigeant, le Maréchal Kim Jong Un (1982, 1983 ou 1984 ?) ; le fait que les Nord-Coréens entretiennent le flou sur ce point ne peut suffire à justifier que les dates données puissent varier d'un chapitre à l'autre.

Un ouvrage dépassant apparemment la propagande, mais en fait dépendant d'une vision traditionnelle sud-coréenne sur la Corée du Nord


Si on ne peut pas reprocher à La dynastie rouge de ne pas constituer l'ouvrage de référence qu'il n'a jamais prétendu être, il est revanche plus regrettable que tant la lecture historique de la RPD de Corée qu'il nous livre, que son analyse (la mutation du communisme à la monarchie), peinent trop souvent à se démarquer des approches traditionnelles sud-coréennes sur la Corée du Nord, tellement ancrées dans les consciences collectives au Sud depuis l'époque des régimes autoritaires qu'elles sont devenues des préjugés fermant la porte au débat.


Donner, l'une après l'autre, la version présentée comme la "propagande du Nord", puis "la propagande du Sud", en les démentant toutes deux (par exemple, sur la disparition de Kim Il-sung, p. 244), ne suffit pas à créer un juste milieu objectif, surtout quand la longue description de la propagande du Sud permet de suggérer que celle-ci aurait un fond de vérité (ou du moins une valeur identique à celle des sources officielles nord-coréennes) qu'aucun spécialiste sérieux n'admet pourtant. Ainsi, suggérer que Kim Jong-il aurait tué Kim Il-sung est une thèse que même le défecteur nord-coréen Hwang Jang-yop, pourtant devenu un des plus vifs critiques de la RPD de Corée, a réfutée comme absurde et sans fondement. Il est très regrettable que Pascal Dayez-Burgeon se fasse alors l'écho d'une légende fabriquée par les services secrets sud-coréens, en se contentant d'un commentaire selon lequel cette thèse est "peu plausible" (alors qu'elle est simplement fausse) et en concluant par un "qu'importe la vérité". Ce genre de détails relève d'une certaine presse, pas d'un ouvrage sérieux.

Soucieux de la formule qui frappe et qui plaît, Pascal Dayez-Burgeon va souvent trop vite en besogne dans ses conclusions : non, tous les hommes politiques venus du Sud n'ont pas été écartés du pouvoir au Nord ; non, l'économie n'entre pas en récession dès 1980, comme tend à le faire croire la formule employée à la page 202... Cela ne signifie évidemment pas que les très nombreuses informations données, et qui traduisent un réel effort de synthèse, ne méritent pas qu'on s'y attarde. Mais il aurait fallu, par un travail de référencement plus approfondi, préciser pour chaque passage les sources utilisées, afin d'en apprécier la fiabilité : ainsi, la plupart des détails sur la vie privée des dirigeants nord-coréens proviennent des trois grands quotidiens conservateurs sud-coréens, et souvent de fuites savamment orchestrées par l'appareil d'Etat sud-coréen. Il s'agit donc d'hypothèses, à prendre avec précaution, faute le plus souvent de sources officielles nord-coréennes. L'indiquer n'a rien d'infâmant : il permet simplement au lecteur de se forger sa propre opinion.

Le livre élude certains débats, qui donnent pourtant une autre coloration aux portraits des dirigeants nord-coréens : il est ainsi hautement douteux que le naufrage de la corvette sud-coréenne Cheonan, au printemps 2010, soit imputable à la Corée du Nord, comme l'a prétendu Séoul. De façon regrettable, ce point n'est pas discuté, alors qu'il a accéléré la détérioration des relations intercoréennes. Ce débat n'est pas anodin s'il s'agit de déterminer les responsabilités de chaque partie dans la fin du rapprochement Nord-Sud au travers de la politique du "rayon du soleil". 

S'il n'est pas lui-même un auteur de référence, malgré des connaissances encyclopédiques tout à fait appréciables et qu'il a plaisir à nous faire partager, Pascal Dayez-Burgeon aurait gagné à mieux utiliser les travaux de ceux qui sont reconnus comme tels. Ainsi, sur la période de la guerre de Corée, il cite les travaux de l'historien américain Bruce Cumings comme faisant référence (p. 429). Sur la base de travaux d'archives menés pendant des dizaines d'années, Bruce Cumings a conclu sur la complexité des origines de la guerre de Corée (comme du reste de toute guerre, généralement le point d'achèvement d'une escalade de part et d'autre). Pascal Dayez-Burgeon peut être en désaccord avec Bruce Cumings sur ce point, mais il est regrettable qu'il ne juge pas utile de mentionner ce débat. De même, il se contente de renvoyer le débat sur l'usage d'armes chimiques par les Etats-Unis à de la propagande communiste, et il occulte les nombreux incidents de frontière qui ont conduit au déclenchement de la guerre. Il donne au final une présentation cohérente, mais en tout point conforme à celle des états majors américain et sud-coréen, très hostiles à la démarche des chercheurs tels que Bruce Cumings, suspects à leurs yeux de pencher trop du côté nord-coréen. Pascal Dayez-Burgeon a pris parti, mais sans donner les clés d'une autre lecture possible.

De même, un autre historien américain, Charles K. Armstrong, sur la base notamment des archives prises par les Américains pendant la guerre de Corée, a apporté une lecture qui fait autorité sur les débuts de la Corée du Nord (1945-1950). Charles Armstrong montre que, en RPD de Corée comme en Chine et au Vietnam, le succès des communistes s'est basé sur la lutte de libération nationale. Or Pascal Dayez-Burgeon ne mentionne pas les foyers de guérilla coréens en Mandchourie dans les années 1930, dont l'organisation, même brève, a servi de référence aux réformes de l'après-guerre (réforme agraire, égalité hommes-femmes, nationalisations). Il décrit Kim Il-sung comme totalement inféodé aux Soviétiques qui occupaient alors la moitié Nord de la Corée. Pourtant, Charles Armstrong a souligné l'intelligence de l'occupation soviétique, consistant à rendre celle-ci moins pesante que l'administration américaine au Sud : non seulement Kim Il-sung n'était pas le candidat des Soviétiques (du moins pas initialement), mais il avait les coudées franches pour, tout en s'inspirant des précédents de l'URSS et de la Chine, créer des institutions tenant aussi compte des conditions de la lutte de libération nationale. A contre-courant de ces travaux reconnus, Pascal Dayez-Burgeon, sur la base d'une lecture rapide et unilatérale des travaux d'Andreï Lankov, ne parvient pas à s'abstraire des vieux schémas sud-coréens sur la Corée du Nord, consistant à faire de Kim Il-sung l'agent des Soviétiques. De même, si l'histoire officielle nord-coréenne a encensé les faits d'armes de Kim Il-sung dans la guérilla, les rabaisser comme le fait Pascal Dayez-Burgeon n'aide pas à la connaissance d'une histoire certes difficile à apprécier objectivement, mais qui aurait mérité mieux qu'une description pour le moins contestable et conduisant à des conclusions hâtives, où se fait sentir la très forte influence des historiens officiels sud-coréens - même si Pascal Dayez-Burgeon réfute la thèse sud-coréenne d'extrême-droite selon laquelle le fondateur de la RPD de Corée aurait usurpé le nom et l'identité du vrai Kim Il-sung, et s'il montre que son nom de guérilla n'a rien d'exceptionnel ni de particulièrement emphatique.

Idéologie et transmission héréditaire du pouvoir : des analyses qui restent à conduire

S'agissant de l'idéologie nord-coréenne du Juche, La dynastie rouge insiste sur sa genèse dans les années après 1972, pour constituer un corpus qui justifierait la transmission dynastique du pouvoir. L'hypothèse est là encore séduisante, mais elle fait l'impasse sur les travaux universitaires qui ont montré que les idées du Juche se mettent en place à l'époque de la confrontation entre l'URSS de Krouchtchev et la Chine maoïste, soit plus de dix ans auparavant, dans une sorte de troisième voie coréenne fondée sur le non-alignement.

Enfin, que penser de l'idée monarchique ? Comme l'a fort bien observé Pascal Dayez-Burgeon en début d'ouvrage et dans d'autres articles, le fait dynastique n'est pas propre à la Corée du Nord, mais existe aussi en Corée du Sud - tant dans le domaine politique qu'économique, ainsi qu'en atteste le culte voué aux fondateurs des conglomérats. Si nous définissons pour notre part la RPD de Corée, dès l'origine, comme un régime nationaliste de gauche, que ce trait typiquement coréen l'ait emporté n'est pas en soi aussi extravagant qu'il peut le sembler. En revanche, donner pour acquis, à l'instar de Pascal Dayez-Burgeon, que Kim Il-sung n'aurait jamais été authentiquement communiste et que la monarchie serait un fait nouveau, après qu'il aurait été fait table rase du marxisme, est s'aventurer trop vite et trop loin (la conférence des partis communistes organisée à Pyongyang après la chute de l'URSS atteste d'une volonté de fidélité à l'héritage des démocraties populaires). Si la pratique nord-coréenne du pouvoir est pragmatique, le discours se fonde toujours sur une grille de lecture de type socialiste soviétique, voire marxiste. Les institutions, même après les réformes de juillet 2002, gardent des traits propres aux démocraties populaires qu'il serait erronné d'éluder, notamment la propriété collective des grands moyens de production, ou les principes (certes tempérés en pratique) de gratuité de l'éducation et de la santé.

Surtout, qu'il y ait des éléments de transmission héréditaire du pouvoir ne répond pas à la question de la nature des institutions et de l'exercice du pouvoir, que ne traite pas l'ouvrage : le Royaume-Uni a beau être une monarchie constitutionnelle, il représente une démocratie parlementaire qui n'a pas grand chose de commun avec le régime dit "absolutiste" qu'a connu l'Angleterre pendant des siècles. Pascal Dayez-Burgeon suggère l'idée d'un pouvoir personnel, ce qui est une hypothèse restant à étayer (connaît-on seulement les rouages du pouvoir et le mode de prise de décision ?) et n'examine pas en tout cas les différences sur ce point entre Kim Il-sung, Kim Jong-il et Kim Jong-un. L'idée du dictateur tout-puissant relève largement du schéma d'idée occidental ; interrogé par un officier du KGB après un voyage en Corée du Nord au début des années 1980, Bruce Cumings s'était vu reprocher par ce dernier d'attacher - comme les Occidentaux - trop d'importance aux dirigeants politiques, et pas assez à l'organisation politique globale.

Le parti pris de La dynastie rouge était de parler du chef, pas du Parti, de l'armée ou de l'Etat : on peut le concevoir, mais l'hypothèse initiale a réduit considérablement les capacités d'analyse du régime nord-coréen. Si les luttes politiques sont relativement bien documentées dans les années qui suivent la guerre de Corée, ce serait une erreur de les arrêter aux années 1960 (comme d'ignorer celles de l'avant-guerre, en particulier autour de la question paysanne qui a amené, un temps, le parti Chondogyo à s'opposer au Parti du travail) ou de les interpréter exclusivement sous l'angle de la consolidation d'un pouvoir personnel. Il y a des débats de fond au sommet de l'Etat, non publics, notamment dans les domaines économique, militaire et diplomatique. Ne pas pouvoir établir précisément la géographie du pouvoir (en termes d'institutions et de réseaux familiaux ou personnels) n'autorise pas pour autant à ignorer cet aspect. En fin d'année 2013, l'élimination de Jang Song-thaek en a été une des manifestations les plus patentes. 

En conclusion, La dynastie rouge a le mérite de combler une lacune dans la bibliographie francophone sur la Corée du Nord, et d'apporter une synthèse plus nuancée et surtout plus documentée d'une question difficile à traiter au-delà des partis pris teintés d'anticommunisme. Son auteur, qui a vécu longtemps en Corée du Sud, est manifestement attaché à la réunification, et exprime une forme de nationalisme coréen très propre au Sud - par exemple, quand il mentionne la "kimgongilmania" lors du sommet de juin 2000, ou lorsqu'il applaudit aux créations cinématographiques du Nord dans les années 1970, ce sont des traits typiquement sud-coréens dans leur fascination pour le Nord. Il gagnerait ainsi à mieux utiliser les sources nord-coréennes, sans évidemment les prendre pour argent comptant, ainsi que les travaux d'auteurs non-coréens (ou, plus largement, non liés aux autorités sud-coréennes), pour s'extraire de certains préjugés sud-coréens tenaces sur la RPD de Corée, et spécialement sur ses dirigeants.
 

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24 décembre 2014 3 24 /12 /décembre /2014 14:50

Dans un article publié le 24 décembre 2014 sur le site de L’Obs, intitulé « Et si ce n’était pas la Corée du Nord qui avait piraté Sony ? », Paul Laubacher souligne que « pour de nombreux experts en cybersécurité, les preuves avancées par le FBI contre Pyongyang ne tiennent pas la route ». Nous reprenons ci-après les principaux éléments de leur démonstration, tout en observant que les principaux médias occidentaux (y compris français) – notamment ceux dits « de référence » - n’ont pas (pas encore ?) jugé utile de faire état des contre-enquêtes menées par des spécialistes en cybersécurité en réponse aux accusations (mal étayées) contre Pyongyang du Président américain Barack Obama et des agents du FBI, qu’ils ont complaisamment diffusées le plus largement possible. Toute vérité ne serait-elle pas bonne à dire ? En fait, pour ces médias, démentir serait reconnaître auprès de leurs lecteurs, auditeurs ou spectateurs que leurs journalistes ont été manipulés ou se sont laissé manipuler, en d’autres termes qu’ils n’ont pas jugé utile de vérifier ou contre-expertiser les « informations » et autres « révélations » du FBI, ce qui constitue pourtant le b.a.-ba du métier. Le coût de la révélation du mensonge – en termes de réputation, d’audience et donc d’argent - serait-il donc à ce prix ?

L'entrée des studios de Sony Pictures

L'entrée des studios de Sony Pictures

Dans l’article de L’Obs, Paul Laubacher rappelle tout d’abord quelles sont les « preuves » du FBI :


« - une analyse technique du logiciel malveillant, qui provoque l'effacement de données utilisé dans ce piratage, "révèle des liens" avec un autre logiciel malveillant que "le FBI sait avoir été développé par des Nord-Coréens". Le FBI évoque des "similarités" dans des lignes de codage spécifiques, le cryptage d'algorithmes et les méthodes d'effacement de données".

- selon l'agence fédérale, il existe des "chevauchements importants" entre les infrastructures (les serveurs et les ordinateurs) du piratage de Sony et celles utilisées dans d'autres attaques directement attribuées par le gouvernement américain à Pyongyang. Exemple : le FBI a découvert que plusieurs adresses IP, le numéro d'identification d'un ordinateur qui se connecte à internet, sont associées à des infrastructures nord-coréennes connues et étaient inscrites dans les codes du logiciel qui a infiltré Sony.

- les outils mobilisés dans le piratage de Sony présentent des "similarités" avec une cyber-attaque menée en mars 2013 contre des banques et des médias de Corée du Sud, qui avait été attribuée à la Corée du Nord. »

Or, ainsi que l’observe le site américain Vox, « aucune de ces preuves ne permet de conclure que la Corée du Nord est derrière le piratage de Sony », du fait notamment, comme le souligne Paul Laubacher citant largement Vox, que le partage est un principe de base dans le milieu des hackers.


Pour reprendre chacun des éléments de « preuve » avancés par le FBI, s’agissant du logiciel malveillant qui aurait été utilisé par la Corée du Nord dans de précédentes attaques (ce qu’elle nie, au demeurant), selon Paul Laubacher, la Corée du Nord aurait ainsi « pu utiliser un logiciel malveillant qui avait déjà été utilisé ailleurs. Ce qui met à mal l'hypothèse de la paternité nord-coréenne du logiciel qui a touché Sony ».

En ce qui concerne les adresses IP, selon Vox les serveurs et ordinateurs qui leur sont associés pourraient constituer une « infrastructure partagée et utilisée par de nombreux hackers », avec laquelle la Corée du Nord pourrait éventuellement avoir été en relation, mais toujours selon Vox « pour des raisons qui n'ont rien à voir avec le piratage de Sony ».

Le PDG d’Errata Security, Robert Graham, également cité par Paul Laubacher observe également que tout se partage dans le milieu des hackers et que, pour lui « il est invraisemblable que la Corée du Nord ait pu développer son propre logiciel malveillant à partir de rien ».

Le magazine américain Wired a aussi eu très tôt des doutes quant à l’origine de l’attaque, en observant qu’un hacker compétent – et l’attaque contre Sony était sophistiquée – ne laisse pas de traces et n’est identifié que s’il a commis des erreurs ou s’il est dénoncé. Au contraire, ils sèment de faux indices : la demande de retrait de The Interview aurait ainsi eu pour but d’attirer l’attention sur les Nord-Coréens, qui au demeurant ont déclaré que les pirates étaient sensibles à leurs préoccupations concernant The Interview… Des médias occidentaux en ont hâtivement conclu que, si ce n'était pas des hackers nord-coréens, il ne pouvait s’agir que de leurs agents. Mais les hackers ont manifestement agi pour des raisons financières, réclamant très rapidement de grosses sommes, en menaçant sinon de publier des données confidentielles, ce qu’ils ont effectivement fait ensuite. Or en termes d’argent, Sony Pictures a davantage les moyens de payer que la Corée du Nord de financer des mercenaires.

Il reste en effet à identifier (ou tenter d’identifier, tant les responsabilités peuvent être imbriquées) les vrais suspects, ainsi que leurs mobiles. Kurt Stammberger, PDG de l’entreprise Norse « qui suit les attaques informatiques en temps réel » comme le précise Paul Laubacher, le doute n’est pas permis : à l’issue de l’enquête qu’il a menée, et dont il a livré les résultats dans une interview donnée à CBS « Sony n'a pas juste été piraté. L’entreprise a été atomisée de l'intérieur ». Kurt Stammberger a identifié une certaine Lena, association au groupe des Gardiens de la paix qui se présentent comme les auteurs de l’attaque contre Sony. Lena est une ancienne employée de Sony pendant dix ans (jusqu’en mai 2014), qui aurait contacté plusieurs médias après le piratage du groupe américain. L’hypothèse est audacieuse, plus difficile à démontrer que la non-implication des Nord-Coréens, mais mérite d’être prise en considération.

Alors que certaines voix, aux Etats-Unis, ont réclamé que la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) soit réinscrite sur la liste des Etats soutenant le terrorisme, le département d’Etat américain a refusé en déclarant que de telles sanctions ne seraient pas efficaces… mais le critère du manque d’efficacité n’a pas empêché Washington, par le passé, de toujours renforcer davantage un régime de sanctions aujourd’hui le plus draconien au monde. La vérité est ailleurs : la RPD de Corée n’a rien à voir avec le terrorisme, et le piratage d’une entreprise comme Sony ne relève d’ailleurs en aucun cas d’un acte qualifié de terroriste en droit international. Même Barack Obama a dû ensuite rétropédaler en déclarant que le piratage de Sony n’était pas un acte de guerre mais du vandalisme – si les mots ont un sens, il semble donc que le Président américain sache que le piratage de Sony est étranger à Pyongyang. Mais peut-il à présent reconnaître avoir menti, quand plusieurs de ses prédécesseurs ont dû laisser leur poste après être passé aux aveux ?

Pendant ce temps, la machine médiatique s’emballe : les récentes coupures du réseau Internet de la Corée du Nord sont interprétées comme les mesures de rétorsion des tout-puissants Américains. Washington se tait. Mais outre que les hackers liés au Gouvernement américain agiraient sans doute de manière plus agressive qu’une simple interruption du réseau nord-coréen, celle-ci peut être le fait de groupes de hackers bien moins organisés, car ne nécessitant pas une grande sophistication. A cet égard, la Corée du Sud (pays le plus connecté au monde) ne manque pas d’activistes anti-Corée du Nord qui, à la nouvelle que le film The Interview avait été largement déprogrammé, ont pu décider de faire justice eux-mêmes, en toute impunité grâce à la protection dont ils bénéficient de la part des autorités sud-coréennes… Mais ce n’est qu’une hypothèse. En tout cas, la surréaction de Barack Obama a entraîné des réactions en chaîne, en encourageant les groupes de pirates du monde entier à frapper la Corée du Nord, traduisant une attitude irresponsable fustigée par Pyongyang, qui a d'ailleurs évoqué des représailles. Il n’y a ainsi pas que dans le domaine conventionnel que les Etats-Unis sont capables de déclencher des guerres.

Principale source :

« - une analyse technique du logiciel malveillant, qui provoque l'effacement de données utilisé dans ce piratage, "révèle des liens" avec un autre logiciel malveillant que "le FBI sait avoir été développé par des Nord-Coréens". Le FBI évoque des "similarités" dans des lignes de codage spécifiques, le cryptage d'algorithmes et les méthodes d'effacement de données". 

« - selon l'agence fédérale, il existe des "chevauchements importants" entre les infrastructures (les serveurs et les ordinateurs) du piratage de Sony et celles utilisées dans d'autres attaques directement attribuées par le gouvernement américain à Pyongyang. Exemple : le FBI a découvert que plusieurs adresses IP, le numéro d'identification d'un ordinateur qui se connecte à internet, sont associées à des infrastructures nord-coréennes connues et étaient inscrites dans les codes du logiciel qui a infiltré Sony.

« - les outils mobilisés dans le piratage de Sony présentent des "similarités" avec une cyber-attaque menée en mars 2013 contre des banques et des médias de Corée du Sud, qui avait été attribuée à la Corée du Nord ».
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23 décembre 2014 2 23 /12 /décembre /2014 18:19

Après le piratage dont a été victime Sony Pictures, Barack Obama et le FBI ont cru bon de devoir accuser la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), qui a nié toute implication, tout en rejetant la proposition nord-coréenne de mener une enquête conjointe. Par ailleurs, les menaces de rétorsion américaines, qui auraient pu être conduites rapidement, ne semblent pas s'être (encore ?) concrétisées. Et pour cause : pour de nombreux experts, ainsi que pour la minorité de journalistes occidentaux ne se contentant pas de  reproduire les éléments de langage du gouvernement américain, la mise en accusation de la RPD de Corée n'est pas fondée. En outre, elle constitue un exutoire commode après les graves failles de la sécurité informatique de Sony Pictures qu'a révélées l'attaque informatique. En particulier, Guerric Poncet a titré un de ses articles publié par Le Point : "Sony : pourquoi la Corée du Nord n'est probablement pas responsable" - le "probablement" étant de mise, faute de pouvoir conclure définitivement en l'absence de preuves. Nous reproduisons et analysons ci-après les principales conclusions du chroniqueur du Point.

L'entrée des studios Sony Pictures Entertainment

L'entrée des studios Sony Pictures Entertainment

 

Guerric Poncet souligne d'emblée que la mise en accusation de la RPD de Corée constitue "une piste très fragile, voire peu crédible", car apparue a posteriori après de premières (et classiques) demandes de rançon par les pirates de Sony :

"La presse américaine a dévoilé que cinq dirigeants de Sony ont reçu une lettre de menaces demandant de l'argent, avant que les soupçons ne commencent à se porter sur la Corée du Nord. C'est alors que l'exigence de l'annulation de la sortie du film The Interview a émergé : ce décalage est pour le moins étrange."

En fait, les pirates informatiques ont toujours intérêt à suggérer l'interférence d'un Etat pour que les soupçons ne se portent pas sur eux. Pour le FBI, la Corée du Nord constituait "le coupable idéal" (pour reprendre l'expression de Guerric Poncet), dont les réfutations seraient naturellement rejetées par la grande majorité des médias occidentaux.  

Mais qui a alors pu piraté Sony Pictures ? Guerric Poncet évoque plusieurs pistes :

"La piste de l'ancien employé. La bonne connaissance des défenses de Sony par les hackers semble indiquer qu'au moins un ancien employé les a aidés. Il pourrait même s'agir de l'acte isolé d'un ancien collaborateur voulant se venger, après un licenciement par exemple.

La piste chinoise. Les armées de hackers chinois sont (comme les Américains !) spécialistes de l'usurpation d'identité et peuvent aisément faire transiter leurs attaques par la Corée du Nord. De manière générale, un cyberattaquant fera systématiquement croire que le piratage provient d'un autre pays. Mais le mobile reste dans ce cas un peu flou : pourquoi Sony ? Certains évoquent la haine historique entre la Chine et le Japon (patrie d'origine de Sony), et notamment des groupes de hackers voulant venger le massacre de Nankin en décembre 1937, il y a tout juste 77 ans.

La piste du concurrent. Les studios concurrents, s'ils peuvent être inquiets pour leur sécurité après les révélations, ne peuvent que se réjouir des mésaventures de Sony Pictures. Le mobile est évident, mais il est toutefois peu probable qu'une entreprise pour laquelle le marché américain est vital prenne le risque de commanditer un tel acte et de se faire prendre par le FBI. Ces trois pistes pourraient aussi n'en constituer qu'une seule : les synergies sont courantes dans le monde du hacking..."

Dans la mesure où les autorités américaines ont demandé une coopération à la Chine (qui en a accepté le principe), il semble que la piste chinoise soit prise au sérieux par le FBI. Mais elle n'est pas la seule. Après la désignation de principe du coupable idéal - pour satisfaire une partie de l'opinion publique - par un président américain minoritaire au Congrès (en effet, l'extrême droite américaine n'a pas apprécié le récent rapprochement avec Cuba), le FBI doit maintenant trouver les vrais responsables, alors que la divulgation d'autres données sensibles a été promise par les pirates.

Quant aux mesures de rétorsion contre la Corée du Nord, elles ne sont évidemment pas à l'ordre du jour. Leur annonce relevait d'une stratégie de communication, et les Etats-Unis n'ont d'ailleurs pas pris les moyens d'une action offensive. Comme le conclut Guerric Poncet :

"si l'opinion publique américaine réclame une vengeance, la décision de la Maison-Blanche de confier l'affaire au bureau fédéral d'investigation plutôt qu'au Commandement des opérations cybernétiques (Cyber Command) de l'armée montre qu'une action offensive ne semble pas à l'ordre du jour. Il y a d'ailleurs, là encore, une absurdité : si le FBI dispose de preuves aussi solides qu'il l'affirme contre Pyongyang, il est illogique qu'aucune riposte ne soit déclenchée. La doctrine cyber présentée par Hillary Clinton en 2010 prévoit une réplique immédiate aux cyberattaques... Il va falloir attendre que les pirates se manifestent de nouveau pour en savoir plus."

La RPDC et le film The Interview n'étaient que des prétextes, et le FBI le sait. L'affaire du piratage de Sony ne fait donc sans doute que commencer.

 

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28 octobre 2014 2 28 /10 /octobre /2014 23:04

Dans un rapport d'une commission d'enquête des Nations Unies sur les droits de l'homme en République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), dont les conclusions ont été rendues publiques le 17 février 2014, un témoignage a été largement médiatisé, notamment par la portée des atteintes aux droits de l'homme en RPDC qu'il dénonce : celui du réfugié nord-coréen Shin Dong-hyuk, dont la biographie a été publiée par le journaliste Blaine Harden sous le titre Rescapé du camp 14 - aujourd'hui un des best-sellers sur la Corée du Nord en Occident. Alors que Shin Dong-hyuk se présente comme le seul Nord-Coréen né dans un camp de travail qui soit parvenu à quitter une "zone de contrôle maximal", son récit a soulevé des interrogations chez des spécialistes de la RPDC pourtant peu suspects de sympathies pour le régime de Pyongyang, avant qu'un rapport nord-coréen dénonce cette enquête en mettant en cause la véracité de certains témoignages, dont celui de Shin Dong-hyuk. Les médias nord-coréens ont aussi diffusé un reportage où ils donnent la parole au père de Shin Dong-hyuk et à d'autres citoyens de la RPDC qui l'accusent d'être un affabulateur et d'avoir fui le pays après avoir commis un crime de droit commun, un viol sur mineure. Alors que Shin Dong-hyuk n'a pas cherché, à notre connaissance, à démentir point par point les graves accusations portées à son encontre (il se contente de rejeter le récit de son père comme le résultat d'une manipulation par les autorités nord-coréennes), la question est posée : qui manipule réellement qui et qui est vraiment Shin Dong-hyuk ?

A l'Assemblée nationale sud-coréenne, les députés démocrates sont mécontents : ils viennent d'entendre l'énième témoignage extraordinaire d'un réfugié nord-coréen qu'ils soupçonnent, une nouvelle fois, d'agir pour le seul compte d'activistes anti-RPDC, voire des services de renseignement sud-coréens. Car leur but n'est pas d'entendre des militants livrer des récits plus ou moins fantasmatiques, mais bien de connaître la vérité sur la Corée du Nord par des témoins dignes de foi.

Aujourd'hui, l'histoire bafouille, à propos des droits de l'homme en Corée du Nord et de nouveaux témoins extraordinaires. Mais lorsque la commission d'enquête des Nations Unies sur les droits de l'homme en RPDC a mené son enquête, elle ne s'est - hélas - pas embarrassée de porter le moindre regard d'analyse critique, ni de donner la parole à la défense, se transformant en tribunal ayant instruit à charge (ne s'agirait-il pas à présent de traduire les dirigeants de la RPDC devant la Cour pénale internationale ?).

Parmi les témoignages capitaux, celui de Shin Dong-hyuk détonne : s'exprimant avec aisance, belle gueule, dentition parfaite, le réfugié nord-coréen "rescapé du camp 14" ne semble pas porter les stigmates qu'on pourrait attendre d'un long séjour dans un des camps de rééducation réputés les plus durs de RPDC. Pour Konstantin Asmolov, chercheur russe au Centre d'études coréennes à l'Institut des études d'Extrême-Orient, le doute est réel : "A ces auditions publiques il y avait 30 personnes qui ont raconté toutes sortes d'histoires horribles. Il y avait Shin Dong-hyuk qui ne parle pas avec un accent nord-coréen, et dont les mains sont celles d'un intellectuel plutôt que d'une personne qui aurait vécu dans un camp toute sa vie. La commission (des Nations Unies) n'a pas procédé à un nombre suffisant d'entretiens privés pour pouvoir accuser le gouvernement [nord-coréen] de crimes de guerre et de famines, c'était un show."

Dans un documentaire intitulé "Lie and Truth" (mensonge et vérité), d'abord publié sur le site nord-coréen Uriminzokkiri, les accusations portées contre Shin Dong-hyuk par son père et plusieurs personnes de son entourage sont extrêmement lourdes. Pour son père Shin Kyong-sop, Shin Dong-hyuk, né sous le nom de Shin In-gun avant de changer son nom suite à son départ au Sud, n'est pas né en 1982 dans un camp, comme il le prétend, mais le 19 novembre 1980 dans le village de Soksan. Shin Kyong-sop ajoute être né en 1944, et pas en 1946 comme le prétend son fils, et que les blessures de Shin Dong-hyuk ont des origines accidentelles, remontant à l'enfance, dont il livre les détails. Shin Dong-hyuk n'aurait jamais vécu dans un camp de concentration, mais il aurait travaillé à partir de 1997 dans la mine de son village de Soksan, où un accident survenu en août 2002 aurait entraîné son invalidité partielle à une main (Shin Dong-hyuk affirme qu'il s'agit d'une punition au camp). Si Shin Kyong-sop aurait bien été condamné à une peine de rééducation en 1975 suite à un vol contre l'Etat (et non à cause du comportement d'un des membres de sa famille, comme le prétend Shin Dong-hyuk), il déclare avoir épousé Jang Hye-kyong, la mère de Shin Dong-hyuk, bien avant, en 1972, et non dans le camp de rééducation 14 (où il déclare n'avoir jamais vécu) comme l'affirme son fils. Enfin, la mère de Shin Dong-hyuk et son frère aîné auraient été condamnés à mort et exécutés en 1996 suite à un meurtre avec préméditation - alors que pour Shin Dong-hyuk ils auraient été tués devant lui et son père pour avoir tenté de fuir le camp 14.

Accusé de vols et surtout d'avoir commis un viol à l'encontre d'une fillette de 13 ans, Lee Eun-ha, en 2001, Shin Dong-hyuk a ensuite cherché à fuir la RPDC, parvenant finalement à rejoindre la Corée du Sud après une première tentative ayant échoué, selon le documentaire publié par Uriminzokkiri.

Il est, à notre connaissance, sans précédent que les médias nord-coréens publient un tel reportage relevant du journalisme d'investigation. Le récit ainsi donné n'est pas nécessairement des plus flatteurs pour la RPDC, qui notamment ne communique pratiquement jamais sur les condamnations à mort qu'elle prononce - or, elle reconnaît les exécutions de la mère et du frère aîné de Shin Dong-hyuk, mais dans des circonstances bien différentes de celles données par le réfugié nord-coréen. Le meurtre avec préméditation pour un motif d'argent est au demeurant un crime qui n'avait rien d'exceptionnel dans le contexte des sévères pénuries alimentaires pendant la "dure marche" des années 1990.

Interrogé par CNN sur ce reportage, Shin Dong-hyuk a reconnu que c'est bien son père qui s'est ainsi exprimé, tout en estimant qu'il est un "otage". Mais les autorités nord-coréennes auraient-elles ainsi pris le risque de faire parler publiquement, en prenant à témoin leur entourage et leurs connaissances, autant de personnes ayant connu intimement Shin Dong-hyuk? Aucune des autres mises en cause à son encontre - pas même sur son identité et sa date de naissance - n'est mentionnée dans l'article de CNN, ni donc a fortiori démentie par l'intéressé.

Quand Shin Dong-hyuk prétend qu'on ne sort pas du camp 14, son père Shin Kyong-sop en est bien manifestement sorti : et pour cause, il affirme n'y être jamais entré! Comme son fils, il ne porte pas les signes d'une captivité prolongée (perte de dents, de cheveux...). Il observe que son fils a probablement pensé qu'il était décédé, en raison de ses problèmes cardiaques, et qu'il était donc le seul survivant de sa famille. Shin Kyong-sop, remarié, a ajouté que Shin Dong-hyuk avait aussi participé au choix de sa belle-mère, qui apparaît également dans le documentaire.

Enfin, le documentaire nord-coréen apporte des détails qui mériteraient une analyse spécifique, indépendamment de la question ici traitée : Shin Kyong-sop a été condamné en 1975, à une époque où il n'existait pas de prisons mais seulement des camps de rééducation en Corée du Nord ; contrairement à une idée reçue, tous les hommes nord-coréens ne rejoignent pas l'armée s'ils échouent aux examens d'entrée à l'université, comme le fait apparaître le récit de Shin Dong-hyuk, qui serait devenu mineur en 1997 après avoir terminé ses études secondaires...

Shin Dong-hyuk pourrait donc n'être qu'un affabulateur. Quels intérêts sert un tel "témoignagne" répété à l'envi jusqu'à écoeurement par des médias du monde entier, sans le moindre recul ni sens critique? Certainement pas ceux de la défense des droits de l'homme, en Corée du Nord ou ailleurs.

Sources :

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2 septembre 2014 2 02 /09 /septembre /2014 23:17

Dans son numéro de septembre 2014, le mensuel Beaux Arts Magazine (qui tire à 50.000 exemplaires) revient sur l'affaire Ahae, dans un article titré "Ahae. Faux artiste et vrai escroc". Revenant sur une "inquiétante dérive du mécénat en France", la journaliste, Françoise-Aline Blain cite l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) en apportant quelques éclairages sur le mécénat de Ahae au musée du Louvre et au château de Versailles.

 

Observant que se pose la question du financement du mécénat en France, au-delà du drame et du scandale attaché au naufrage du ferry "Sewol" que possédait Yoo Byung-eun par personnes interposées, le mensuel cite l'AAFC :

"Benoît Quennedey, vice-président de l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC), la première, en France, à avoir soupçonné le lien existant entre Ahae et Yoo Byung-eun, ne décolère pas : 'La baisse des crédits publics justifie-t-elle de vendre à un inconnu, au talent douteux, une réputation d'artiste ? Justifie-t-elle d'accepter tous les fonds, d'où qu'ils viennent ? A notre avis, les graves manquements à l'éthique dans le financement des musées exigent des réponses de l'administration française' ".

Pour être parfaitement honnête, c'est en France Bernard Hasquenoph, animateur du site Louvre pour tous, qui avait révélé que le photographe Ahae était Yoo Byung-eun. L'AAFC avait ensuite été la première, en France, à faire le lien avec le propriétaire du ferry "Sewol" en mentionnant par ailleurs une ancienne condamnation pour fraude et que son nom avait été mêlé à une affaire de suicide collectif. Ensuite, il est revenu au collectif de Coréens vivant en France Paris Copain le mérite d'avoir permis par leur action l'annulation de la participation de Ahae au festival des forêts de Compiègne, après qu'ils eurent écrit une lettre ouverte à Mme Aurélie Filipetti, alors ministre de la Culture.

 

Ayant poussé ses investigations, Françoise-Aline Blain n'a guère obtenu de réponse des bénéficiaires des largesses de Ahae, sinon une promesse qu'ils seraient plus vigilants à l'avenir... Mais elle nous apprend que le ministère des Affaires étrangères, sollicité, n'avait rien trouvé à redire à ces "mécénats" intéressants pour leur parrain, et que Tracfin aurait également été interrogé, sans qu'aucune mise en garde ne soit formulée.

En outre, l'AAFC rappelle que Henri Loyrette, ancien président du Louvre et qui avait été l'un des plus grands zélateurs de Ahae, a gagné des liens qu'il a noués dans cette affaire avec les officiels sud-coréens de devenir le commissaire culturel des années croisées France-Corée (2015-2016) ! Au-delà de cette inconvenante récompense, ni les diplomates sud-coréens qui ont "vendu" la marque Ahae, ni les hauts fonctionnaires français qui ont été complices de cette escroquerie n'ont été, à aucun moment, inquiétés ou mis en cause.

Affaire Ahae : "Beaux Arts Magazine" cite l'AAFC et revient sur les dérives du mécénat
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12 juillet 2014 6 12 /07 /juillet /2014 22:37

Le Foyer rural de Tousson en Seine-et-Marne s'intéresse de longue date au cinéma coréen - de toute la péninsule coréenne - et à la question de la réunification. Un ensemble d'actions ont ainsi été menées en commun avec l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) depuis l'organisation d'un stage sur le cinéma de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) en décembre 2011 : visite de l'Institut du végétal Arvalis, à Boigneville ; visite de la sucrerie de Pithiviers ; projection-débat avec David Carr-Brown autour de son film Intérieur Nord ; organisation d'un stage de cuisine coréenne ; compte rendu des voyages effectués en 2013 par l'AAFC. Le 29 juin 2014, la projection du film documentaire de Pierre-Olivier François Corée : l'impossible réunification ? a donné lieu à une journée d'études avec le réalisateur, afin de mieux comprendre les enjeux de la division et de la réunification de la Corée. Nous publions ci-après le compte rendu du Foyer rural de Tousson.

Projection à Tousson de "Corée : l'impossible réunification ?" avec Pierre-Olivier François

Dimanche 29 juin 2014, le Foyer rural (FR) de Tousson (Seine et Marne) invitait le réalisateur Pierre-Olivier François à présenter son documentaire en deux parties, Corée : l’impossible réunification ?. Une petite journée d’études pour une douzaine d’adhérents du FR dont certains avaient déjà participé aux précédentes rencontres ayant pour thème le cinéma, en décembre 2011 (La légende de Chunhyang et Le calice) et en avril 2013 (Intérieur Nord, en présence de David Carr-Brown).

Le film documentaire de Pierre-Olivier François a été particulièrement apprécié pour avoir donné la parole successivement à diverses hautes personnalités aussi bien au Nord qu’au Sud. C’était un grand étonnement que d’entendre des hommes politiques américains ou historiens tenir un discours d’ouverture, illustré d’un certains nombre d’archives filmées. Au contraire d’autres documentaires, souvent à charge et partisan, celui-ci fait prendre conscience de la terrible histoire contemporaine de la Corée, du désastre des bombardements et de l’embargo. Pierre-Olivier François fait preuve d’une démarche originale et progressiste qui a nourri les échanges très nourris entre les participants et le jeune réalisateur. La curiosité s’est naturellement portée sur son expérience de tournage en RPDC, son organisation, « comment cela s’est déroulé », les contacts avec les Coréens, comment c’est Pyongyang, les restaurants, l’économie, les magasins … la gentillesse et la disponibilité du réalisateur ne pouvait qu’encourager toutes ses questions auxquelles il a répondu d’une manière très positive.


En tant qu’association d’éducation populaire, le FR explore parfois hors des sentiers battus pour permettre à chacun de se faire sa propre opinion. Remercions l’AAFC et les diplomates de la RDPC à Paris de s’associer à ces rencontres au fin fond de la Seine-et-Marne et d’enrichir ces échanges culturels.

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17 mai 2014 6 17 /05 /mai /2014 08:27

Services_secrets.JPGLa République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) est le pays des plus folles rumeurs, souvent alimentées par les services secrets de la République de Corée (Corée du Sud), le NIS (National intelligence service). Ces "intox", servilement relayées par des médias occidentaux en quête de sensationnel et peu scrupuleux de vérifier leurs sources, ont pris une ampleur particulière depuis un an, compte tenu du tournant autoritaire que connaît aujourd'hui la Corée du Sud et de la place éminente qu'y prend le NIS, soucieux de fabriquer des scandales impliquant la Corée du Nord pour faire oublier ses propres turpitudes. Les soi-disant exécutions de membres de l'orchestre nord-coréen Unhasu, dont nous avions démontré l'absence de fiabilité dans un article paru sur ce blog le 31 août 2013, viennent de recevoir un démenti final : une des chanteuses du groupe, prétendument exécutée, vient de réapparaître en public. Un nouveau coup dur pour le NIS qui, comme à son habitude, va certainement tenter de préparer une nouvelle opération d'intoxication ciblant les médias occidentaux.

La prétendue nouvelle était croustillante : un orchestre dissous parce que ses membres auraient tourné des vidéos osées (mais qui aurait été les acheter en Corée du Nord ? et pourquoi les membres de l'orchestre auraient-ils encouru un tel risque s'ils étaient pris, alors qu'ils sont à l'abri du besoin ?), naturellement des joueurs exécutés et, pour pimenter le tout, parmi les victimes, une ancienne relation supposée (et sans le moindre début d'une preuve) avec le dirigeant nord-coréen...

La ficelle des services secrets sud-coréens (NIS) était tellement grosse que des médias occidentaux pris au piège avaient ensuite dénoncé la main maladroite du NIS, après la publication d'une analyse sur le site Internet de l'AAFC, reprise dans une mise à jour de l'édition en ligne du quotidien Le Monde. Mais le coup était lancé, et des millions d'Occidentaux crédules avaient déjà gobé la mise en scène du NIS, quand des dizaines d'autres journalistes ne jugeaient même pas utile de se rectifier... car ils avaient commis une erreur professionnelle en ne vérifiant pas leurs sources, et qu'ils n'avaient aucun intérêt à le mettre en lumière.

Piqué au vif par la tournure inattendue des événements (il n'est pas banal que les désinformations sur la Corée du Nord soient démenties par les médias, même par une partie seulement d'entre eux), le NIS, s'est alors évertué à diffuser auprès de journalistes qui lui sont acquis une vidéo montrant des chanteuses de l'orchestre avec une jupe fendue (!). Difficile pourtant de parler de sextape, dans cette vidéo dont la provenance est invérifiable... Inventer des scandales sexuels est décidément une marque de fabrique des espions, comme l'avait montré chez nous, en France, l'affaire Markovic concoctée avec l'aide d'anciens des services secrets français tenter de briser (en vain) la carrière de Georges Pompidou.

Comme les doutes persistaient, le directeur du NIS, Nam Jae-joon, a martelé dans les médias qu'il y aurait eu des exécutions parmi les anciens musiciens du groupe Unhasu. Il a même témoigné en ce sens devant les députés sud-coréens, en avançant le chiffre de dix exécutions, selon la fuite - évidemment organisée - de son audition parlementaire à huis-clos... Précisons que des parlementaires sud-coréens demandent la démission de Nam Jae-joon, après une lourde ingérence du NIS dans l'élection présidentielle de décembre 2012 et la tentative de suicide d'un de leurs informateurs, ayant mis en cause le NIS et impliqué dans une affaire de falsification de documents officiels chinois pour créer de toutes pièces un faux espion nord-coréen. Par sa position hiérarchique, Nam Jae-joon, dont le prédécesseur a été démis de ses fonctions face à l'ampleur des scandales touchant le NIS, est lui aussi impliqué et mis en cause dans la production des fausses pièces à conviction du pseudo espion nord-coréen.

Le dernier acte de la pièce qu'a voulu écrire le NIS vient d'être joué : la chanteuse de l'orchestre Unhasu
Hyon Song-wol, que le NIS avait tenté de présenter comme intimement liée au dirigeant nord-coréen et que les services sud-coréens avaient donnée pour morte, est réapparue vendredi dernier à la télévision nord-coréenne, en tant qu'oratrice dans un rassemblement. Le mensonge du NIS est maintenant prouvé.

 

Mais les rumeurs continueront aussi longtemps que les journalistes occidentaux accepteront d'être manipulés par le NIS. Plus récemment, il avait été affirmé dans nombre de médias occidentaux que la coupe de cheveux du dirigeant nord-coréen était obligatoire pour tous les jeunes Nord-Coréens (ou les seuls étudiants, on ne sait plus trop...). Naturellement, il aurait suffi de regarder les images qui nous proviennent des médias nord-coréens pour se rendre compte que la rumeur était fausse et qu'il s'agissait d'une nouvelle "intox" fabriquée par le NIS. Car, en 2012, une jeune fille qui s'est ensuite révélée être une informatrice du NIS en France avait déjà essayé de nous convaincre, à l'AAFC, que cette coupe de cheveux faisait fureur dans la communauté nord-coréenne en France - ne suscitant de notre part que des haussements d'épaules et de l'indifférence. Comme nous l'avons compris ensuite à la lecture des articles de presse occidentaux quand l'opération de désinformation a été officiellement lancée, le NIS testait alors sa nouvelle rumeur auprès d'un public intéressé par les questions nord-coréennes, en France et certainement également dans d'autres pays. Ensuite ciblés par le NIS, des journalistes occidentaux n'ont, eux, pas haussé les épaules mais ont mordu à l'hameçon. Dommage.

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22 décembre 2013 7 22 /12 /décembre /2013 21:57

Le 5 novembre et le 11 décembre 2013, la chaîne franco-allemande ARTE a diffusé un documentaire, en deux parties, de Pierre-Olivier François intitulé "Corée : l'impossible réunification ?". Refusant les partis pris, ce film permet de mieux comprendre la situation actuelle, loin des clichés qui émaillent ordinairement tout reportage sur la Corée, Nord comme Sud. Il offre ainsi une excellente base pour qui veut connaître les causes de la division et du conflit toujours latent qui touche les populations de la péninsule coréenne.

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Pierre-Olivier François a réussi le tour de force d'apporter une analyse claire et synthétique de la situation historique et politique de la péninsule coréenne, sans parti pris, en donnant tour à tour la parole à des acteurs de premier plan - nord-coréens, sud-coréens et américains - sans oublier nombre d'experts reconnus sur la question coréenne, notamment américains, seuls manquant les experts chinois. Ce faisant, Pierre-Olivier François a encouru le risque de déplaire aux uns et aux autres - aux Sud-Coréens, en mettant sur un même plan les deux lectures antagonistes du déclenchement de la guerre de Corée et en donnant la parole à l'historien Bruce Cumings, un des meilleurs spécialistes de la guerre de Corée mais dont les thèses sont jugées indésirables à Séoul (pour Bruce Cumings, chaque partie se préparait à la guerre, au-delà de la question secondaire de qui a tiré le premier coup de feu) ; mais sans doute aussi aux Nord-Coréens, en donnant largement la possibilité de s'exprimer à Paul Wolfowitz, l'un des néo-conservateurs américains les plus intransigeants, qui avance ainsi la thèse - très controversée - selon laquelle la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) aurait noué une coopération avec la France dans le domaine de l'industrie chimique pour développer des armes de destruction massive. Cependant, les méthodes de travail de Pierre-Olivier François sont celles, éprouvées, du chercheur et du journaliste occidental et non de l'expert coréen. En Europe, on considère que l'on ne peut s'approcher de la vérité qu'en confrontant les différents points de vue, la prise de position relevant ensuite du militant, et plus du chercheur ou du journaliste. 

La première partie, largement historique, a l'immense mérite de resituer la division et les tensions d'aujourd'hui dans un contexte qui fait apparaître la profonde unité culturelle de la Corée. Si les statues géantes des dirigeants nord-coréens font partie des images habituelles que nous avons de la RPDC, il est extrêmement éclairant de voir la même dévotion autour du lieu natal du Président Park Chung-hee et de sa statue géante, et de faire le parallèle avec les scènes de désolation de masse après son assassinat en 1979. Ces images ne sont pas enfouies dans un passé lointain : elles expliquent pour une large part l'élection de la fille du général Park, Mme Park Geun-hye, à la présidence en République de Corée (Corée du Sud) en décembre 2012. En Corée - dans toute la Corée - le confucianisme implique le respect des anciens et de l'autorité, et le deuil est démonstratif. Ces éléments d'analyse permettent de relativiser certaines de nos conceptions occidentalo-centrées qui font apparaître la Corée du Nord comme une contrée exotique. Ce sont aussi les mêmes mots, les mêmes accents d'émotion qui frappent le spectateur lorsque les Coréens, du Nord comme du Sud, évoquent le drame qu'ils ont subi à travers la division de leur patrie.

Le documentaire de Pierre-Olivier François est également exceptionnel par sa très riche collection d'images d'archive, qui impriment à son récit un rythme soutenu, nous tenant en haleine, un peu à l'image d'une enquête policière où l'on dénoue, peu à peu, les fils de l'intrigue.

Certains sujets, complexes, ne sont pas occultés : ainsi, des différents modèles de réunification, où le précédent allemand est à la fois une source d'inspiration (pour la "politique du rayon de soleil" des présidents Kim Dae-jung et Roh Moo-hyun, et dans les visites d'étude conduites en Allemagne par des responsables sud-coréens), et un repoussoir, la réunification allemande par absorption de la RDA étant clairement rejetée par la Corée du Nord. Sans doute pourrait-on regretter que la démocratisation de la Corée du Sud ne soit que superficiellement traitée - le massacre de Kwangju en 1980 est absent, de même que la nature démocratique du régime sud-coréen est considéré comme un fait établi ne faisant pas discussion - ou encore que les conséquences économiques de l'embargo américain sur la Corée du Nord soient à peine évoquées, mais le format du film documentaire ne permet pas les mêmes approfondissements qu'un ouvrage d'analyse, et le choix a été fait de mettre l'accent sur les relations diplomatiques et intercoréennes, et pas sur les situations politiques, économiques et sociales propres à chacun des deux Etats de la péninsule coréenne.

Au final, ce documentaire - terminé avant les développements qu'ont connus les relations intercoréennes au cours de l'année 2013 - a aussi le mérite de montrer que, malheureusement, le chemin vers la réunification reste long, et qu'une telle perspective s'est éloignée dans la période récente. Rejetés dans l'opposition, les démocrates sud-coréens ont assisté, impuissants, à la déconstruction en règle de la "politique du rayon de soleil" qu'ils avaient conduite pendant dix ans, imputable à l'administration conservatrice de retour au pouvoir à Séoul en 2008, tandis qu'affleurent des reproches de leur part vis-à-vis du gouvernement nord-coréen dans son durcissement après 2008. Les responsables nord-coréens, pour leur part, soulignent qu'ils n'ont pas eu d'autre choix face aux Etats-Unis que de renforcer leurs capacités d'autodéfense, y compris nucléaires, les précédents irakien, afghan et libyen montrant le peu de crédit qui doit être accordé à la parole américaine. Quand la veuve du président sud-coréen Kim Dae-jung déplore que le mandat du Président Lee myung-bak (2008-2013) ait constitué cinq années perdues dans les relations intercoréennes, nous pouvons ajouter que ces dernières années ont aussi marqué un recul pour tous ceux qui veulent la paix dans cette partie du monde, l'une des dernières frontières de la guerre froide.



Présentation du film sur le site de la chaîne ARTE (y compris photo)


Le documentaire de Pierre-Olivier François est disponible en DVD chez ARTE Video.
 

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12 août 2013 1 12 /08 /août /2013 20:46

Eglise-Pongsu.JPGL'avantage que présente la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) pour le journaliste occidental moyen est qu'il peut raconter n'importe quoi, 99 % des lecteurs goberont ses propos comme paroles d'évangile. L'inénarrable Gonzague Saint Bris n'a pas fait exception à la règle : dans un article du Monde mensuel signé Josyane Savigneau (n° 43, p. 118), le sémillant M. Saint Bris n'hésite pas à affirmer que "en Corée du Nord par exemple être surpris avec une Bible à la main est un aller simple pour un camp de travail... Ce qui me frappe, c'est que cette religion fut persécutée dès son origine et retrouve les douloureuses épreuves de ses débuts". Manque de chance pour Gonzague Saint Bris : le 4 août 2013, la délégation de l'AAFC présente en RPDC a assisté à une messe protestante à Pongsu (photo à gauche) où les fidèles, chacun disposant d'une Bible en mains - à commencer par le pasteur coréen - n'avaient rien de prétendus évadés d'un "camp de travail". Par ailleurs, l'office auquel nous avons participé n'avait rien d'un message de soutien aux autorités gouvernementales de la RPDC, détruisant là encore un mythe tenace de la légende noire anti-RPDC.

 

Un culte protestant comme on voit partout ailleurs dans le monde, réunissant quelque 150 fidèles - comme dans d'autres pays du monde, majoritairement des femmes, mais aussi quelques Coréens Américains venus du Michigan - dans un temple rénové il y a une petite dizaine d'années grâce aux protestants américains et sud-coréens présents en Corée du Nord par un réseau d'ONG (dont la fondation Billy Graham, l'évangéliste s'étant rendu à plusieurs reprises en RPDC). Pour une religion prétendument persécutée, le christianisme en Corée du Nord se porte apparemment bien. Gonzague Saint Bris, intellectuel catholique auto-proclamé, aurait-il été victime d'une insolation ?  On n'ose  en effet imaginer qu'un intellectuel de son calibre, se prétendant journaliste de surcroît, se soit permis de lancer des anathèmes sans vérifier ses sources.

 

Fideles_Pongsu_Coree-du-nord_protestants.JPG

 

Ce 4 août 2013, au temple de Bongsu, un coup d'oeil sur les Bibles les plus anciennes montre qu'elles ont été publiées à Pyongyang, Donc, si l'on suivait le raisonnement de Gonzague Saint Bris, tous les Nord-Coréens ayant participé au travail d'édition de ces exemplaires auraient fini en camp de rééducation à perpétuité ? Décidément, les voies du Seigneur sont impénétrables, à moins que le malheureux Gonzague Saint Bris n'ait été inspiré par le Malin.

 

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Pour encadrée qu'elle soit par l'Etat, comme dans les autres démocraties populaires, la vie religieuse existe en RPD  de Corée. Il y a quelques mois, l'élection du pape François avait ainsi été saluée par les catholiques de Corée du Nord.

 

Par ailleurs, dans son édition du 1er juillet 2013, l'Annuaire pontifical a déclaré pour la première fois vacant le diocèse de Pyongyang, à la suite de la mort de son évêque, François Borgia Hong Yong-ho, né le 12 octobre 1906, ordonné prêtre le 25 mai 1933, nommé vicaire apostolique par Pie XII le 24 mars 1944 et consacré le 29 juin suivant. Auparavant, Mgr Hong était considéré comme disparu, bien qu'il eût été âgé de plus de 106 ans... ce qui en aurait fait le doyen de la RPDC, selon le dernier recensement de la population nord-coréenne conduit avec l'appui des Nations Unies. C'est en 1962 que Jean XXIII avait décidé d'élever le vicariat apostolique de Pyongyang au rang d'évêché, avec Mgr Hong comme évêque. Cette modification de l'Annuaire pontifical ouvre la voie à une possible béatification de Mgr Hong et de 80 autres de ses compagnons, considérés comme des martyrs.

 

En Corée, les catholiques ont joué un rôle de résistants - contre l'occupation japonaise puis, au Sud, contre le régime militaire. Au début des années 1970, les oeuvres complètes du Président Kim Il-sung, fondateurs de la RPD de Corée, ont été publiées en Italie par Jaca Book, éditeur proche du courant chrétien de gauche Communion et Libération.

 

L'Association des catholiques de RPD de Corée est dirigée par un laïc, Jang Jae-on, ancien président de la Croix-Rouge nord-coréenne. Par ailleurs, une Eglise orthodoxe à Pyongyang avait été visitée par la délégation de l'AAFC peu après son inauguration en août 2006, et elle avait rencontré deux prêtres coréens formés à Moscou. Il avait été indiqué à l'AAFC que, à cette date, sept Nord-Coréens avaient été baptisés orthodoxes. Le nombre de protestants en Corée du Nord est estimé à 10.000, et celui des catholiques à 4.000.

 

L'activité de plusieurs communautés chrétiennes est attestée publiquement en Corée du Nord depuis l'inauguration, en 1988, de deux temples protestants (à Pongsu et Chilgol) et de la cathédrale catholique de Changchung.

 

Le dialogue interreligieux constitue l'un des canaux des échanges intercoréens, notamment depuis la tenue en 1988, en Suisse, d'un séminaire international des chrétiens du Nord et du Sud de la Corée pour la paix et la réunification.

 

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Sources : AAFC, Journal du Vatican. Photos du temple Pongsu par Alain Noguès

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7 mai 2013 2 07 /05 /mai /2013 13:29

TV cerveauEn 1963, dans le film Les Tontons flingueurs, le dialoguiste Michel Audiard faisait dire à Lino Ventura une de ses répliques les plus connues : « Les cons ça ose tout, c'est même à ça qu'on les reconnaît. » Cinquante ans plus tard, les responsables de la chaîne M6, soucieux de racoler à peu de frais le téléspectateur distrait par les ponts du mois de mai, ont eux aussi tout osé : le 5 mai 2013, ils ont rediffusé une « enquête exclusive » sobrement intitulée « Dictature, paranoïa, famine : bienvenue en Corée du Nord »... datant de 2010 ! Lors de sa première diffusion, le 24 octobre 2010, ce qui peut à peine être qualifié d'« enquête » n'était déjà pas très « exclusif », comme l'avait souligné l'Association d'amitié franco-coréenne dans un article que nous republions ci-après. La télévision française est paresseuse. Nous aussi.  

 

M6 enquête en Corée du Nord... et renonce à l'information

21 novembre 2010


Alors qu'une offensive dirigée contre la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) semble en cours dans tous les médias - presse, édition, et même jeux vidéo -, la chaîne française M6 diffusait le 24 octobre 2010, dans le cadre de son magazine Enquête exclusive (présenté par Bernard de la Villardière), un reportage intitulé « Dictature, paranoïa, famine : bienvenue en Corée du Nord ». L'auteur de cette « enquête exclusive » a accompagné trois touristes français en visite dans le pays, tout en dissimulant sa véritable identité. La presse magazine consacrée à la télévision a jugé assez sévèrement cet énième reportage à sensations sur la Corée du Nord. Ainsi, l'hebdomadaire TV Magazine écrit : « Le reportage de M6, présenté comme un document, renonce à l'information. » L'Association d'amitié franco-coréenne a jugé utile d'apporter quelques éléments d'information à l'attention des téléspectateurs qui ont vu ou verront cette émission.

Une « enquête » ? « Exclusive »? A l'instar d'autres de ses collègues des magazines de télévision (comme Télérama), Emmanuel Galiero, de TV Magazine (supplément hebdomadaire des titres de la Socpresse) ne cache pas sa déception quant à cet énième reportage télévisé de M6 consacré à la République populaire démocratique de Corée : « Le commentaire, très engagé, à grands renforts de termes enflés, insiste sur le caractère infernal de la destination : "famines", "délires suicidaires", "version totalitaire du paradis"... [...] Au fil de ce qui est présenté comme un "document", le téléspectateur se demande finalement où est l'enquête et quand surgira l'exclusivité. »

Cette année marque le soixantième anniversaire de la Guerre de Corée, mais le reportage diffusé par M6 ne dit rien de la nature et des causes complexes de cette guerre, quand le président autoritaire sud-coréen Syngman Rhee multipliait les déclarations guerrières à l'égard de la Corée du Nord, ni de l'utilisation à grande échelle du napalm par l'armée américaine. Que les troupes nord-coréennes aient franchi le 38èmeparallèle en 1950 est un fait unanimement avéré, mais pourquoi ignorer les milliers de morts dans les affrontements inter-frontaliers qui ont précédé la Guerre de Corée, entre 1945 et 1950 ? Est-ce une ignorance de l'auteur du reportage, Alexandre Spalaikovitch, ou une volonté délibérée de simplifier à l'extrême ? La Corée du Nord serait donc responsable, à elle seule, d'un conflit ayant causé des millions de morts ? L'histoire de tout conflit montre pourtant qu'il n'y a pas de guerres où les massacres n'auraient existé que dans un seul camp... De même, pas un mot n'est dit des travaux de la Commission Vérité et Réconciliation qui, en Corée du Sud, a fait la lumière sur les massacres de masse de dizaines de milliers de sympathisants communistes ou supposés tels par les troupes américaines et leurs alliés sud-coréens avant et pendant le conflit.

A l'entendre, Monsieur Spalaikovitch se soucierait du sort de la population nord-coréenne, mais il ne dit rien non plus sur l'embargo américain - le plus ancien au monde – à l'encontre de la Corée du Nord. Outre les omissions, au-delà d'une famine qu'on ne voit pas (sauf à considérer que les plats à base d'algues ne sont pas de la nourriture, comme invite à y penser l'auteur du documentaire), le reportage de M6 présente une autre déficience majeure : il multiplie les erreurs et les inexactitudes. Face à un reportage qui prend pour principe qu'en Corée du Nord tout ne serait qu'illusion et mensonges, le spectateur averti se demande si, finalement, la plus grosse ficelle de la propagande n'apparaît pas déjà dans les procédés auxquels recourent sciemment Spalaikovitch et son équipe, en bon connaisseurs des médias et « du poids des mots, du choc des photos », selon le célèbre slogan de Paris Match.

Ainsi, le déplacement à Chongjin, sur la côte Est de la Corée, ne figure pas habituellement dans les circuits touristiques. Il n'est pas autorisé, ici comme ailleurs, de photographier les zones militaires. Le reportage s'attarde alors sur un guide coréen demandant de regarder d'un autre côté... qui se trouve être la ville de Kaesong, à presque 500 kilomètres de là, juste au nord de la zone démilitarisée séparant les deux Corée, où le reportage nous avait déjà conduits. Dommage que le commentaire omette de signaler ce simple « détail » de changement de lieux - et donc de décors -  qui tient de la téléportation... A l'écran, le montage des images n'est jamais neutre : respecter l'ordre chronologique du voyage, comme semble l'indiquer la carte au tout début de l'émission, n'aurait pas permis d'amener le spectateur à comprendre ce que le journaliste veut qu'il comprenne.

Un autre détail est d'autant plus gênant qu'il fonde le climat de peur qu'on cherche à faire ressentir par le téléspectateur : le groupe de touristes aurait été menacé de rester quelques mois de plus (en prison ?) s'il continuait à faire des remarques désobligeantes. Mais on ne saura jamais ce qui leur a été dit exactement. Qu'il nous soit permis de douter de la véracité même des propos prêtés aux autorités nord-coréennes : des délégations de l'AAFC ont visité la Corée du Nord cinq fois depuis 2005. Jamais elles n'ont entendu parler du placement en détention d'un touriste occidental. Au pire, un touriste pourrait se voir signifier qu'il sera reconduit à la frontière s'il ne change pas de comportement mais, à notre connaissance, une telle menace n'a jamais été mise à exécution. L'hypothèse d'un séjour de simples touristes prolongé de plusieurs mois en Corée du Nord en cas d'indiscipline nous apparaît donc hautement invraisemblable. En revanche, le guide coréen s'est exposé, et le commentaire du reportage insiste sur ce point : alors, pourquoi avoir montré des images compromettantes pour lui ? Le sort d'un Nord-Coréen est-il moins précieux que celui d'un Français ? La recherche de l'image spectaculaire à tout prix suffirait-elle à justifier cet oubli des principes élémentaires d'humanité ? Qui menace qui ?

Autre procédé classique du discours persuasif : le recours à un « sachant ». Le sachant est une autre personne que le journaliste, un témoin neutre et objectif censé ici connaître la réalité dissimulée de la Corée du Nord. Ce rôle est joué par une femme du groupe de visiteurs, Claude, fille d'un Coréen et d'une Française, qui a voulu retourner en Corée du Nord sur les traces de son père (à cet égard, le journaliste ne jugera pas utile d'expliquer que ce dernier a fui la brutale colonisation japonaise de la Corée qui a duré de 1910 à 1945). Quand les propos de la touriste ne sont pas assez négatifs, le journaliste juge bon d'expliquer qu'elle ne peut pas tout dire (la peur rôde !) pour justifier les commentaires que lui-même ajoute. Plus ennuyeux encore : les rares précisions techniques que donne le « sachant » sont souvent fausses. Ainsi, selon elle, Kim Il-sung aurait commencé ses activités dans la guérilla anti-japonaise en 1920 - et pour le souligner elle ajoute qu'il n'avait alors que 8 ans. En réalité, tous les historiens s'accordent sur le rôle joué par Kim Il-sung dans la lutte anti-japonaise en Corée (sans d'ailleurs que le journaliste ne juge utile d'indiquer qu'elle fonde la légitimité dont se revendique la République populaire démocratique de Corée), et même s'il existe un désaccord majeur entre les historiens nord-coréens et leurs confrères d'autres pays sur la date de début de ces activités, au plus tôt, selon l'historiographie nord-coréenne, Kim Il-sung a fondé l'Union pour abattre l'impérialisme en 1926, pas en 1920. Il avait donc 14 ans, et pas 8 ans.

C'est sur ces omissions et ces erreurs factuelles que le bât blesse : l'histoire de la Corée du Nord ne peut se comprendre que restituée dans la lutte des deux Etats coréens, du Nord et du Sud, aspirant tous les deux à une légitimité dans toute la Corée, au moins jusqu'à leur entrée conjointe à l'ONU, en 1991, après la fin de la Guerre froide. Or les images de la Corée du Sud sont choisies en contrepoint de l'image qu'on veut donner de la Corée du Nord : les mêmes parcs d'attraction, les mêmes enfants... Mais un enfant coréen sourirait-il différemment de part et d'autre du 38èmeparallèle ? De même, les scènes paysannes qu'on voit de la Corée du Nord ne sont pas éloignées de celles des campagnes sud-coréennes.

Il n'est pas soufflé mot, non plus, du régime militaire au pouvoir à Séoul pendant plusieurs décennies. En préparant ce reportage, les responsables de la société C Productions, filiale de M6 qui fabrique l'émission Enquête exclusive, ont écrit à l'AAFC afin d'« être mis en relation avec des réfugiés Nord Coréens en France pour [leur] livrer leur témoignage ». Nous leur avons répondu connaître des réfugiés coréens, mais du Sud, ayant fui le régime militaire en place à Séoul à l'époque. Les journalistes de M6 n'ont pas donné suite à notre proposition d'entrer en contact avec eux.

Alors, quel est l'objectif d'un journaliste réalisant un reportage aussi grossièrement manipulateur, au mépris de sa crédibilité et des règles déontologiques propres à son métier ? Un début de réponse est peut-être fourni au détour d'un commentaire dans le reportage diffusé ce 24 octobre par M6 : « la Corée du Nord possède l'arme atomique, et même les Etats-Unis n'osent pas l'attaquer. ». L'auteur d'un tel commentaire a tout compris au principe de la dissuasion nucléaire. Et, comme on sent pointer un regret, on se demande s'il ne rêve pas en secret  d'être embedded dans une unité de l'armée américaine en opérations en Corée du Nord...

 

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