Devant la commission des Affaires étrangères de l'Assemblée nationale, Jack Lang a annoncé que la France a proposé à la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) de créer à Pyongyang une "structure permanente de coopération humanitaire, culturelle, linguistique", sans toutefois établir de relations diplomatiques "dans la période immédiate".
La France, seul pays de l'Union européenne, à l'exception de l'Estonie, qui n'entretient pas de relations diplomatiques avec la RPDC, propose de se rapprocher de ce pays "par étapes (...), sans reconnaissance d'Etat dans la période immédiate", a déclaré Jack Lang.
L'envoyé spécial du président de République a expliqué que le contexte politique ne se prêtait pas à cette reconnaissance maintenant de l'Etat nord-coréen, tout en relevant que cette position était "contradictoire" avec la tradition française de reconnaître "des Etats et non des régimes".
"Le souhait formulé par la France est d'essayer d'ouvrir une page nouvelle" dans les relations entre les deux pays car "les lignes paraissent légèrement bouger" du côté des Nord-Coréens, a-t-il dit.
"Nous attendons la réponse de la Corée du Nord" à notre proposition d'ouvrir une structure dans la capitale nord-coréenne, a précisé Jack Lang qui a remis un rapport au président de la République Nicolas Sarkozy et au ministre des Affaires étrangères Bernard Kouchner. Il a précisé que le nom de cette structure restait à définir avec les Nord-Coréens, alors que la République populaire démocratique de Corée est représentée en France, depuis vingt-cinq ans, par une délégation générale.
Suite à cette annonce, l'agence officielle nord-coréenne KCNA a précisé, dès le 17 décembre, l'accord de la RPDC pour l'ouverture d'un bureau français d'action culturelle et de coopération à Pyongyang :
"La RPDC a donné son accord à l'ouverture par la France d'un bureau à Pyongyang, provenant de sa position pour le développement des relations avec la France (...) La France a informé la RPDC qu'elle souhaitait établir un bureau français d'action culturelle et de coopération à Pyongyang, comme une étape dans la première phase de la normalisation des relations entre les deux pays."
"Une aide beaucoup plus importante à ces organisations serait profitable sur tous les points", a-t-il estimé.
Dans le cadre de sa mission, Jack Lang s'est rendu du 9 au 13 novembre en Corée du Nord. Il s'est aussi rendu au Japon, en Corée du Sud, aux Etats-Unis, en Chine et en Russie, autres Etats parties aux pourparlers à six sur la question nucléaire.
Les responsables nord-coréens avec lesquels il s'est entretenu ont fait deux déclarations solennelles, a rappelé Jack Lang. La première déclaration assurait que la RPDC ne se livrait pas à des activités de prolifération avec transferts de matières fissiles et balistiques. La seconde affirmait que la RPDC était prête à discuter de la question des droits de l'homme, ainsi que des droits sociaux. Le ministère français des Affaires étrangères "prépare plusieurs choses" à ce sujet afin "de prendre au mot les Nord-Coréens", a indiqué Jack Lang.
Bien que la question nucléaire ne fût pas au coeur de la mission de Jack Lang, ce dernier s'est déclaré, à titre personnel, favorable à l'institution d'un "système de sécurité collective" en Asie du Nord-Est pour répondre aux inquiétudes de tous les acteurs de cette région du monde.
Si l'Association d'amitié franco-coréenne regrette que l'établissement de relations diplomatiques complètes entre la France et la RPDC ne soit pas prévu dans l'immédiat, elle se félicite de la perspective d'un renforcement de la coopération humanitaire, culturelle et linguistique, comme elle l'a fait elle-même - notamment lors d'une soirée de solidarité dans les salons de Boffrand de la présidence du Sénat, ou par ses actions de coopération pour l'apprentissage du français (ici avec les étudiants du département de français de l'Université Kim Il-sung, en 2006). Pour la première fois, une représentation gouvernementale française en RPDC fera le pendant de celle de la RPDC qui existe à Paris depuis l'inauguration officielle, en 1972, d'un bureau commercial.
Dans ses échanges réguliers avec l'envoyé spécial du président de la République tout au long de sa mission, l'AAFC n'a cessé de plaider en ce sens ; elle a reçu le 18 novembre dernier une lettre de Jack Lang se félicitant de la convergence de nos analyses (voir ci-dessous), tandis qu'un de ses adhérents a été reçu, à titre professionnel, par l'envoyé spécial du chef de l'Etat.
Sources : AAFC, AFP, Assemblée nationale, KCNA
Regarder l'audition de Jack Lang par la commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale
Courrier électronique adressé par l'AAFC à Jack Lang le 17 novembre 2009
Monsieur le Ministre,
L'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) a suivi attentivement votre mission en Corée du Nord et ses résultats.
En particulier, l'entretien que vous avez accordé le 15 novembre à RFI, TV5 et Le Monde a retenu toute notre attention.
- de la nécessité d'un véritable traité de paix dans la péninsule coréenne et de sa dénucléarisation TOTALE (voir http://amitiefrancecoree.over-
- de l'importance de soutenir l'action humanitaire des ONG françaises présentes sur place, face aux diverses difficultés qui touchent la population (voir http://amitiefrancecoree.over-
- de la place à accorder objectivement à la question des droits de l'homme (voir http://amitiefrancecoree.over-
L'AAFC accorde aussi une grande importance à la coopération éducative de la France avec la RPD de Corée, notamment en ce qui concerne l'apprentissage de la langue française (voir http://amitiefrancecoree.over-
Si les analyses de notre association ont jusqu'ici rencontré peu d'écho auprès des autorités françaises, nous espérons que votre mission aura pour résultat d'établir enfin un véritable dialogue politique entre la France et la RPD de Corée sur tous ces sujets.
D'une manière générale, pour assurer la paix et la sécurité dans cette région du monde - qui doit être la priorité - la France devrait, selon nous, jouer un rôle actif et contribuer à la pleine mise en oeuvre des accords inter-coréens du 15 juin 2000 et du 4 octobre 2007, soutenus par l'Assemblée générale des Nations Unies.
Restant à votre disposition pour vous rencontrer ou vous apporter toute information que vous jugeriez utile, nous vous prions de croire, Monsieur le Ministre, en l'expression de notre haute considération.
André Aubry
président de l'Association d'amitié franco-coréenne
ancien sénateur-maire d'Antony
Patrick Kuentzmann
secrétaire général de l'Association d'amitié franco-coréenne
Réponse de Jack Lang à l'AAFC
Monsieur le Président,
Monsieur le Secrétaire Général,
Je vous remercie pour votre lettre en date du 17 novembre.
Je me réjouis de constater que nos analyses convergent.
Nous devons intensifier nos efforts pour favoriser une solution de paix mais aussi pour obtenir un meilleur soutien public national et international aux actions menées sur place par les organisations non gouvernementales et les Nations Unies.
Je vous prie de croire, Monsieur le Président, Monsieur le Secrétaire Général, à mes meilleurs sentiments.
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