Si la visite à Taïwan de Nancy Pelosi, présidente de la Chambre des représentants des Etats-Unis, a été amplement commentée car elle s’est accompagnée d’un regain de tensions entre Pékin et Washington à propos de l’île nationaliste, ce déplacement s’inscrivait dans le cadre plus large d’une tournée est-asiatique qui a également conduit la délégation parlementaire menée par Nancy Pelosi à Singapour, en Malaisie et en République de Corée (Corée du Sud) , avant de rejoindre le Japon. C’était le premier déplacement d’un président de la Chambre des représentants américaine en Corée du Sud depuis 2002.
Lors de sa visite de deux jours en Corée du Sud, Nancy Pelosi, loin d’appeler au dialogue intercoréen et à la désescalade, a tenu un discours au contraire de nature à attiser les tensions en mettant l’accent sur la démocratie et la défense de la Corée du Sud, visant – bien qu’en évitant de la nommer directement – la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) :
Les Etats-Unis et la Corée du Sud partagent un lien fort formé pour la sécurité et forgé par des décennies d’amitié chaleureuse (…) Notre délégation du Congrès a voyagé à Séoul pour réaffirmer nos liens précieux et notre engagement commun à faire progresser la sécurité et la stabilité, la croissance économique et la gouvernance démocratique.
Sa visite dans la zone démilitarisée a mis en avant que les questions sécuritaires étaient considérées par Nancy Pelosi comme primordiales dans la relation américano – sud-coréenne, la délégation parlementaire américaine choisissant par ailleurs d’être hébergée symboliquement, pour sa visite dans la péninsule coréenne, dans la base aérienne américaine d’Osan, ouverte pendant la guerre de Corée et ayant joué à ce titre un rôle essentiel pour couvrir la Corée d’un tapis de bombes. Enfin, Nancy Pelosi a loué la présence militaire américaine en Corée du Sud : dans un entretien téléphonique avec le président sud-coréen Yoon Suk-yeol, elle a remercié ce dernier « pour l’hospitalité coréenne des 28 000 militaires américains et de leurs familles » et « exprimé la gratitude du Congrès et du pays pour le service patriotique de nos militaires, qui sont des sentinelles de la démocratie sur la péninsule coréenne ».
La RPD de Corée a réagi en dénonçant Nancy Pelosi comme la « pire destructrice » de la paix internationale et de la sécurité, et estimé que sa visite dans la zone démilitarisée témoignait de la « politique hostile de l’actuelle administration américaine » à son encontre. Jo Yong-nam, directeur général du département de la presse et de l’information du ministère nord-coréen des affaires étrangères, a justifié ses critiques contre la Présidente Nancy Pelosi en rappelant sa visite en Ukraine en avril, ainsi que son récent voyage à Taïwan. Un porte-parole de la RPDC avait alors dénoncé l’ingérence américaine dans les affaires intérieures de la Chine et la remise en cause de son intégrité territoriale, en voyant dans l’attitude américaine la source des menaces sur la paix et la sécurité dans la région.
Nancy Pelosi a aussi délibérément occulté que les exercices militaires de grande ampleur qui se tiennent régulièrement autour de la péninsule coréenne sont menées ici non pas par Pékin, mais bien par les Etats-Unis et leur allié sud-coréen. Ces manœuvres sont dénoncées par Pyongyang comme des préparatifs à une guerre d’invasion. Pourtant, les chancelleries occidentales ne disent pas autre chose lorsqu’elles dénoncent les manœuvres militaires chinoises au large de Taïwan. « Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà » ?
Pour sa part, l’Association d’amitié franco-coréenne plaide encore et toujours pour le dialogue et la paix dans la péninsule coréenne, seule la désescalade pouvant prévenir tout risque de dérapage vers un conflit dont les Coréens seraient les premières et innocentes victimes. La diplomatie parlementaire doit y contribuer – et non attiser les braises de conflits loin d’être éteints – et dont la guerre en Ukraine nous rappelle qu’ils ont de lourdes conséquences, y compris économiques et sociales, dans le monde entier.
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