La République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) reste méconnue en ce qui concerne les questions religieuses. Pourtant, celles-ci sont loin d’être négligeables. D’abord, il convient de rappeler qu’il y a peu de chrétiens, l’évangélisation s’étant surtout faite au Sud. Il y avait donc peu de chrétiens à la fin des années 1940 dans le Nord. La Guerre de Corée accentua certainement la dialectique entre un Nord athée et un Sud religieux, ce qui suscita une méfiance à l’égard du christianisme. On sait que les adversaires de la RPDC ne sont pas privés d’invoquer les valeurs du christianisme, entraînant peut-être certaines suspicions. Pourtant, il est nécessaire de rectifier les choses en raison de leur complexité. La RPDC n’a pas évacué cette composante de la société coréenne. La présence et le témoignage chrétiens ne sont, en effet, nullement absents de la RPDC.
Ainsi, le dimanche 4 août 2013, la délégation de l’AAFC alors présente en RPDC a assisté à un office protestant dans une église de Pyongyang. Ses membres ont ainsi rencontré une communauté fervente. Sous la houlette de son pasteur, les fidèles chantent et prient (il y a une alternance de chants et de lectures). Une remarquable chorale participe à l’animation de l’office. On reconnaît quelques étrangers, même si l’essentiel de l’assistance est bien d’origine coréenne, preuve qu’il est possible de prier à Pyongyang. Sur chaque banc, on peut trouver des livres de prière ainsi que plusieurs bibles, venant de Corée du Sud ou non. C’est un signe d’échanges religieux entre les deux Corée. Les fidèles ont donc accès à la Bible dans son intégralité.
La cérémonie célébrée ce dimanche présente un caractère pleinement religieux sans aucune confusion avec un quelconque message politique ; on sait d’ailleurs que les chrétiens de Corée sont aussi d’ardents patriotes. À cet égard, le récent constat de vacance du diocèse de Pyongyang s’inscrit probablement dans les démarches de l’épiscopat de Corée du Sud qui souhaite ainsi béatifier son titulaire que l’on peut considérer comme étant décédé (il aurait 106 ans ! Or, d’après les statistiques, aucun centenaire homme de RPDC n'aurait cet âge…). En effet, le 1er juillet dernier, la Secrétairerie d’État du Vatican a cessé de mentionner à l’Annuaire pontifical Mgr François Borgia Hong Yong-ho. Désormais, le diocèse de Pyongyang n’a plus de titulaire (en revanche, canoniquement, une administration apostolique, dont l’archevêque de Seoul est l’administrateur, continue à gérer les catholiques de ce territoire). Au-delà de la béatification, c’est aussi l’unité du pays que les évêques coréens cherchent à défendre, unité qui est aussi clairement défendue par les autorités de Pyongyang. Pour le Cardinal Nicholas Cheong Jinsuk, « travailler par tous les moyens à la réconciliation des deux Corées » (entretien à 30 jours, mars 2006) constitue l’une des priorités de l’Église coréenne. On ne peut que souhaiter que cet objectif soit poursuivi.
L’aspect chrétien est loin d’être escamoté dans les différents sites visités en RPDC, même s’il peut s’agir de pages encore douloureuses dans la mémoire du peuple coréen. Ainsi, à Sinchon, dans un musée consacré aux exactions commises par les Américains, la délégation a constaté l’exposition de quelques objets religieux. Ils rappellent la trop forte connivence du prosélytisme avec la présence américaine. On notera que ces aspects du christianisme sont clairement présentés au public, ce qui peut familiariser les Coréens avec les éléments qui concourent à la dévotion du chrétien.
Photos HJ - AAFC