Le 6 avril 2011, le professeur Yang Yoon-mo, critique de cinéma, a été arrêté après s'être couché sous un camion pour s'opposer à la construction de la base navale américaine dans l’île de Jeju, à l’extrême sud de la péninsule coréenne. Le professeur Yang a engagé une grève de la faim, alors que la mobilisation contre la base américaine s’amplifie – avec au premier rang les habitants de l’île, qui ne veulent pas que celle-ci devienne une nouvelle Okinawa et alors que l'armée américaine a des responsabilités dans la répression meurtrière de dizaines de milliers de Coréens de Jeju en 1948.
La photo a été prise par un homme qui a rendu visite à Yang Yoon-mo, dans sa cellule de la prison de Dongboo, sur l’île de Jeju. Il avait été arrêté le 6 avril, alors qu’il s’était physiquement opposé à la construction de la nouvelle base américaine dans l’île, en s’allongeant sur le chantier le 4 avril dernier. Ayant commencé une grève de la faim, le professeur Yang tend un papier où il est écrit : « Moi, Yang Yoon-mo, critique de cinéma, engage une grève de la faim illimitée au risque de ma vie, en exigeant : 1. La fin de la construction de la base navale ; 2. Au regard des actes de violence intentionnels perpétrés par les policiers du commissariat de Seogwipo le 6 avril, le relèvement de ses fonctions du commissaire de Seogwipo ; 3. La sanction de tous les policiers qui ont participé à la violence de groupe [pendant l’arrestation] le 6 avril ». Le mandat d’arrêt a été donné le 8 avril par les autorités judiciaires de Jeju, soulevant l’indignation de la population témoin des violences policières.
Le 9 avril, un groupe d’opposants appelé « Frontière » a organisé une manifestation sur le chantier : leur dirigeant, M. Song, a raconté comment il échappé aux forces de police qui, après avoir prétendu l’escorter, avaient tenté de l’arrêter. L’entreprise de construction présente sur le site avait promis de retirer ses équipements, avant de revenir sur sa promesse dès lors que la manifestation s’est terminée.
Yang Yoon-mo est personnellement concerné par le sort des habitants de Jeju : les frères de sa grand-mère maternelle ont été tués par la police sud-coréenne lors de la manifestation du 1er mars 1948, qui commémorait le soulèvement contre l’occupation japonaise, vingt-neuf ans plus tôt, en 1919. La répression de la manifestation du 1er mars 1948 avait entraîné le soulèvement de l’île de Jeju, le 3 avril, causant la mort par le régime de Syngman Rhee, avec l'appui des soldats américains, de 30.000 à 60.000 personnes, et l'exil de 40.000 autres (pour une population de 300.000 habitants). La construction de la base navale américaine a ainsi entraîné une large opposition de la population de l’île, dans une opposition qualifiée de « second 3 avril ».
Un Américain solidaire des habitants de Jeju, Eddy MacGregor, a appelé à protester contre cette atteinte aux droits de l’homme auprès de la mission de la République de Corée (du Sud) aux Nations Unies, ainsi que des ambassades sud-coréennes à l’étranger.
Un lourd climat pèse sur les droits de l’homme en Corée du Sud. La quotidien de centre-gauche Hankyoreh a ainsi révélé que les relevés d’ADN, autorisés depuis juillet 2010 pour lutter contre des faits de nature criminelle, étaient effectués à l’encontre d’ouvriers ayant participé soit à la grève de Ssangyong Motor, soit à l’occupation de l’usine Daelim.
Solidaire des Coréens en lutte contre la construction d’une base navale américaine qui menacerait le patrimoine naturel exceptionnel de l’île de Jeju et aviverait encore davantage les tensions dans la péninsule coréenne, l’Association d’amitié franco-coréenne appelle à la libération du professeur Yang Yoon-mo. Une pétition circule pour sa libération.
Source principale : No base stories of Korea (articles d'avril 2011)
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