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6 septembre 2023 3 06 /09 /septembre /2023 17:56

Selon Washington, une rencontre devrait prochainement avoir lieu entre le président russe Vladimir Poutine et le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un. Si Moscou a refusé de confirmer ou d'infirmer cette annonce, un nouveau sommet entre les deux dirigeants nous semble effectivement probable. Plus que la date de la rencontre, ce qui importe est de resituer celle-ci dans le cadre des relations russo-nord-coréennes - alors que le précédent sommet Russie - République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) a eu lieu en avril 2019 à Vladivostok et que la RPDC vient de rouvrir ses frontières

Rencontre entre Kim Jong-un et Vladimir Poutine le 25 avril 2019 à Vladivostok

Rencontre entre Kim Jong-un et Vladimir Poutine le 25 avril 2019 à Vladivostok

Un des rares avantages des guerres est qu'elles conduisent les services de renseignement à se focaliser sur l'adversaire, quitte d'ailleurs à négliger d'autres champs d'analyse : si la Corée du Nord reste un trou noir pour le renseignement occidental, en revanche le pouvoir russe est scruté avec attention. Dans ce contexte, c'est probablement par des informations provenant de Russie que la Maison Blanche a jugé être en mesure de pouvoir annoncer publiquement un futur sommet entre les dirigeants russe et nord-coréen. Dans le contexte de la guerre en Ukraine, Adrienne Watson, porte-parole au Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche, a accusé les deux pays d'être en discussions pour la livraison d'armes :  

Comme nous l'avons déjà dit, des négociations sur la fourniture d'armes entre la Russie et la Corée du Nord progressent activement.

La formulation reste toutefois prudente, en ne prétendant pas que des fournitures d'armes - qui contreviendraient aux sanctions internationales contre la RPDC - ont déjà eu lieu, même si de telles accusations ont déjà été formulées et démenties par les deux parties intéressées. De fait, dans le conflit en Ukraine, les deux Etats coréens souhaitent ne pas être directement impliqués

Par ailleurs, en ne réfutant pas la possibilité de manoeuvres conjointes avec la RPD de Corée, Sergueï Choïgou, ministre russe de la défense qui était présent à Pyongyang en juillet 2023 à l'occasion de la commémoration de l'armistice ayant mis fin aux combats de la guerre de Corée, semble surtout jouer avec les nerfs des Occidentaux, en laissant sous-entendre que la coopération militaire avec la RPDC pourrait prendre un tour nouveau : 

Nous en discutons avec tout le monde, y compris avec la Corée du Nord. Pourquoi pas? Ce sont nos voisins.

Si la Russie est l'un des deux voisins de la Corée du Nord, la Chine reste aujourd'hui - et de loin - son principal partenaire. Le resserrement des liens  politiques, économiques... - avec la Russie s'inscrit dans une volonté délibérée de Pyongyang de ne pas être dans un face-à-face avec Pékin, le nouveau contexte international résultant de la guerre en Ukraine ayant conduit à un resserrement des liens avec la Russie. Si les sanctions contre la RPDC n'ont pas ouvertement été dénoncées par la Chine et la Russie, il n'est pas (ou plus) dans l'intérêt de ces deux puissances de les voir s'appliquer, ni a fortiori de les renforcer malgré les nouvelles initiatives prises par Pyongyang en méconnaissance des précédentes résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies (CSNU). Dans la confrontation américano-nord-coréenne, Pékin et Moscou sont à présent extrêmement critiques contre Washington, accusant les Etats-Unis d'être responsables de la montée des tensions autour de la péninsule coréenne. Disposant d'un droit de veto, ils bloquent l'imposition de nouvelles sanctions par le CSNU.

Au-delà des aspects stratégiques - qu'il faut relativiser s'agissant d'une possible coopération militaire opérationnelle, la RPDC étant très soucieuse de son autonomie - la nécessité de relancer les échanges apparait cruciale pour l'économie nord-coréenne qui a été durement éprouvée par la fermeture des frontières dans le contexte de la crise liée au Covid-19. Selon la Banque de Corée (du Sud), le PIB nord-coréen aurait reculé pendant trois années consécutives. Pyongyang aurait un intérêt direct à la fourniture d'énergie par la Russie, ainsi que de produits alimentaires, tandis que l'embargo occidental limite les débouchés des produits russes. Par ailleurs, des travailleurs nord-coréens demeurent à l'étranger - y compris en Russie - dans des secteurs comme le bois et le bâtiment, alors que la sous-exploitation de l'Extrême-Orient russe, faiblement peuplé, constitue un facteur de fragilité pour Moscou. 

Enfin, une éventuelle rencontre, tout en réaffirmant une solidarité anti-impérialiste contre les Etats-Unis, pourrait aussi être l'occasion de renouer des échanges culturels et sportifs entre les deux pays. 

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