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28 avril 2019 7 28 /04 /avril /2019 22:28

Le 25 avril 2019, Kim Jong-un, président de la Commission des affaires d'Etat de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), et Vladimir Poutine, président de la Fédération de Russie, se sont rencontrés à Vladivostok, dans l'Extrême-Orient russe. Depuis sa rencontre de mars 2018 avec le président de la République populaire de Chine, le dirigeant nord-coréen aura multiplié les contacts directs avec les principaux acteurs du dossier coréen : quatre rencontres avec le président chinois Xi Jinping, trois rencontres avec le président sud-coréen Moon Jae-in, deux rencontres avec le président américain Donald Trump et, donc, une rencontre avec le président russe Vladimir Poutine. Deux mois après l'échec du sommet RPDC-Etats-Unis de Hanoï, la rencontre de Vladivostok a été une occasion significative de rappeler l'importance d'un mécanisme de sécurité collective pour l'Asie du Nord-Est et, plus particulièrement, de garanties de sécurité pour la Corée du Nord, garanties que les Etats-Unis semblent incapables d'offrir.

A Vladivostok, Kim Jong-un et Vladimir Poutine réaffirment l'importance d'une solution pacifique en Corée et d'un mécanisme de sécurité collective pour l'Asie du Nord-Est

La rencontre du 25 avril 2019 entre Kim Jong-un et Vladimir Poutine s'est tenue à l'Université fédérale d'Extrême-Orient, sur l'île Rousski, située en face de Vladivostok. C'était la première rencontre au plus haut niveau entre des dirigeants nord-coréen et russe depuis le sommet entre le Dirigeant Kim Jong-il et le Président Dmitri Medvedev d'août 2011, et la première visite à l'étranger de Kim Jong-un après sa réélection au poste de président de la Commission des affaires d'Etat de la RPDC le 12 avril 2019.

Ce sommet était très attendu car perçu comme un test pour les efforts diplomatiques de la RPDC destinés à mettre fin au blocage dans les négociations avec les Etats-Unis sur la dénucléarisation, à alléger les sanctions et pressions et à donner une nouvelle impulsion à son plan de développement économique.

Les dirigeants nord-coréen et russe ont d'abord eu, pendant deux heures, un entretien en tête-à-tête consacré, d'après l'agence russe TASS, à la résolution pacifique de la question nucléaire dans la péninsule coréenne, aux moyens d'assurer la paix en Asie du Nord-Est et aux relations entre la RPDC et la Fédération de Russie. Il n'était pas prévu de signature d'une déclaration commune ou d'un accord.

Avant cet entretien, le Président Vladimir Poutine a déclaré que la visite du dirigeant de la RPDC aiderait à résoudre la situation dans la péninsule coréenne, la Fédération de Russie accueillant favorablement les efforts de la RPDC visant à normaliser ses relations avec la Corée du Sud et avec les Etats-Unis. Il a félicité Kim Jong-un pour sa réélection au poste de président de la Commission des affaires d'Etat de la RPDC et souligné que l'année 2018 avait été celle du 70ème de l'établissement des relations diplomatiques entre la RPDC et la Russie.

Le Dirigeant Kim Jong-un a aussi fait part de son espoir que sa rencontre avec le Président russe contribue au développement des relations bilatérales et au règlement de la situation dans la péninsule coréenne. Il a remercié Vladimir Poutine pour l'organisation de la rencontre et l'a félicité à son tour pour sa réélection à la présidence de la Fédération de Russie en 2018, lui souhaitant de poursuivre « son travail couronné de succès pour construire une Russie forte ».

A l'issue de leur entretien en tête-à-tête, les dirigeants se sont montrés satisfaits : « Nous venons d'avoir un échange d'opinions très substantiel sur des questions qui nous intéressent mutuellement », a déclaré Kim Jong-un, remerciant Vladimir Poutine pour ce « très bon moment ».

« Nous avons abordé la situation sur la péninsule coréenne, avons eu un échange d'opinions sur ce qu'il fallait faire et comment le faire pour que les perspectives puissent s'améliorer », a de son côté affirmé Vladimir Poutine.

Ils ont alors été rejoints par les membres de leurs délégations pour une réunion élargie d'une heure et demi. Kim Jong-un était accompagné du ministre des Affaires étrangères Ri Yong-ho et de la vice-ministre des Affaires étrangères Choe Son-hui, tandis que la délégation russe comprenait le vice-Premier ministre Yuri Trutnev, le ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, le ministre des Transports Yevgeny Dietrich et le ministre du Développement de l'Extrême-Orient Alexandre Kozlov.

A Vladivostok, Kim Jong-un et Vladimir Poutine réaffirment l'importance d'une solution pacifique en Corée et d'un mécanisme de sécurité collective pour l'Asie du Nord-Est

Selon l'agence nord-coréenne KCNA, Kim Jong-un a déclaré au cours de cette réunion élargie que la situation dans la péninsule coréenne et la région se trouve dans l'impasse et est à un point critique où elle pourrait revenir à son état originel, car les Etats-Unis ont adopté une attitude unilatérale de mauvaise foi lors du sommet RPDC-Etats-Unis à Hanoï. Il a ajouté, toujours selon KCNA, que la paix et la sécurité sur la péninsule coréenne dépendront entièrement de la future attitude des Etats-Unis et la RPDC se préparera à toutes les situations possibles.

Les dirigeants russe et nord-coréen sont convenus de promouvoir plus étroitement la compréhension et les liens mutuels et de renforcer la collaboration stratégique pour assurer la paix et la sécurité régionales à l'avenir. Ils se sont également accordés à prendre des mesures positives dans divers domaines afin de stimuler davantage leur coopération en matière de commerce, d'économie et de sciences et technologies en plaçant les relations économiques et commerciales mutuellement bénéfiques entre les deux pays à un niveau élevé.

Enfin, Kim Jong-il a invité Vladimir Poutine à visiter la République populaire démocratique de Corée, une invitation acceptée par le Président russe.

Pendant la réception qui a suivi les entretiens, Vladimir Poutine a réaffirmé qu'il n'y a pas d'alternative à une résolution pacifique de la question nucléaire dans la péninsule coréenne. « Nous considérons qu'il n'y a pas et qu'il ne peut pas y avoir d'alternative au règlement pacifique du problème nucléaire et d'autres problèmes dans la région », a dit le Président russe. La Russie, quant à elle, est prête à continuer à coopérer pour réduire les tensions dans la péninsule coréenne et améliorer la sécurité en Asie du Nord-Est en général : « Comme le dit un proverbe coréen, si nous joignons nos forces, un rocher peut être déplacé », a déclaré Poutine, ajoutant qu'il s'agit d'une « formule à succès ». « Avec la participation active de la communauté internationale et de tous les pays concernés, nous atteindrons définitivement notre but d'assurer une paix durable, la stabilité et la prospérité dans la péninsule coréenne », a insisté Vladimir Poutine.

Pour sa part, Kim Jong-un a porté un toast à la prospérité à la Russie, mettant en avant les vieilles traditions d'amitié entre les deux pays : « J'ai eu aujourd'hui des échanges de vues francs et substantiels avec Monsieur [le Président russe Vladimir] Poutine sur les questions du développement des liens d'amitié russo-coréens, de la préservation de la paix et de la sécurité dans la péninsule coréenne et dans la région, ainsi que sur les questions internationales », a dit le dirigeant nord-coréen. « Je souhaite sincèrement à la Russie de prospérer en tant que grand pays puissant et digne »

A Vladivostok, Kim Jong-un et Vladimir Poutine réaffirment l'importance d'une solution pacifique en Corée et d'un mécanisme de sécurité collective pour l'Asie du Nord-Est

Après avoir quitté le dirigeant nord-coréen (qui devait rentrer en Corée le lendemain 26 avril), Vladimir Poutine a tenu une conférence de presse, se disant satisfait de ses discussions avec Kim Jong-un : « Nous sommes tous satisfaits des résultats des discussions, mes collègues et moi », a dit le Président russe, décrivant Kim Jong-un comme « une personne assez ouverte qui discute librement de tous les sujets à l'ordre du jour ». Selon Vladimir poutine, Kim Jong-un s'est révélé être « un interlocuteur assez intéressant et substantiel ».

Le Président russe a insisté sur la nécessité d'abandonner l'idée de la force pour résoudre la situation dans la péninsule coréenne. Il croit qu'un règlement dans la péninsule coréenne est possible, pour peu que chaque partie concernée respecte les intérêts des autres.

Vladimir Poutine a rappelé qu'on était proche d'une solution en 2005, quand la RPDC et les Etats-Unis étaient parvenus à un accord dans le cadre des pourparlers à six pays (deux Corée, Etats-Unis, Russie, Chine, Japon). Mais Washington essaya par la suite d'inclure d'autres dispositions dans cet accord, ce qui incita la Corée du Nord à s'en retirer : « Si nous agissons ainsi, un pas en avant, deux pas en arrière, alors nous ne parviendrons pas au résultat désiré, mais si nous avançons pas après pas en respectant les intérêts des autres, alors cet objectif peut être finalement atteint », a déclaré le Président Poutine.

Selon Poutine, pour que la Corée du Nord renonce à son programme nucléaire, il faut lui fournir des garanties : « Que signifie la dénucléarisation? Dans une certaine mesure, il s'agit du désarmement de la Corée du Nord. », a-t-il dit, notant que Moscou et Pyongyang pensent que la Corée du Nord « a besoin de garanties quant à sa sécurité et à la préservation de sa souveraineté ». « De quelle sorte de garanties peut-il s'agir, à part les garanties qu'offre la légalité internationale ? », s'est interrogé le Président russe, ajoutant qu'il est trop tôt pour dire si de telles garanties seront suffisantes et qu'il est donc « essentiel de prendre des premières mesures afin de bâtir la confiance ».

Selon Vladimir Poutine, les intérêts russes et américains peuvent coïncider sur la question de la dénucléarisation de la péninsule coréenne : « Par certains aspects, [les intérêts russes et américains] coïncident », a déclaré Poutine. « Nous sommes résolument opposés à la prolifération des armes de destruction massive sur la planète. C'est pourquoi un nombre significatif de mesures sont prises dans le cadre de l'Organisation des Nations unies », a dit le Président russe, dans une allusion aux sanctions visant le programme nucléaire nord-coréen, votées par le Conseil de sécurité des Nations unies, dont la Russie est un membre permanent. « Il est vrai que, quand certaines décisions sont prises, nous ne le cacherons pas et vous le savez, il y a souvent une lutte pour imposer une certaine formulation, mais pour ce qui concerne la réduction de la menace d'un conflit nucléaire, assurément, il s'agit de notre priorité commune », a encore dit Vladimir Poutine.

Le Président russe a déclaré que des discussions multilatérales sur la Corée du Nord (à l'image des pourparlers à six pays qui ont pris fin en décembre 2008) devront reprendre à terme, une fois qu'il s'agira de fournir des garanties internationales à Pyongyang : « Je ne suis pas sûr que ces discussions doivent reprendre maintenant mais je suis confiant quant au fait que, si nous parvenons à une étape où nous avons besoin de mettre au point certaines garanties pour une des parties, à commencer par des garanties de sécurité pour la Corée du Nord, des garanties internationales deviendront nécessaires », a dit Poutine.

Enfin, le Président Poutine a dit qu'il allait informer les dirigeants chinois et américains du contenu de sa rencontre avec Kim Jong-un : « Bien sûr, je parlerai de celà demain [26 avril 2019 à Pékin pendant le Forum sur les nouvelles routes de la soie] avec les dirigeants de la République populaire de Chine et nous discuterons aussi ouvertement et sincèrement de la rencontre de ce jour avec les dirigeants américains. Il n'y a aucun secret à cet égard et la position de la Russie est toujours ouverte, sans aucun complot. De plus, Kim Jong-un lui-même nous a demandé d'informer la partie américaine de sa position et des problèmes qui se posent à lui à propos des processus en cours dans la péninsule coréenne et dans ses environs », a conclu le Président russe.

A l'instar de la Chine, la Russie entend de longue date jouer un rôle dans l'établissement d'un mécanisme de sécurité collective, en tant que potentiel garant d'un accord entre les Etats-Unis et la République populaire démocratique de Corée, laquelle devra disposer de garanties de sécurité et de non-agression en contrepartie de sa dénucléarisation. Le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov avait déjà eu l'occasion d'exposer la position russe à Kim Jong-un quand il l'avait rencontré à Pyongyang en mai 2018.

En outre, la Russie et la Chine plaident, de manière constante, pour un « double gel » : gel des essais nucléaires et balistiques de la Corée du Nord, gel des manoeuvres militaires et de l'alourdissement continu des sanctions par les Etats-Unis et leurs alliés. En novembre 2017, à Séoul, le vice-ministre russe des Affaires étrangères Igor Morgoulov avait présenté les trois étapes de la feuille de route russo-chinoise :

- tout d'abord, une révision à la baisse des exigences attendues de la part de Washington (non plus la suspension des exercices militaires conjoints avec la Corée du Sud, mais la diminution de leur intensité et de leur ampleur), afin de faire baisser les tensions diplomatiques et militaires ;

- puis l'engagement de négociations bilatérales directes entre Pyongyang et Washington d'une part, Séoul et Pyongyang d'autre part ;

- enfin, des négociations multilatérales portant sur la mise en place d'un dispositif collectif de maintien de la paix et de la sécurité en Asie du Nord-Est, impliquant notamment la dénucléarisation de la Corée du Nord.

Si les deux premières étapes semblent en grande partie atteintes à la faveur des accords signés au cours de l'année 2018 par le dirigeant suprême de la Corée du Nord avec son homologue sud-coréen d'une part, et son homologue américain d'autre part, la troisième reste un vœu pieux, d'abord en raison des exigences américaines quant à un désarmement unilatéral de la RPDC avant toute autre avancée.

Comme l'a rappelé Vladimir Poutine le 25 avril 2019 à Vladivostok, la confiance est un préalable sur le chemin d'une solution en Corée.

 

Sources :

KCNA

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