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7 juillet 2017 5 07 /07 /juillet /2017 20:37

Le 8 juillet 2017 la République populaire démocratique de Corée célèbrera son fondateur, le Président Kim Il-sung, disparu vingt-trois ans plus tôt, comme l'homme ayant "vaincu deux impérialismes en une génération" (l'impérialisme japonais et l'impérialisme américain).  Mais un autre aspect mérite aussi d'être souligné : la capacité du Président Kim Il-sung, tout en renforçant le potentiel militaire national de dissuasion, à éviter que la péninsule ne plonge à nouveau dans la guerre, comme lorsqu'en juin 1994, soit moins d'un mois avant sa disparition, il scelle à Pyongyang un accord avec l'ancien président américain Jimmy Carter qui éloignera les menaces d'un nouveau conflit dévastateur en Corée. 

Kim Il-sung et Jimmy Carter

Kim Il-sung et Jimmy Carter

15 juin 1994 : réunis avec ses conseillers à la Maison Blanche, le Président William Clinton a décidé de frapper la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), qui ne donne pas plein accès à son territoire aux inspecteurs de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) et vient d'annoncer son retrait de l'AIEA. Plusieurs options sont sur la table : un bombardement (entre autres) du site nord-coréen de Yongbyon, suspecté d'accueillir des activités nucléaires militaires, apparemment non retenu car il aurait causé (au bas mot) des dizaines de milliers de morts en précipitant la péninsule coréenne dans une nouvelle guerre ; le déploiement de 10 000 hommes supplémentaires mais aussi de bombardiers près de la Corée du Nord tout en évacuant les civils américains à Séoul, avec une incertitude majeure, comment réagira la RPD de Corée face à ce qu'elle pourrait considérer comme une rupture de l'accord d'armistice de 1953 ? Le risque d'un conflit n'a jamais été aussi élevé.

C'est alors que retentit un appel téléphonique : c'est Jimmy Carter. Il a rencontré Kim Il-sung à Pyongyang, et annonce qu'un accord a été trouvé. La RPD de Corée accepte de suspendre son programme nucléaire, contre (entre autres) un accès au nucléaire civil. L'escalade est évitée, et la voie ouverte vers un accord sur la question nucléaire. 

Les détails de ce récit sont connus depuis que William Perry, alors secrétaire à la Défense du président américain (c'est lui qui a reçu l'appel téléphonique de Jimmy Carter), en a donné les détails dans un ouvrage publié en 1999, avec son conseiller Ashton Carter - avec des précisions édifiantes, comme la nouvelle que la guerre contre la RPD de Corée avait alors été préparée pendant 6 mois dans le cadre de l'OPLAN (pour "plan opérationnel") 5027. Un plan opérationnel non seulement jamais abandonné, mais actualisé...

Ce qui est en revanche rarement souligné dans la presse occidentale est la capacité du Président Kim Il-sung à obtenir cet accord décisif, alors qu'il menait une diplomatie multi-cartes : parallèlement à sa négociation avec Jimmy Carter il s'engageait dans des discussions avec l'administration sud-coréenne, qui aurait dû déboucher sur un sommet intercoréen au plus haut niveau avec Kim Young-sam - un sommet finalement empêché par sa disparition le 8 juillet 1994, puis par le comportement des autorités sud-coréennes.

Jimmy Carter avait accepté de prendre en compte les attentes nord-coréennes, notamment leur demande de considération. Kim Il-sung avait accepté de rencontrer un chef d'Etat qui n'était pourtant plus en exercice, ayant dirigé un pays (les Etats-Unis) ayant une part décisive dans la partition
de la Corée, pour ne négliger aucun canal afin d'empêcher une nouvelle guerre, cauchemar de tous les Coréens de sa génération. Cet art de la diplomatie apparaît aujourd'hui plus que jamais nécessaire, alors que les tensions autour de la Corée ont atteint un niveau sans précédent depuis... 1994. 

Sources : 

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