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1 juin 2018 5 01 /06 /juin /2018 20:32

Le 1er juin 2018, le Président Donald Trump a reçu dans le Bureau Ovale le général Kim Yong-chol, vice-président du Comité central du Parti du travail de Corée, directeur du département du Front uni, porteur d'une lettre du Président Kim Jong-un qu'il a remis en mains propres au chef d'Etat américain. Donald Trump a ensuite confirmé que les avancées réalisées lors de la visite de Kim Yong-chol aux Etats-Unis permettaient de confirmer la tenue historique du sommet du 12 juin 2018 à Singapour, appelé à être le premier entre un président américain en exercice et le dirigeant suprême de la République populaire démocratique de Corée (RPD de Corée).  

Kim Yong-chol et Donald Trump à la Maison blanche le 1er juin 2018

Kim Yong-chol et Donald Trump à la Maison blanche le 1er juin 2018

Quand les Nord-Coréens décrivaient, pendant la campagne présidentielle américaine, le candidat Donald Trump comme un homme sage et avisé, ils faisaient un pari que d'aucuns pouvaient juger risqué au regard de l'escalade continue des tensions de l'année 2017 entre les deux pays. Mais rétrospectivement le choix était le bon : au regard du refus de l'administration américaine de changer ses schémas de pensée (comme l'ont ensuite montré la résistance de l'appareil d'Etat - et des démocrates - à suivre le Président Donald Trump lorsqu'il a annoncé qu'il entendait rencontrer le Président Kim Jong-un), la diplomatie atypique du numéro un américain offre la possibilité de sortir d'une impasse dans les relations bilatérales et pour la paix dans cette partie du monde, préjudiciable à toutes les parties, qui était connue sous le nom de "patience stratégique".

Certes, en l'absence de communication publique sur le contenu des négociations, tout porte à croire que les différends demeurent - en particulier, sur la portée et le calendrier de la dénucléarisation nord-coréenne, sur le contenu des garanties de sécurité qu'apporteraient les Etats-Unis et sur la levée des sanctions par les Etats-Unis dont Pyongyang demande qu'elle s'opère au fur et à mesure de la mise en oeuvre de ses propres engagements, et non en fin de processus, comme le proposent les partisans à Washington de l'épreuve de force - qui ne font que remettre au goût du jour la vieille politique du diktat ayant de vagues apparences de dialogue et qu'aucun Etat souverain ne peut accepter de son plein gré.

Cependant, la volonté est partagée d'aller de l'avant pour tendre vers l'atteinte d'objectifs partagés, la paix, la sécurité collective et la dénucléarisation dans la péninsule coréenne, dans le cadre d'un processus dont l'administration présidentielle américaine a désormais conscience qu'il sera long et complexe. 


A ceux qui objecteront que, 18 ans plus tôt, un autre haut responsable nord-coréen (le vice-maréchal Jo Myong-rok), avait été reçu dans le Bureau Ovale, sans que ne s'enclenche alors un processus conduisant à la dénucléarisation et à la paix en Corée, il convient de répondre que le contexte est très différent : en 2000, l'administration Clinton était en fin de mandat et avait répondu favorablement à la demande des républicains de ne pas engager le futur président élu. Plus fondamentalement, les Nord-Coréens étaient encore loin d'être en mesure de réaliser leur premier essai nucléaire - auquel ils ne devaient procéder que six ans plus tard, en octobre 2006 - si bien qu'à l'époque nombreux étaient ceux, aux Etats-Unis et ailleurs dans le monde, qui attendaient (faisant déjà leur les mirages de la patience stratégique) l'effondrement d'un régime nord-coréen qu'ils estimaient de surcroît incapable de se doter d'une force de dissuasion nucléaire. Dix-sept ans plus tard, en 2017, tous leurs paris s'étaient avérés faux : la RPD de Corée n'a pas connu le destin de l'Union soviétique et les missiles nord-coréens dotés d'armes nucléaires peuvent atteindre le territoire américain. Il s'est donc opéré un retour au réalisme diplomatique et militaire, loin des rêveries idéalistes de ceux qui s'émerveillaient de la fin de l'histoire avec la victoire américaine dans la guerre froide, et qui explique qu'aujourd'hui les chances d'une normalisation des relations entre Washington et Pyongyang, dans le cadre d'un accord global, n'aient jamais été aussi élevées - même si le processus en cours peut encore s'enrayer.

A bien des égards, le tournant en cours est comparable à celui qui avait vu le Vietnam normaliser ses relations avec les Etats-Unis, une génération après la fin de la guerre, et qui avait conduit à une reconfiguration diplomatique globale en Asie du Sud-Est. Pyongyang a parfaitement compris l'avantage qu'elle peut retirer de la rivalité sino-américaine, en jouant la carte américaine pour sortir de son isolement ou en resserrant l'alliance avec la Chine en cas d'échec du processus diplomatique qui résulterait d'un raidissement américain. Quel que soit le scénario, elle joue gagnant à tous les coups.

Sources :
 

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