Le 28 décembre 2015, Fumio Kishia, ministre des Affaires étrangères du Japon, a conclu avec son homologue sud-coréen Yun Byung-se un accord tendant à résoudre "de manière finale et irréversible" la question des "femmes de réconfort" - euphémisme désignant les centaines de milliers d'esclaves sexuelles, notamment coréennes, de l'armée impériale japonaise avant et pendant la Seconde Guerre mondiale. Si les autorités conservatrices sud-coréennes, le secrétaire général des Nations Unies Ban Ki-moon et les Etats-Unis ont salué un accord qu'ils ont considéré comme historique, l'opposition sud-coréenne et les principaux représentants des associations de soutien aux "femmes de réconfort" ont en revanche dénoncé un texte qu'ils jugent clairement insuffisant et qui marque un recul sans précédent par rapport aux positions jusqu'alors défendues par la Corée du Sud - et a même été qualifié d' "humiliant" par la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord). Engagée de longue date sur la question de la reconnaissance par le Japon des crimes commis à l'égard des anciennes esclaves sexuelles de l'armée japonaise, l'Association d'amitié franco-coréenne partage la déception, sinon la colère, des associations et de nombre de survivantes.
Fumio Kishida et Yun Byung-se, lors d'une conférence de presse conjointe après la conclusion de l'accord
Dire que l'accord ne marque pas un infléchissement des positions japonaises serait erroné : le gouvernement japonais du très nationaliste Shinzo Abe a accepté la création d'un fonds de dédommagement des victimes doté d'un milliard de yens (soit 7,6 millions d'euros), et le Premier ministre a exprimé "des regrets et des excuses à toutes les personnes ayant subi des dommages qui faisaient parti des femmes de réconfort". Lorsqu'on sait la puissance de l'extrême-droite nationaliste japonaise, qui n'hésite pas à affirmer que les victimes de l'esclavage sexuel auraient été consentantes car elles auraient ainsi gagné de l'argent (!), on mesure combien Shinzo Abe se démarque d'une partie de son électorat. Pour les tenants japonais du révisionnisme historique, l'accord nippo-sud-coréen de 1965 normalisant les relations entre les deux pays avait réglé la question des "femmes de réconfort". En fait, il ne l'évoquait pas.
Mais aucun de ces principes n'est nouveau, ni celui d'une indemnisation, ni les regrets du Japon, déjà formulés par le gouvernement japonais de Ryutaro Hashimoto en 1997. En outre, cet accord élude volontairement la question de la responsabilité morale de l'Etat japonais qui a mis en place un indigne système public d'esclavage sexuel via l'armée : les dernières victimes encore en vie attendaient cette reconnaissance de responsabilité, et non de l'argent. En acceptant un accord qui ne mentionne pas la responsabilité juridique du Japon, Mme Park Geun-hye renie les positions défendues par tous ses prédécesseurs, qu'ils soient démocrates ou conservateurs.
Pis, les deux parties s'engagent à ne plus évoquer ces sujets dans les enceintes internationales, comme si le Japon avait acheté le silence de la Corée du Sud pour quelques millions d'euros et la réitération de formules de regrets dépourvues de portée juridique (à cet égard, qualifier un accord de définitif ignore les principes de base du droit international public). Enfin, en envisageant de déplacer la statue de la jeune fille située devant l'ambassade du Japon à Séoul et symbolisant le crime de l'esclavage sexuel, les autorités sud-coréennes - qui ont certes annoncé qu'elles conduiraient des discussions sur ce sujet avec les associations à l'origine de l'érection de cette statue - ont cédé à une demande hautement symbolique des autorités nippones, dont les victimes et les associations qui les soutiennent avaient fait savoir par avance qu'elle constituerait une concession inacceptable vis-à-vis de Tokyo.
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http://french.yonhapnews.co.kr/international/2015/12/28/0400000000AFR20151228002400884.HTML
[Editorial] No final resolution without legal responsibility on comfort women issue
The South Korean and Japanese governments declared they were "finally and irreversibly resolving" the comfort women issue on Dec. 28 with their announcement of an agreement on the matter. But the ...
http://english.hani.co.kr/arti/english_edition/e_editorial/723940.html
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