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30 avril 2015 4 30 /04 /avril /2015 22:12

Le 29 avril 2015, le Premier ministre japonais Shinzo Abe s'est exprimé devant les deux chambres du Congrès américain. S'il a exprimé ses "condoléances" aux familles des soldats américains morts pendant la Seconde guerre mondiale, il ne s'est pas départi du nationalisme japonais le plus conservateur en évitant soigneusement toute expression d'excuses envers les victimes coréennes de la politique menée par l'impérialisme nippon - une position d'autant plus choquante qu'avait pris place, dans la tribune, Mme Lee Yong-soo, ancienne "femme de réconfort" - c'est-à-dire esclave sexuelle de l'armée japonaise. Alors que le Président américain Barack Obama a offert un dîner d'Etat à Shinzo Abe, ces égards protocolaires témoignent de l'attention privilégiée qu'accordent les Etats-Unis au Japon dans la région Asie-Pacifique. Ils ont aussi infligé un camouflet aux conservateurs sud-coréens qui prônent une alliance toujours plus étroite avec "l'allié" américain en faisant croire qu'ils pourraient ainsi obtenir un appui de Washington pour la reconnaissance des souffrances subies par le peuple coréen : les rapports américano - sud-coréens relèvent bien d'une relation de subordination , et non d'une alliance d'égal à égal.

Shinzo Abe devant le Congrès américain : un discours pas à la hauteur des attentes

Si les nationalistes japonais tendent à respecter l'adversaire américain qui les a vaincus lors de la Seconde guerre mondiale, ils n'ont pas les mêmes attentions à l'égard des pays qu'ils ont envahis et colonisés pendant le conflit, à commencer par la Corée, soumise au jour japonais dès 1905. Dans son discours devant le Congrès, Shinzo Abe s'est contenté de formules très générales ; pis, en réaffirmant qu'il s'en tenait aux positions traditionnelles du Gouvernement japonais, il a exprimé de la manière la plus claire possible qu'il n'entendait pas apporter le moindre infléchissement à une position fondée sur le déni, notamment en ce qui concerne le drame subi par les "femmes de réconfort", coréennes, chinoises et d'autres pays :

Après la guerre, nous nous sommes engagés sur un chemin, forts de sentiments de profonds remords à l’égard de la guerre. Nos actes ont fait souffrir les peuples des pays asiatiques (...) Je maintiendrai les positions exprimées par les anciens Premiers ministres à cet égard.

Ces propos ont suscité une levée de boucliers, notamment en Chine et en Corée.

Le ministère des Affaires étrangères de la République de Corée (Corée du Sud) a jugé ce discours "très regrettable", en soulignant qu'il contredisait les déclarations de principe du Japon sur la paix mondiale et le besoin d'établir des relations de confiance et d'harmonie entre les nations, comme l'a précisé le porte-parole du ministère Noh Kwang-il :

Le Gouvernement considère très regrettable le discours d'Abe au Congrès américain, qui aurait pu être un tournant pour la réconciliation et la coopération véritables avec les pays voisins avec une vision correcte de l'histoire et qui n’a pas manifesté une telle conscience ou présenté d’excuses sincères (...) Le Japon a déclaré dans le discours, afin de contribuer à la paix mondiale, qu’il faut établir des relations de confiance et d'harmonie avec la communauté internationale à travers la reconnaissance et la réflexion sincères sur l'histoire, mais son comportement va dans le sens contraire (...) Le Japon doit faire face à des faits liés à l'histoire de la colonisation et de l'invasion, à la violation cruelle des droits humains des victimes de l'esclavage sexuel, en ayant une vision historique correcte, et doit prendre le chemin de la réconciliation et de la coopération avec les pays voisins.

Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) a tenu des propos encore plus acerbes, en estimant que l'absence d'excuses était une insulte faite aux victimes de l'esclavage sexuel de l'armée japonaise, et inscrivant cette prise de position dans l'alliance des autorités nippones avec les groupes révisionnistes japonais :

Ce ne peut être que l'œuvre de hooligans dépourvus de moralité et de conscience humaine, et de psychopathes dénués du sens commun le plus élémentaire.

Alors que des négociations avaient repris en 2014 entre le Japon et la RPD de Corée pour améliorer les relations bilatérales, les propos du Premier ministre Shinzo Abe enterrent toute perspective de progrès à court et moyen termes. Enfin, elles affectent négativement les relations nippo - sud-coréennes, que Washington cherche par ailleurs à renforcer pour étendre son influence et sa présence dans la région Asie-Pacifique.

Sources :

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