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24 novembre 2015 2 24 /11 /novembre /2015 13:20

Né le 20 décembre 1927 à Geoje dans le Gyeongsang du Sud, l'ancien Président de la République de Corée (Corée du Sud) Kim Young-sam (1993-1998) est décédé quelques jours avant son quatre-vingt-huitième anniversaire, le 22 novembre 2015 à l'hôpital de l'Université nationale de Séoul. L'Association d'amitié franco-coréenne salue la mémoire d'un homme d'Etat qui a marqué l'histoire de la Corée au vingtième siècle en conduisant à engager la Corée du Sud sur la voie de la démocratie, et dont les obsèques donneront lieu à des funérailles nationales.

Kim Young-sam (1927-2015), ancien Président de la République de Corée

Kim Young-sam (1927-2015), ancien Président de la République de Corée

Il y a plusieurs phases dans la vie politique de Kim Young-sam. Né dans une famille aisée de pêcheurs en 1927, diplômé de l'Université de Séoul en 1952, il devient en 1954 le plus jeune député de l'Assemblée nationale, élu sous les couleurs du parti majoritaire du très autoritaire Syngman Rhee. Puis il rejoint les rangs de l'opposition par refus des manoeuvres des autorités sud-coréennes pour réviser la Constitution.
 

Pendant le régime militaire du général Park Chung-hee, il devient, avec Kim Dae-jung, l'un des chefs de file de l'opposition libérale et se distingue par sa critique acerbe du pouvoir le plus autoritaire qu'ait jamais connu la Corée du Sud, et son refus de toute compromission avec la junte militaire. Cette dernière utilise le pouvoir judiciaire pour l'écarter politiquement : en septembre 1979, une décision de justice lui retire la présidence du Nouveau parti démocratique ; en octobre 1979, il est déchu de son mandat de député, ce qui conduit 66 députés d'opposition à remettre leur démission et les Etats-Unis à rappeler leur ambassadeur en République de Corée. Interdit de toute activité politique entre 1980 et 1985, placé en résidence surveillée, il conduit une grève de la faim pendant vingt-et-jours, en 1983, devant le siège de la présidence.

Après le rétablissement de l'élection du chef de l'Etat au suffrage universel direct grâce au combat des militants pour la démocratie, il est candidat au scrutin présidentiel de 1987, remporté par le général Roh Tae-woo. La division de l'opposition entre ses deux figures de proue (Kim Dae-jung et Kim Young-sam, qui obtiennent respectivement 27 % et 28 % des voix), et le mode de scrutin uninominal à un seul tour assurent l'élection d'un répresentant de la junte militaire (36,6 % pour Roh Tae-woo).

Alors que le régime militaire est de plus en plus affaibli, ses partisans décident de s'allier avec Kim Young-sam contre Kim Dae-jung, le premier étant considéré comme un opposant moins dangereux pour leurs intérêts : en 1990, le Parti libéral-démocrate (PLD) naît de la fusion du Parti pour une réunification démocratique de Kim Young-sam et du Parti démocratique pour la justice (au pouvoir). Kim Young-sam prend la présidence du PLD. Avec 42 % des voix (contre 33,8 % pour Kim Dae-jung), Kim Young-sam remporte l'élection présidentielle de 1992. En fonctions de février 1993 à février 1998, il devient le premier président civil de la Corée du Sud depuis 1962.

Son mandat est marqué par une volonté de réforme politique et économique : dans le contexte d'une campagne anti-corruption, ses deux prédécesseurs (les généraux Chun Doo-hwan et Roh Tae-woo) sont arrêtés. Des milliers de prisonniers politiques sont libérés, et la faction militaire Hanahoe, dont les hommes avaient animé la junte militaire au pouvoir, est dissoute. Kim Young-sam entend en outre adapter la Corée du Sud à l'ère de la mondialisation.

Il échoue cependant à réduire le pouvoir des conglomérats, les chaebols, alors que le pays reste marqué par des catastrophes témoignant de l'ampleur de la corruption : en 1995, l'effondrement du grand magasin Sampoong cause cinq cents morts. La crise financière asiatique de 1997-1998, qui conduit la République de Corée à bénéficier de la plus importante opération de soutien financier alors jamais conduite par le FMI (à hauteur de 58 milliards de dollars), ternit considérablement son image, de même que l'implication de son second fils dans un scandale de corruption et d'évasion fiscale, conduisant à la faillite du conglomérat Hanbo Steel. Il finit aussi par amnistier ses deux prédécesseurs à la tête de l'Etat, qui avaient été accusés de mutinerie et de trahison.

La démocratisation n'a pas été conduite à son terme, la loi de sécurité nationale restant en vigueur et les opposants étant sévèrement réprimés - notamment le mouvement étudiant, fer de lance de la démocratisation, à l'Université Yonsei en 1996, et le mouvement syndical, suite à l'adoption de la loi du 26 décembre 1996 restreignant les libertés syndicales. Néanmoins, les syndicats non liés aux intérêts patronaux peuvent pour la première fois s'organiser librement : la Confédération coréenne des syndicats (acronyme anglais, KCTU) est créée en 1995.

S'agissant des relations intercoréennes, le Président Kim Young-sam a joué un rôle utile de retenue pour empêcher les Etats-Unis de bombarder les installations nucléaires nord-coréennes lors de la crise de 1994, ce qui aurait pu entraîner une escalade des tensions menant jusqu'à la guerre. En juillet 1994, l'absence de condoléances de la République de Corée après la disparition du Président Kim Il-sung de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) ajournera les projets de sommet intercoréen jusqu'à la fin du mandat de Kim Young-sam, grippant durablement les relations Nord-Sud.

Alors que les chefs de l'Etat sud-coréens n'ont plus le droit de se représenter immédiatement à l'issue de leur mandat, Kim Young-sam favorise implicitement l'élection de Kim Dae-jung en 1997, en se distanciant de son ancien Premier ministre (1993-1994), Lee Hoi-chang, candidat sur une ligne ultra-conservatrice.

Après son départ de la présidence de la République, Kim Young-sam a évité une trop grande implication dans la vie politique. Récemment, il avait critiqué l'actuelle chef de l'Etat Mme Park Geun-hye, fille du général Park Chung-hee qui avait réprimé sévèrement les activités de l'opposition alors conduite par Kim Young-sam.

Sources :

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22 novembre 2015 7 22 /11 /novembre /2015 18:17

Une semaine après les manifestations d'envergure exceptionnelle du 14 novembre 2015, la présidente sud-coréenne Park Geun-hye a décidé de frapper vite et fort, comme elle l'avait menacé avant même que ne commence la journée d'action : le siège de la Confédération coréenne des syndicats (Korean Confederation of Trade Unions, KCTU), principal organisateur des manifestations du 14 novembre, a été la cible d'un raid policier sans précédent depuis sa fondation en 1995, sous la présidence de Kim Young-sam - qui était devenu en 1993 le premier président civil de la République de Corée (Corée du Sud) depuis plus de trente ans, et vient par ailleurs de décéder. Le raid policier a duré six heures : 700 agents de police ont pénétré à l'intérieur du siège de la KCTU pour saisir documents et matériels informatiques, quand 1.840 de leurs collègues étaient positionnés autour du bâtiment. Leur but ? Trouver les preuves d'une implication de la KCTU dans les incidents violents qui ont émaillé - comme trop souvent, hélas, en Corée du Sud - les manifestations du 14 novembre. La répression policière a causé quelque 30 blessés dans les rangs des manifestants (dont l'un est toujours entre la vie et la mort) - sur le sort desquels les médias conservateurs et pro-gouvernementaux sud-coréens éviteront soigneusement de faire allusion dans leurs comptes rendus d'une des plus spectaculaires descentes de police contre une organisation forte de centaines de milliers de membres, et ayant toujours agi dans la légalité.

Raid policier sans précédent au siège du syndicat KCTU

La descente de police opérée ce week-end en Corée du Sud a un air de déjà vu : de même, le principal parti de gauche, le Parti progressiste unifié (PPU), avait fait l'objet d'un raid des forces de l'ordre avant d'être interdit et ses députés déchus de leur mandat, sur la base de preuves fabriquées et d'un amalgame effectué à dessein entre l'action d'une partie de ses membres et l'ensemble de l'organisation.

Car Mme Park Geun-hye a besoin de preuves si elle veut détruire la KCTU, comme elle a fait auparavant interdire le PPU par une décision de la Cour constitutionnelle qui a été une farce juridique : les forces de l'ordre n'ont trouvé qu'un talkie-walkie et un casque au siège de la KCTU ? C'est bien maigre pour prouver qu'il s'agit d'une organisation poursuivant des objectifs insurrectionnels... Qu'à cela ne tienne : il suffit de rajouter dans la liste des documents saisis des haches, des marteaux et des cordes. Les dirigeants de la KCTU auront beau affirmer que lorsqu'ils organisent des rassemblements à la campagne ils ont besoin de haches pour couper du bois, et que les marteaux servent à briser la glace, l'essentiel est ailleurs : en communiquant opportunément sur la liste des objets saisis (ce qui, par ailleurs, n'est absolument pas l'usage), le gouvernement sud-coréen cherche à distiller l'idée que la KCTU, fondée il y a 20 ans, serait subitement devenue une organisation violente, dont la répression s'impose.

Car s'il est exact que des échauffourées ont eu lieu avec les forces de l'ordre sud-coréennes, ces dernières ne sont pas spécialement réputées pour leur faiblesse - le syndicaliste paysan toujours dans le coma suffirait à nous le rappeler... Voix fidèles du gouvernement conservateur, les médias de droite ou à capitaux publics ne manquent pas de souligner à satiété que certains manifestants avaient, le 14 novembre, des barres de fer et que des véhicules de police ont été détruits. Des véhicles de police dont ils se gardent de rappeler qu'ils étaient utilisés, au nombre de 700, comme éléments de barrage, dans une stratégie d'aiguisement des tensions savamment organisée par le pouvoir sud-coréen... Et que les barres de fer deviennent des haches dans l'imaginaire répressif de la droite sud-coréenne est une incohérence qui n'effleure pas davantage les partisans de Mme Park.

Dans leur offensive policière et juridique contre la KCTU, les autorités sud-coréennes cherchent aussi toujours à faire arrêter le leader de la centrale syndicale, Han Sang-gyun, qu'elles avaient déjà tenté de faire enlever à l'occasion des manifestations du 14 novembre lors d'une piteuse opération menée par des policiers en civil. Son crime ? Avoir activement permis l'organisation, ce 1er mai, des plus importantes manifestations jamais vues en Corée du Sud pour une fête du travail - lors desquelles des affrontements ont eu lieu entre la police et les manifestants. Au nom du principe de culpabilité par association (si un membre de la KCTU a agi en dehors du cadre légal pacifique, toute la KCTU est responsable), déjà utilisé pour interdire un syndicat enseignant trop critique vis-à-vis du pouvoir (le syndicat a été dissous car certains de ses membres n'étaient plus enseignants), Han Sang-gyun a écopé d'un mandat d'arrêt. Depuis, il se cacherait dans un temple bouddhiste de l'ordre Jogye.

Et si les disques durs saisis au siège de la KCTU ne disent rien ? C'est qu'ils auront été purgés, forcément, ont déjà prévenu par avance les autorités sud-coréennes : le même artifice avait déjà été utilisé en juillet pour emprisonner le militant des droits de l'homme Park Rae-gun ("si nous n'avons trouvé aucunes preuves à son domicile, c'est qu'il les a détruites"), placé depuis en liberté conditionnelle après le versement d'une caution. Des preuves ? Vous êtes coupable. Pas de preuves ? Vous êtes aussi coupable. L'argument est imparable.

A l'approche des élections législatives du printemps 2016 le pouvoir sud-coréen a besoin de criminaliser ses opposants, hier le PPU, aujourd'hui la KCTU - avant de chercher à impliquer les démocrates dans les combats du PPU et de la KCTU, en pratiquant l'amalgame. Avant, demain, de frapper cette même opposition libérale ? Si un tel scénario se produisait, il serait la réplique de ce qu'a ourdi le père de l'actuelle chef de l'Etat, le général Park Chung-hee, arrivé au pouvoir par un coup d'Etat militaire, en 1961, avec le soutien au moins tacite des Etats-Unis. Son régime était devenu de plus en plus autoritaire jusqu'à ce qu'il soit assassiné en 1979 par son chef des services de renseignement, dans des conditions qui n'ont jamais été élucidées. 

Face aux menaces grandissantes qui pèsent sur les libertés politiques et syndicales en Corée du Sud, la vigilance et la solidarité avec les démocrates s'imposent : demain comme hier, l'AAFC répondra toujours présente dans le combat pour la démocratie en Corée du Sud.

Source :

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14 novembre 2015 6 14 /11 /novembre /2015 22:03

Malgré les intimidations et les menaces des autorités sud-coréennes, 68 000 personnes (selon la police) à 130 000 personnes (selon les organisateurs) ont participé le 14 novembre 2015 à l'un des plus vastes rassemblements organisé à Séoul au cours de ces dix dernières années, à l'appel de 53 organisations (dont la centrale syndicale Korean Confederation of Trade Unions, Confédération coréenne des syndicats - acronyme anglais KCTU - et l'Union des enseignants et travailleurs de l’éducation coréens, KTU). Plusieurs mots d'ordre ont fédéré les participants : tout particulièrement, le refus des projets de libéralisation du marché du travail et des manuels scolaires d'Etat - que les autorités sud-coréennes entendent mettre en place pour inculquer la "bonne pensée" aux écoliers. Un même slogan "A bas Park Geun-hye !" a traduit l'aspiration commune des participants, fermement opposés à la dérive libérale-autoritaire de la Corée du Sud. Refusant la criminalisation de l'opposition sud-coréenne, l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) est pleinement solidaire du combat des militants sud-coréens pour la démocratie, les libertés et la justice sociale, en saluant leur courage face à la répression.

"A bas Park Geun-hye !"

Parmi les motifs du rassemblement figuraient le refus des manuels scolaires d'histoire estampillés par les pouvoirs publics qui doivent entrer en vigueur en 2017 (et permettre une appréciation positive de la présidence Park Chung-hee, initiateur d'un régime militaire ayant entraîné des milliers de morts, et père de l'actuelle chef de l'Etat Park Geun-hye), la déréglementation de marchés de produits agricoles, la facilitation du licenciement des "travailleurs inadaptés" (sic) - que les syndicats dénoncent comme une mesure qui accroîtrerait la pression à la baisse des salaires et accentuerait encore le dualisme du marché du travail au détriment des travailleurs ayant un statut précaire.

 

Les autorités sud-coréennes avaient mis en place le dispositif nécessaire pour assurer la criminalisation des manifestations de ce samedi 14 novembre et en retirer les bénéfices politiques attendus en limitant encore un peu plus la liberté d'expression de l'opposition politique et syndicale :

- d'abord, les menaces pour décourager les participants éventuels ; outre les déclarations martiales du ministère de l'Intérieur (cf. infra), les fonctionnaires et enseignants qui participeront au mouvement encourront toute la sévérité de la loi en cas de débordements, avait prévenu préalablement le gouvernement, la veille, dans un communiqué conjoint du ministère de l'Education, du ministère de la Justice, du ministère de l'Intérieur, du ministère de l'Agriculture, de l'Alimentation et des Affaires rurales et du ministère de l'Emploi et du Travail ;

- ensuite, un déploiement policier surdimensionné (20 000 policiers anti-émeutes) pour favoriser les affrontements ;

- enfin, des pièges tendus aux dirigeants du mouvement identifiés comme devant être arrêtés dans le cadre de la journée d'action.

Je veux dire clairement que nous tiendrons les fonctionnaires personnellement responsables pour avoir participé à ou conduit toute activité illégale faisant l'objet de poursuites légales, et que nous prendrons toutes les mesures nécessaires pour poursuivre de tels individus (Chung Chae-gun, ministre de l'Intérieur).

Hankyoreh

Quand les manifestants ont approché de la Maison Bleue, siège de la présidence, les forces de l'ordre ont déployé un cordon de 700 bus pour bloquer leur avancée, puis ont utilisé des canons à eau et du gaz lacrymogène. Et ce qui devait se passer est arrivé : certaines personnes ont tenté de forcer les barrages de police, entraînant des affrontements et causant des dizaines de blessés (30, selon un bilan provisoire du quotidien progressiste Hankyoreh).

Cible de choix, le dirigeant de la centrale syndicale KCTU Han Sang-gyun a fait l'objet d'une tentative d'arrestation par des policiers en civil munis d'un mandat d'arrêt judiciaire pour avoir prétendument organisé, par le passé, des rassemblements illégaux - entre autres, le rassemblement ayant mobilisé un nombre exceptionnel de travailleurs à l'occasion de la fête du travail cette année. Mais Han Sang-gyun est parvenu à s'échapper lors de sa tentative d'arrestation après des échaffourées entre des syndicalistes de la KCTU et les policiers en civil, étant exfiltré par un bâtiment adjacent, avant de réapparaître au coeur du principal rassemblement devant l'hôtel de ville de Séoul en appelant à se diriger vers la Maison Bleue, qu'il a dénoncée comme "le coeur d'un gouvernement injuste".

Solidaire des militants pour les libertés politiques et syndicales, l'AAFC n'aura qu'un mot : ce n'est qu'un début, continuons le combat !

"A bas Park Geun-hye !"

Sources :

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21 octobre 2015 3 21 /10 /octobre /2015 21:39

Depuis l'interdiction du Parti progressiste unifié (PPU) en République de Corée (Corée du Sud), il y a un an, en décembre 2014, le Comité international pour les libertés démocratiques, en Corée du Sud (CILD) alarme l'opinion publique internationale et organise la solidarité avec les militants sud-coréens pour les droits de l'homme et la démocratie. Parmi les militants de l'ex-PPU, un groupe est particulièrement dans le viseur des autorités sud-coréennes : les membres de la tendance Corea21 du PPU, qui animent l'Alliance coréenne. Nous reproduisons ci-après un témoignage des militants de l'Alliance coréenne à Séoul. Le CILD appelle à leur libération immédiate, ainsi qu'à l'abrogation de la loi de sécurité nationale, instrument des régimes autoritaires au Sud de la péninsule !

PS : article reproduit du blog du Comité international pour les libertés démocratiques en Corée du Sud (CILD). Le 14 mars 2015, l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) avait co-organisé un colloque à Paris avec l'Alliance coréenne pour défendre les droits de l'homme et les libertés en Corée du Sud : l'AAFC est donc plus que jamais solidaire du combat pour la libération des militants progressistes emprsonnés en Corée du Sud et la fin de la répression politique. Les photos illustrant l'article nous ont été communiquées par l'Alliance coréenne.

Notre camarade Ji Young-chul (ancien co-président de l'Alliance coréenne pour la démocratie et la réunification indépendante) a été arrêté hier, mardi 20 octobre [2015], après trois mois de recherches. La police a pisté les camarades et sa famille, y compris ses deux enfants, pour trouver Ji Young-chul. Il se trouve en ce moment au commissariat de Jongro-gu, à Séoul. Il est actuellement en grève de la faim, exigeant l'abolition de la loi de sécurité nationale, la démission de la Présidente Park Geun-hye et refusant les persécutions judiciaires. Les camarades de l'Alliance coréenne ont commencé une manifestation illimitée à une personne devant le commissariat depuis hier soir.

Le lundi 19 octobre marquait le 71e jour de l'action illimitée de nos militants dormant à la belle étoile devant la maison de détention de Séoul et le dixième jour de la grève de la faim de Sang Hoon. En effet, Sang Hoon a commencé une grève de la faim en prison le samedi 10 octobre pour demander l'amélioration des conditions de vie des prisonniers et le respect des droits de l'homme, la libération de tous les prisonniers politiques et la fin de la répression politique contre les forces progressistes. Nos camarades de l'Alliance coréenne organisent des manifestations avec distribution de tracts tous les jours, matin et soir, depuis dix jours. Mme Lee Mi-sook, ancienne secrétaire générale du Forum coréen international, commencera aussi bientôt une grève de la faim en prison. Pour sa part, Mme Kim Hye-young ne peut pas mener une grève de faim à cause de sa maladie, souffrant d'un cancer de la thyroïde... Pourtant, la maison de détention ne lui permet toujours pas de suivre un traitement approprié à l'hôpital.

Hier [20 octobre 2015], a eu lieu l'audience publique de trois de nos camarades, sans résultat par rapport au précédent jugement début septembre. Le rapport d'accusation est long de 40 000 pages. Le combat sera difficile, mais nous ne lâcherons rien !



Ji Young-chul et, en bas, ses enfants
Ji Young-chul et, en bas, ses enfants

Ji Young-chul et, en bas, ses enfants

Manifestation le 20 octobre devant le commissariat de Jongro, à Séoul

Manifestation le 20 octobre devant le commissariat de Jongro, à Séoul

Kim Joong-hee, l'épouse de Ji Young-chul

Kim Joong-hee, l'épouse de Ji Young-chul

Non à la chasse à l'homme en Corée du Sud ! Libération des militants de l'Alliance coréenne emprisonnés !
Non à la chasse à l'homme en Corée du Sud ! Libération des militants de l'Alliance coréenne emprisonnés !
Non à la chasse à l'homme en Corée du Sud ! Libération des militants de l'Alliance coréenne emprisonnés !

Source :

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19 octobre 2015 1 19 /10 /octobre /2015 23:20

Le 7 octobre 2015, le gouvernement conservateur sud-coréen a annoncé son intention de revenir à des manuels d'histoire d'Etat dans les établissements secondaires, suivant la pratique en vigueur entre 1973 et 2009 - et non plus à un choix entre des manuels édités par huit maisons d'édition habilitées par un comité d'experts. L'opposition démocrate est vent debout contre cette tentative de la droite sud-coréenne d'imposer sa vision de l'histoire - de fait, les conservateurs ont clairement annoncé la couleur : mettre fin à la conception selon eux "gauchiste", trop favorable à la Corée du Nord, enseignée dans les actuels manuels scolaires, et réhabiliter le régime militaire, et tout particulièrement celui très autoritaire établi par le général Park Chung-hee, père de l'actuelle présidente Park Geun-hye, en mettant notamment l'accent sur ses réalisations économiques.

Manuels scolaires : les conservateurs sud-coréens veulent imposer leur vision de l'histoire

Imposer une vision unique de l'histoire, notamment dans l'enseignement, a toujours été une préoccupation des régimes autoritaires dans leur volonté de révisionnisme historique : en voie de fascisation, la Corée du Sud de Mme Park Geun-hye a donc franchi allègrement ce pas en annonçant que, à compter de 2017, une conception selon elle "correcte" et "équilibrée" de l'histoire serait enseignée dans le secondaire à travers des manuels d'Etat dûment estampillés par les autorités gouvernementales.

Experts dans l'art de faire passer des réformes antidémocratiques pour une défense des libertés, ayant déjà interdit le principal parti de gauche au nom d'une soi-disant défense de la démocratie mais en forgeant un procès de toutes pièces, les conservateurs sud-coréens, héritiers du régime militaire à l'origine de milliers d'assassinats politiques en Corée du Sud pendant trente ans, osent prétendre que la vérité naîtra de la fin du débat contradictoire et de l'étouffement des voix discordantes.

Pour justifier sa contre-réforme, la droite conservatrice invoque une demande de l'opinion publique ; en fait, le parti Saenuri au pouvoir a lui-même créé de toutes pièces un mouvement d'opinion réactionnaire pour le révisionnisme historique dans les manuels scolaires.

L'opposition démocrate sud-coréenne réunie au sein de l'Alliance de la nouvelle politique pour la démocratie a exigé l'établissement d'un vrai consensus sur cette question, et demandé la constitution d'une commission d'enquête parlementaire.

Des inquiétudes se sont exprimées non seulement en Corée du Sud, mais aussi à l'étranger, notamment au Japon où les opposants au révisionnisme historique du gouvernement Shinzo Abe craignent non seulement une exacerbation des tensions Corée-Japon, mais aussi que les autorités de droite japonaises prennent prétexte du précédent sud-coréen pour aller plus loin encore dans leur dérive autoritaire. L'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) soutient les démocrates opposés à la réforme des manuels scolaires, que veut une nouvelle fois imposer au forceps une administration conservatrice aux abois, affolée par la perspective de pouvoir être désavouée aux législatives du printemps 2016 et à l'élection présidentielle de décembre 2017.

Principales sources :

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7 octobre 2015 3 07 /10 /octobre /2015 23:45

L'étudiant sud-coréen Joo Won-moon, qui dispose d'un statut de résident permanent aux Etats-Unis et était entré illégalement en République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) il y a six mois dans l'espoir de créer un événement de nature à améliorer les relations Nord-Sud, a été rapatrié au Sud le 5 octobre, via Panmunjom, après avoir fait son autocritique le 25 septembre lors d'une conférence de presse télévisée. Alors qu'il est exposé à des poursuites judiciaires en application de la loi de sécurité nationale sud-coréenne qui interdit aux ressortissants du Sud tout contact non autorisé avec le Nord, l'Association d'amitié franco-coréenne appelle à ne pas faire application de l'inique "loi de sécurité nationale" qui, dans le cas présent, apporterait des entraves à la liberté de circulation sans commune mesure avec le Nord - alors que les autorités nord-coréennes n'ont même pas attrait Joo Won-moon devant les tribunaux pour entrée et séjour illégals.

Rapatrié en Corée du Sud, Joo Won-moon ne doit pas être poursuivi !

C'est un Joo Won-moon qui est apparu souriant et détendu, comme toujours, lors de son rapatriement du Nord de la Corée vers le Sud le 5 octobre 2015. Mais il n'a pas dit un mot dans les vidéos alors diffusées par les médias internationaux.

Car l'étudiant new-yorkais - qui n'a pas été condamné par les tribunaux nord-coréens pour son entrée illégale au Nord de la péninsule - risque, en effet, bien plus gros avec la justice du Sud, vindicative à l'encontre de n'importe lequel de ses concitoyens qui a enfreint la loi de sécurité nationale interdisant tout contact avec le Nord.

Comme l'a indiqué l'agence américaine AP, Joo Won-moon a été interrogé par les services de renseignement sud-coréens le jour même de sa libération, tandis qu'un des responsables a confirmé, sous couvert d'anonymat, qu'une condamnation était envisagée.

L'AAFC appelle le gouvernement américain, si prompt à condamner les droits de l'homme au Nord de la péninsule, à faire preuve de la même rigueur vis-à-vis du Sud et de la loi de sécurité nationale unanimement condamnée par les ONG de défense des droits de l'homme, d'autant plus que Joo Won-moon et sa famille ont le statut de résident permanent sur le territoire américain.

Sources :

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24 août 2015 1 24 /08 /août /2015 11:07

Les négociations marathon qui se déroulent depuis trois jours entre les deux Corée dans le village frontalier de Panmunjom ont ostensiblement pour origine un malheureux incident : le 4 août 2015, deux soldats sud-coréens ont sauté sur des mines dans la DMZ et ont été gravement estropiés. Après plusieurs jours de flottement, les autorités sud-coréennes avaient ensuite dénoncé une "attaque" nord-coréenne - ce qu'avait démenti Pyongyang - et, à titre de représailles, relancé la propagande anti-Nord diffusée par les hauts parleurs situés le long de la DMZ. Un des points d'achoppement des discussions en cours est que le Nord exige la fin de la propagande par haut-parleur, quand le Sud réclame des excuses du Nord. Si les négociateurs tentent apparemment de sortir par le haut de l'impasse en élargissant le champ des discussions, il est utile de revenir sur l'incident des mines, qui, à bien des égards, rappelle le dramatique naufrage du Cheonan, au printemps 2010 dans lequel 46 marins sud-coréens ont trouvé la mort, entraînant la rupture des échanges intercoréens (à l'exception notable de ceux de la zone économique spéciale de Kaesong) après la mise en place, par Séoul, des mesures dites du 24 mai (2010). En effet, en 2010 déjà l'opinion publique sud-coréenne avait été fortement émue suite à un accident attribué tardivement au Nord, comme récemment pour l'affaire des mines, avec le même démenti vigoureux de Pyongyang, et les mêmes doutes de nombreux experts sur la fiabilité de la thèse officielle sud-coréenne et américaine - laquelle permet opportunément, en 2015 comme en 2010, de ressouder les Sud-Coréens contre la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), autour d'un exécutif conservateur sud-coréen à la cote de popularité en baisse et dont une part importante de la base électorale est viscéralement hostile à la RPDC. Nous traduisons ci-après de l'anglais un article paru en exclusivité le 21 août 2015 dans New Eastern Outlook, qui avait déjà été mis en lien sur notre page Facebook : l'expert russe Konstantin Asmolov, chercheur à l'Institut d'études orientales de l'Académie des sciences de Russie, y analyse de manière approfondie "l'affaire des mines", sous le titre "A propos des explosions récentes dans la zone démilitarisée et de la dégradation des tensions intercoréennes". 

L'analyse du chercheur russe Konstantin Asmolov, à propos de l'affaire des mines à l'origine de l'actuel bras-de-fer intercoréen

Le 4 août 2015 un incident est intervenu au Sud de la zone démilitarisée (DMZ), qui sépare la République populaire démocratique de Corée et la Corée du Sud le long du 38e parallèle.

Selon l'agence de presse Yonhap, deux soldats sud-coréens ont été gravement blessés à la jambe pendant une patrouille de routine, en raison d'une explosion survenue à 7h40 du matin heure locale (1h40 heure de Moscou) dans le district d'Incheon, de la province de Gyeonggi, près de la ville de Paju. Un représentant local du commandement militaire a déclaré à l'agence qu'"une implication de la République populaire démocratique de Corée dans cet incident était improbable". Il a ajouté qu'une mine antipersonnelle était la cause la plus probable de l'explosion.

Kim Min-seok, porte-parole du ministère de la Défense nationale, a exprimé ses regrets à propos de l'incident et observé que la vie des victimes n'était plus en danger grâce à une réaction rapide. En outre, le compte rendu de Yonhap avait aussitôt relevé que l'endroit où l'incident était survenu était "jonché" de mines, pour la plupart enfouies au moment de la guerre de Corée (1950-1953). Les cartes des champs de mines n'aident pas vraiment à les localiser précisément, car la plupart ont été déplacées par la pluie, le vent et l'érosion des sols.

Il ne semblait s'agir que d'un incident banal. Pourtant, dès le 7 août, un militaire de haut rang du commandement sud-coréen, Jung Ho-sub, plaçait ses unités en alerte pour pouvoir répondre à de futures provocations nord-coréennes et bientôt la question des provocations nord-coréennes devint le principal sujet de discussions dans la ville.

Pendant ce temps, les blessures subies par le personnel militaire pendant l'incident se sont révélées bien plus graves qu'initialement envisagé. Les deux garde-frontières ont perdu leurs jambes, ce qui signifie qu'ils sont officiellement handicapés et éligibles à une pension à vie.  

Finalement, l'implication nord-coréenne a été officiellement annoncée le 10 août. Selon le général de brigade Ahn Young-ho, qui a conduit la commission d'enquête sur l'incident, "il est apparu qu'il s'agissait d'une mine antipersonnel (pour être précis, trois mines), enfermées dans une des boîtes en bois habituellement utilisées par l'armée nord-coréenne (...) L'ennemi a délibérément planté des mines pour infliger des dommages aux forces armées de la République de Corée", ainsi que pour faire obstacle aux prochains exercices militaires conjoints de la République de Corée et des Etats-Unis (Ulchi Freedom Guardian).

Selon les officiers militaires, les éléments trouvés sur place (des fragments de la boîte en bois qui aurait contenu les mines, trois ressorts et des traces d'une substance explosive, le trotyl) prouvent l'implication de la République populaire démocratique de Corée dans l'explosion. Et dès lors qu'il n'y avait pas de corrosion ou de rouille sur les fragments de mine il en a été conclu que la mine avait été installée récemment, sans doute fin juillet, dans la région de l'incident qui avait connu de fortes pluies et un épais brouillard. 

En tout cas il a été en même temps "découvert" qu'il n'y avait auparavant pas de mines dans la région où l'incident s'est produit, ce qui signifie qu'il ne s'agissait pas de vieilles mines plantées il y a longtemps, mais de mines récentes, enfouies par des agents provocateurs nord-coréens. Il est apparu que le brouillard était si dense en juillet que des agents de renseignement nord-coréens auraient pu pénétrer sur le territoire de la République de Corée et planté ces mines à 440 mètres de la frontière. Ahn Young-ho a souligné que des incidents similaires étaient survenus dans les années 1960.  

A ce stade une question se pose : qu'en est-il du système de garde-frontière sud-coréen assisté par ordinateur tant vanté ? Il faudrait alors admettre qu'il est possible de pénétrer dans la zone démilitarisée. Au moins deux incidents ont eu lieu récemment, quand des soldats nord-coréens ayant fait défection ont franchi avec succès tous les obstacles posés à la frontière. Dans un des cas, le soldat n'a été remarqué qu'après avoir frappé à la porte d'un point de contrôle sud-coréen. C'est pourquoi il est difficile de dire si les commandos nord-coréens sont si habiles, ou si les garde-frontières sud-coréens ont échoué à accomplir leur mission. En outre, tout en formulant ses excuses, le ministère de la Défense nationale (MDN) a admis que les garde-frontières n'avaient pas de détecteur de mines, ce qui doit être considéré comme une grave négligence. 

Il semble à l'auteur de cet article que les deux déclarations se contredisent de manière à soulever un doute. D'un côté, les représentants du commandement local ont confirmé la non-implication de la République populaire démocratique de Corée dans cet incident. Dans ce cas, il est raisonnable d'affirmer que cette conclusion se fondait sur les éléments matériels de l'enquête menée initialement sur le lieu de l'incident. Or près d'une semaine plus tard de nouvelles preuves sont apparues qui, pour une raison ou une autre, n'avaient pas été découvertes immédiatement. Mais si des restes de l'enveloppe extérieure de la mine et d'autres parties avaient été découvertes d'emblée, il apparaît alors quelque peu étrange que cette version n'ait pas été diffusée tout de suite, surtout si les mines des deux pays sont si différentes. 

Il est aussi important de relever que le lieu de l'incident a attiré l'attention à plusieurs reprises. Si l'on revient en 2010, après les incidents de l'île Yeonpyeong, au paroxysme de la flambée de tensions entre les deux Corée, un canon s'est "accidentellement" embrasé de lui-même. Son obus n'a pas atteint le territoire nord-coréen et il n'y a donc pas eu d'échanges de tirs. Et des incidents difficiles à expliquer dans lesquels chaque partie reproche à l'autre d'avoir "bombardé son territoire" sont survenus à plusieurs reprises ces jours-ci. En outre, les "défenseurs sud-coréens des droits de l'homme" ont envoyé leurs ballons chargés de tracts de propagande depuis cette zone.

Néanmoins, une enquête menée par le commandement des troupes des Nations Unies (la commission d'enquête comprenait des représentants des Etats-Unis, de la République de Corée, de la Nouvelle-Zélande et de la Colombie) est arrivée aux mêmes conclusions que leurs homologues en Corée du Sud, ce qui a été qualifié de signal pour "aller de l'avant". Les commandants en chef du comité conjoint des forces armées de la République de Corée ont qualifié l'enfouissement de mines par la Corée du Nord dans la DMZ de rupture ouverte du cessez-le-feu et des accords de réconciliation. Le Sud a exigé que le Nord reconnaisse sa responsabilité dans l'incident et présente ses excuses. Le commandement des Nations Unies a dénigré les actions supposées du Nord et ordonné une rencontre de toutes les parties concernées au niveau des généraux. Selon la déclaration du commandement des Nations Unies, "en ayant planté des mines antipersonnel enfermées dans des boîtes en bois le long de la route où patrouillent les soldats sud-coréens dans la partie Sud de la DMZ, l'armée nord-coréenne a violé les paragrahes 6, 7 et 8 de l'accord de cessez-le-feu".

Tant le parti au pouvoir que l'opposition sud-coréenne ont dénoncé les actions supposées de la République populaire démocratique de Corée. Le Secrétaire Général des Nations Unies Ban Ki-moon a appelé le Nord à cesser immédiatement ses provocations et à engager un dialogue. Le secrétaire d'Etat britannique pour les Affaires étrangères et le Commonwealth Phillip Hammondalso a vilipendé les actions présumées de la République populaire démocratique de Corée. En ce qui concerne la Présidente de la République de Corée (qui n'a jamais clairement mis en doute les résultats de l'enquête), elle a pris une position rigide, mais sans essayer de "brûler les ponts" comme Lee Myung-bak l'avait fait avant elle.  "Notre gouvernement continuera d'exercer une pression sur la Corée du Nord selon une logique de stricte dissuasion, et poursuivra parallèlement ses efforts pour reprendre le dialogue intercoréen". 

Le 10 août, il a été pris la décision de reprendre les émissions de propagande anti-Corée du Nord en utilisant les hauts parleurs installés le long de la frontière et de placer en état d'alerte les troupes de la République de Corée stationnées dans la zone démilitarisée. Le ministre de la Défense de la République de Corée Han Min-koo a déclaré que ce n'était qu'un début et que d'autres mesures de rétorsion étaient envisagées. Quand il a été interrogé s'il existait des plans pour attaquer les postes frontières nord-coréens situés de l'autre côté de la zone démilitarisée, il a répondu que la décision n'avait pas encore été prise. Selon certaines sources, la République de Corée aurait même souhaité mener une contre-attaque, mais les Etats-Unis l'aurait désapprouvée.

S'agissant des grands médias sud-coréens, ils ont déjà identifié le Nord-Coréen qui aurait manigancé l'incident. Ils ont pointé du doigt le Général Kim Yong-chol, récemment promu. En fait, il a été promu avant l'incident, mais c'est le général Kim qui avait déjà été accusé d'être derrière l'incident de l'île Yeonpyeong et le naufrage de la corvette sud-coréenne Cheonan. Les Sudistes croient qu'il est en charge du renseignement militaire et qu'il a sur la conscience toutes les provocations de ce genre.

Pour conclure, les lecteurs doivent avoir conscience de deux autres aspects de la situation, qui ont trait à la politique étrangère. D'abord, l'incident est survenu juste avant les exercices militaires conjoints prévus entre les armées américaine et sud-coréenne. Chaque année la Corée du Nord déclare que ces exercices sont menés en préparation d'une invasion, et elle reçoit la même réponse du Sud que ce sont leurs affaires et strictement leur droit souverain. L'incident récent a "démoli les allégations nord-coréennes" : maintenant tout un chacun peut voir qui est le vrai provocateur.

Et plus largement il doit être noté que, ayant repoussé une attaque menée par Park Geun-hye dans le cadre de sa politique de "lutte contre la corruption", les forces conservatrices de la République de Corée tentent de se venger. Ce qui inclut la nomination d'un nouveau Premier ministre, une tentative pour limiter le pouvoir du Président, que nous avons analysée dans un de nos récents articles, et tout une série de décisions controversées rendues par la Cour constitutionnelle.

En tout cas, pour l'auteur de cet article tant les provocations du Nord que celles du Sud représentent en quelque sorte "beaucoup de bruit pour rien", car il se passe quelque chose de beaucoup plus important. Qu'on en juge : au moment même où était rendue publique la nouvelle de l'implication supposée de la Corée du Nord, les deux victimes de l'accident devenaient handicapées et éligibles à une pension à vie. Dans ce contexte, indépendamment de ce qui est effectivement arrivé, les Sud-Coréens épouseraient plus facilement la version officielle de la provocation de la Corée du Nord  comme étant socialement plus acceptable que la méconnaissance des règles de sécurité (les soldats n'avaient pas de détecteur de mines).

Et effectivement il y a des ressemblances avec l'escalade des tensions engendrée par le naufrage de la corvette Cheonan il y a cinq ans, quand il a été décidé que cet événement dramatique pourrait être utilisé à des fins politiques. Alors qu'initialement, après les faits, la Corée du Nord ne figurait pas parmi les suspects, des preuves hautement douteuses (une torpille rouillée de manière surprenante) ont ensuite été "découvertes".  

Konstantin Asmolov, docteur en histoire, chercheur confirmé de l'Institut d'études orientales de l'Académie des sciences de Russie. Article publié en exclusivisité par le magazine en ligne New Eastern Outlook.

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18 août 2015 2 18 /08 /août /2015 17:01

A l'occasion du 70e anniversaire de la libération de la Corée, le député sud-coréen Moon Jae-in a tenu une conférence de presse à l'Assemblée nationale le 16 août 2015. L'adversaire malheureux de la Présidente Park Geun-hye lors de l'élection présidentielle de décembre 2012, et qui dirige l’Alliance de la nouvelle politique pour la démocratie (ANPD, démocrate) depuis février 2015, a prôné une autre politique intercoréenne, en mettant l'accent sur le renforcement des échanges économiques avec la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord).

Moon Jae-in, le 16 août 2015 à l'Assemblée nationale

Moon Jae-in, le 16 août 2015 à l'Assemblée nationale

S'inscrivant dans la droite ligne des administrations démocrates au pouvoir à Séoul entre 1998 et 2008, Moon Jae-in a jugé nécessaire de renforcer les échanges intercoréens pour préparer la réunification, tout particulièrement dans le domaine économique :

Nous devons dresser une nouvelle carte économique de la péninsule coréenne en étendant le territoire de nos activités économiques vers la Corée du Nord et le continent (...) Si nous arrivons d’abord à établir une communauté économique, même si nous ne pouvons pas (tout de suite) réaliser l’unification des deux Corées, la taille de notre économie pourra s’accroître avec un marché de 80 millions d’habitants et un revenu par tête de 30.000 dollars grâce à l’entrée au Nord de nos entreprises.

En mettant en avant les bénéfices que chaque partie de la Corée retirerait d'un accroissement des échanges économiques, Moon Jae-in a pris le contrepied des administrations conservatrices (au pouvoir à Séoul depuis 2008) qui, tout en privilégiant les aspects sécuritaires dans les relations Nord-Sud, ont bloqué l'essor du commerce intercoréen. Pour Moon Jae-in, la mise en place d'une communauté économique intercoréenne accroîtrait le PIB sud-coréen de 0,8 % par an jusqu’en 2050, générant 50.000 emplois nouveaux par an.

Etablies unilatéralement par le Sud en 2010 après le dramatique naufrage de la corvette "Cheonan" (dont la cause est une torpille nord-coréenne selon Séoul, ce que nie farouchement Pyongyang, les preuves avancées par la Corée du Sud étant très contestées par de nombreux experts), les mesures dites du 24 mai (2010) interdisent pour l'essentiel les échanges économiques intercoréens, sauf dans la zone économique spéciale nord-coréenne de Kaesong. Moon Jae-in préconise la levée de ces mesures, ce que refusent les autorités conservatrices sud-coréennes.

Moon Jae-in a également réitéré la position démocrate traditionnelle en faveur des échanges et du dialogue Nord-Sud : il a proposé une réunion 2+2 (République de Corée - RPDC d'une part, RPDC - Etats-Unis d'autre part) en vue d'une reprise rapide des pourparlers à six. Le chef de l'opposition sud-coréenne a jugé nécessaire l'intensification des échanges, officiels ou officieux, Nord-Sud.

L'AAFC soutient pleinement les propositions de Moon Jae-in, alors que la politique de fermeté suivie par les administrations conservatrices sud-coréennes de Lee Myung-bak et de Park Geun-hye depuis 2008 a fait la preuve de son inefficacité. Cette politique a considérablement réduit les perspectives d'investissement au Nord des entreprises sud-coréennes, accru les tensions dans la péninsule coréenne sans pouvoir entraver, comme prétendaient naguère y parvenir les oracles de la droite sud-coréenne, les progrès des programmes nucléaires et balistiques nord-coréens.

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12 août 2015 3 12 /08 /août /2015 22:47

Le 4 août 2015, deux soldats sud-coréens ont été estropiés dans la zone démilitarisée (DMZ) située entre les deux Etats coréens après avoir été blessés par l'explosion de trois mines antipersonnel. Si la République de Corée (Corée du Sud) a aussitôt accusé la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) et décidé, en représailles à ce qu'elle a qualifié d' "attaque", d' "intensifier" la guerre psychologique en lançant à nouveau des messages de propagande hostiles à la RPDC par les haut-parleurs situés le long de la DMZ, il faut garder la tête froide : en l'absence d'enquête indépendante rien ne permet à ce stade d'accuser la RPD de Corée. En revanche, il est certain que les mines antipersonnel, lesquelles sont d'abord un legs monstrueux de la guerre de Corée (1950-1953), créent des dommages atroces : l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) appelle ainsi à ce que le refus des mines antipersonnel soit un combat prioritaire pour toutes celles et tous ceux qui sont sincèrement attachés à la paix dans la péninsule coréenne.

Dans la terrible attaque qui a gravement estropié deux soldats sud-coréens, la vigueur de la réaction des autorités sud-coréennes, parlant désormais de mesures de représailles, contraste avec leur silence assourdissant pendant près d'une semaine, puis avec l'absence tout d'abord  de réponse coordonnée entre les différentes administrations. En effet, ce n'est que le 10 août que le ministère de la Défense sud-coréen a rendu compte de cet incident, et le 11 août, soit une semaine après les faits, que le porte-parole de la présidence sud-coréenne, Min Kyung-wook, a pointé la responsabilité selon lui de la Corée du Nord :

Il s'agit clairement d'une provocation dans laquelle des forces nord-coréennes ont franchi illégalement la ligne de démarcation militaire et planté une mine dans une boîte en bois (...) Cette provocation de la Corée du Nord est une violation flagrante de l'accord d'armistice et de l'accord de non-agression entre le Sud et le Nord, et nous demandons avec force à la Corée du Nord de s'excuser pour cette provocation et d'en punir les responsables.

Mais il serait naïf de prendre pour argent comptant ces accusations bien tardives, alors que la République de Corée a une longue réputation d'opacité sur les questions touchant la défense nationale et est prompte à accuser le Nord pour se dédouaner de ses propres défaillances dans la protection de ses soldats - car quelle que soit l'origine des mines, il y a eu clairement des insuffisances dans la protection des militaires sud-coréens face à un problème connu, celui des mines antipersonnel, encore bien trop nombreuses dans la DMZ depuis la fin de la guerre de Corée.

Si les médias nord-coréens n'avaient pas encore réagi publiquement à l'heure où nous rédigeons ces lignes, il est à attendre que les autorités nord-coréennes s'offusquent d'une opération qu'elles dénoncent comme montée par la Corée du Sud elle-même, à quelques jours de l'anniversaire de la libération de la Corée. Dans ce contexte, la prudence s'impose : seule une enquête internationale indépendante, associant toutes les parties, permettra de déterminer la nature et l'origine des mines ayant estropié les deux soldats sud-coréens, et serait un préalable nécessaire pour prendre ensuite les mesures indispensables au déminage de la péninsule coréenne, qui n'a causé que trop de souffrances depuis la guerre de Corée.

Au regard de l'absolue nécessité de supprimer les mines antipersonnel, l'Association d'amitié franco-coréenne considère urgent de créer un climat de confiance et de détente entre toutes les parties, et non de provoquer une escalade dans les tensions - comme s'y essaient aujourd'hui les faucons au pouvoir à Séoul pour tenter de calmer une opinion publique légitimement indignée face à ce qui apparaît comme un nouveau scandale de sécurité, après les dramatiques naufrages du "Cheonan" et du "Sewol".

Sources :

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15 juillet 2015 3 15 /07 /juillet /2015 19:45

Le 15 juillet 2015 une nouvelle descente de police a été opérée dans les locaux de l'Alliance coréenne, une ONG proche de la tendance Corea 21 du Parti progressiste unifié (PPU) - dissous en décembre 2014 dans des conditions inacceptables au regard des principes démocratiques de base. Après la dissolution du PPU les militants de Corea 21 avaient déjà été les premiers visés par la répression gouvernementale contre les forces progressistes. Les motifs invoqués par la police étant anciens, rien ne justifiait le nouveau coup de poing de ce 15 juillet - si ce n'est la nécessité pour la présidente sud-coréenne Mme Park Geun-hye de montrer qu'elle ne tolèrerait pas l'opposition de gauche, en instaurant un climat de terreur visant à empêcher ses militants de toute action politique. Il est temps que les gouvernements occidentaux cessent de fermer les yeux sur la dérive autoritaire qui s'aggrave chaque jour davantage en Corée du Sud.

Saisie de livres, de disques durs et d'autres documents au siège de l'Alliance coréenne

Saisie de livres, de disques durs et d'autres documents au siège de l'Alliance coréenne

Une descente de police a eu lieu le 15 juillet 2015 au siège de l'Alliance coréenne et dans cinq autres locaux liés à l'organisation (notamment ses trois imprimeries), à partir de 5 heures du matin heure locale selon les informations qui ont été transmises à l'AAFC.

 

Les accusations ne sont pas nouvelles : violation de la "loi de sécurité nationale", qui interdit tout contact entre des Sud-Coréens et la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord). En l'occurrence, une militante - Mme Hwang Hye Ro - a été indirectement citée (sans être nommée dans les premiers articles de presse rendant compte du raid opéré le 15 juillet à Séoul) et est tout particulièrement visée : elle avait été présente aux obsèques du dirigeant nord-coréen Kim Jong-il en décembre 2011. Une autre cible, également non directement citée, est l'avocat Jang Kyung-uk, coupable d'avoir participé à une conférence en Allemagne, fin 2013, pour un traité de paix en Corée, où avaient aussi été présents des Nord-Coréens.

 

Une chasse à l'homme a été lancée contre 10 militants de l'Alliance coréenne, dont 8 résident en Corée et 2 à l'étranger. Une personne, Mme Kang, a été arrêtée à son domicile. Neuf autres personnes sont toujours recherchées. Il appartient aux gouvernements étrangers, et d'abord aux gouvernements occidentaux, s'ils sont cohérents avec les principes démocratiques qu'ils entendent défendre, de ne pas donner suite aux mandats d'arrêt lancés par les autorités sud-coréennes, sur la base d'une loi - la loi de sécurité nationale - qui est une violation flagrante de la liberté d'expression. Ainsi que l'a rappelé Byun Jeong-pil, responsable d'Amnesty International en Corée dans un entretien à NK News, "il y a de nombreux cas où cette loi a été appliquée de manière arbitraire, et l'article 7 doit être modifié". L'article 7 a servi encore récemment, en janvier 2015, à l'expulsion de Corée du Sud d'une Coréenne américaine, Shin Eun-mi, dont le crime était de ne pas dépeindre la Corée du Nord comme l'enfer, l'image que s'évertuent à donner du Nord les autorités sud-coréennes et leurs services de renseignement. C'est aussi au nom de la loi de sécurité nationale que le secrétaire général de l'AAFC a été interdit d'entrée en Corée du Sud en février 2015.

 

Mais pourquoi ce regain de violence contre l'Alliance coréenne, alors que les principaux faits incriminés - datant de fin 2011 et fin 2013 - ne sont pas nouveaux ? En fait, le principal grief à l'encontre des membres de l'Alliance coréenne est de continuer à militer pour la paix et la démocratie (comme le souligne le site NK News, l'objectif principal de l'Alliance coréenne est la réunification pacifique de la Corée, et elle avait récemment dénoncé la perspective de déploiement du dispositif américain antimissile THAAD en Corée du Sud), en critiquant ouvertement l'administration conservatrice sud-coréenne de Mme Park Geun-hye : cette dernière, prompte à assimiler toute critique comme une allégeance à la Corée du Nord, veut faire un exemple. Dans ce contexte, l'Alliance coréenne peut lui apparaître comme la cible parfaite, puisque certains de ses membres ont effectivement eu des contacts avec la Corée du Nord. Et elle juge certainement qu'un procès truqué - avec des preuves fabriquées en tant que de besoin, comme dans le cas de l'ancien député Lee Seok-ki - lui apportera les coudées franches, grâce au soutien d'une justice aux ordres.

 

La descente de police est aussi une contre-attaque à l'annonce, faite la veille par l'Alliance coréenne, qu'elle porterait plainte pour les violences commises par la police à son encontre, l'Alliance coréenne observant qu'elle a mené des actions pacifiquement et dans le cadre de la loi sud-coréenne.

 

C'est bien aujourd'hui l'instauration d'un règne de la terreur qui menace tous les militants de gauche sud-coréens, ce qui implique plus que jamais d'être solidaire de tous ceux qui, en République de Corée, militent pour la paix et la démocratie, notamment en s'engageant dans le Comité international pour les libertés démocratiques en Corée du Sud.

 

Sources :

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