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12 décembre 2015 6 12 /12 /décembre /2015 22:32

Les discussions intercoréennes, menées au niveau des vice-ministres, se sont conclues sans aucun accord le samedi 12 décembre 2015, après deux jours de discussions à Kaesong. Aucune date n'a été fixée pour une réunion ultérieure. L'agence de presse KCNA de la RPD de Corée a blâmé la partie sud-coréenne pour l'échec du dialogue, en indiquant que celle-ci n'avait pas voulu aborder certaines questions clés - comme la reprise du tourisme intercoréen dans les monts Kumgang, au Nord, interrompu depuis juillet 2008 - malgré ses efforts, tout en déplorant des exigences "déraisonnables" du Sud (dans une allusion probable à la demande d'excuses pour le naufrage du Cheonan en 2010). Mais quelle est la vraie raison de cet énième échec de la tentative de reprise des discussions Nord-Sud, qui se sont fortement dégradées depuis le retour au pouvoir des conservateurs à Séoul en 2008 ?

Depuis 2008, toutes les tentatives pour relancer le tourisme intercoréen dans les monts Kumgang, qui était géré par le conglomérat sud-coréen Hyundai Asan, se sont heurtées à une fin de non-recevoir des autorités sud-coréennes. Les seules réalisations tangibles - acceptées, voire initiées par le Sud - ont été la reprise des réunions de familles séparées de part et d'autre du trente-huitième parallèle.

Ces blocages de la partie Sud peuvent s'expliquer de manière très simple : depuis 2008, les conservateurs sud-coréens revenus aux affaires à Séoul misent sur un effondrement - qu'ils espèrent imminent - de la Corée du Nord. La présidente sud-coréenne Park Geun-hye l'a encore rappelé récemment, en appelant les membres d'un organisme qu'elle a mis en place à se préparer à une réunification susceptible de survenir, selon elle, du jour au lendemain : il ne saurait y avoir aveu plus patent de l'espoir d'un effondrement de la RPD de Corée, qui invalide donc toute politique de coopération Nord-Sud à moyen et long termes.

Dans cette perspective, la reprise du tourisme intercoréen des Monts Kumgang, en apportant des capitaux au Nord, est mal vue de Séoul, car non seulement elle conduirait les visiteurs sud-coréens à sortir des clichés d'un Nord hostile savamment entretenus par la propagande de Séoul, mais elle contribuerait à améliorer la situation économique de la RPD de Corée, et donc à contrarier l'objectif des autorités sud-coréennes de favoriser un changement de régime, ou à tout le moins une instabilité économique, voire politique, au Nord.

Les réunions de familles séparées ne sont pas une exception à ce schéma général de pensée de la droite sud-coréenne : les personnes concernées sont âgées, et constituent le coeur de l'électorat conservateur. Favoriser de telles rencontres avant que les témoins ne disparaissent est payant dans l'opinion publique sud-coréenne à court terme, sans être contradictoire avec l'objectif de Séoul d'un changement de régime au Nord à une date rapprochée - lequel constitue l'alpha et l'oméga de la politique intercoréenne de la droite sud-coréenne, de Lee Hoi-chang (candidat malheureux des conservateurs aux élections présidentielles de 1997 et 2002) à Lee Myung-bak et Park Geun-hye. Seule la méthode a changé : alors que Lee Hoi-chang était ouvertement hostile à tout dialogue avec le Nord (ce qui a pesé dans ses échecs électoraux successifs), Lee Myung-bak (élu président en 2007) et Park Geun-hye (présidente depuis 2012), cherchent à masquer leurs intentions pour ne pas heurter de front une opinion publique majoritairement attachée au développement des relations Nord-Sud, tout en créant les conditions de la rupture. Ainsi, l'un et l'autre exigent des excuses de la RPD de Corée pour le naufrage du Cheonan en mars 2010, dont on sait qu'il n'était nullement imputable au Nord, les conservateurs sud-coréens ont fait croire, comme en août dernier, que des mines auraient été posées par des Nord-Coréens du côté Sud de la DMZ - lire http://www.amitiefrancecoree.org/tag/naufrage%20du%20%22cheonan%22/.  

Sources :

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26 novembre 2015 4 26 /11 /novembre /2015 23:47

Le jeudi 26 novembre 2015, la République de Corée (Corée du Sud) et la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) ont tenu des discussions préliminaires dans le village frontalier de Panmunjeom. Cette rencontre s'inscrit dans la continuité de l'accord intercoréen d'août dernier, conclu après une forte montée des tensions, et qui a permis de nouvelles réunions de familles séparées en octobre. Les deux parties ont convenu d'une nouvelle rencontre, au niveau des vice-ministres, le 11 décembre 2015, dans la zone industrielle de Kaesong, au Nord de la péninsule, pour discuter des questions relatives à l'amélioration des relations bilatérales. Si l'AAFC se félicite du retour au dialogue, celui-ci reste néanmoins fragile.

Vers une reprise durable du dialogue intercoréen ?

Il y a deux façons d'envisager le cours des relations intercoréennes : comme pour les cycles économiques, des tendances de moyen-long termes, et des variations à plus court terme. Si les relations Nord-Sud se sont sérieusement dégradées depuis le retour au pouvoir des conservateurs à Séoul en 2008, des tentatives de renouer le dialogue sont actuellement en cours.

Les divergences restent cependant importantes : si peu - voire rien - n'a filtré des échanges intercoréens lors de la rencontre de travail qui s'est tenue à Panmunjeom le 26 novembre, les positons de chaque partie sont connues : le Nord plaide notamment pour la levée des sanctions du 24 mai, prises par la Corée du Sud deux mois après le naufrage de la corvette Cheonan le 26 mars 2010 dans laquelle l'implication du Nord manque de preuves tangibles, le Sud exige pour sa part des excuses du Nord à ce sujet. Le Nord appelle à la reprise du tourisme intercoréen dans les monts Kumgang, suspendu en 2008. Enfin, le Sud met plus particulièrement l'accent sur les réunions de familles séparées. Il semblerait sinon que le nucléaire nord-coréen ne soit plus considéré comme un préalable au dialogue par le Sud.

Si certains échanges intercoréens - de personnes et de biens - ont été autorisés par le Sud dans le cadre néanmoins des mesures du 24 mai, et que la RPD de Corée s'est abstenue récemment de toute initiative qui aurait pu conduire à une nouvelle condamnation internationale (lancement d'un satellite, essai nucléaire... malgré des annonces médiatiques récurrentes et jamais vérifiées), les divergences restent réelles entre les deux parties. C'est pourquoi, avant d'envisager une amélioration des échanges, discuter des positions respectives de chacun pour trouver un terrain d'entente semble, dans l'immédiat, un préalable indispensable, qui figure du reste au programme de la rencontre au niveau des vice-ministres prévue le 11 décembre 2015.

Sources :

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20 novembre 2015 5 20 /11 /novembre /2015 07:54

Un dialogue intercoréen au niveau de "discussions de travail" se tiendra à Panmunjeom, dans la Maison de la Réunification (Thongil), le 26 novembre 2015. Cette reprise des discussions Nord-Sud, consécutive à l'accord entre les deux parties coréennes le 25 août dernier qui a conduit à de nouvelles réunions de familles séparées en octobre, traduit une volonté de renouer le dialogue de part et d'autre du trente-huitième parallèle.

Le Comité pour la réunification pacifique de la Corée (CRPC) de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) a annoncé le 20 novembre 2015, dans un communiqué publié par l'agence de presse nord-coréenne KCNA, que des échanges intercoréens prenant la forme d'un dialogue de travail se tiendraient dans la zone démilitarisée le 26 novembre prochain. L'accord Nord-Sud du 25 août avait prévu la tenue de discussions au niveau gouvernemental dès que possible.

Chacune des deux parties coréennes cherche à s'attribuer le mérite de cette nouvelle rencontre, dont le contenu et les participants n'ont pas encore été précisés.

Côté Nord, des demandes réitérées à l'amélioration des relations intercoréennes sont la reprise du tourisme intercoréen dans les monts Kumgang, interrompu depuis la mort d'une touriste sud-coréenne qui avait pénétré dans une zone militaire nord-coréenne le 11 juillet 2008, et la levée des sanctions du 24 mai (2010), prises par le Sud à la suite du dramatique naufrage de la corvette Cheonan (46 morts), attribué par Séoul et Washington à la RPDC sur la base de "preuves" qui ne convainquent pas les experts internationaux indépendants ni a fortiori les services de renseignement occidentaux - qui ont cependant évité publiquement de mettre en cause l'allié sud-coréen.

Source :

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25 octobre 2015 7 25 /10 /octobre /2015 16:10

Suite à l'accord intercoréen conclu fin août 2015, de nouvelles réunions de familles séparées de part et d'autre du 38e parallèle ont actuellement lieu dans les monts Kumgang, au Nord de la péninsule : du 20 au 22 octobre, ce sont 399 Sud-Coréens et 140 Nord-Coréens qui ont retrouvé leurs proches, dont ils n'avaient plus aucunes nouvelles - toute communication (téléphone, mél, courrier...) étant impossible entre les deux Corée. Puis, du 24 au 26 octobre, de nouvelles retrouvailles chargées d'émotion ont lieu entre un deuxième groupe de 254 Sud-Coréens et 188 Nord-Coréens. Beaucoup de participants sont octogénaires, voire nonagénaires, parfois handicapés moteurs, et la rencontre avec ceux qu'ils aiment risque d'être la première - et la seule - depuis la division de la Corée et la guerre, il y a plus de 65 ans.

Oh In-se (83 ans) retrouve sa femme, Lee Sun-kyu (85 ans), le 20 octobre 2015 dans les monts Kumgang, avec au centre leur fils. Ils se sont séparés seulement quelques mois après leur mariage, à cause de la guerre, alors qu'elle était enceinte.

Oh In-se (83 ans) retrouve sa femme, Lee Sun-kyu (85 ans), le 20 octobre 2015 dans les monts Kumgang, avec au centre leur fils. Ils se sont séparés seulement quelques mois après leur mariage, à cause de la guerre, alors qu'elle était enceinte.

Oh In-se a chuchoté à sa femme Lee Sun-kyu "Assieds-toi près de moi".

"Nous retrouver comme cela après 65 ans ? C'est bon, je pense. Dès que j'aurai commencé de dire combien elle m'a manqué, ce sera sans fin...".

Vêtue d'une robe traditionnelle rouge-brun, Lee est timide.

Oh commence à s'excuser auprès de sa femme : "C'était la guerre... Je veux dire, je n'avais pas idée combien ce serait difficile".

Oh a du mal à finir sa phrase, peut-être parce qu'il se sent coupable d'avoir commencé une nouvelle vie, en se remariant, au Nord. Les larmes viennent aux yeux de Lee.

Pendant près d'une semaine, ce sont des centaines d'histoires tristes qui se disent au milieu de la joie de trop brèves retrouvailles, et d'échanges de cadeaux.

Oh Jang-gyun a 65 ans.

Il s'est incliné respectueusement devant son père, qui l'a enlacé. Le jeune Oh a pleuré : "J'ai essayé toute ma vie de vivre comme un fils qui a un père".

Ils ont serré leurs mains et se sont regardés dans les yeux. "Nous nous ressemblons", ont-ils dit en pleurs.

Oh Jang-gyun est né cinq mois après le départ de son père du village de Gadeok, dans le comté de Cheongwon de la province du Chungcheong du Nord, au centre de la Corée du Sud. Ses parents n'étaient mariés que depuis un peu plus de six mois.

Le père a reçu dix jours d'entraînement militaire. Sa femme lui a fait ses adieux en lui souhaitant bon voyage. Elle allait devoir élever seule son fils.

Seulement au Sud, 65 000 Coréens sont inscrits sur une liste d'attente pour revoir leurs proches partis ou restés au Nord.

Réuni(e)s dans les monts Kumgang, six décennies plus tard

Sources (principalement, traduction partielle d'un article en anglais du quotidien sud-coréen Hankyoreh) :

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7 octobre 2015 3 07 /10 /octobre /2015 23:45

L'étudiant sud-coréen Joo Won-moon, qui dispose d'un statut de résident permanent aux Etats-Unis et était entré illégalement en République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) il y a six mois dans l'espoir de créer un événement de nature à améliorer les relations Nord-Sud, a été rapatrié au Sud le 5 octobre, via Panmunjom, après avoir fait son autocritique le 25 septembre lors d'une conférence de presse télévisée. Alors qu'il est exposé à des poursuites judiciaires en application de la loi de sécurité nationale sud-coréenne qui interdit aux ressortissants du Sud tout contact non autorisé avec le Nord, l'Association d'amitié franco-coréenne appelle à ne pas faire application de l'inique "loi de sécurité nationale" qui, dans le cas présent, apporterait des entraves à la liberté de circulation sans commune mesure avec le Nord - alors que les autorités nord-coréennes n'ont même pas attrait Joo Won-moon devant les tribunaux pour entrée et séjour illégals.

Rapatrié en Corée du Sud, Joo Won-moon ne doit pas être poursuivi !

C'est un Joo Won-moon qui est apparu souriant et détendu, comme toujours, lors de son rapatriement du Nord de la Corée vers le Sud le 5 octobre 2015. Mais il n'a pas dit un mot dans les vidéos alors diffusées par les médias internationaux.

Car l'étudiant new-yorkais - qui n'a pas été condamné par les tribunaux nord-coréens pour son entrée illégale au Nord de la péninsule - risque, en effet, bien plus gros avec la justice du Sud, vindicative à l'encontre de n'importe lequel de ses concitoyens qui a enfreint la loi de sécurité nationale interdisant tout contact avec le Nord.

Comme l'a indiqué l'agence américaine AP, Joo Won-moon a été interrogé par les services de renseignement sud-coréens le jour même de sa libération, tandis qu'un des responsables a confirmé, sous couvert d'anonymat, qu'une condamnation était envisagée.

L'AAFC appelle le gouvernement américain, si prompt à condamner les droits de l'homme au Nord de la péninsule, à faire preuve de la même rigueur vis-à-vis du Sud et de la loi de sécurité nationale unanimement condamnée par les ONG de défense des droits de l'homme, d'autant plus que Joo Won-moon et sa famille ont le statut de résident permanent sur le territoire américain.

Sources :

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4 octobre 2015 7 04 /10 /octobre /2015 11:44

Du 2 au 4 octobre 2007 se tenait, à Pyongyang, la deuxième rencontre au plus haut niveau entre les dirigeants de la République de Corée (Corée du Sud) et de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) : après la première déclaration du 15 juin 2000, le dirigeant nord-coréen Kim Jong-il et le président sud-coréen Roh Moo-hyun signaient alors, le 4 octobre 2007, une déclaration conjointe qui ouvrait de nouvelles perspectives de coopération et d'échanges Nord-Sud, tendant ainsi à la réunification pacifique et indépendante de la péninsule. Mais le retour au pouvoir des conservateurs à Séoul, en 2008, a marqué un coup d'arrêt au rapprochement, et la fin de la politique sud-coréenne du "rayon de soleil" (sunshine policy) d'ouverture au Nord. Huit ans plus tard, de multiples voix, non seulement en Corée du Sud mais aussi parmi les spécialistes des questions coréennes (universitaires, diplomates), font observer que le changement de cap de l'administration sud-coréenne n'a produit aucun des effets escomptés par les tenants d'une ligne dure. Nous rendons ainsi compte d'un colloque organisé à Séoul à l'occasion de l'anniversaire de la déclaration du 4 octobre, en traduisant ci-après de l'anglais un article publié par le quotidien sud-coréen progressiste Hankyoreh,  intitulé "A l'occasion de l'anniversaire de la déclaration [du 4 octobre 2007], des voix s'élèvent pour revenir à la politique du rayon de soleil".

Rencontre le 13 juin 2000 entre le Président sud-coréen Kim Dae-jung et le Dirigeant nord-coréen Kim Jong-il, lors du premier sommet intercoréen

Rencontre le 13 juin 2000 entre le Président sud-coréen Kim Dae-jung et le Dirigeant nord-coréen Kim Jong-il, lors du premier sommet intercoréen

Les participants au symposium ont affirmé que si les politiques de réconciliation s'étaient poursuivies les relations intercoréennes ne se seraient pas détériorées

Lors d'une conférence universitaire qui a marqué le huitième anniversaire de la Déclaration Nord-Sud du 4 octobre, plusieurs voix ont appelé à revenir à la politique du rayon de soleil et à prendre d'autres initiatives pour améliorer les relations intercoréennes. Le 2 octobre, la Fondation Roh Moo-hyun, le Forum pour la paix en Corée (Korea Peace Forum) et le Chatham House (Institut royal de relations internationales) ont co-organisé un symposium international lors du huitième anniversaire de la Déclaration du 4 octobre, au Centre Séjoing des Arts des Spectacles, au centre de Séoul.

Lors du symposium, James Hoare, membre de Chatham House et ancien chargé d'affaires et consul général à l'ambassade britannique à Pyongyang, a déclaré que le Sud et le Nord avaient maintenant besoin de revenir aux initiatives de la politique du rayon de soleil mises en oeuvre par Kim Dae-jung et Roh Moo-hyun entre 1997 et 2007. Il a ajouté que si Lee Myung-bak avait poursuivi de telles initiatives au lieu d'abandonner la déclaration du 4 octobre, cela aurait grandement aidé les relations intercoréennes. 

Moon Jae-in, dirigeant de l'Alliance de la nouvelle politique pour la démocratie (opposition), a affirmé que si les initiatives prises dans le cadre de la déclaration du 4 octobre s'étaient poursuivies, la vie de 70 millions de personnes "serait prospère et pleine d'espoir", tandis que la péninsule coréenne "tendrait la main à la communauté internationale comme formant un tout". "Mais les huit dernières années de Lee Myung-bak et Park Geun-hye ont ramené les relations intercoréennes à leur période la plus sombre", en ajoutant que si les mesures telles que la création d'une zone spéciale de paix et de coopération en Mer de l'Ouest (Mer Jaune) avaient été mises en oeuvre, le pays pourrait concentrer ses efforts à résoudre avec succès les questions de la stagnation économique, du déclin de la classe moyenne et du chômage des jeunes. La déclaration du 4 octobre comportait des accords tendant à la mise en place d'une "zone spéciale de paix et de coopération" en Mer de l'Ouest, incluant la ville de Haeju et la région maritime située à proximité, ainsi que la création de zones de pêche conjointes et de districts dédiés à la paix.

Lee Seung-hwan, directeur opérationnel de Tongilmaji - Agir pour Une Corée, a déclaré que le déclaration du 4 octobre était importante en ce qu'elle avait manifesté la volonté de la Corée du Nord de "discuter avec les Etats-Unis des sujets liés à la paix et de travailler sur des programmes d'échanges et de coopération avec la Corée du Sud", en observant qu'elle avait marqué une percée diplomatique qui aurait pu conduire à des discussions de paix directement entre les différents gouvernements. Il a ajouté qu'en niant les résultats de l'époque Roh Moo-hyun (2003-2008), l'administration Park pouvait réussir à conclure des "accords provisoires", comme ceux obtenus lors des discussions de crise le 25 août dernier dans un contexte d'escalade des tensions, mais "échouerait en définitive à éloigner l'animosité et la méfiance entre les deux Corée", conduisant ainsi à de nouveaux conflits. Toujours selon lui,  "le gouvernement qui améliorera les relations intercoréennes sera celui qui reprendra les initiatives de la Déclaration du 4 octobre".

Etaient également présents le maire de Séoul Park Won-soon, le gouverneur de la province de Gangwon Choi Moon-soon, et d'autres dirigeants d'exécutifs locaux, qui ont souligné la nécessité de ressusciter les échanges intercoréens dans un esprit de paix et conformément à la déclaration du 4 octobre. Won Hee-ryong, gouverneur de Jeju, a dit qu'il proposait depuis l'an dernier de relancer les projets d'exportation de mandarines vers la Corée du Nord, tels qu'ils avaient existé depuis 1998 jusqu'aux mesures du 24 mai 2010. Il a ajouté que la Corée du Nord est la seule région maritime en Asie à laquelle n'ont pas accès les navires des lignes régulières, en observant que "l'établissement d'une route maritime entre Jeju et la Corée du Nord diminuerait fortement les tensions intercoréennes".

Kim Jin-hoon, journaliste du Hankyoreh

Article original en anglais :  

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11 septembre 2015 5 11 /09 /septembre /2015 01:20

Après l'accord intercoréen du 25 août 2015 qui a stoppé un grave cycle de tensions, une réunion entre les Croix-Rouge des deux Corée, conclue ce 8 septembre à Panmunjeom, a permis, à l'issue de 24 heures de discussions, de déterminer les modalités des retrouvailles entre des familles séparées de part et d'autre du 38e parallèle : entre le 20 et le 26 octobre 2015, 100 Nord-Coréens et 100 Sud-Coréens seront réunis dans les monts Kumgang, au Nord de la péninsule, pour la première fois depuis février 2014.

La délégation nord-coréenne (à gauche) et la délégation sud-coréenne (à droite)

La délégation nord-coréenne (à gauche) et la délégation sud-coréenne (à droite)

Imaginez des parents, des enfants, des frères et des soeurs séparés depuis plus de soixante ans, de part et d'autre de la zone démilitarisée (DMZ) qui sépare le Nord et le Sud de la péninsule coréenne.

Imaginez des êtres qui s'aiment, sans aucunes possibilités de contacter par courrier, par téléphone ou par mél ceux qui leur sont chers restés de l'autre côté, ceux qui sont partis.

Imaginez des familles divisées, sans avoir la moindre nouvelle de leurs proches, depuis trop longtemps : sont-ils même encore seulement en vie ? Car l'espoir est toujours vivant, de se revoir, un jour, une dernière fois.

La séparation des familles coréennes illustre à elle seule le drame national de la division, une division imposée contre la volonté du peuple coréen.

Dans ce contexte chargé d'émotion, l'Association d'amitié franco-coréenne se réjouit que les germes de la division puissent un jour disparaître, et permettent de renouer la chaîne de l'amitié, par-delà la distance et le temps qui sépare des êtres humains qui, jour après jour, pensent à ceux qu'ils n'oublieront jamais.

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30 août 2015 7 30 /08 /août /2015 16:01

Après l'accord conclu dans la nuit du 24 au 25 août 2015 entre les deux Corée, qui a permis de mettre fin à l'escalade des tensions, une nouvelle phase de dialogue et de rapprochement intercoréen s'est ouverte : tandis que les exercices militaires Ulji Freedom Guardian ont pris fin, les armées du Nord et du Sud sont à nouveau en "mode paix". Par ailleurs, des rencontres sont prévues entre les Croix-Rouge des deux Corée, le 7 septembre, pour préparer de nouvelles réunions de familles séparées, à l'occasion de la fête coréenne des moissons - qui aura lieu cette année le 27 septembre. Dans ce contexte, une réunion élargie de la Commission militaire centrale du Parti du travail de Corée s'est tenue, sous la présidence du Maréchal Kim Jong-un, dont un compte rendu, publié sur le site nord-coréen Naenara, est analysé ci-après.

Réunion de la Commission militaire centrale du Parti du travail de Corée

Depuis l'accession aux responsabilités du Maréchal Kim Jong-un, les médias de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) rendent plus fréquemment compte, de manière assez détaillée, de réunions des organes de direction du Parti du travail de Corée (PTC).

La réunion de la Commission militaire centrale (CMC) du PTC, qui s'est tenue après la conclusion de l'accord intercoréen du 25 août 2015, a été élargie non seulement aux dirigeants militaires de haut rang, mais également à une partie des directions nationale et locales du PTC : outre les membres de la Commission, y ont participé, selon le site nord-coréen Naenara, "les membres exécutifs du comité du PTC de l’Armée populaire de Corée (APC), les responsables des départements et des sections de la Direction politique générale de l’APC, du ministère des Forces armées populaires et de l’Etat-major général de l’APC, les commandants des armées et des unités au rang de corps d’armée, les commandants des écoles militaires de tous les échelons, les responsables des organismes de sûreté nationale et de sécurité du peuple, les responsables du CC du PTC, du Cabinet et du secteur des affaires étrangères et les secrétaires en chef du comité du PTC des provinces".  

Toujours selon Naenara, il s'agissait de dresser un bilan et de fixer un cap pour la politique de défense, après les graves tensions survenues entre les deux Corée ces dernières semaines, jusqu'à la conclusion de l'accord intercoréen du 25 août 2016. "Elle a également discuté les mesures de réparation des dégâts causés par l’inondation dans la ville de Rason et a traité le problème de l’organisation, dont la destitution et la nomination de certains membres de la CMC du PTC". Sur le premier point, les graves inondations survenues dans la ville de Rason ont entraîné 40 morts, selon le bilan établi par les autorités nord-coréennes ; la mention en bonne place des secours dans le compte rendu de la réunion de la CMC rappelle le rôle joué par l'armée, en Corée du Nord, pour secourir les victimes de catastrophes naturelles. S'agissant du second point ("la destitution et la nomination de certains membres de la CMC du PTC"), les médias sud-coréens - et à leur suite certains médias occidentaux - ont beaucoup spéculé, sans fondements, sur les motivations de ces changements, qui n'ont pas davantage été précisés, à la direction du plus haut organe militaire du PTC. Les raisons peuvent en être très diverses, de nouvelles nominations étant par ailleurs nécessaires du seul fait des changements intervenus dans l'organisation administrative (récemment, un nouveau ministre de la Défense a été nommé), ou du besoin de remplacer des membres âgés ou malades.

Réunion de la Commission militaire centrale du Parti du travail de CoréeRéunion de la Commission militaire centrale du Parti du travail de Corée

En ce qui concerne la situation récente, le rapport du Maréchal Kim Jong-un a salué le rôle du Parti, de l'armée et du peuple tout entier "pour défendre la révolution" et la patrie. Il a rappelé que la réunion d'urgence Nord-Sud avait été organisée à la demande du Nord, et avait permis d'éloigner le danger de la guerre. Il s'est félicité que le communiqué commun ait pu faire passer les rapports Nord-Sud, qui étaient dans une situation catastrophique, à un stade de "réconciliation" et de "confiance".

Il a dit que le résultat du récent contact est la victoire de l’idéal sublime de ceux qui se soucient du destin de la nation et font grand cas de la paix.

Le Maréchal Kim Jong-un a précisé que, selon lui, cet accord avait été rendu possible par le "puissant potentiel militaire axé sur la force de dissuasion nucléaire autodéfensive développée par notre Parti et (par) l’union étroite des rangs invincibles du Parti" - confortant ainsi la ligne du PTC visant au développement simultané de l'économie et des forces armées, lesquelles s'appuient sur la force de dissuasion nucléaire. Le compte rendu de la réunion se termine d'ailleurs sur la priorité à donner à la poursuite du renforcement du potentiel militaire, avant une nouvelle mention de l'intervention de l'armée pour résoudre les dégâts causés par les inondations à Rason, avant les cérémonies de célébration de la fondation du PTC (le 10 octobre prochain). Il a précisé en avoir donné l'ordre "en qualité de Commandant Suprême" de l'Armée populaire de Corée, soulignant ainsi son implication personnelle sur ce dossier.

S'il est logique que les questions de défense (y compris, en RPDC, en matière de sécurité civile) concentrent l'essentiel des débats d'une réunion de la Commission militaire centrale, les attentes quant à une amélioration des relations Nord-Sud apparaissent fortes, sans toutefois que ne soient détaillées les mesures envisagées ou à prendre. Le terme de "confiance" pour évoquer les rapports Nord-Sud est fondamental, alors que celle-ci a manqué depuis le retour au pouvoir des conservateurs à Séoul, en 2008.

Enfin, alors qu'un courant d'analyse en Occident cherche à minimiser, sans véritables preuves, le rôle clé que joue manifestement le Maréchal Kim Jong-un dans la direction de la RPD de Corée, il est significatif que le seul rapport mentionné dans le compte rendu soit le sien, tendant ainsi à souligner l'exercice de son leadership.

Source principale :

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24 août 2015 1 24 /08 /août /2015 19:22

Dans la nuit de lundi (24 août 2015) à mardi (25 août), les délégations de la République de Corée (Corée du Sud) et de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) sont parvenues à un accord après plus de trois jours de négociations dans le village frontalier de Panmunjeom. Cet accord a été annoncé successivement par le Sud puis par le Nord. Dans l'attente et sous réserve de publication du texte de cet accord, nous indiquons ci-après ses grandes lignes, telles qu'elles ont été annoncées dans les médias sud-coréens.

Un accord trouvé entre les deux Corée

Selon l'agence de presse sud-coréenne Yonhap, la RPDC a exprimé ses regrets pour les soldats sud-coréens blessés par les explosions de mines qui ont eu lieu le 4 août dernier. Elle a également décidé de lever le semi-état de guerre. L'expression de "regrets" n'est pas identique aux "excuses" qu'exigeait jusqu'à présent la chef de l'Etat sud-coréenne, alors que la RPDC a nié toute implication dans cet incident et que la version sud-coréenne officielle mettant en cause le Nord est mise en doute, notamment par des experts étrangers.

Le Sud a décidé de suspendre sa propagande anti-RPDC par les hauts parleurs placés le long de la DMZ, qu'il avait relancée après 11 ans d'interruption suite à l'incident des mines antipersonnel du 4 août, sans exclure la possibilité de la reprendre dans certaines circonstances (en cas de "situation anormale", selon Yonhap). L'arrêt de cette propagande était une exigence fondamentale du Nord.

Les deux parties ont convenu d'une nouvelle réunion, à Séoul ou à Pyongyang, dès que possible, pour améliorer les relations intercoréennes. Par ailleurs, il a été convenu  d'une réunion de travail des Croix-Rouge début septembre, en vue d'organiser de nouvelles réunions de familles séparées autour de Chuseok, la fête coréenne des moissons, au cours de laquelle les Coréens honorent leurs ancêtres. Enfin, et toujours selon Yonhap, le Nord et le Sud travailleront également à renforcer les échanges civils dans différents domaines (sans plus de précisions de l'agence sud-coréenne).

L'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) se félicite de cet accord, conclu à l'issue de discussions exceptionnellement longues. Il permet d'éloigner les risques de conflit dans la péninsule coréenne malgré la poursuite des exercices de guerre internationaux Ulji Freedom Guardian (avec une participation française), et ouvre par ailleurs des perspectives de reprise et d'approfondissement des échanges intercoréens.

Source :

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24 août 2015 1 24 /08 /août /2015 11:07

Les négociations marathon qui se déroulent depuis trois jours entre les deux Corée dans le village frontalier de Panmunjom ont ostensiblement pour origine un malheureux incident : le 4 août 2015, deux soldats sud-coréens ont sauté sur des mines dans la DMZ et ont été gravement estropiés. Après plusieurs jours de flottement, les autorités sud-coréennes avaient ensuite dénoncé une "attaque" nord-coréenne - ce qu'avait démenti Pyongyang - et, à titre de représailles, relancé la propagande anti-Nord diffusée par les hauts parleurs situés le long de la DMZ. Un des points d'achoppement des discussions en cours est que le Nord exige la fin de la propagande par haut-parleur, quand le Sud réclame des excuses du Nord. Si les négociateurs tentent apparemment de sortir par le haut de l'impasse en élargissant le champ des discussions, il est utile de revenir sur l'incident des mines, qui, à bien des égards, rappelle le dramatique naufrage du Cheonan, au printemps 2010 dans lequel 46 marins sud-coréens ont trouvé la mort, entraînant la rupture des échanges intercoréens (à l'exception notable de ceux de la zone économique spéciale de Kaesong) après la mise en place, par Séoul, des mesures dites du 24 mai (2010). En effet, en 2010 déjà l'opinion publique sud-coréenne avait été fortement émue suite à un accident attribué tardivement au Nord, comme récemment pour l'affaire des mines, avec le même démenti vigoureux de Pyongyang, et les mêmes doutes de nombreux experts sur la fiabilité de la thèse officielle sud-coréenne et américaine - laquelle permet opportunément, en 2015 comme en 2010, de ressouder les Sud-Coréens contre la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), autour d'un exécutif conservateur sud-coréen à la cote de popularité en baisse et dont une part importante de la base électorale est viscéralement hostile à la RPDC. Nous traduisons ci-après de l'anglais un article paru en exclusivité le 21 août 2015 dans New Eastern Outlook, qui avait déjà été mis en lien sur notre page Facebook : l'expert russe Konstantin Asmolov, chercheur à l'Institut d'études orientales de l'Académie des sciences de Russie, y analyse de manière approfondie "l'affaire des mines", sous le titre "A propos des explosions récentes dans la zone démilitarisée et de la dégradation des tensions intercoréennes". 

L'analyse du chercheur russe Konstantin Asmolov, à propos de l'affaire des mines à l'origine de l'actuel bras-de-fer intercoréen

Le 4 août 2015 un incident est intervenu au Sud de la zone démilitarisée (DMZ), qui sépare la République populaire démocratique de Corée et la Corée du Sud le long du 38e parallèle.

Selon l'agence de presse Yonhap, deux soldats sud-coréens ont été gravement blessés à la jambe pendant une patrouille de routine, en raison d'une explosion survenue à 7h40 du matin heure locale (1h40 heure de Moscou) dans le district d'Incheon, de la province de Gyeonggi, près de la ville de Paju. Un représentant local du commandement militaire a déclaré à l'agence qu'"une implication de la République populaire démocratique de Corée dans cet incident était improbable". Il a ajouté qu'une mine antipersonnelle était la cause la plus probable de l'explosion.

Kim Min-seok, porte-parole du ministère de la Défense nationale, a exprimé ses regrets à propos de l'incident et observé que la vie des victimes n'était plus en danger grâce à une réaction rapide. En outre, le compte rendu de Yonhap avait aussitôt relevé que l'endroit où l'incident était survenu était "jonché" de mines, pour la plupart enfouies au moment de la guerre de Corée (1950-1953). Les cartes des champs de mines n'aident pas vraiment à les localiser précisément, car la plupart ont été déplacées par la pluie, le vent et l'érosion des sols.

Il ne semblait s'agir que d'un incident banal. Pourtant, dès le 7 août, un militaire de haut rang du commandement sud-coréen, Jung Ho-sub, plaçait ses unités en alerte pour pouvoir répondre à de futures provocations nord-coréennes et bientôt la question des provocations nord-coréennes devint le principal sujet de discussions dans la ville.

Pendant ce temps, les blessures subies par le personnel militaire pendant l'incident se sont révélées bien plus graves qu'initialement envisagé. Les deux garde-frontières ont perdu leurs jambes, ce qui signifie qu'ils sont officiellement handicapés et éligibles à une pension à vie.  

Finalement, l'implication nord-coréenne a été officiellement annoncée le 10 août. Selon le général de brigade Ahn Young-ho, qui a conduit la commission d'enquête sur l'incident, "il est apparu qu'il s'agissait d'une mine antipersonnel (pour être précis, trois mines), enfermées dans une des boîtes en bois habituellement utilisées par l'armée nord-coréenne (...) L'ennemi a délibérément planté des mines pour infliger des dommages aux forces armées de la République de Corée", ainsi que pour faire obstacle aux prochains exercices militaires conjoints de la République de Corée et des Etats-Unis (Ulchi Freedom Guardian).

Selon les officiers militaires, les éléments trouvés sur place (des fragments de la boîte en bois qui aurait contenu les mines, trois ressorts et des traces d'une substance explosive, le trotyl) prouvent l'implication de la République populaire démocratique de Corée dans l'explosion. Et dès lors qu'il n'y avait pas de corrosion ou de rouille sur les fragments de mine il en a été conclu que la mine avait été installée récemment, sans doute fin juillet, dans la région de l'incident qui avait connu de fortes pluies et un épais brouillard. 

En tout cas il a été en même temps "découvert" qu'il n'y avait auparavant pas de mines dans la région où l'incident s'est produit, ce qui signifie qu'il ne s'agissait pas de vieilles mines plantées il y a longtemps, mais de mines récentes, enfouies par des agents provocateurs nord-coréens. Il est apparu que le brouillard était si dense en juillet que des agents de renseignement nord-coréens auraient pu pénétrer sur le territoire de la République de Corée et planté ces mines à 440 mètres de la frontière. Ahn Young-ho a souligné que des incidents similaires étaient survenus dans les années 1960.  

A ce stade une question se pose : qu'en est-il du système de garde-frontière sud-coréen assisté par ordinateur tant vanté ? Il faudrait alors admettre qu'il est possible de pénétrer dans la zone démilitarisée. Au moins deux incidents ont eu lieu récemment, quand des soldats nord-coréens ayant fait défection ont franchi avec succès tous les obstacles posés à la frontière. Dans un des cas, le soldat n'a été remarqué qu'après avoir frappé à la porte d'un point de contrôle sud-coréen. C'est pourquoi il est difficile de dire si les commandos nord-coréens sont si habiles, ou si les garde-frontières sud-coréens ont échoué à accomplir leur mission. En outre, tout en formulant ses excuses, le ministère de la Défense nationale (MDN) a admis que les garde-frontières n'avaient pas de détecteur de mines, ce qui doit être considéré comme une grave négligence. 

Il semble à l'auteur de cet article que les deux déclarations se contredisent de manière à soulever un doute. D'un côté, les représentants du commandement local ont confirmé la non-implication de la République populaire démocratique de Corée dans cet incident. Dans ce cas, il est raisonnable d'affirmer que cette conclusion se fondait sur les éléments matériels de l'enquête menée initialement sur le lieu de l'incident. Or près d'une semaine plus tard de nouvelles preuves sont apparues qui, pour une raison ou une autre, n'avaient pas été découvertes immédiatement. Mais si des restes de l'enveloppe extérieure de la mine et d'autres parties avaient été découvertes d'emblée, il apparaît alors quelque peu étrange que cette version n'ait pas été diffusée tout de suite, surtout si les mines des deux pays sont si différentes. 

Il est aussi important de relever que le lieu de l'incident a attiré l'attention à plusieurs reprises. Si l'on revient en 2010, après les incidents de l'île Yeonpyeong, au paroxysme de la flambée de tensions entre les deux Corée, un canon s'est "accidentellement" embrasé de lui-même. Son obus n'a pas atteint le territoire nord-coréen et il n'y a donc pas eu d'échanges de tirs. Et des incidents difficiles à expliquer dans lesquels chaque partie reproche à l'autre d'avoir "bombardé son territoire" sont survenus à plusieurs reprises ces jours-ci. En outre, les "défenseurs sud-coréens des droits de l'homme" ont envoyé leurs ballons chargés de tracts de propagande depuis cette zone.

Néanmoins, une enquête menée par le commandement des troupes des Nations Unies (la commission d'enquête comprenait des représentants des Etats-Unis, de la République de Corée, de la Nouvelle-Zélande et de la Colombie) est arrivée aux mêmes conclusions que leurs homologues en Corée du Sud, ce qui a été qualifié de signal pour "aller de l'avant". Les commandants en chef du comité conjoint des forces armées de la République de Corée ont qualifié l'enfouissement de mines par la Corée du Nord dans la DMZ de rupture ouverte du cessez-le-feu et des accords de réconciliation. Le Sud a exigé que le Nord reconnaisse sa responsabilité dans l'incident et présente ses excuses. Le commandement des Nations Unies a dénigré les actions supposées du Nord et ordonné une rencontre de toutes les parties concernées au niveau des généraux. Selon la déclaration du commandement des Nations Unies, "en ayant planté des mines antipersonnel enfermées dans des boîtes en bois le long de la route où patrouillent les soldats sud-coréens dans la partie Sud de la DMZ, l'armée nord-coréenne a violé les paragrahes 6, 7 et 8 de l'accord de cessez-le-feu".

Tant le parti au pouvoir que l'opposition sud-coréenne ont dénoncé les actions supposées de la République populaire démocratique de Corée. Le Secrétaire Général des Nations Unies Ban Ki-moon a appelé le Nord à cesser immédiatement ses provocations et à engager un dialogue. Le secrétaire d'Etat britannique pour les Affaires étrangères et le Commonwealth Phillip Hammondalso a vilipendé les actions présumées de la République populaire démocratique de Corée. En ce qui concerne la Présidente de la République de Corée (qui n'a jamais clairement mis en doute les résultats de l'enquête), elle a pris une position rigide, mais sans essayer de "brûler les ponts" comme Lee Myung-bak l'avait fait avant elle.  "Notre gouvernement continuera d'exercer une pression sur la Corée du Nord selon une logique de stricte dissuasion, et poursuivra parallèlement ses efforts pour reprendre le dialogue intercoréen". 

Le 10 août, il a été pris la décision de reprendre les émissions de propagande anti-Corée du Nord en utilisant les hauts parleurs installés le long de la frontière et de placer en état d'alerte les troupes de la République de Corée stationnées dans la zone démilitarisée. Le ministre de la Défense de la République de Corée Han Min-koo a déclaré que ce n'était qu'un début et que d'autres mesures de rétorsion étaient envisagées. Quand il a été interrogé s'il existait des plans pour attaquer les postes frontières nord-coréens situés de l'autre côté de la zone démilitarisée, il a répondu que la décision n'avait pas encore été prise. Selon certaines sources, la République de Corée aurait même souhaité mener une contre-attaque, mais les Etats-Unis l'aurait désapprouvée.

S'agissant des grands médias sud-coréens, ils ont déjà identifié le Nord-Coréen qui aurait manigancé l'incident. Ils ont pointé du doigt le Général Kim Yong-chol, récemment promu. En fait, il a été promu avant l'incident, mais c'est le général Kim qui avait déjà été accusé d'être derrière l'incident de l'île Yeonpyeong et le naufrage de la corvette sud-coréenne Cheonan. Les Sudistes croient qu'il est en charge du renseignement militaire et qu'il a sur la conscience toutes les provocations de ce genre.

Pour conclure, les lecteurs doivent avoir conscience de deux autres aspects de la situation, qui ont trait à la politique étrangère. D'abord, l'incident est survenu juste avant les exercices militaires conjoints prévus entre les armées américaine et sud-coréenne. Chaque année la Corée du Nord déclare que ces exercices sont menés en préparation d'une invasion, et elle reçoit la même réponse du Sud que ce sont leurs affaires et strictement leur droit souverain. L'incident récent a "démoli les allégations nord-coréennes" : maintenant tout un chacun peut voir qui est le vrai provocateur.

Et plus largement il doit être noté que, ayant repoussé une attaque menée par Park Geun-hye dans le cadre de sa politique de "lutte contre la corruption", les forces conservatrices de la République de Corée tentent de se venger. Ce qui inclut la nomination d'un nouveau Premier ministre, une tentative pour limiter le pouvoir du Président, que nous avons analysée dans un de nos récents articles, et tout une série de décisions controversées rendues par la Cour constitutionnelle.

En tout cas, pour l'auteur de cet article tant les provocations du Nord que celles du Sud représentent en quelque sorte "beaucoup de bruit pour rien", car il se passe quelque chose de beaucoup plus important. Qu'on en juge : au moment même où était rendue publique la nouvelle de l'implication supposée de la Corée du Nord, les deux victimes de l'accident devenaient handicapées et éligibles à une pension à vie. Dans ce contexte, indépendamment de ce qui est effectivement arrivé, les Sud-Coréens épouseraient plus facilement la version officielle de la provocation de la Corée du Nord  comme étant socialement plus acceptable que la méconnaissance des règles de sécurité (les soldats n'avaient pas de détecteur de mines).

Et effectivement il y a des ressemblances avec l'escalade des tensions engendrée par le naufrage de la corvette Cheonan il y a cinq ans, quand il a été décidé que cet événement dramatique pourrait être utilisé à des fins politiques. Alors qu'initialement, après les faits, la Corée du Nord ne figurait pas parmi les suspects, des preuves hautement douteuses (une torpille rouillée de manière surprenante) ont ensuite été "découvertes".  

Konstantin Asmolov, docteur en histoire, chercheur confirmé de l'Institut d'études orientales de l'Académie des sciences de Russie. Article publié en exclusivisité par le magazine en ligne New Eastern Outlook.

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