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16 mars 2016 3 16 /03 /mars /2016 21:04

Les tensions continuent de monter dans la péninsule coréenne : alors que les Etats-Unis mènent cette année, conjointement avec la République de Corée (Corée du Sud), des exercices militaires d'une ampleur exceptionnelle, la République populaire démocratique de Corée (Corée du Nord) a annoncé qu'elle procèderait bientôt à de nouveaux essais nucléaires et à des lancements de missiles balistiques capables de transporter des ogives nucléaires - tandis qu'un étudiant américain (Otto Warmbier) a été condamné à quinze ans de travaux forcés par les autorités nord-coréennes. Dans ce contexte, la Chine, qui a été l'hôte des pourparlers à six sur la dénucléarisation de la péninsule coréenne, se fait, conjointement avec la Russie, l'avocat de la reprise du dialogue, en appelant l'ensemble des parties à la retenue - alors même qu'elle serait en première ligne en cas de conflit.

L'agence officielle nord-coréenne KCNA a annoncé, le 16 mars 2016, que le Maréchal Kim Jong-un avait fait procéder à une simulation d'entrée dans l’atmosphère d’une fusée balistique.

L'agence officielle nord-coréenne KCNA a annoncé, le 16 mars 2016, que le Maréchal Kim Jong-un avait fait procéder à une simulation d'entrée dans l’atmosphère d’une fusée balistique.

Si la résolution 2270 du Conseil de sécurité des Nations Unies, qui a renforcé les sanctions contre la RPDC à un niveau sans précédent, a bien été adoptée à l'unanimité, tous les membres du Conseil de sécurité n'en donnent pas la même lecture. En visite à Moscou, Wang Yi, ministre des Affaires étrangères de la République populaire de Chine, a déclaré, lors d'une conférence de presse conjointe avec son homologue russe Sergueï Lavrov, que la résolution devait être pleinement appliquée afin d'empêcher le développement par la RPDC de son programme nucléaire et balistique, mais sans avoir d'impact sur les populations - cette dernière précision, qui conditionne la mise en oeuvre de nouvelles restrictions aux principales exportations nord-coréennes de minerais, étant systématiquement rappelée par Pékin - à la différence, bien évidemment, de Washington et Séoul, qui souhaitent l'application la plus large possible des sanctions.

Lors de cette même conférence de presse, la Russie et la Chine ont appelé à la reprise des pourparlers à six (qui réunissent les deux Corée, les Etats-Unis, la Chine, la Russie et le Japon)
, alors que les néo-conservateurs américains et sud-coréens (ces derniers, par la voix de la Présidente sud-coréenne Mme Park Geun-hye elle-même) ont envisagé la tenue de pourparlers multilatéraux excluant la Corée du Nord.

Les autorités chinoises ont même fixé un objectif aux pourparlers à six : non seulement la dénucléarisation de l'ensemble de la Corée, mais aussi la signature d'un traité de paix entre, notamment, les Etats-Unis et la RPDC.

Si les autorités chinoises ont toujours été défavorables à ce que la RPDC se dote d'armes nucléaires (votant constamment les sanctions contre Pyongyang après chacun de ses essais nucléaires), elles sont également conscientes que la montée de tensions sert de prétexte au déploiement du système THAAD en Corée, qui les vise implicitement. A cet égard, selon l'agence chinoise Xinhua, les chefs de la diplomatie russe et chinois ont  formulé en termes diplomatiques une mise à garde vis-à-vis de Washington :

 

Interrogés sur le possible déploiement en Corée du Sud du bouclier anti-missiles balistiques américain THAAD, les deux diplomates ont jugé que celui-ci excédait les besoins de défense de la région et qu'il ne pourrait conduire qu'à une course aux armements.

Alors que le bon sens et la raison impliquent de donner toutes leurs chances au dialogue et à la paix pour empêcher un nouvel embrasement dans la péninsule coréenne, la Chine, avec l'appui de la Russie, milite avec constance pour trouver une issue diplomatique à l'escalade en cours.

Sources :

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29 février 2016 1 29 /02 /février /2016 12:34

Alors qu'elles sont encore en discussion au sein du Conseil de sécurité des Nations Unies, les nouvelles sanctions envisagées contre la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) après l'essai nucléaire du 6 janvier 2016 et le lancement d'un satellite le 7 février 2016 font d'ores et déjà l'objet de débats quant à leur portée et à leur mise en oeuvre. A supposer que le texte ne soit pas substantiellement modifié, il existe en effet une marge d'interprétation. En outre, la Russie examine en détail un texte à l'élaboration duquel elle n'a pas été associée : dans une conversation téléphonique à son homologue américain John Kerry, le 27 février, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a fait part de sa préoccupation quant à la nécessité de ne pas créer de difficultés pour les coopérations économiques avec la RPDC dans le secteur privé, en relevant par ailleurs les problèmes humanitaires rencontrés par la Corée du Nord.

Jetée au port de Dandong, en Chine, par lequel transite une part importante du commerce sino - nord-coréen.

Jetée au port de Dandong, en Chine, par lequel transite une part importante du commerce sino - nord-coréen.

Les "faucons" américains s'étaient bruyamment félicités après être parvenus à un accord avec la Chine sur un nouveau train de sanctions - d'une ampleur sans précédent - contre la RPD de Corée. Et effectivement, si leurs désirs étaient appliqués à la lettre ils porteraient un coup particulièrement rude à l'économie nord-coréenne - que nous avions estimé à potentiellement 10 points de PIB - entraînant la mort de nombreux civils, notamment d'enfants : un schéma qui, même s'ils s'en défendent, est conforme à leur volonté de mettre à genoux la population nord-coréenne dans l'espoir d'un effondrement de la RPDC, que l'administration Obama cherche ainsi à provoquer à défaut, pour les administrations américaines successives, de la voir survenir depuis plus de vingt ans.

Un des points essentiels concerne les restrictions aux exportations nord-coréennes de minerais - dont nous soulignions déjà, dans notre édition du 23 février, qu'elles méritaient d'être précisées.

Lee Je-hun, du quotidien sud-coréen Hankyoreh, a apporté les précisions suivantes, au regard des informations apparues ultérieurement dans les médias : 

Citant la copie du projet de résolution qu'elle a obtenue, l'agence Reuters a rendu compte que l'or, le titanium et les terres rares seraient soumis à un embargo, alors que le charbon et le minerai de fer seraient exclus de la liste des sanctions dès lors qu'ils seraient utilisés à "des fins concernant les moyens d'existence" et que ces sommes ne seraient pas détournées vers le développement des programmes nucléaires et balistiques de la Corée du Nord.

L'or, le titanium et les terres rares constituent des ressources importantes de la RPD de Corée qui, davantage exploitées (surtout en ce qui concerne les terres rares), pourraient offrir d'importantes perspectives de développement à la RPD de Corée. Il n'est d'ailleurs pas anodin que la Chine ait accepté d'inclure les terres rares dans cette liste de produits soumis à une interdiction d'exportation : au regard des réserves connues ou estimées, le principal concurrent de la Chine pour l'exploitation des terres rares est... la Corée du Nord.

Néanmoins, les principaux minerais exportés par la Corée du Nord sont aujourd'hui le charbon (plus de 1 milliard de dollars en 2015) et le fer, d'abord à destination de la Chine (on notera par ailleurs que d'autres exportations minières significatives, comme le cuivre et la magnésite, ne sont actuellement pas citées dans la presse : qu'en sera-t-il pour elles ?). Cette dernière n'a donc pas intérêt à perdre une source d'approvisionnements.

La question est de savoir comment s'assurer que le produit des exportations nord-coréennes va à l'amélioration des conditions de vie de la population, et non aux programmes nucléaires et balistiques ? Une telle "traçabilité" est en pratique quasi-impossible, sauf par une pratique douteuse d'amalgame entre entreprises relevant de secteurs d'activité totalement différents : les Etats-Unis sont peut-être prêts à franchir un tel pas, mais la Chine certainement pas... les médias chinois s'étant d'ailleurs empressés d'affirmer que les sanctions n'affecteraient pas les moyens d'existence des populations.

Il en va de même pour les restrictions aux livraisons de carburants pour les avions. Potentiellement, une telle mesure est de nature à asphyxier l'économie nord-coréenne. Mais la Chine, principal fournisseur de la RPDC en pétrole et en produits dérivés du pétrole, n'entend visiblement pas s'engager sur cette voie en étant soucieuse d'assurer le fonctionnnement normal de l'économie nord-coréenne, alors que les Etats-Unis avaient rêvé d'un embargo total sur les livraisons d'hydrocarbures à la RPDC.

Enfin, le projet de sanctions exclut l'aide humanitaire et, plus généralement, toute mesure de nature à porter atteinte au "bien-être" des populations. Les Etats-Unis et leur alliés iront peut-être plus loin, via des sanctions unilatérales, que les sanctions des Nations Unies dans leur logique d'affamer les populations nord-coréennes - ainsi, en Corée du Sud, même l'aide humanitaire à la RPDC est soumise à autorisation gouvernementale (!). Mais au regard de la faiblesse de leurs liens commerciaux, voire humanitaires, avec la RPD de Corée, leur marge de manoeuvre est limitée.

Prise de court par les initiatives nord-coréennes, la Chine revient au centre du jeu diplomatique. Tout en réaffirmant qu'elle appliquerait bien les sanctions (la semaine dernière, le blocage de livraisons de charbon nord-coréen par les douanes chinoises était apparu comme un signe avant-coureur des nouvelles sanctions), elle n'a aucune raison de privilégier une interprétation non conforme à la lettre du projet de résolution, quelles que soient les tentatives des Etats-Unis de chercher à imposer une lecture politique et non juridique... et alors que la Russie examine en détail le projet de résolution. Cette préoccupation est d'autant plus légitime que, par le passé, la Chine et la Russie se sont fait imposer des lectures non juridiques de résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies - par exemple, en ce qui a concerné les actions contre la Jamahiriya arabe libyenne du colonel Mouammar Khadafi.

Principale source :

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26 février 2016 5 26 /02 /février /2016 13:28

Le 25 février 2016 l'ambassadrice américaine auprès des Nations Unies, Mme Samantha Power, a communiqué sur un projet de résolution soumis aux autres membres du Conseil de Sécurité des Nations Unies, issu de longues négociations avec la Chine, qui prévoit des sanctions d'une ampleur sans précédent contre la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), suite à son essai nucléaire du 6 janvier 2016 et au lancement d'un satellite le 7 février 2016. Si les Etats-Unis espèrent une adoption de cette résolution ce week-end, la Russie a annoncé qu'elle l'examinerait en détail, ce qui pourrait en retarder l'adoption - sans toutefois devoir en changer substantiellement le fond, Moscou ayant fermement condamné les récentes initiatives de Pyongyang.

Le Conseil de Sécurité des Nations Unies

Le Conseil de Sécurité des Nations Unies

Selon les éléments communiqués par les Etats-Unis, les éléments du projet de résolution sont les suivants :

- une inspection obligatoire de toutes les cargaisons à destination ou en provenance de la Corée du Nord, quel que soit le mode de transport (terrestre, aérien, maritime), ainsi qu'une interdiction pour les navires nord-coréens "soupçonnés de transporter des produits illicites" de faire relâche dans les ports étrangers ; trente-deux navires nord-coréens sont placés sur une liste noire ;

- un embargo total sur les armes conventionnelles et sur les équipements à usage dual (civil ou militaire ;

- des restrictions, voire des interdictions, d'exportation par la RPD de Corée de certains minerais (sont cités le charbon, le fer, le titane, l'or et les terres rares) ;

- une interdiction des livraisons de carburants à la RPD de Corée pour les avions et les fusées ;

- la fermeture de succursales bancaires en Corée du Nord et de succursales nord-coréennes à l'étranger, et un doublement du nombre de personnes (17 au total) et d'entités (12) nord-coréennes sanctionnées au plan financier en raison de leur rôle supposé dans les programmes nucléaire et balistique de la RPD de Corée ;

- des compléments et précisions sur la liste des produits dits de luxe interdits d'importation par la Corée du Nord.

Enfin, les membres des Nations Unies seront invités à "expulser les diplomates nord-coréens impliqués dans des activités illicites".

Selon les Etats-Unis et leurs alliés, il s'agit d'exercer une pression sans précédent contre Pyongyang pour l'inciter à abandonner ses programmes nucléaire militaire et balistique.

L'inflexion de la position chinoise est à relever : Pékin a manifestement choisi de sacrifier tout ou partie de ses intérêts économiques en RPD de Corée (investissements à l'étranger, échanges commerciaux) - certes dans un contexte où son ralentissement économique diminue son besoin en minerais nord-coréens - sur la base de considérations stratégiques (avec l'espoir manifestement d'empêcher le déploiement du dispositif militaire THAAD, que les Etats-Unis veulent désormais conditionner à l'abandon de son programme nucléaire par la RPD de Corée), mais aussi - et peut-être surtout - du poids de ses échanges économiques avec la Corée du Sud et les Etats-Unis.

Si certains points méritent d'être précisés - par exemple, le contenu exact des restrictions aux exportations de minerais qui représentent près de la moitié du commerce extérieur de la RPD de Corée (le commerce total de la RPDC atteint 8 à 10 milliards de dollars par an jusqu'en 2015), lui-même déjà amputé de plus de 20 % depuis la fermeture il y a quelques semaines de la zone industrielle de Kaesong - il s'agit de mesures extrêmement sévères, dont on peut estimer, en première analyse, qu'elles pourraient impacter l'économie nord-coréenne de l'ordre de 10 % du PIB, entraînant ainsi une grave crise économique qui affecterait lourdement les populations et risquerait de faire resurgir le spectre des pénuries alimentaires qui ont causé, dans les années 1990, une surmortalité de plusieurs centaines de milliers de personnes. C'est le choix conscient fait par les diplomates américains et leurs alliés (dont la France), quelles que soient leurs dénégations, la main sur le coeur, que les populations civiles seraient soi-disant épargnées.

Par exemple, les restrictions aux livraisons de fioul pour les transports par voie aérienne entraîneront un déport sur le transport ferroviaire, routier et maritime - lui-même déjà soumis à des pénuries. Il en résultera des difficultés accrues à assurer le ramassage et le transport des produits alimentaires d'une part, et à la navigation des bateaux de pêche en haute mer d'autre part - réduisant gravement l'alimentation des populations en produits de la mer. L'AAFC dénonce les choix opérés sciemment par les gouvernements occidentaux qui conduiront à tuer de nombreux civils innocents, y compris les enfants qui sont parmi les populations les plus fragiles, reproduisant des scénarios déjà connus - comme naguère en Irak.

Au plan international, il est très improbable que la RPD de Corée se plie à la volonté américaine, surtout si les Etats-Unis n'offrent aucune contrepartie concernant notamment un traité de paix ou le déploiement de leurs forces en Asie de l'Est. Pire, les manoeuvres militaires conjointes avec la Corée du Sud qui débuteront début mars devraient être les plus importantes jamais réalisés, accroissant les risques d'escalade et de conflit.

Un chantage visant les populations civiles, qui sont comme toujours les premières victimes des sanctions internationales ? Des risques de conflit local généralisé ? A l'AAFC, nous ne voulons pas du remake de ce mauvais film, et mettrons tout notre poids pour faire prévaloir la voie du dialogue et de la raison, de la paix, des coopérations et du soutien aux populations.

Source :

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9 janvier 2016 6 09 /01 /janvier /2016 11:39

Après la conduite le 6 janvier 2016 d'un essai nucléaire que la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) a présenté comme celui d'une bombe H, une déclaration du favori à la primaire républicaine aux Etats-Unis Donald Trump - déclarant qu'il fallait envisager des sanctions contre la République populaire de Chine si elle ne changeait pas sa politique nord-coréenne - a révélé sa profonde ignorance de la politique nord-coréenne de la Chine. Si Pékin et Pyongyang partagent des intérêts stratégiques et économiques communs, la Chine a en effet vivement condamné l'essai nucléaire nord-coréen - comme les précédents conduits en 2006, 2009 et 2013 - et a appuyé, au sein du Conseil du Sécurité des Nations Unies, une déclaration tendant au renforcement du régime international de sanctions contre Pyongyang. Cet article vise à rappeler les enjeux que représente la RPDC pour la Chine.

Le Maréchal Kim Jong-un de la RPDC et le Liu Yunshan, secrétaire exécutif du Parti communiste chinois, lors des cérémonies ayant célébré, à Pyongyang, le 70e anniversaire de la fondation du Parti du travail de Corée, le 10 octobre 2015.

Le Maréchal Kim Jong-un de la RPDC et le Liu Yunshan, secrétaire exécutif du Parti communiste chinois, lors des cérémonies ayant célébré, à Pyongyang, le 70e anniversaire de la fondation du Parti du travail de Corée, le 10 octobre 2015.

L'amitié et la solidarité sino-nord-coréenne est ancienne, depuis la participation des volontaires chinois aux combats de la guerre de Corée (1950-1953) et la signature, en 1961, d'un traité d'amitié, de coopération et d'assistance mutuelle - prévoyant une assistance mutuelle en cas d'attaque militaire de l'une des deux parties. Dans ce contexte, des hauts représentants chinois participent aux principales commémorations à Pyongyang - au niveau du vice-président de la République lors de la célébration de la fin de guerre de Corée en juillet 2013, et du secrétaire exécutif du Parti communiste chinois en octobre 2015, pour le 70e anniversaire de la fondation du Parti du travail de Corée. Représentant près de la moitié du commerce extérieur de la RPDC, les échanges commerciaux sino-nord-coréens - qui approvisionnent notamment la Corée du Nord en pétrole et en céréales, et la Chine en minerais, charbon et autres matières premières - ont pour pendant des investissements chinois en RPD de Corée, pour un montant au moins égal à 1 milliard de dollars, notamment dans le secteur des matières premières. Ces échanges s'effectuent aux conditions du marché, voire de manière plus favorable pour les investisseurs chinois.

Au regard de l'ancienneté, de l'étendue et de la diversité de leurs relations, la Chine fait de la stabilité de la péninsule coréenne un de ses objectifs de diplomatie, tout en encourageant la RPDC à adopter des réformes économiques similaires aux siennes pour accroître son rythme de développement économique. Les voyages en Chine de l'ancien dirigeant nord-coréen Kim Jong-il - alors que son successeur ne s'y est pas rendu depuis son accession aux plus hautes responsabilités du Parti et de l'Etat -  fin 2011 et début 2012 ont témoigné d'une influence du "socialisme de marché" à la chinoise sur les "mesures économiques" adoptées par la RPD de Corée depuis 2002, même si les réformes nord-coréennes ne sont aussi ni linéaires, ni aussi systématiques que dans la Chine des années 1980.

Après le premier essai nucléaire nord-coréen en d'octobre 2006, la Chine a fortement promu, tout en hébergeant les sessions de pourparlers, le dialogue à six (les deux Corée, la Chine, les Etats-Unis, la Russie et le Japon) pour résoudre pacifiquement la question nucléaire dans la péninsule coréenne. L'accord conclu à Pékin en février 2007 validait apparemment l'efficacité de la voie diplomatique. Mais les Etats-Unis et la Corée du Nord se sont accusés mutuellement de non-respect de leurs engagements, conduisant à une escalade des tensions marquées par un accroissement des exercices militaires américano-sud-coréens, la poursuite du programme nucléaire militaire et balistique nord-coréen et l'adoption en conséquences de sanctions toujours plus lourdes par le Conseil de sécurité des Nations Unies.

Dans ce contexte, et alors que le dirigeant chinois Xi Jinping a davantage mis l'accent sur les relations avec les deux Corée (la Corée du Sud et la Chine étant devenues des partenaires économiques majeurs), l'essai nucléaire nord-coréen de février 2013 a amené les autorités chinoises à renforcer leurs contrôles dans l'application des sanctions internationales, tout en gelant les avoirs de la RPDC dans la Foreign Exchange Bank. Des voix plus nombreuses - même si elles n'étaient pas les premières - se sont élevées en Chine pour remettre en cause l'alliance traditionnelle avec Pyongyang, et les gouvernements occidentaux ont espéré un changement de la politique nord-coréenne de la Chine, qui ne s'est toutefois pas produit malgré des ajustements et des infléchissements qui devraient se poursuivre après l'essai du 6 janvier dernier - notamment en ce qui concerne l'application des sanctions, le commerce bilatéral et plus particulièrement les livraisons d'hydrcocarbures nécessaires à l'économie nord-coréenne qui souffre toujours de pénuries d'énergie. Par ailleurs, la diplomatie chinoise est définie au plus haut niveau, et il ne faut pas surestimer l'influence de ceux qui préconisent en Chine même un changement de politique.

Après le rapprochement entre Pékin et Pyongyang opéré en 2015, les autorités chinoises ne peuvent qu'être irritées de la poursuite par la RPD de Corée d'une politique qui lui est propre, qu'elle définit elle-même sans concertation avec la Chine, et qui pourrait conduire à ce que d'autres Etats de la région (Corée du Sud et surtout Japon), qui expriment une certaine défiance vis-à-vis de la Chine, se dotent à leur tour de l'arme nucléaire. Par ailleurs, les tensions occasionnent un renforcement de la présence militaire américaine en Corée du Sud, déjà dirigée contre Pékin - comme en témoigne la construction de la base navale dans l'île sud-coréenne de Jeju. Enfin, le rapprochement nippo-sud-coréen, fin 2015, sur la question des "femmes de réconfort" (anciennes esclaves sexuelles de l'armée impériale japonaise)  est pleinement favorable aux intérêts américains pour forger une alliance tripartite visant implicitement la Chine - et alors même que les femmes de réconfort chinoises sont - avec d'autres - les grandes oubliées de l'accord Tokyo-Séoul du 28 décembre 2015. Le renforcement des sanctions internationales contre la Corée du Nord est enfin défavorable aux intérêts économiques chinois en RPDC. A plus long terme, la politique de sanctions des Etats-Unis et de leurs alliés tend à un étranglement économique visant à l'effondrement de la Corée du Nord - qui entraînerait une réunification sous l'égide du Sud pro-américain, héritant de l'arme nucléaire, et conduirait à l'accroissement des flux de réfugiés nord-coréens vers la Chine tout en créant une région d'instabilité et de trafics en tous genres à la frontière chinoise. Pékin est particulièrement concerné par les implications d'un tel scénario catastrophe.

Que Pékin appelle une nouvelle fois au dialogue entre toutes les parties et à la retenue est dans la continuité de sa politique coréenne. Il y a toutefois fort à parier que la Chine envisage d'autres voies pour y parvenir, utilisant ses relations avec toutes les parties, mais qui ne correspondront pas à un alignement sur les intérêts de Washington et Séoul, lesquels ne sont pas ceux de Pékin au-delà, à court terme, du renforcement des sanctions.

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2 septembre 2015 3 02 /09 /septembre /2015 22:07

A l'occasion des cérémonies marquant le 70e anniversaire de la victoire en Asie lors de la Seconde guerre mondiale, la République populaire de Chine accueille (RPC) quelque trente chefs d'Etat et de gouvernement étrangers - dont le Russe Vladimir Poutine et la Sud-Coréenne Park Geun-hye. Cette dernière, présente à Pékin du 2 au 4 septembre 2015, se démarque des pays occidentaux, qui n'ont pas souhaité être représentés au plus haut niveau, notamment lors de la parade militaire dans la capitale chinoise le 3 septembre, tandis que le Japon est absent. Si l'actuelle diplomatie sud-coréenne entend ne pas choisir entre les Etats-Unis, principal allié politique et militaire, et la Chine, premier partenaire économique, ce choix  de Mme Park Geun-hye d'aller à Pékin traduit une marque d'indépendance vis-à-vis de Washington, qui tranche avec l'alignement systématique de son prédécesseur Lee Myung-bak. Cette évolution favorise un approfondissement des échanges intercoréens, alors que Pékin se pose en médiateur, encourageant le dialogue entre la République de Corée (Corée du Sud) et la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord).

Rencontre au sommet entre Park Geun-hye et Xi Jinping

A l'occasion de leur sixième rencontre au sommet depuis 2013, la présidente sud-coréenne Mme Park Geun-hye et le président chinois M. Xi Jinping ont convenu, le 2 septembre 2015, d'approfondir leur coopération bilatérale, traditionnellement forte dans le domaine économique. En particulier, le Président Xi Jinping a rappelé la mise en place officielle de l'accord de libre échange et les progrès réalisés au sein de la Banque asiatique d'investissement et de développement des infrastructures (BAII).

S'agissant de la péninsule coréenne, si l'agence officielle sud-coréenne Yonhap a joué son rôle d'organisme pro-gouvernemental en titrant sur une prétendue "mise en garde" vis-à-vis de la RPDC "contre toute provocation", le texte précis émanant de la Maison Bleue sud-coréenne (et confirmé par le communiqué de l'agence officielle chinoise Xinhua) indique simplement que "les deux parties se sont opposées à tout acte pouvant attiser les tensions". Il s'agit de la reprise très exactement de la position chinoise, hostile tant aux essais nucléaires nord-coréens qu'aux manoeuvres militaires américano - sud-coréennes au large de la péninsule. Mais la formulation elliptique permet à Séoul d'en donner une interprétation conforme à sa position traditionnelle.

L'élément le plus significatif est en fait que les deux chefs d'Etat "s’accordent à penser que les pourparlers à six doivent reprendre rapidement", suite notamment au récent accord sur le nucléaire iranien. Ces pourparlers, visant à la dénucléarisation de toute la péninsule coréenne, impliquent les deux Corée, la Chine, les Etats-Unis, la Russie et le Japon et sont interrompus depuis 2008. Si la Chine est favorable à leur reprise sans conditions préalables, de telles conditions sont régulièrement rappelées par Washington et Séoul. Le fait que le communiqué ne mentionne plus ces préconditions peut être interprété comme un pas de Séoul en faveur de la reprise du dialogue multilatéral, même si cette position doit encore être exprimée plus explicitement par la République de Corée.

Par ailleurs, dans un contexte de tensions toujours vives entre Séoul et Tokyo à propos du révisionnisme historique japonais, il est significatif d'observer la représentation de la République de Corée à Pékin au plus haut niveau, à l'occasion de cérémonies qui, selon l'agence chinoise Xinhua, célèbrent la "victoire de la Guerre de résistance du Peuple chinois contre l'agression japonaise et de la Seconde Guerre mondiale". Les deux chefs d'Etat ont rappelé qu'ils avaient lutté ensemble contre le Japon. Ils n'en ont pas moins convenu d'organiser un sommet trilatéral avec le Japon, fin octobre ou début novembre, pour relancer le dialogue trilatéral, bloqué par les contentieux territoriaux et historiques, la dernière réunion datant de 2012, Mme Park Geun-hye remerciant par ailleurs Pékin pour son rôle joué dans l'apaisement des tensions régionales.

Sources :

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6 août 2015 4 06 /08 /août /2015 01:18

Le 28 juillet 2015, à l'occasion du 62e anniversaire de l'armistice ayant mis fin aux combats de la guerre de Corée - célébré en République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) comme la victoire dans la guerre de libération de la patrie - le Maréchal Kim Jong-un et l'Armée populaire de Corée ont rendu hommage non seulement aux deux premiers dirigeants du pays (Kim Il-sung et Kim Jong-il), mais aussi aux combattants coréens et chinois, rappelant ainsi que le rôle joué par l'Armée des volontaires du peuple chinois constitue un des fondements de l'amitié et de la solidarité entre la République populaire de Chine et la RPD de Corée.

La RPDC a honoré les volontaires chinois de la guerre de Corée

En déposant une gerbe de fleurs au cimetière des martyrs de l'Armée des volontaires du peuple chinois, en présence des différentes composantes de l'Armée populaire de Corée, ainsi que de la Garde rouge des ouvriers et des paysans, le Maréchal Kim Jong-un a rendu hommage au sacrifice des volontaires chinois ayant combattu étroitement aux côtés des Coréens :

Je présente mes respects aux martyrs de l'Armée populaire de Corée et à l'Armée des volontaires du peuple chinois [qui] ont donné leur vie précieuse dans cette guerre sacrée pour la liberté et l'indépendance du pays et la paix.

Je présente également mes respects aux vétérans de l'Armée des volontaires du peuple chinois qui ont combattu côte à côte avec nos soldats de l'Armée populaire et qui ont payé de leur sang la liberté et l'indépendance du peuple coréen et la paix en Orient.

Alors que la guerre de Corée s'est conclue par un simple accord d'armistice, l'Association d'amitié franco-coréenne milite pour l'établissement d'un traité de paix qui permette de mettre fin aux accrochages meurtriers qui ont trop endeuillé la péninsule coréenne depuis 1953.

La RPDC a honoré les volontaires chinois de la guerre de Corée

Source :

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12 janvier 2015 1 12 /01 /janvier /2015 22:45

Le 11 janvier 2015, les Etats-Unis ont rejeté la proposition faite par la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) de suspendre ses essais nucléaires si les Etats-Unis et leurs alliés (au premier rang desquels la République de Corée, Corée du Sud) renonçaient à leurs exercices militaires de grande ampleur autour de la RPDC, et dénoncés par Pyongyang comme des préparatifs de guerre. En fermant une nouvelle fois la porte du dialogue qu'avaient ouverte les Nord-Coréens, les Américains ont campé sur leur position de front de refus (ni dialogue, ni échanges et renforcement continu des sanctions - de nouvelles mesures ayant été prises au lendemain du piratage de Sony Pictures, dans lequel la RPD de Corée a pourtant nié toute implication et selon des accusations du FBI mises en doute par de nombreux experts occidentaux en sécurité informatique). Dans ce contexte, le rêve américain d'une coalition avec la République populaire de Chine sur la question nord-coréenne s'est avéré une nouvelle fois chimérique, un commentaire publié par l'agence de presse chinoise Xinhua, intitulé "La paix dans la péninsule coréenne requiert des actions réciproques" - dont nous reproduisons et commentons ci-après de larges extraits - montrant un élargissement du fossé entre Washington et Pékin, la Chine ayant soutenu de manière constante la résolution des différends dans la péninsule coréenne par la voie du dialogue.

Washington ferme la porte au dialogue avec Pyongyang : le refus américain est condamné par la Chine

Soulignant que l'offre de dialogue de Pyongyang avait non seulement été rejetée par Washington, mais dénoncée comme une "menace implicite", Xinhua regrette que le refus opposé au geste d'ouverture de Pyongyang ait éloigné la perspective d'une "solution pacifique" à la question coréenne, telle que la promeut la Chine dans le cadre, notamment, des pourparlers à six (les deux Corée, les Etats-Unis, la Chine, la Russie et le Japon) sur la question nucléaire, dont les sessions se sont tenues à Pékin jusqu'à 2008. Pour la Chine, une solution pacifique aux différends en suspens implique tout particulièrement de créer un climat de confiance entre les différentes parties, que ne contribue pas à instaurer le rejet catégorique opposé par les Etats-Unis.

"En fait, l'offre, que les Etats-Unis considèrent comme une 'menace implicite', est en quelque sorte un acte de bonne volonté publié par la République populaire démocratique de Corée (RPDC) pour une solution pacifique à la crise qui perdue depuis dix ans sur la péninsule coréenne.

La proposition est le dernier des efforts déployés ces derniers mois par l'administration Kim Jong Un pour apaiser les tensions et établir un dialogue basé sur la confiance ou un climat détendu avec les États-Unis et la Corée du Sud.

Malheureusement, cette proposition n'a pas été accueillie à bras ouverts."

 

La mention par Xinhua du changement d'administration à Pyongyang ("l'administration Kim Jong Un"), à un moment dont on peut observer qu'il marque la fin du deuil officiel de trois ans après la disparition du dirigeant nord-coréen Kim Jong-il, aurait pourtant dû favoriser un changement d'approche, selon l'agence de presse chinoise.

Soulignant implicitement (l'idée figure explicitement dans le titre de l'article) que des gestes doivent être accomplis de part et d'autre, le commentaire de Xinhua rappelle que la RPDC est "un pays isolé et sanctionné depuis des décennies" et que les préoccupations légitimes de Pyongyang quant à sa sécurité nationale conduisent logiquement à devoir lier la question nucléaire nord-coréenne et les exercices militaires américano-sud-coréens. Dissocier ces deux dossiers, comme veut le faire Washington, est un non-sens.  

"Les Etats-Unis n'ont pas remarqué, ou ont choisi d'ignorer, le changement positif potentiel à l'atmosphère intense entourant la péninsule coréenne qui pourrait être apporté si la proposition était mise en œuvre.

La sécurité nationale est la 'priorité des priorités' pour n'importe quel pays de la planète, et l'est encore plus pour une nation comme la RPDC qui est isolée et sanctionnée depuis des décennies.

Contrairement à ce qu'a dit Mme Psaki (porte-parole du département d'Etat américain), la possibilité d'essais nucléaires de Pyongyang et les exercices militaires américano-sud-coréens ne sont pas des dossiers distincts."

 

Soulignant que l' "arrogance aveugle" américaine n'a produit aucun résultat positif, ne faisant que renforcer l' "anxiété" et exacerber la "sensibilité" de la RPDC, le commentaire de Xinhua conclut en appelant les Etats-Unis à changer d'attitude et en soulignant que c'est à eux de prendre à présent les bonnes décisions, en répondant positivement aux "branches d'olivier" tendues par la Pyongyang : "la balle est maintenant dans le camp de Washington."

"Croyez-le ou non, la région et le monde en général ne bénéficiera en rien d'une RPDC acculée au mur et téméraire. L'arrogance aveugle et la négligence constante face aux branches d'olivier tendues par le pays pourraient s'avérer le coup de grâce pour la nation isolée.

Tout comme l'a exhorté la Chine à plusieurs reprises, un dialogue basé sur la confiance est la seule issue à l'impasse qui perdure depuis des décennies et pour la reprise des pourparlers à six sur la dénucléarisation de la péninsule, et cela a été approuvé par la communauté internationale.

Il est vivement souhaité que les Etats-Unis saisissent l'opportunité et répondent à la dernière offre par la positive. Après tout, la paix sur la péninsule et le rapprochement entre les ennemis de longue date nécessitent des actions réciproques. La balle est maintenant dans le camp de Washington."

 

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12 octobre 2014 7 12 /10 /octobre /2014 09:23

Le 10 octobre 2014, le ministre de la Justice de la République de Corée (Corée du Sud) a déclaré qu'un étudiant chinois - que nous appellerons Song - avait été expulsé du territoire sud-coréen en août et interdit définitivement d'y entrer pour avoir "aidé la Corée du Nord". Cette application exceptionnelle à un étranger de la loi de sécurité nationale (LSN) sud-coréenne plaide une fois encore pour l'abrogation d'une législation dénoncée comme contraire aux droits de l'homme, héritage des régimes autoritaires. La LSN interdit tout contact entre le Nord et le Sud de la péninsule et est toujours largement utilisée pour réprimer les mouvements d'opposition, au prétexte que leurs activités favoriseraient la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) - même si, dans l'immense majorité des cas, il n'y a aucun lien entre ces opposants et la Corée du Nord.

Tout d'abord, que s'est-il exactement passé ? La seule version des faits dans la presse a été donnée par le très conservateur quotidien sud-coréen Chosun Ilbo, que les services de renseignement sud-coréens (National Intelligence Service, NIS) privilégient comme leur porte-voix et comme instrument de leurs campagnes de désinformation sur la Corée du Nord. Ce scoop du Chosun Ilbo n'est donc pas surprenant, eu égard à ses liens aujourd'hui quasi-organiques avec le NIS : le quotidien puise ses informations à bonne source et en donne une lecture conforme aux intérêts du NIS.

Selon le Chosun Ilbo, "Song" est originaire de la province de Guangdong. Il est arrivé en Corée du Sud fin 2012 pour apprendre le coréen. Pendant son séjour, il aurait posté des messages sur Facebook critiquant les autorités sud-coréennes et faisant l'éloge du dirigeant nord-coréen Kim Jong-un. Le quotidien sud-coréen, prétendant avoir accès à une source gouvernementale (aveu quasi-implicite que ces informations viennent du NIS, alors que le ministère de la Justice a refusé de donner des détails), a ajouté que les messages, écrits en coréen et en chinois, donnaient "uniquement le point de vue nord-coréen" et continueraient d'être publiés même après son expulsion de la péninsule.

L'amalgame, vieille ficelle des services de renseignement du monde entier, fonctionne ici à plein régime : d'un regret que Song donne un point exclusivement nord-coréen nous glissons à l'éloge supposée du Maréchal Kim Jong-un, ce qui n'est évidemment pas la même chose. Naturellement, aucune preuve ni aucune citation des messages en question n'est fournie, permettant au NIS et au Chosun Ilbo de donner leur version exclusive des faits.

Mais pourquoi avoir choisi de communiquer ? La LSN est vivement critiquée par les ONG, le gouvernement américain, allié de la Corée du Sud, et la commission des droits de l'homme des Nations Unies comme contraire à l'exercice des libertés publiques. Quel est l'intérêt des autorités sud-coréennes, en pointe dans la dénonciation des droits de l'homme en Corée du Nord, de prêter elles-mêmes le flanc à la critique sur ce même terrain des droits de l'homme ?

Non seulement le NIS et la droite sud-coréenne, obsédées par le danger que constituent à leurs yeux la Corée du Nord et le "communisme", ne sont pas conscientes des atteintes aux droits de l'homme commises au nom de la LSN (ou les minimisent), mais elles les revendiquent comme un élément fondamental du respect de l'ordre et des institutions sud-coréennes. C'est grâce à la LSN, par exemple, qu'est interdit le débat sur les véritables causes du naufrage du Cheonan, ou que le député Lee Seok-ki a été déchu de son mandat et condamné à une peine de prison ferme en violation du principe universel d'inviolabilité du mandat parlementaire, fondement de la séparation des pouvoirs dans les démocraties parlementaires.

Le cas Song est d'autant plus inquiétant qu'il applique la sinistre LSN à un étranger, ce qui semble sans précédent, du moins dans l'époque récente. Par ailleurs, Song n'avait pas participé à des manifestations, ni mené des actions publiques : c'est bien l'expression de ses opinions qui était jugée inacceptable, révélant par ailleurs un contrôle toujours accru d'Internet et des réseaux sociaux par les autorités sud-coréennes.

Le but n'est-il pas d'intimider les étrangers vivant en Corée du Sud ? Mais pas seulement : l'article de presse déplore que ces messages continuent d'être postés... à l'étranger ! Or la loi de sécurité nationale, comme toute loi nationale, ne s'applique pas en dehors des frontières sud-coréennes. Et ce n'est malheureusement pas la première fois que les services secrets sud-coréens feignent de l'ignorer : il a été rapporté à l'AAFC que le NIS avait dénoncé des Français vivant en France au motif qu'ils violeraient la LSN. Les actions du NIS étaient clairement illégales, entraînant l'ouverture d'enquêtes judiciaires et une réaction du contre-espionnage français pour défendre la souveraineté nationale de notre pays et l'intégrité de ses ressortissants et des personnes placées sous la protection des lois françaises.

Face à ces expressions d'une évolution autoritaire en Corée du Sud, l'AAFC juge urgente l'abrogation de la loi de sécurité nationale ainsi que l'instauration qu'un contrôle politique du NIS, incluant l'opposition, comme dans toutes les démocraties parlementaires, pour mettre fin aux dérives de cette agence de renseignement qui confond sécurité nationale et intérêts partisans.

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4 juillet 2014 5 04 /07 /juillet /2014 08:39

En visite en République de Corée (Corée du Sud) les 3 et 4 juillet 2014, le président chinois Xi Jinping a mis l'accent sur le renforcement des liens économiques et diplomatiques traditionnels entre Pékin et Séoul, afin d'enrichir le "partenariat coopératif stratégique" entre les deux pays. L'Association d'amitié franco-coréenne revient sur les principaux résultats de cette visite.

Le Président Xi Jinping à Séoul (source : Le Monde / Reuters)

Le Président Xi Jinping à Séoul (source : Le Monde / Reuters)

Depuis l'établissement des relations diplomatiques entre la République populaire de Chine et la République de Corée (Corée du Sud) en 1992, les deux pays ont noué d'importantes relations économiques et politiques dans le cadre desquelles s'inscrit la visite du numéro un chinois Xi Jinping en Corée du Sud, ces 3 et 4 juillet 2014.

Les relations économiques et commerciales ont figuré au premier plan, avec la tenue d'un forum de coopération économique et commercial bilatéral le 4 juillet. L'un des objectifs affirmés a été de porter le commerce bilatéral à 300 milliards de dollars en 2015, en mettant l'accent sur des domaines tels que les nouvelles énergies, les télécommunications et les systèmes de fabrication intelligents. Les négociations bilatérales sur un accord de libre échange doivent s'accélérer en vue d'une conclusion avant la fin de cette année, la Chine souhaitant en outre établir un système de compensation du yuan. Par ailleurs, des dispenses de visa ont été évoquées par le président chinois afin d'encourager les échanges de personnes, alors que les deux pays doivent s'engager dans le cadre d'années croisées sur le tourisme en 2015 et 2016.

S'agissant des relations internationales, Pékin et Séoul ont insisté sur la nécessité d'une reconnaissance par le Japon du crime commis à l'encontre des "femmes de réconfort" - les anciennes esclaves sexuelles de l'armée nippone pendant la Seconde guerre mondiale. Ils ont par ailleurs dénoncé les déclarations du Premier ministre Shinzo Abe sur la possibilité que le Japon engage des troupes pour aider ses alliés en cas d'attaque comme étant contraire à la Constitution pacifiste japonaise - la position de Tokyo ayant en revanche reçu le soutien des Etats-Unis. L'année prochaine marquera le 70ème anniversaire de la victoire dans la Seconde guerre mondiale, les Chinois et les Coréens ayant été les uns et les autres victimes du militarisme japonais.

Alors que la construction de la base navale dans l'île de Jeju, qui pourra accueillir des équipements américains, apparaît comme implicitement dirigée contre la Chine, les deux pays ont simplement envisagé d'engager des discussions sur leurs frontières maritimes.

Sur la question très attendue du nucléaire, la déclaration conjointe a réaffirmé que les deux pays étaient opposés à la présence d'armes nucléaires dans la péninsule coréenne et que cette question devait être réglée dans le cadre des pourparlers à six, la Chine ayant une "évaluation active" (et pas explicitement un soutien) des "efforts" sud-coréens pour améliorer les relations intercoréennes en vue d'une réunification pacifique de la péninsule. La rédaction employée se réfère à toute la péninsule coréenne (Nord comme Sud), sans mention explicite des armes nucléaires nord-coréennes dans la déclaration conjointe. Les formules utilisées tiennent compte de l'équilibre des relations qu'entretient la Chine avec les deux gouvernements coréens.

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24 juin 2014 2 24 /06 /juin /2014 23:31

A la différence de la Corée, la Chine est un État pluriethnique qui mélange plus d’une cinquantaine de « nationalités » (selon le lexique chinois), dont notamment l’ethnie ultramajoritaire Han qui compose 92% de la population de la République Populaire de Chine. Parmi les autres nationalités, on compte notamment les Ouïghours, les Tibétains, les Zhuang (un groupe vietnamien de Chine), les Hui et… les Coréens. Alors que les premiers, beaucoup plus importants en termes démographiques, disposent tous de régions autonomes de niveau national (respectivement le Xinjiang, le Tibet, le Guangxi, le Ningxia), les Coréens de Chine habitent d’abord la Préfecture Autonome Coréenne de Yanbian, située dans la province chinoise du Jilin et frontalière de la République Populaire et Démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord). A l’occasion d’un séjour en RPDC courant mai, un adhérent de l’Association d’amitié franco-coréenne (AAFC) a eu l’opportunité de séjourner dans la capitale de la préfecture autonome coréenne de Chine, Yanji, à la rencontre des Chaoxianju (Coréens de Chine).

 

Selon diverses estimations, il existe actuellement entre deux et trois millions de Chinois d’ethnie coréenne. Si l’immense majorité d’entre eux réside dans le nord-est chinois (le fameux Dongbei, composé du Liaoning, Jilin, Heilongjiang), ils sont particulièrement concentrés à Yanbian, puisque la préfecture en héberge plus de 800 000. La structuration de la minorité coréenne de Chine est particulièrement complexe puisque les Coréens de Chine sont à la fois issus de vagues d’immigration plus ou moins récentes, mais aussi de la mobilité extrême de la frontière Chine/Corée/Russie au fil des siècles. Rappelons-le, il y a de cela plusieurs siècles, l’actuel territoire coréen a été occupé au moins en partie par plusieurs dynasties « chinoises » (au sens politique plus qu’ethnique, certains empereurs chinois ayant occupé une partie de la péninsule coréenne étant issus de diverses ethnies mongoles – les dynasties Liao et Yuan notamment), d’où un métissage ethnique déjà relativement ancien et des liens culturels très forts : avant l’invention de l’alphabet syllabaire coréen en 1443 (appelé hangeul en Corée du Sud et chosongeul en Corée du Nord), la langue coréenne s’écrivait par exemple à l’aide des sinogrammes. Par ailleurs, comme les lecteurs réguliers du blog de l’AAFC le savent peut-être, parmi les Coréens ayant vécu une partie de leur vie dans le nord-est chinois et l’actuelle Yanbian, on trouve notamment Kim Il-sung (ayant animé en exil la guérilla antijaponaise) et son fils Kim Jong-il, respectivement président de la RPDC et Secrétaire Général du Parti du Travail de Corée.

 

Plus récemment, la frontière sino-(nord)-coréenne a été tracée à la fois à l’occasion des « traités inégaux » opposant la dynastie russe des Romanov à celle, sur le déclin, des Qing chinois (d’ethnie mandchoue), ce qui a eu pour principal effet la perte de la façade maritime chinoise (la ville de Vladivostok redevenant ainsi russe en 1860). Un siècle plus tard, avec l’avènement de la République Populaire de Chine (1949), et l’alliance sino-coréenne forgée dans le feu de la Guerre de Corée (1950-1953), naissait la « zone autonome » puis la « préfecture autonome » de Yanbian. Si la décentralisation importante de pouvoirs politiques à une ethnie n’était pas chose rare en Chine au début des années 1950 (c’est l’époque du fameux accord en 17 points sur la libération pacifique du Tibet), Yanbian revêt très vite un statut tout à fait particulier de par sa localisation stratégique : sas de communication et couloir économique de première importance entre Chine et Corée populaire, l’état-major militaire américain envisagera, au plus fort de la Guerre de Corée, de procéder à des frappes nucléaires sur la zone pour isoler la péninsule du continent (créer une « ceinture de cobalt radioactif » selon le vocable américain). Par ailleurs, l’histoire personnelle du dirigeant chinois Mao Zedong témoigne de l’importance prise par la préfecture de Yanbian : alors qu’est souvent évoqué le destin tragique de Mao Anying, fils de Mao disparu pendant la Guerre de Corée, il est moins connu que son propre neveu fut un temps (en pleine révolution culturelle) à la tête de Yanbian.

 

Un temps « minorité modèle », les Coréens de Yanbian ont subi coup sur coup un certain nombre de revers économiques majeurs, notamment la perte d’attractivité du Dongbei (aujourd’hui cœur industriel en net déclin) après la disparition de l’Union Soviétique, et la concurrence des provinces côtières exportatrices du sud de la Chine (Guangdong, Fujian) après « l’ouverture » menée par Deng Xiaoping dans les années 1980. Frontalière à la fois de la Corée du Nord et de la Russie, Yanbian a connu à la fois un sévère ralentissement économique consécutif à l’implosion soviétique et la « dure marche » en RPDC dans les années 1990. Aujourd’hui, les choses semblent lentement évoluer positivement, grâce notamment à l’investissement sud-coréen (en témoignent les nombreux édifices chrétiens de Yanji) et aux perspectives offertes par la Zone Économique Spéciale nord-coréenne de Rajin-Sonbong située à moins de 50km au sud. Cette dernière offre à Yanbian un débouché sur la mer de l’Est qui permet de désenclaver l’ensemble du nord-est chinois et offre une alternative au port russe de Vladivostok, qui gèle durant l’hiver. La mise en valeur relativement nouvelle de cette situation de carrefour (la ZES de Rason a été ouverte en 1991, mais le projet n’a véritablement pris forme qu’avec l’inspection du dirigeant Kim Jong-il en 2009) n’est pas sans soulever beaucoup d’espoir pour l’ensemble de l’Asie du nord-est, dont l’économie stagne depuis plusieurs années. Certains programmes soutenus par l’ONU (notamment le Greater Tumen Initiative) ont d’ailleurs pour objet de développer les infrastructures nord-coréennes et les liaisons entre Yanbian et la RPDC (ainsi que, dans une moindre mesure, la Russie). En effet, une part importante des investisseurs chinois en RPDC sont d’ethnie coréenne, issus de Yanbian, ce qui explique notamment la présence d’une délégation commerciale de la ZES de Rason dans la capitale de la préfecture, Yanji. Nous avons eu l’occasion de rencontrer des investisseurs chinois (et coréens américains) actifs dans la zone, qui ont pu nous exposer les difficultés mais aussi les perspectives offertes par le commerce transnational.

 

Si les grandes villes de la zone comme Yanji ou Tumen évoquent surtout la tristesse granitique de beaucoup de villes chinoises de cette importance, il ne faut pas s’y tromper : il existe encore de nombreuses traces d’architecture coréenne traditionnelle à découvrir, ainsi que de vibrants quartiers coréens, qui mélangent des Coréens du Nord, du Sud, de Chine ainsi que quelques Coréens américains. Située à trois heures de route de la ZES de Rason, deux heures du mont Paektu (Changbai en chinois) et une demi-heure de la frontière sino-nord-coréenne, il est plus que conseillé aux lecteurs intéressés par l’amitié sino-coréenne de s’attarder dans cette troisième Corée.

Yanbian : bienvenue dans la Corée chinoise
Yanbian : bienvenue dans la Corée chinoise
Yanbian : bienvenue dans la Corée chinoise
Yanbian : bienvenue dans la Corée chinoise

Sources :

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