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11 novembre 2018 7 11 /11 /novembre /2018 13:37

Le 9 novembre 2018, le Président Moon Jae-in a remplacé les deux principaux acteurs de la politique économique du gouvernement : le ministre de l'Economie Kim Dong-yeon et le conseiller présidentiel en charge de l'économie Jang Ha-sung étaient ouvertement en désaccord, le second voulant poursuivre une politique de croissance basée sur l'augmentation des revenus (dont il est l'inspirateur, et qui figurait dans le programme du Président Moon Jae-in), quand le premier entendait mettre l'accent sur la déréglementation de l'économie. Kim Dong-yeon et Jang Ha-sung ont été remplacés respectivement par Hong Nam-ki et Kim Su-hyun. Alors que la politique économique est un sujet majeur de divergences entre le gouvernement et l'opposition conservatrice (avec la politique d'ouverture au Nord du Président Moon), les médias français ont très largement répété les éléments de langage figurant dans une dépêche de l'AFP, laquelle apporte une image complètement biaisée des termes du débat en reprenant les arguments douteux des opposants de droite au Président Moon. 

De gauche à droite : Hong Nam-ki et Kim Su-hyun, respectivement nouveau ministre de l'Economie et nouveau conseiller présidentiel chargé des politiques économiques

De gauche à droite : Hong Nam-ki et Kim Su-hyun, respectivement nouveau ministre de l'Economie et nouveau conseiller présidentiel chargé des politiques économiques

En apparence, la dépêche de l'AFP peut sembler factuelle : elle précise les changements d'acteurs, met en exergue le conflit qui opposait Kim Dong-yeon et Jang Ha-sung et rappelle les données macro-économiques de la Corée du Sud. En réalité, elle biaise - délibérément ? - les données politiques et économiques en soulignant implicitement que la politique du Président Moon Jae-in serait à l'origine d'un ralentissement de l'économie présenté comme inquiétant. Cette lecture partisane s'inspire directement de l'argumentaire de la droite conservatrice qui avait engagé la République de Corée sur une pente autoritaire avant d'être chassée par le peuple lors de la révolution des bougies. Cette présentation et cette analyse biaisées ne résistent pourtant pas à l'examen des faits. 

Le remaniement ministériel est d'abord décrit comme un "limogeage". Nous avons de la chance, le journaliste de l'AFP aurait pu parler de "purge" - mais l'accusation de "dictature"  (à laquelle les "purges" sont nécessairement liées) ne fait pas (pas encore ?) partie des faux procès lancés contre les démocrates coréens, qui sont au contraire - faut-il le préciser ? - les héritiers de ceux qui ont abattu le régime de la junte militaire. Le journaliste de l'AFP aurait été bien inspiré de rappeler que dans le système sud-coréen c'est le Président de la République qui forme le gouvernement sans le paratonnerre du Premier ministre, mais donner au lecteur des clés pour se forger sa propre opinion ne fait pas partie de la culture de l'AFP. 

Ensuite, la politique de relance économique du Président Moon Jae-in - d'inspiration keynésienne - est réduite à quelques appréciations sommaires et, bien entendu, décrite comme "sujette à controverse". Relisons les éléments de langage de l'AFP : 

À l'international, Moon s'est fait connaître pour son rôle dans la spectaculaire détente en cours avec le voisin du Nord armé de la bombe nucléaire. Mais à domicile, sa politique économique est de plus en plus sujette à controverse et sa cote de popularité descend dans les sondages. Son gouvernement a nettement augmenté le salaire minimum, réduit la durée du travail et transformé des contrats de travail temporaires en contrats à durée indéterminée dans le cadre d'une politique de redistribution destinée à stimuler une "croissance portée par les revenus".

AFP (via "La Tribune")

La désinformation commence dès la première phrase : Moon Jae-in a le mauvais goût de vouloir dialoguer avec le régime honni - forcément honni - du Nord car "armé de la bombe nucléaire" (le mot "armé" est employé de préférence à celui de "doté", car il occulte délibérément la stratégie de dissuasion nucléaire de la Corée du Nord qui a développé l'arme atomique pour ne pas connaître le sort de l'Irak ou de la Libye, et parce qu'il a le mérite d'introduire dans l'esprit du lecteur l'idée d'un risque de guerre fondé, forcément, sur la dangerosité d'un Etat puissance nucléaire).

Le processus de réécriture des faits continue en utilisant le procédé de l'omission : la cote de popularité du Président Moon Jae-in diminue. C'est un fait, indéniable, sauf qu'elle n'est jamais tombée en dessous de 50 %. Une précision que le journaliste de l'AFP juge sans doute contre-productive, car elle irait à l'encontre de sa démonstration. Et corréler cette cote de popularité sur la politique économique relève de la pure désinformation : la cote de popularité du président sud-coréen suit au contraire les développements internationaux autour de la péninsule coréenne, rebondissant lors des sommets inter-coréens. Et si elle baisse aujourd'hui, c'est d'abord parce qu'elle part de très haut (jusqu'à 75 % de satisfaits !). 

Vient enfin l'essentiel : la politique menée, basée sur une hausse du salaire minimum, une résorption de l'emploi précaire (par la transformation de contrats de travail en contrats à durée indéterminée) et la réduction du temps de travail. Tout cela est balayé en une demi-phrase, sans recontextualiser ni juger utile d'apporter des détails : rappeler que la durée maximum hebdomadaire de travail a été réduite de... 68 à 52 heures ou que la République de Corée est le champion de l'OCDE pour la durée du travail, ou encore que le travail précaire place la Corée du Sud très en-dessous des standards de l'OCDE, serait allé à l'encontre de la démonstration forcée imposée par l'AFP, et reprise par l'immense majorité des médias français. 

Après cette mise en bouche - ou ce conditionnement - est asséné l'argument d'autorité : la politique économique du gouvernement sud-coréen rompt avec le passé et aujourd'hui la croissance diminue. La boucle est bouclée : il faut accréditer l'idée que la Corée du Sud suivrait un mauvais chemin économique et devrait impérativement changer de cap. Citons là encore ce que dit l'AFP, qui fait pleinement coprs avec les conservateurs sud-coréens (qui, faut-il le préciser, recueillent 20 % des intentions de vote, soit moitié moins que les démocrates au pouvoir) : 

Il s'agit d'un revirement complet par rapport au modèle de croissance passé, porté par les exportations et les investissements des énormes conglomérats sud-coréens, et qui a vu l'économie sud-coréenne se hisser au quatrième rang asiatique.
Les critiques du gouvernement affirment que cette politique a eu l'effet inverse de celui escompté, en aggravant la situation des gens aux revenus les plus faibles et en forçant les petites entreprises à licencier, tandis que les mastodontes hésitent à investir au vu du renforcement des régulations. Le mois dernier, la banque centrale avait ramené sa prévision de croissance annuelle à 2,7%, contre un taux effectif de 3,1% en 2017. Au troisième trimestre, le taux de chômage a avancé de 0,4%, à 3,8%, le taux de chômage des jeunes s'établissant à 9,4%, soit son plus haut niveau depuis 1999.

AFP (via "La Tribune")

Relisons bien ce qu'écrit l'AFP : auparavant la Corée du Sud suivait un "modèle de croissance", un modèle qui lui a permis de devenir la quatrième économie d'Asie. L'auteur de la dépêche n'ose pas parler de miracle, mais seul le mot manque, et l'idée implicite est limpide : la rupture avec le modèle produit des effets négatifs. 

La déformation des faits attend ici des sommets : non seulement ce n'est pas parce qu'un modèle a fonctionné qu'il sera toujours performant, mais plus fondamentalement le miracle du fleuve Han (qui traverse Séoul) est en partie la création d'économistes néolibéraux qui omettent quelques points pourtant fondamentaux : que la croissance sud-coréenne a été basée sur un dirigisme étatique accordant des avantages à une poignée de conglomérats liés au pouvoir militaire (les chaebols) ainsi que sur l'injection massive de capitaux étrangers, et pas sur l'application de la doxa libérale ; que les contreparties (très longues journées de travail, faible protection sociale, dualisme entre les grandes entreprises et le reste de l'économie, milices privées brisant les grèves et tuant au besoin les syndicalistes) sont la face cachée de ce qui n'est pas précisément un paradis des travailleurs. Enfin, les conglomérats ont dû être réformés de force, l'accumulation de dettes pourries au sein de ces entreprises étant une des causes directes de la crise asiatique de 1998, qui a conduit au plongeon de l'économie sud-coréenne et à l'injection la plus massive de l'histoire de capitaux des institutions financières internationales dans l'économie d'un pays. A l'époque le chômage (et singulièrement le chômage des jeunes) a atteint un pic en 1999, point certes mentionné par l'AFP mais en oubliant curieusement de faire la moindre référence à la crise asiatique de 1998.

Rapprocher la politique actuelle du ralentissement économique en cours relève non seulement de la mauvaise foi, mais de mensonges sur les mécanismes économiques : la politique de relance actuelle par les revenus produit nécessairement de la croissance à court terme (c'est sur le plus long terme que les économistes divergent, suivant leurs références), si bien que la croissance économique de l'année 2018 serait au contraire encore plus faible sans le soutien aux revenus et à la consommation des ménages. Si l'économie sud-coréenne s'est autant ralentie ces dernières années, c'est bien davantage du fait des effets à moyen et long termes des politiques de dérégulation des prédécesseurs libéraux-autoritaires du Président Moon, qui eux n'ont pas été avares en "réformes". Qu'il est loin le temps où le président Lee Myung-bak (au pouvoir entre 2007 et 2012, et aujourd'hui en prison pour corruption) promettait 7 % de croissance économique par an !

Ce qui est reproché au Président Moon Jae-in est bien son refus de s'inscrire dans la politique de déréglementation néolibérale : ne pas se soumettre aux injonctions des détenteurs de capitaux lui vaut une volée de bois vert, et suffit manifestement à justifier les arrangements de l'AFP avec la vérité. 

PS : la dépêche de l'AFP a été reprise pratiquement mot à mot par les médias suivants, entre autres : 

- Ouest France

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29 octobre 2018 1 29 /10 /octobre /2018 23:54

Alors que la croissance économique de la République de Corée (Corée du Sud) continue de ralentir (ayant atteint 0,6 % en glissement trimestriel au troisième trimestre 2018), entraînant une révision à la baisse (de 2,9 % à 2,7 %) du taux de croissance prévu par la Banque centrale coréenne pour l'ensemble de l'année 2018, les perspectives de reprise des échanges économiques Nord-Sud sont susceptibles de dynamiser l'économie du pays. Les sanctions contre la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) constituent cependant un lourd facteur d'incertitudes.

Le ministre des Finances Kim Dong-yeon (à gauche) s'entretenant avec le gouverneur de la Banque centrale Lee Ju-yeol (à droite), lors d'une audition parlementaire, le 29 octobre 2018.

Le ministre des Finances Kim Dong-yeon (à gauche) s'entretenant avec le gouverneur de la Banque centrale Lee Ju-yeol (à droite), lors d'une audition parlementaire, le 29 octobre 2018.

La présence de dirigeants de 17 entreprises sud-coréennes, dont les représentants des principaux conglomérats du pays, aux côtés du Président Moon Jae-in lors de sa visite à Pyongyang (du 18 au 20 septembre 2018) n'est pas passée inaperçue : indéniablement, les grands groupes sud-coréens - qui disposent tous d'instituts en charge des relations Nord-Sud (pour appréhender le Nord tant en termes de risque politique que d'opportunité d'investissements et de projets conjoints) - voient dans le rapprochement inter-coréen en cours l'occasion d'envisager une présence dans le Nord de la péninsule, qui combinerait les moindres coûts de la main-d'oeuvre disciplinée et bien formée du Nord et les capitaux du Sud. Une telle association capital-travail est d'ailleurs celle qui a été à l'oeuvre dans la zone économique de Kaesong jusqu'à sa fermeture en 2016, avec cette différence - de taille - que ce sont des PME sud-coréennes qui investissaient à Kaesong (même si le pilotage et l'infrastructure du projet dépendaient de Hyundai Asan, filiale du conglomérat Hyundai). Désormais, outre un possible redémarrage de la zone économique de Kaesong, la question est posée du possible investissement des grands groupes sud-coréens au Nord de la péninsule, parallèlement à la conduite d'études sur des projets structurants pour l'économie de l'ensemble de la Corée (comme le raccordement des réseaux routiers et ferroviaires, qui désenclaveraient le Sud de péninsule du reste du continent eurasiatique). 

L'actuel régime drastique de sanctions internationales contre la Corée du Nord ne permet pas aujourd'hui de (nouveaux) investissements économiques sud-coréens, mais le plaidoyer de Séoul pour l'assouplissement des sanctions ne répond pas seulement à des considérations politiques (payer en retour les efforts accomplis par Pyongyang dans son processus de dénucléarisation, tout en soutenant la poursuite du dialogue Nord-Sud, ne pas laisser la Chine être - de loin - le principal partenaire économique de la RPD de Corée), mais aussi à des préoccupations visant à freiner le ralentissement économique en cours - qui ne sont toutefois pas affichées comme telles. En attendant le déblocage de la situation diplomatique qui permettrait d'envisager la levée de tout ou partie des sanctions, les grands groupes sud-coréens n'ont pas eu besoin du feu vert gouvernemental pour envisager l'installation d'unités de production dans la moitié septentrionale du pays, partageant une proximité géographique et une langue commune avec le Sud. S'ajoutent, pour certains groupes, des considérations liées au parcours personnels des membres des familles dirigeant les conglomérats - comme dans le cas de Chung Ju-yung, ancien dirigeant du groupe Hyundai, originaire du Nord.

Des investissements conjoints inter-coréens pourraient s'appuyer soit sur des exemptions explicites, dûment approuvées, au régime international de sanctions contre la Corée du Nord, soit sur une révision générale du cadre des sanctions. Au demeurant, Pyongyang a fait de la levée au moins partielle des sanctions l'une de ses priorités diplomatiques.

En attendant une éclaircie de la situation internationale, les autorités sud-coréennes ont aussi la possibilité de lever tout ou partie des mesures dites du 24 mai, prises après le dramatique naufrage de la corvette Cheonan, attribué jusqu'à présent par Séoul - malgré le caractère peu convaincant de l'enquête officielle, et les conclusions contraires de nombreux experts indépendants - aux autorités nord-coréennes. Un tel geste est à portée de main pour l'administration Moon Jae-in, malgré la levée de boucliers prévisible des conservateurs qui, alors au pouvoir, avaient mis en place les mesures du 24 mai. 

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17 octobre 2018 3 17 /10 /octobre /2018 20:50

Si les échanges entre le président sud-coréen Moon Jae-in et son homologue français ont été particulièrement décevants pour les autorités sud-coréennes et pour la paix dans la péninsule, compte tenu de la position ultra-conservatrice d'Emmanuel Macron, les autres rencontres inscrites au programme de la visite en France du président de la République de Corée, le 16 octobre 2018, ont été nettement plus prometteuses pour l'avenir des relations franco-coréennes. Retour sur ces échanges.

Avec Edouard Philippe : cap sur les coopérations économiques vecteurs de modernisation technologique

Edouard Philippe, Anne Hidalgo, Audrey Azoulay : le contenu de leurs échanges avec Moon Jae-in

Si l'augmentation du nombre de vols directs entre la France et Séoul a été l'aspect le plus commenté par l'agence officielle Yonhap des échanges entre le Président Moon Jae-in et le Premier ministre Edouard Philippe, c'est plus largement l'essor des relations économiques qui a été mis en avant, en étant resituées dans une perspective historique (introduction de la technologie du TGV à Séoul, développement conjoint d'un satellite). Selon les services de la présidence sud-coréenne,

En notant que l'introduction du train à grande vitesse (TGV) en Corée du Sud durant les années 1990 et d'autres projets économiques conjoints, tels que le développement conjoint d'un satellite au cours des années 2000, ont fourni de grands avantages aux peuples des deux pays, le président Moon et le Premier ministre Philippe ont convenu de continuer à explorer de nouveaux domaines de coopération en étendant continuellement le commerce et les investissements entre les deux pays.

Parmi les nouveaux secteurs de coopération ont ainsi été mentionnés le changement climatique, l'intelligence artificielle et les technologies de l'information et de la communication. Toujours selon les autorités sud-coréennes, il s'agit de secteurs clés pour la "quatrième révolution industrielle". Dans un contexte de ralentissement de la croissance économique en Corée du Sud, cette approche s'inscrit dans une conception du progrès économique telle qu'analysé par Joseph Schumpeter - selon laquelle les innovations technologiques déterminent les cycles de croissance.

Lors de ses rencontres avec les milieux économiques, le Président Moon Jae-in a aussi observé que l'établissement d'un régime de paix durable dans la péninsule coréenne sera un facteur de croissance économique.

Anne Hidalgo a apporté son soutien à l'organisation conjointe des Jeux olympiques de 2032 par toute la Corée

Edouard Philippe, Anne Hidalgo, Audrey Azoulay : le contenu de leurs échanges avec Moon Jae-in

Si la réception dans les salons de l'hôtel de ville de Paris d'un chef d'Etat en visite officielle en France fait partie des usages protocolaires, la maire de Paris Anne Hidalgo a appuyé le projet du Président Moon Jae-in d'une candidature conjointe des deux Etats coréens à l'organisation des Jeux olympiques de 2032. La première édile parisienne a observé que ce projet était conforme à l'esprit de l'olympisme.

Tout en témoignant de sa connaissance du rôle de la France et de Paris dans le mouvement de libération de la Corée alors soumise à la colonisation japonaise, le Président Moon Jae-in a aussi plaidé pour un soutien de la ville de Paris à la participation conjointe d'athlètes nord et sud-coréens aux Jeux Olympiques de Paris en 2024, alors que la constitution d'équipes conjointes inter-coréennes lors de récents événements sportifs est l'une des manifestations les plus éclatantes du renouveau du dialogue et des échanges Nord-Sud.

Avec Audrey Azoulay : augmentation du soutien de l'Unesco aux programmes éducatifs à destination de la RPDC

Lors de leur rencontre, le Président Moon Jae-in et la directrice générale de l'Unesco, la Française Audrey Azoulay, ont convenu de favoriser la coopération et la paix dans la péninsule coréenne, par une augmentation des aides à la Corée du Nord dans le domaine de l'éducation et en promouvant la désignation de la zone démilitarisée (DMZ) entre les deux Corée comme réserve mondiale de biosphère.

Sources :

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25 juin 2018 1 25 /06 /juin /2018 22:33

Dans A Most Enterprising Country, Justin V. Hastings développe une étude exhaustive et approfondie des modalités d'insertion de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) dans l'économie internationale, qu'il s'agisse de réseaux formels ou informels. Battant en brèche le stéréotype d'un pays isolé, Justin V. Hastings n'en reste pas moins proche du courant dominant d'analyses anglo-saxon – l'auteur reconnaissant d'ailleurs sa dette vis-à-vis des sources secondaires. Il considère en effet que l'économie «  grise  » représenterait le principal (sinon, l'unique) moteur de croissance économique et aurait constitué un facteur essentiel de développement des programmes nucléaires et balistiques. De même, bien que pondéré et prudent, il se montre pour le moins peu optimiste – non sans raisons – quant au climat des affaires pour les investisseurs étrangers. Ainsi, il accuse selon nous une certaine dépendance par rapport aux auteurs ayant cru – à tort – à l'effondrement prochain de la Corée du Nord, comme Stephan Haggard et Marcus Noland, sans toutefois reprendre toutes leurs conclusions, et ne questionne pas le manque de fiabilités d'informations provenant de sources militantes engagées anti-Corée du Nord, enclins à une certaine propagande (DailyNK, One Free Korea...), tout en ignorant a contrario les sources officielles nord-coréennes au motif que les discours officiels et la pratique divergent fortement, notamment en ce qui concerne le contrôle économique public. Dans ce contexte, les sources primaires – notamment dans le chapitre 4 – auprès d'investisseurs chinois en Corée du Nord sont d'autant plus intéressantes qu'elles nuancent un tableau globalement sombre (qu'illustrent les cas des pertes massives enregistrées par China Minmetals Corporation et Xiyang, couverts dans les médias occidentaux), en mettant également en avant des investissements étrangers en Corée du Nord qui apparaissent comme des succès, peu médiatisés, mais riches d'enseignements pour les potentiels investisseurs en Corée du Nord. Sans partager nécessairement les vues de l'auteur, nous traduisons ainsi de l'anglais, ci-après, l'exemple qu'il cite de la réparation automobile (p. 169-170), dans un paragraphe intitulé «  Le zen de la maintenance automobile  ».

Un exemple d'investissement étranger réussi en Corée du Nord : la réparation automobile

Un cas, celui d'un homme d'affaires chinois impliqué dans la réparation automobile en Corée du Nord, montre à quoi ressemble un investissement en Corée du Nord ayant eu un certain succès. L'investisseur chinois avait été alerté du marché potentiel de la réparation automobile par un ami qui lui avait mentionné l'état très dégradé des véhicules nord-coréens, et le fait que les Nord-Coréens manquaient de pièces de rechange. Après avoir fait lui-même un voyage exploratoire en Corée du Nord, l'investisseur avait conclu qu'il existait un marché pour la réparation des voitures des entreprises publiques et des représentants de l'administration civile, dans la mesure où ils disposaient de véhicules mais d'un faible accès aux moyens de réparation (peu adaptés) des militaires, et dépendaient ainsi de boutiques gérées par les Chinois. Finalement, il a créé des boutiques de réparation à Pyongyang et à Sinuiju.

 

Ce propriétaire d'une entreprise de réparation automobile a limité sa prise de risque en structurant son investissement de manière à limiter ses liens financiers et matériels avec la Corée du Nord. La nature du commerce de réparation automobile signifiait que les paiements immédiats étaient la norme, et qu'il n'avait donc pas à s'inquiéter du risque de non-paiement, à la différence des commerçants qui affrètent par bateau des biens pour les Nord-Coréens. Il n'a également employé que des travailleurs chinois, ce qui n'a pas rendu nécessaire de recourir à une main-d'oeuvre nord-coréenne et à l'appareil d'Etat qui la contrôle. Au final, l'investissement en capital nécessaire aux boutiques était faible  ; les pièces elles-mêmes étaient approvisionnées depuis la Chine, le besoin d'embauche ne s'élevait qu'à quatre ou cinq travailleurs chinois, et il n'y avait guère à s'approprier par les autorités nord-coréennes au cas où elles en arriveraient là. La nature de l'investissement immunisait ainsi largement l'investisseur contre les risques économiques et politiques.

 

A la différences d'autres investissements, celui dans les boutiques de réparation automobile a autorisé l'homme d'affaires à construire des réseaux sociaux qui auraient sinon nécessité de verser de l'argent et, à part les douanes, il affirme n'avoir pas eu besoin de payer qui que ce soit. A son arrivée, il a offert ses services à d'autres hommes d'affaires chinois travaillant en Corée du Nord, qui après six mois l'ont à leur tour présenté à des officiels nord-coréens, qui avaient tous besoin de services de réparation, et qui étaient en position de lui permettre de faciliter ses accords commerciaux dans le pays. Cette stratégie s'est avérée payante à certains égards. Aux douanes à Sinuiju, l'homme d'affaires avait d'abord dû verser de fortes sommes et remettre de grands quantités d'alcool, surtout à partir du moment où il a commencé à faire venir des travailleurs chinois, mais quand il a commencé à réparer les voitures des officiels des douanes, il a obtenu des contacts qui lui ont permis d'éviter les tracas douaniers, et le besoin de payer (au-delà de la simple fourniture de cigarettes) a diminué.

 

En même temps, les boutiques de réparation étaient souvent obligées d'accepter des paiements en nature (sous la forme par exemple de ginseng) des services rendus – ce qui a obligé l'homme d'affaires à faire des démarches supplémentaires en ramenant ses biens en Chine pour les vendre et réaliser ses gains – et des officiels gouvernementaux étaient autorisés à obtenir des réparations gratuites mensuelles dans une certaine limite en dollars. L'homme d'affaires a vu ces pertes dans ses entreprises comme un moyen d'établir des contacts avec les personnes appropriées, pour construire ses réseaux à l'intérieur du pays et recueillir des informations sur les conditions pour faire des affaires en Corée du Nord. Finalement, il a considéré les boutiques de réparation comme lui ayant ouvert la possibilité d'investissements plus importants et plus profitables dans le pays.


L'investisseur chinois a reproduit nombre des caractéristiques des réseaux commerciaux qui ont fait le succès des Nord-Coréens pour vivre ou survivre dans le pays. Il a été entreprenant  : il a identifié un marché de niche qui avait souffert de la rupture de l'ancienne économie politique, mais difficile à satisfaire pour ceux qui n'ont pas accès aux chaînes d'approvisionnement extérieures à la Corée du Nord. Comme beaucoup de commerçants nord-coréens, il a tiré profit d'une opportunité  : il a considéré le commerce de la réparation automobile comme la pierre angulaire pour d'autres affaires plus lucratives. Le succès de son affaire a été basé sur un accès direct aux fournisseurs en Chine, et une certaine habilité à naviguer entre les écueils de la corruption aux points de passage entre la Chine et la Corée du Nord. Dès le début, il a compris que la réussite reposait sur les liens entretenus avec les bonnes personnes dans la chaîne alimentaire. Les seuls versements à certaines personnes ne suffisent pas pour garantir le succès d'un accord commercial en Corée du Nord  ; pour ce faire, l'entretien de réseaux de type patron-clients est nécessaire. Alors que l'investisseur chinois ne pouvait pas offrir de contreparties à des officiels hauts placés comme dans le cas de l'établissement d'entreprises hybrides pour les réseaux en Corée du Nord, il a réussi à mettre en place des relations durables en satisfaisant les besoins réguliers d'administrations et d'officiels au regard de l'état de leurs véhicules. En même temps, l'investisseur a réduit les risques économiques et politiques en limitant l'empreinte physique de ses opérations à l'intérieur de la Corée du Nord, pour se prévenir contre les risques d'expropriation et de retournements de situation politique. Même si tout son investissement était perdu, ses pertes ne seraient pas si importantes. Il a aussi minimisé son exposition au risque concernant la main-d'oeuvre nord-coréenne  ; en fait, il a investi en Corée du Nord sans vraiment y investir.

 

Source  : Justin V. Hastings, A Most Enterprising Country  : North Korea in the Global Economy, Cornell University Press, New York et Londres, 2016, p. 169-170.

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5 mai 2018 6 05 /05 /mai /2018 20:54

Les échanges économiques intercoréens ont été réduits à néant pendant la décennie perdue (pour la réunification) des présidences conservatrices sud-coréennes (2008-2017) : dans un premier temps, les mesures du 24 mai [2010], suspendant tous les échanges économiques sauf ceux de la zone de Kaesong, ont été adoptées en représailles au naufrage de la corvette Cheonan, alors même que les "preuves" de l'implication nord-coréenne ne sont pas crédibles ; dans un second temps, en février 2016, les autorités de Séoul ont décidé de "suspendre" les activités de la zone économique intercoréenne de Kaesong, entraînant sa fermeture, alors que celle-ci avait été un symbole de la coopération Nord-Sud. Dans ce contexte, et alors que les sanctions internationales empêchent actuellement toute reprise des échanges économiques intercoréens, la déclaration de Panmunjom du 27 avril 2018 envisage - en termes prudents - une telle perspective. 

La zone économique intercoréenne de Kaesong en février 2017, avant sa fermeture

La zone économique intercoréenne de Kaesong en février 2017, avant sa fermeture

Il faut lire en détail la déclaration de Panmunjom pour en apprécier la portée s'agissant de la relance des échanges économiques Nord-Sud : 

Le Nord et le Sud sont convenus, en vue d’un développement équilibré de l’économie nationale et d’une prospérité commune, de promouvoir activement les points convenus dans la Déclaration du 4 Octobre et, en premier lieu, de prendre des mesures pratiques visant à relier les réseaux ferroviaires et routiers des côtes est et ouest, à les moderniser et à les mettre en fonctionnement.

Cette prudence s'explique par le fait que les Etats-Unis prétendent ne pas vouloir, à ce stade, de levée des sanctions internationales contre la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), même partielle, avant que le processus de dénucléarisation de la RPD de Corée ne soit mené à son terme. Si cette position maximaliste peut être appelée à évoluer (dans un processus de dialogue, il faut que chaque partie fasse simultanément des pas, ce qui n'est pas aujourd'hui le cas de Washington), les autorités sud-coréennes n'étaient pas en mesure, lors du sommet de Panmunjom, d'aller beaucoup plus loin.

Mais la réaffirmation des mesures définies dans la déclaration du 4 octobre 2007 permet de dessiner les contours d'une future reprise des échanges Nord-Sud, une fois les sanctions levées. 

Premier objectif - le seul explicitement réaffirmé le 27 avril 2018 : la modernisation et le rétablissement des réseaux ferroviaires et routiers, alors que l'obsolescence des réseaux nord-coréens est un obstacle majeur à la modernisation de l'économie de la RPD de Corée. Plus précisément, la déclaration du 4 octobre 2007 avait précisé quelles étaient les liaisons ferroviaires et routières prioritaires : 

Ils ont décidé de délibérer sur le problème du réaménagement et de la réparation de la ligne ferroviaire Kaesong-Sinuiju et de l'autoroute Kaesong-Pyongyang pour les utiliser en commun et d'accélérer ces travaux (...) d'entamer celle de la deuxième tranche, de commencer le trafic ferroviaire entre Munsan et Pongdong (...)

Au-delà de la péninsule, la République de Corée serait ainsi reliée à la Chine et à la Russie. En revanche, les liaisons dans le domaine du gaz - qui permettraient à la RPD de Corée d'obtenir des droits de transit - ne figuraient pas explicitement dans la déclaration du 4 octobre 2007.

La déclaration du 4 octobre 2007 prévoyait également des investissements conjoints, notamment pour l'exploitation du très riche potentiel minier nord-coréen (réévalué récemment à la hausse, les réserves en terres rares du pays ayant été considérées comme pouvant être les premières au monde) : 

Ils ont décidé d'encourager les investissements pour leur collaboration économique, de promouvoir vigoureusement la construction des infrastructures économiques et l'exploitation des ressources et d'y attribuer prioritairement diverses conditions de faveur et un traitement préférentiel en accord avec les particularités de la collaboration intercoréenne.

La même déclaration de 2007 envisageait également un partage des ressources halieutiques autour de Haeju, la mise en place d'une zone économique spéciale dans cette région et l'utilisation commune de l'embouchure du fleuve Rimjin : 

Ils ont décidé d'établir une «zone spéciale de paix et de collaboration de la mer de l'Ouest» englobant Haeju et ses environs maritimes et de promouvoir activement l'établissement d'un secteur de pêche commun et d'un secteur maritime de paix, la construction d'une zone économique spéciale, l'utilisation du port de Haeju, le passage direct des navires civils à ce port et l'utilisation commune de l'embouchure du fleuve Rimjin.

La déclaration du 4 octobre 2007 envisageait également le développement de la zone industrielle de Kaesong, qui n'était pas montée en puissance comme initialement prévu avant même sa fermeture en février 2016 (moins de 60 000 ouvriers nord-coréens y travaillaient alors, contre un objectif de 730 000 travailleurs nord-coréens lors de l'achèvement de la construction du parc industriel) : 

Ils ont décidé de terminer dans les meilleurs délais la construction de la première tranche de la zone industrielle de Kaesong (...)

Enfin, la déclaration du 4 octobre 2007 envisageait  "diverses mesures d'assurance institutionnelle, y compris pour la circulation, la communication et le dédouanement", ainsi que des coopérations plus sectorielles (construction navale, en citant spécifiquement les sites d'Anbyon et Nampo, et sans plus de précisions : agriculture, santé, médecine, protection de l'environnement, cette liste n'étant pas limitative).

Incontestablement, si la reprise des échanges Nord-Sud devait se concrétiser à la faveur de la levée des sanctions internationales (et de celles additionnelles décidées par le gouvernement sud-coréen), les domaines sont nombreux pour la création de richesse économique favorable aux deux parties de la péninsule - ce qui permettrait aussi, à Séoul, de battre en brèche l'argument des conservateurs sur le prétendu fardeau économique d'un rapprochement avec le Nord. Dans l'immédiat, exploiter le potentiel minier nord-coréen, combiner le recours à la main-d'oeuvre qualifiée, disciplinée et bon marché du Nord et aux capitaux du Sud, et partager des ressources maritimes représenterait une opportunité économique exceptionnelle pour les économies tant nord-coréenne que sud-coréenne. La prospérité n'est peut-être pas encore au coin de la rue, comme l'affirmait le président américain Herbert Hoover, mais certainement au détour des futurs tracés des liaisons Nord-Sud.

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2 mars 2018 5 02 /03 /mars /2018 21:22

Le 27 février 2018, la commission du travail et de l'environnement de la République de Corée (Corée du Sud) a réduit la durée maximale hebdomadaire de travail de 68 heures à 52 heures, dans le cadre d'un accord entre la majorité progressiste et l'opposition conservatrice. Les discussions ont notamment porté sur le taux de majoration des heures supplémentaires, alors que la durée annuelle de travail en Corée du Sud est l'une des plus élevée parmi les pays industrialisés membres de l'OCDE (en 2016, 2 069 heures par an, contre 1 763 heures en moyenne dans l'OCDE). 

La Corée du Sud réduit le temps de travail

L'accord trouvé au Parlement le 27 février 2018 permet au Président Moon Jae-in d'honorer l'une de ses promesses de campagne : réduire la durée du travail pour laisser plus de temps libre aux salariés, mais aussi engager un processus de partage du temps de travail en augmentant les embauches dans une économie en phase de ralentissement (selon certaines estimations, la mesure créerait entre 600 000 et 700 000 emplois). D'autres effets positifs sont escomptés - comme relancer le taux de natalité, l'un des plus bas au monde (en moyenne, 1,2 enfant par femme), mais en ce domaine d'autres mesures joueront un effet plus décisif (en particulier, la réduction des frais - très élevés - liés à l'éducation, et la mise en place d'un système de protection sociale plus ambitieux dans le cadre d'une politique nataliste). 

Dans le droit actuel, la durée hebdomadaire de travail est de 40 heures, auxquelles peuvent s'ajouter 12 heures supplémentaires et 16 heures de travail le week-end, soit 68 heures. Désormais, les heures de week-end seront incluses dans le total des heures supplémentaires, soit une durée maximale de travail de 52 heures.

Par ailleurs, le jour de la Libération (le 15 août) et la fête nationale de l'Indépendance (le 1er mars) deviennent des jours fériés payés.

La nouvelle réglementation entrera progressivement en vigueur : à compter de juillet 2018 pour les entreprises comptant au moins 300 salariés, de janvier 2020 pour les entreprises de 50 à 299 salariés et de juillet 2021 pour les entreprises de moins de 50 salariés. Cinq secteurs (contre vingt-six auparavant) pourront déroger à la durée légale : les transports et la santé. 

La réforme a soulevé des critiques, tant à gauche qu'à droite. A gauche, les syndicats demandaient que la majoration des heures supplémentaires soit de 100 %, et non - comme voté - de 50 % pour les 8 premières heures et de 100 % pour les 4 heures suivantes. Le régime actuel de majorations étant plus favorable, il en résultera des baisses de salaires. A droite, il est mis en avant la corrélation de cette mesure avec l'augmentation du salaire minimum de 16,4 % intervenue le 1er janvier 2018 : la hausse du coût du travail et les conséquences de la baisse du temps de travail en termes d'embauche sont dénoncées comme des entraves à la compétitivité des entreprises.

Sources : 

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17 janvier 2018 3 17 /01 /janvier /2018 21:45

Réunis à Bruxelles le 23 janvier 2018, les ministres chargés des finances de l'Union européenne (UE) devraient retirer huit des dix-sept pays inscrits en décembre 2017 sur la liste noire des paradis fiscaux de l'UE, dont la République de Corée (Corée du Sud) - une liste noire hautement critiquable et critiquée puisqu'elle ne comporte aucun pays européen. L'Association d'amitié franco-coréenne se félicite de cette décision à venir - même si la République de Corée restera dans la liste dite grise. 

Gangnam, le quartier des affaires de Séoul

Gangnam, le quartier des affaires de Séoul

Dès que la nouvelle rendue avait été publique selon laquelle la Corée du Sud constituait un paradis fiscal selon l'Union européenne, l'AAFC avait exprimé sa stupeur face à une décision disproportionnée et injuste au regard des exemptions fiscales, bien plus importantes, de pays tels que, par exemple, le Liechtenstein. Il n'en demeure pas moins qu'il existe des pratiques d'évasion fiscale vers des paradis fiscaux trop systématiques de la part de certains grands groupes sud-coréens, lesquelles relèvent toutefois autant - sinon davantage - du régime d'atteinte à la libre concurrence et d'une perte de ressources publiques extrêmement dommageable pour les administrations et les citoyens de la République de Corée. 

Le gouvernement sud-coréen avait déploré une décision qui porte atteinte à l'image du pays et annoncé qu'il travaillerait avec les autorités européennes pour retirer la Corée du Sud de la liste noire, ce qui va donc être le cas un mois et demi plus tard. Mais la Corée du Sud aurait-elle dû y figurer ? Nous estimons que non.

Sources : 

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12 décembre 2017 2 12 /12 /décembre /2017 22:26

A l'occasion de la sortie de son ouvrage La Corée du Nord, cette inconnue aux éditions Delga, Benoît Quennedey, président de l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) est intervenu à la librairie Tropiques, le 5 décembre 2017, sur le thème "L'économie de la Corée du Nord (est-elle socialiste ?)". Il avait déjà prononcé une première conférence à la librairie Tropiques, le 12 septembre 2017, sur le thème "De quoi la Corée du Nord est-elle le nom ?", autour de l'ouvrage de Robert Charvin, vice-président de l'AAFC : Comment peut-on être Coréen (du Nord) ?

Les études sur la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) s'intéressent traditionnellement peu à l'économie de ce pays. Au demeurant, ce sujet est difficile à traiter : les Nord-Coréens ne publient plus de statistiques économiques de manière régulière et ont par ailleurs tendance à occulter les "mesures économiques" (qu'ils considèrent non comme des réformes économiques, mais comme des mesures d'ajustement à un contexte économique spécifique après la disparition de l'Union soviétique et des démocraties populaires) ; quant aux Occidentaux, ils tendent à trop fortement s'appuyer sur des sources sud-coréennes en partie biaisées, ignorent largement les aspects micro-économiques et voient les mesures macro-économiques sous l'angle, selon eux, de la nécessaire restauration d'une économie capitaliste.

Il est trop souvent ignoré que la RPD de Corée a été, au moins jusque dans les années 1970, un modèle de développement économique, suscitant par exemple les commentaires élogieux d'Ellen Brun et Jacques Hersh dans leur ouvrage, basé sur le recueil de données sur place, Socialist Korea. A Case Study in the Strategy of Economic Development (Etats-Unis, 1976). Le principe a été celui de la recherche de l'autonomie (à distinguer de l'autarcie), selon les principes des idées du Juche, philosophie directrice de la RPD de Corée.

Pour apprécier où en est aujourd'hui l'économie nord-coréenne, avant d'examiner si elle est socialiste (au sens où on l'entend dans les démocraties populaires, suivant une grille de lecture marxiste : propriété collective des moyens de production, planification, gratuité de l'éducation et de la santé, coût modique du logement, des transports et de certains loisirs) et la direction qu'elle prend (évolue-t-on vers un "socialisme de marché" à la chinoise ou à la vietnamienne ?), il est utile de donner quelques repères économiques, de caractériser le secteur public (y compris sous l'impact des mesures économiques adoptées en Corée du Nord) et d'apprécier la restauration partielle d'une économie capitaliste, par le développement du secteur privé, la mise en place de zones économiques spéciales, et  l'introduction de nouveaux mécanismes de redistribution. 

Quelques repères économiques

Structure de la production
Si l'agriculture emploie environ 36 % de la population active, elle ne forme que 20 % du PIB. L'industrie (34 % de la population active, 40 % du PIB) et les services (25 % de la population active, 30 % du PIB) dominent, alors que le secteur minier est particulièrement développé (5 % de la population active, 10 % du PIB). Les ressources minières du pays ont ainsi été évaluées à 6 400 milliards de dollars, alors que le PIB (aux taux de change courants) est estimé par les Occidentaux à 40 milliards de dollars.

Principales productions
Agriculture : riz et maïs, légumes et fruits frais, pommes de terre, patates douces. Un sixième seulement de la surface du pays est cultivable. L'élevage est relativement peu développé, contrairement à la pêche.
Mines et énergie : charbon, fer, cuivre. Pétrole offshore non exploité. Deuxièmes ressources mondiales en terres rares. Troisième rang mondial pour la magnésite. 
Industrie et construction : métallurgie, textile, industrie agro-alimentaire.
Services : fort potentiel éducatif. Essor du commerce international et du tourisme depuis 2000.

Niveau de développement
Si le PIB exprimé en parité de pouvoir d'achat est généralement estimé à environ 2000 dollars par habitant, d'autres indicateurs font ressortir un niveau de production trois à quatre fois supérieurs : la production d'électricité par habitant est supérieure à celle de la Moldavie, proche de celle de Cuba et de la Tunisie.
Espérance de vie à la naissance : 70 ans (supérieur au niveau russe).
Mortalité infantile : 18 pour 1000 (moyenne mondiale : 40 pour 1000).
Taux d'alphabétisation : 100 %.


Taux de croissance économique annuels
Les taux de croissance économique ont été à deux chiffres de la fin de la guerre de Corée (1953) jusqu'au moins dans les années 1970. Après un important recul entre 1990 et 1998, l'économie se développe à nouveau depuis 1999, malgré l'embargo international, traduisant une capacité d'innovation et d'adaptation fondée sur un haut niveau d'éducation et de formation. 
L'obsolescence de l'appareil productif et des réseaux (transports, énergie) constitue un frein important au développement économique.

La prédominance d'un secteur public en mutation

Les aspects traditionnels de l'économie nord-coréenne, tels que décrits par Ellen Brun et Jacques Hersh (op. cit.), font apparaître celle-ci comme socialiste au sens marxiste du terme (suivant son acceptation dans les démocraties populaires) :
- la propriété collective des moyens de production a été généralisée, à l'exception des marchés paysans (mis en place en 1953 pour les surplus de l'économie agricole par rapport aux objectifs du plan) et des lopins individuels, de surface toutefois réduite (4 % de la superficie agricole au début des années 1970) ; l'impôt privé a été aboli il y a plus de 40 ans ; 
- les activités économiques sont orientées suivant un plan pour satisfaire les besoins de la population à court terme et à moyen terme ; le parti joue un rôle fondamental pour la définition des objectifs du plan, tandis qu'une décentralisation du processus décisionnel a été mise en place dans les provinces, les villes et les villages ; 
- la volonté de développer les forces productives, tout en élevant le niveau de conscience idéologique, a pris la forme de batailles pour la production, jusqu'à la période actuelle, et est allée de pair avec un souci d'éviter tout gaspillage des ressources (les céréales sont ainsi cultivées sur les plus petites parcelles pour atteindre l'objectif d'autosuffisance alimentaire) ;
- de nouvelles formes d'organisation économique et sociale (ou "transformations structurelles") visent à mettre en place un nouveau système de valeurs, dans le cadre de la construction du socialisme : les visites de terrain des dirigeants jouent un rôle fondamental en RPD de Corée, où le rôle des gestionnaires est combiné avec une association des représentants des différentes catégories sociales au sein du comité d'entreprise dans le processus décisionnel (suivant le système dit de Daean) ; le principe d'entraide est érigé en valeur fondamentale (tous les Nord-Coréens participent ainsi aux campagnes de repiquage du riz), tandis que les travailleurs les plus méritants et les équipes les plus performantes sont mis à l'honneur suivant un système de récompenses qui n'ont pas toutes un caractère pécuniaire ; enfin, la créativité et l'innovation sont fortement encouragées, avec un accent porté sur la mécanisation (dans le cadre du système CNC au début des années 2010, après un développement précoce de l'industrie informatique).

Ces choix économiques se sont traduits par un degré de monétarisation parmi les plus faibles au monde dans une économie industrialisée : les rémunérations sont complétées par un système public de distribution étendu, qui fournit les produits de base (dont le logement et l'alimentation), une éducation et une santé gratuites. Chacun a le droit au travail et le devoir de travailler, le principe d'entraide étant généralisé dans la communauté éducative (les élèves les plus doués doivent aider les camarades plus en difficulté, et les résultats s'apprécient à l'échelle de toute la classe) comme dans la communauté de travail.

Les mesures économiques, introduites à la suite des graves difficultés économiques des années 1990 (la "dure marche", pendant laquelle la fin du commerce de troc avec les démocraties populaires et de graves catastrophes climatiques ont entraîné une surmortalité de centaines de milliers de personnes, au bas mot), ont toutefois altéré ce modèle d'organisation économique et sociale.

Dès 1998, la Constitution est révisée afin d'autoriser les profits privés, à condition qu'ils résultent d'activités légales.

Les mesures économiques du 1er juillet 2002 ont été poursuivies depuis cette date, mais de manière non uniforme :

- le système public de distribution a été recentré sur les produits alimentaires de base, et est de fait aujourd'hui géré au niveau des administrations et des entreprises ;
- le principe a été introduit de l'autonomie de gestion des entreprises, avec la possibilité de redistribuer les bénéfices aux salariés suivant des mesures incitatives à la production ;
- la libéralisation des prix et des salaires a conduit à la mise en place de dispositifs de contrôle des prix.

Parallèlement, après l'interruption du plan couvrant la période 1987-1994, la planification a reculé, avant d'être ouvertement réintroduite dans la période récente (le dernier congrès du Parti du travail de Corée, en 2016, évoque les objectifs de la planification pour la période 2016-2020).

Un des aspects les plus marquants des réformes a été l'organisation des coopératives agricoles autour d'unités de production de plus petite taille regroupant, depuis les mesures du 28 juin 2012, de trois à quatre familles.

Enfin, les mesures économiques ont contribué à accroître le secteur privé, jusqu'alors marginal. 

Une restauration partielle du capitalisme ?

Le secteur privé domestique est marqué, outre les évolutions internes aux coopératives paysannes, par l'émergence des marchés généraux de biens et de services, apparus pendant les difficultés économiques de la "dure marche" et légalisés en juin 2003 : il s'agit d'une transformation des anciens marchés paysans, dont la spécialisation en produits agricoles a été supprimée en 2004. Seuls certains intervenants - des femmes, ayant un âge minimum - peuvent participer aux marchés généraux de biens et de services, en contrepartie d'un droit de place et suivant des règles fixées par l'Etat.

Il a résulté de l'essor de ce commerce privé un double système de taux de change (légal, et de fait sur les marchés généraux) et une prédominance des devises étrangères dans les échanges internationaux. 

Néanmoins, il n'existe toujours pas d'accumulation de capital privé pour créer des entreprises en Corée du Nord, ni a fortiori de bourse des valeurs. Les gestionnaires d'entreprise ne sont pas propriétaires des moyens de production, et peuvent être révoqués.

Le secteur privé international prend plusieurs formes :

- les entreprises à capitaux mixtes (coréens et étrangers, avec en principe une majorité du capital coréenne), depuis une modification législative introduite en 1984 ;
- les zones économiques spéciales (ZES), qui rappellent celles chinoises, et où les investisseurs étrangers bénéficient d'exemptions fiscales ; la principale ZES, à Kaesong, a cependant fermé en février 2016, dans un contexte de regain des tensions intercoréennes ;
- la création, en 2013, de 19 centres régionaux spécialisés pour accueillir les investissements étrangers.
Pour sa part, la Corée du Nord a développé des investissements à l'étranger (notamment une chaîne de restaurants) et emploie des dizaines de milliers de travailleurs étrangers, en Europe et dans le monde arabe notamment.

Le commerce international (qui a dépassé 8 milliards de dollars par an au milieu des années 2010) est aujourd'hui dominé par la Chine, qui concentre également désormais 90% des investissements étrangers en Corée du Nord (en particulier, dans les secteurs des mines et de l'industrie).

Mais cette ouverture au capital étranger (et le déploiement des facteurs travail et capital de la RPDC dans le monde) ont été remis en cause par les récentes résolutions 2371 et 2375 du conseil de sécurité des Nations unies, adoptées en août et septembre 2017, qui ont interdit la plus grande partie des échanges internationaux du pays, réduisant d'autant la part du secteur privé : le secteur public tend ainsi à redevenir largement prédominant en Corée du Nord. 

Concernant la redistribution, les mesures économiques ont introduit des disparités importantes de revenus : de fait, l'éducation et la santé ne sont plus totalement gratuites, les cours privés ayant fait leur apparition et de nombreux patients devant fournir les médicaments en cas d'hospitalisation. Le système de protection sociale reste cependant complet, atténuant les inégalités entre classes sociales et entre régions.

Au final, les mesures économiques marquent-elles un repli tactique (comme l'avait été la NEP en Union Soviétique) ou correspondent-elles à une restauration partielle du capitalisme ? Si les Nord-Coréens ne font plus officiellement référence au marxisme-léninisme, leur économie reste cependant la plus socialisée parmi les Etats se réclamant toujours du socialisme, et la réfutation même de la notion de "réformes" économiques tend à faire des mesures économiques des adaptations jugées temporaires et transitoires, pour garantir la poursuite de la construction d'une économie socialiste puissante et disposer de capitaux étrangers nécessaires à la modernisation de l'outil productif, dans un contexte marqué par un renforcement sans précédent des sanctions internationales.

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8 décembre 2017 5 08 /12 /décembre /2017 23:39

Malgré des sanctions sans précédent, l'économie nord-coréenne apparaît aujourd'hui résiliente, après un taux de croissance estimé à près de 4 % en 2016 par les autorités sud-coréennes elles-mêmes. Un universitaire chinois, Jin Jingyi, en rend compte après deux voyages dans le pays (mai et novembre 2017), dans un article du quotidien sud-coréen (progressiste) Hankyoreh, traduit de l'anglais par YB - en s'interrogeant toutefois jusqu'à quand la République populaire démocratique de Corée pourrait ainsi résister aux sanctions internationales.

Les militaires se rassemblent pour un spectacle de feu d'artifice sur les rives du fleuve Taedong à Pyongyang le 1er décembre pour célébrer le lancement réussi du missile Hwasong-15.

Les militaires se rassemblent pour un spectacle de feu d'artifice sur les rives du fleuve Taedong à Pyongyang le 1er décembre pour célébrer le lancement réussi du missile Hwasong-15.

L'économie nord-coréenne florissante semble démentir l'efficacité des sanctions

Quand j'ai visité la Corée du Nord fin mai dernier [NdT : 2017], ma plus grande question était de savoir combien de temps le Nord pourrait résister aux sanctions de la communauté internationale. Mais cette question a été rendue sans intérêt pratique du fait des changements étrangement positifs visibles dans ce pays. Le pays débordait tellement d'énergie que je me suis demandé si « les sanctions sans précédent » existaient vraiment. Les universitaires disaient que l'économie nord-coréenne était florissante et de telles remarques prenaient partout leur sens.

Au début du mois dernier [novembre 2017], je suis allé en Corée du Nord encore une fois. C'était au début de l'hiver, mais le temps à Pyongyang m’a semblé exceptionnellement froid, comme s’il reflétait les dures sanctions mises en oeuvre. Cela m'a rappelé une nouvelle fois la question de savoir pendant combien de temps le Nord pourrait endurer des sanctions d'une telle dureté. Après que la Corée du Nord a réalisé son sixième essai nucléaire le 3 septembre [2017], les sanctions de la communauté internationale ont mis le Nord sous une pression cruelle.

Pendant ma visite, j’ai eu la chance de voir une réunion de 5 000 scientifiques des sciences sociales venus de tout le pays pour la troisième convention des sciences sociales de Corée du Nord, qui avait lieu pour la première fois en 45 ans. Quand j'ai entendu les applaudissements assourdissants, les acclamations et les slogans criés avec passion, je suis arrivé à la conclusion que plus la pression et les sanctions étaient fortes, plus elles renforçaient le régime en exacerbant l'animosité envers la communauté internationale.

Mais ce que j'ai trouvé de plus mystérieux encore était que la convention ait duré un jour et demi et que soient à peine mentionnés les mots "nucléaire", "missile" ou "sanctions" dans les remarques formulées par un des membres nouvellement élus du Bureau Politique du Parti du travail de Corée, par ailleurs Vice-Président du parti. Le mot "sanctions" est à peine apparu pendant les conversations avec les scientifiques nord-coréens au sujet de l’économie de leur pays. Comment cela est-il possible ? En dépit de la vive assurance répandue dans le monde extérieur que la Corée du Nord ne pourra pas tenir encore longtemps et qu’elle s'effondrera bientôt, les Nord-Coréens semblent accepter cette situation avec une sérénité remarquable.

J'ai demandé directement aux experts nord-coréens combien de temps ils pourraient endurer les nouvelles et dures sanctions de la communauté internationale. En réponse, ils m'ont indiqué qu'ils avaient toujours été sous le coup des sanctions. Après des décennies de sanctions ils avaient appris comment s'en accommoder. Ils ont soutenu qu'ils n'étaient pas sous le coup de sanctions parce qu'ils développaient des armes nucléaires, mais que c'est parce qu'ils développaient des armes nucléaires que les Etats-Unis menaçaient leur sécurité avec ces sanctions. Cela suffisait à faire de Kim Jong-un un "héros légendaire" luttant hardiment contre les Etats-Unis, le plus fort pays au monde, avec ses armes nucléaires et ses missiles. Finalement, il est possible de conclure que les sanctions renforcées ont donné une légitimité accrue au gouvernement de Kim Jong-un et l'ont conduit à réaliser des accomplissements comparables à ceux de ses grand-père et père, Kim Il-sung et Kim Jong-il.

À part le fait que le temps était exceptionnellement froid pour un début d'hiver, il n’y avait pas beaucoup de changement à Pyongyang depuis la fin mai. Pendant les cinq premières années de la direction de Kim Jong-un, les sanctions ont diminué de moitié l'approvisionnement du pays en pétrole brut. Il en a résulté un doublement du prix de l'essence, qui se vendait maintenant à environ 10 renminbi (1.51 $ américain) par litre. Mais le prix des bus et des taxis, fonctionnant à l’essence, n’a pas monté du tout. Le prix du riz est aussi resté stable. Il n'y avait toujours aucune indication que l'économie chancellerait. Même les experts nord-coréens s'en étonnaient.

Comme les Nord-Coréens ne sont pas des surhommes, ils seront sûrement affectés par les dures sanctions mises en oeuvre sur le long terme. La question, cependant, est que le Nord a depuis longtemps pris des mesures pour se préparer aux sanctions. Dans le cas où les réserves de pétrole brut seraient complètement coupées, le Nord consacrerait ses efforts à extraire du pétrole brut du charbon et à ses propres réserves de pétrole [NdT : pétrole offshore, aujourd'hui non exploité]. Pour conserver le pétrole lourd, il a développé une méthode d'ignition sans fuel dans ses centrales fonctionnant au charbon.
 

La Corée du Nord a aussi affecté de grandes quantités du charbon, désormais interdit à l’exportation, à la consommation énergétique intérieure et augmenté la part des usines fonctionnant au charbon dans son mix énergétique. Elle transfère la technologie avancée de son industrie d'armement vers l'industrie légère et augmente fortement la part des produits de l'industrie légère réalisés dans le pays. Les leaders nord-coréens affirment qu'ils remédieront au manque d'énergie et résoudront complètement l'approvisionnement alimentaire d'ici à 2020. Combien de temps la Corée du Nord peut-elle tenir avec de telles méthodes ? Si la direction nationale continue à épuiser ses moyens avec de dures sanctions dures empêchant un dynamisme nouveau, il y a peu de chance que l'économie grandisse. Mais les expressions imperturbables qu'on peut lire sur les visages des Nord-Coréens suggèrent clairement qu'ils ont la force de continuer à endurer.

Le jour précédant mon départ il y a eu des fortes chutes de neige à Pyongyang. C'était le signe qu'une autre malédiction glaciale s’annonçait. Mais ce jour-là, au moins, il faisait anormalement chaud pour la saison.

Par Jin Jingyi , professeur du Centre de Langues étrangères de l’université de Beijing.

Traduit par YB de l’édition anglaise du journal Sud-Coréen Hankyoreh du 4 décembre 2017.

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9 novembre 2017 4 09 /11 /novembre /2017 23:39

Alors que la catastrophe de Fukushima en 2011 et plusieurs scandales autour des pièces détachées de réacteurs ont rendu l'énergie nucléaire impopulaire en République de Corée (Corée du Sud), le Président Moon Jae-in s'était engagé, pendant sa campagne, à ce que son pays renonce au nucléaire civil - il a par ailleurs confirmé fin octobre 2017 que la Corée du Sud ne s'engagerait pas sur la voie de la détention de l'arme nucléaire. Le Président Moon Jae-in a confirmé la sortie du nucléaire en 2060, en détaillant son calendrier. 

Le réacteur nucléaire Wolsong-1

Le réacteur nucléaire Wolsong-1

Le 20 octobre 2017, à la suite d'un débat public, le Président Moon Jae-in annonçait la relance des travaux de construction de deux réacteurs nucléaires - mais tout en réaffirmant la sortie du nucléaire civil en 2060.

Après son élection, le chef de l'Etat avait déjà indiqué que la construction de six nouveaux réacteurs ne serait pas engagée, tandis qu'il ne serait pas accordé de prolongation d'activité aux 24 réacteurs actuellement en activité dans quatre centrales. Le nombre de réacteurs devrait ainsi baisser à 14 en 2038. Après la fermeture du plus vieux réacteur du pays (Kori-1) en mai 2017, la fermeture du réacteur Wolsong-1 a été anticipée.

Alors que l'économie sud-coréenne est fortement dépendante de l'électricité nucléaire, Séoul fixe pour objectif de porter la part des énergies renouvelables à 20 % en 2030. 

Par ailleurs, si la construction de cinq nouvelles centrales à charbon a été autorisée, le gouvernement a fait savoir qu'il n'accorderait plus de nouvelles licences - entendant favoriser la conversion des centrales à charbon en stations de gaz naturel liquéfié.

Sources :
 

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