Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
24 août 2014 7 24 /08 /août /2014 10:34

Du 12 au 21 août 2014, une délégation de huit membres de l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) conduite par Benoît Quennedey, vice-président chargé des actions de coopération, a visité la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), en se rendant à Pyongyang, Wonsan et Kaesong, ainsi que dans la zone démilitarisée (DMZ) qui sépare les deux Corée. Les participants tiennent à remercier leurs guides, Mme Jong Un-a, secrétaire générale de l'association d'amitié Corée-France (AACF), homologue de l'AAFC, et Mme Yun So-hyong, et leur chauffeur, M. Kim Song, ces deux derniers travaillant également au Comité des relations culturelles avec les pays étrangers (dont relève l'AACF), pour leur parfaite disponibilité et, comme toujours, leur grand professionnalisme, qui ont permis l'excellent déroulement de cette visite. Ce déplacement a permis de faire avancer concrètement un certain nombre de projets de coopération franco-coréens en rencontrant les responsables des institutions coréennes concernées. Il a également mis en lumière la priorité donnée par la RPDC du Maréchal Kim Jong-un à la jeunesse, à l'éducation et aux loisirs, ce que reflètent en particulier les nouveaux bâtiments inaugurés - dans la continuité des observations recueillies sur place par l'AAFC lors de ses visites de juillet-août et septembre 2013.

Voyage en RPDC d'août 2014 : la jeunesse, l'éducation et les loisirs au premier rang des priorités

Fondée en 1969, l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) a pour but le développement des relations de coopération et de solidarité entre la France et l'ensemble de la péninsule coréenne, convaincue que la pleine insertion de la RPD de Corée sur la scène internationale est le meilleur garant non seulement de la réunification de la péninsule, mais aussi de la paix et de la prospérité dans cette partie au monde, la dernière au monde où la guerre froide n'a jamais pris fin - comme l'a rappelé la visite de sa délégation dans la zone démilitarisée qui sépare les deux Corée, le 19 août 2014, au lendemain du lancement des exercices militaires annuels américano - sud-coréens Ulji Freedom Guardian qui, en attisant les tensions, éloignent malheureusement toujours davantage la perpective d'une paix durable en Asie du Nord-Est. Les visiteurs ont réitéré la position de l'AAFC en faveur d'un traité de paix dans la péninsule coréenne, en lieu et place de l'accord d'armistice, lors de la visite effectuée dans la DMZ.

 

La délégation de l'Association d'amitié franco-coréenne a discuté des actions qu'elle a menées et de ses projets avec le nouveau président de l'Association d'amitié Corée-France, M. Kim Jin-bom, parfaitement au courant des activités de l'AAFC. Elle a remis une donation au Comité coréen de solidarité avec les peuples du monde : les sommes, recueillies grâce à la générosité des adhérents de l'AAFC, ont permis l'achat d'engrais afin d'aider les Coréens à retrouver l'autosuffisance alimentaire - dans un pays dont seulement un sixième des terres sont arables, et gravement éprouvé par les catastrophes naturelles (sécheresses, inondations) des années 1990.

Toujours dans le domaine agricole, des semences de betterave ont à nouveau été remises à l'Institut d'agriculture. Une discussion a été engagée avec les responsables de l'Institut à partir des résultats des expériences menées grâce aux semences données lors des précédentes visites de l'AAFC.

L'éducation constitue un deuxième volet majeur des actions de coopération de l'AAFC. Un vidéoprojecteur a été remis à l'école n° 1 de Moranbong, à Pyongyang, avec laquelle est jumelée l'AAFC. Le spectacle donné par les enfants, de grande qualité, a témoigné de l'importance accordé au développement des disciplines artistiques. Les membres de la délégation ont pu rencontrer les élèves : quelques jours avant la reprise des cours, beaucoup d'entre eux choisissent de suivre les cours renforcés donnés par les enseignants.

A l'école n° 1 de Moranbong, à Pyongyang
A l'école n° 1 de Moranbong, à Pyongyang

A l'école n° 1 de Moranbong, à Pyongyang

S'agissant de la formation et de la recherche universitaires, la délégation a visité l'Université Kim Il-sung, à qui elle soumis un projet d'échanges avec la France. Des dons de livres ont été effectués aux départements de français de l'Université Kim Il-sung et de l'Université des langues étrangères de Pyongyang, aux élèves de français du lycée des langues étrangères de Pyongyang ainsi qu'aux principales institutions d'architecture de la capitale (Institut Paektusan, Institut d'urbanisme de Pyongyang et Université d'architecture de Pyongyang). Les ouvrages seront préalablement exposés dans le cadre de la prochaine foire de Pyongyang du livre scientifique et technique.

 

Par les contacts qu'elle a noués de longue date avec des chercheurs et professeurs français et lors de rencontres organisées à l'occasion de ses précédentes visites en RPDC, l'AAFC avait préparé le déplacement à Pyongyang - à l'automne 2013 - d'une délégation d'universitaires français et européens spécialistes de la Corée. En août 2014, la délégation de l'AAFC a à nouveau visité l'Institut Paektusan et elle a rencontré les professeurs de l'Université d'architecture de Pyongyang. Avec ces derniers, elle a discuté, en coordination avec le Centre d'études sur la Corée (CEC) de l'Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS), des conditions d'un prochain déplacement en France d'une délégation de professeurs d'architecture, à laquelle l'AAFC apportera son soutien.

Rencontre avec les professeurs de l'Université d'architecture de Pyongyang
Rencontre avec les professeurs de l'Université d'architecture de Pyongyang

Rencontre avec les professeurs de l'Université d'architecture de Pyongyang

La visite coïncidait avec l'anniversaire de la Libération de la Corée de l'occupation japonaise, le 15 août 1945 : ce jour-là, l'Association d'amitié Corée-France a offert un banquet aux membres de la délégation de l'AAFC, qui ont à leur tour invité à dîner, le 20 août, leurs guides et le directeur du département Europe du Comité coréen de solidarité avec les peuples du monde.

 

Dans l'ambiance festive qui a marqué les cérémonies de l'anniversaire de la Libération, les réalisations récentes en matière d'éducation et de loisirs sont apparues impressionnantes : le 15 août, la délégation s'est rendue le matin au parc aquatique Munsu, inauguré en octobre 2013, puis le soir au parc d'attraction de l'île Rungra, qui a ouvert ses portes en 2012. Après les difficultés rencontrées pendant la "dure marche" des années 1990, la RPD de Corée dirigée par le Maréchal Kim Jong-un depuis décembre 2011 a mis l'accent sur l'avènement d'une société de loisirs - qui ne se limite pas à Pyongyang, même si la capitale nord-coréenne est aujourd'hui la ville la mieux équipée du pays, comme en témoignent notamment le parc d'attraction et la patinoire en plein air de Wonsan, sur la côte Est, où a séjourné pendant deux jours la délégation de l'AAFC.

Le parc aquatique Munsu

Le parc aquatique Munsu

A Wonsan, le camp de vacances international des enfants de Songdowon, récemment rénové, offre un cadre pédagogique et de loisirs qui témoigne de la priorité accordée à la jeunesse. La ville côtière, avec ses plages fréquentées par des familles dont certaines font le trajet depuis Pyongyang, s'affirme en RPD de Corée comme l'équivalent des stations balnéaires de la mer Noire pour les Russes.

Enfants sur la plage de Wonsan

Enfants sur la plage de Wonsan

Les nouveaux équipements de loisirs relèvent également d'une réflexion des autorités nord-coréennes sur l'organisation de la vie sociale et professionnelle : de même qu'en France l'instauration des congés payés sous le Front populaire puis l'émergence d'une société de loisirs durant les Trente glorieuse ont été les fruits de la croissance économique et des changements sociaux, la RPD de Corée mène de front la distribution des fruits de la croissance et la modernisation de son appareil productif - à cet égard, l'usine textile Kim Jong-suk, à Pyongyang, visitée par la délégation de l'AAFC, fait figure de modèle. Les dortoirs qui y ont récemment été créés pour les jeunes ouvrières célibataires, qui travaillent par cycles de huit heures, visent à éviter que ne s'ajoutent aux journées de travail de longs trajets entre le domicile et l'usine.

L'usine textile Kim Jong-suk, à Pyongyang

L'usine textile Kim Jong-suk, à Pyongyang

Les dortoirs de l'usine textile Kim Jong-suk ont été construits par l'Armée populaire de Corée, comme de nombreux autres équipements publics. L'armée nord-coréenne joue non seulement un rôle de protection du pays, mais constitue également un agent économique qui partage une communauté de destin avec la population civile, dans la recherche d'une symbiose entre l'armée et la population. Inauguré en juillet 2013 à l'occasion du 60e anniversaire de l'armistice - en présence notamment de représentants de l'AAFC - l'esprit de défense nationale est entretenu notamment au Musée de la Guerre de Corée - célébrée au Nord de la péninsule comme une victoire contre l'impérialisme américain, qui n'avait pas réussi à l'emporter sur un théâtre d'opérations extérieures pour la première fois de son histoire. Alors que le navire espion américain Pueblo, capturé en 1968, est désormais amarré à proximité du nouveau musée, les armes prises sur l'armée américaine et d'autres armées occidentales depuis la signature de l'armistice en 1953 sont exposées dans une section en plein air du musée : si les soldats ont été rapatriés, les armes ainsi récupérées constituent autant de trophées qui soulignent la volonté farouche de la RPDC de sauvegarder son indépendance nationale conquise de haute lutte.

Musée de la guerre : des soldats américains arrêtés le 17 mai 1963, et les débris de leur appareil

Musée de la guerre : des soldats américains arrêtés le 17 mai 1963, et les débris de leur appareil

Un ensemble de bronze monumental à l'entrée du Musée de la guerre de Corée s'élance devant la silhouette de l'hôtel Ryugyong.

Un ensemble de bronze monumental à l'entrée du Musée de la guerre de Corée s'élance devant la silhouette de l'hôtel Ryugyong.

Voyage en RPDC d'août 2014 : la jeunesse, l'éducation et les loisirs au premier rang des priorités
Partager cet article
Repost0
2 août 2014 6 02 /08 /août /2014 21:08

La République de Corée (Corée du Sud) est le seul pays membre du G20 qui n'a pas officiellement réagi à l'opération Bordure protectrice conduite par Israël, ce qui démontre les limites de la puissance diplomatique de la Corée du Sud - cette dernière ne se donnant toujours pas les leviers d'influence nécessaires à ses légitimes ambitions sur la scène internationale. Néanmoins, Séoul a une longue tradition de coopération militaire avec Israël, héritée de la longue période où les généraux étaient au pouvoir à Séoul. Dans ce contexte, le 31 juillet 2014, l'antenne sud-coréenne d'Amnesty International a demandé aux autorités de Séoul de "suspendre urgemment ses transferts d'armes vers Israël" jusqu'à ce que l'Etat hébreu "cesse de commettre de graves atteintes aux droits de l'homme". Amnesty International a également lancé une pétition pour que l'Etat d'Israël cesse d'attaquer les civils palestiniens à Gaza.

Amnesty International Corée demande à la Corée du Sud de suspendre ses ventes d'armes à Israël

Il y a une longue tradition de refus de l'usage aveugle de la violence par l'armée israélienne parmi les militants pacifistes et des droits de l'homme en Corée du Sud. Alors que l'opération Bordure protectrice a entraîné plus de 1.300 morts et 7.500 blessés depuis son déclenchement le 8 juillet 2014, Amnesty International Corée a demandé, dans une lettre remise le 31 juillet au ministre des Affaires étrangères M. Yun Byung-se, que le gouvernement sud-coréen cesse ses livraisons d'armes à Israël. Selon l'ONG, les ventes d'armes sud-coréennes à Israël depuis 2008 ont atteint 22,7 milliards de won (soit 22 millions de dollars) - des armes dont les victimes à Gaza sont, pour 78 % d'entre elles, des civils, parmi lesquels 21 % d'enfants. La République de Corée (du Sud) est le 10ème fournisseur d'armes à Israël. Les Etats-Unis, dont la Corée du Sud est l'un des alliés les plus proches en Extrême-Orient, sont le premier fournisseur d'armes à Israël.

Les branches locales d'Amnesty International à Taïwan et en Thaïlande ont également adressé des lettres demandant la suspension des fournitures d'armes à Israël aux représentations diplomatiques sud-coréennes à Taipeh et Bangkok.

Mme Kim Hee-jin, secrétaire générale d'Amnesty International Corée, a rappelé que la République de Corée est signataire du traité sur le commerce des armes, qui interdit l'usage d'armes telles que les missiles, les tanks et les armes de poing contre les populations civiles. Alors que la Corée du Sud a l'obligation de rendre compte des exportations de ces armes conventionnelles, Mme Kim Hee-jin s'est dite profondément préoccupée que la Corée du Sud fournisse de telles armes à Israël pour tuer des civils innocents.

Kim Hee-jin, secrétaire générale d'Amnesty International Corée

Kim Hee-jin, secrétaire générale d'Amnesty International Corée

La campagne de signatures d'Amnesty International Corée contre la livraisons d'armes à Israël par la Corée du Sud et pour que cessent les attaques contre les civils en Palestine a déjà réuni 1.400 signatures, l'objectif étant d'atteindre 10.000 signatures.

L'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) soutient pleinement la campagne menée par Amnesty International Corée. Elle appelle les autorités sud-coréennes à se conformer à leurs obligations internationales en cessant les livraisons d'armes à Israël, alors que l'armée israélienne a déjà tué plus de 1.300 Palestiniens, dont de nombreux enfants.

Sources :

Partager cet article
Repost0
20 juillet 2014 7 20 /07 /juillet /2014 15:39

Alors que l'Europe célébre le centième anniversaire du déclenchement de la Première guerre mondiale pour refuser la guerre comme mode de règlement des conflits entre Etats, des étudiants sud-coréens ont visité la France et l'Europe et ainsi rappelé que, dans la péninsule coréenne où aucun traité de paix n'a été signé depuis l'armistice de la guerre de Corée en 1953, agir pour la paix reste d'une brûlante actualité. Militant pour la conclusion d'un traité de paix en Corée, l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) a participé à l'organisation d'une rencontre des étudiants avec Mme Kil Won-ok pour protester contre l'utilisation des femmes comme armes de guerre, ainsi que d'autres visites à Paris. Grâce à Liliane Boussel, correspondante régionale de l'AAFC en Limousin, les participants du voyage pour la paix "Rêve de papillon" ont aussi pu visiter Oradour-sur-Glane en présence de Camille Senon, une des dernières rescapées du massacre. Un compte rendu a été publié le 27 juin 2014 sur le site de France 3-Limousin, ainsi qu'un reportage de Rahabia Issa, Anthony Borlot et Bastien Boulesteix.

Voyage en Europe d'étudiants coréens pour la paix

Ils étaient 48 étudiants sud-coréens, accompagnés de 2 Japonais, pour comprendre le martyr d'Oradour-sur-Glane et rendre hommage aux 642 victimes, le 10 juin 1944, de la division SS Das Reich. Alors que l'occupation japonaise de la Corée (1910-1945) et la guerre de Corée (1950-1953) ont donné lieu à des massacres d'une violence inouïe, se souvenir du massacre d'Oradour-sur-Glane est emblématique des valeurs du combat universel pour la paix.

Les étudiants et leurs accompagnateurs ont visité le centre de mémoire puis l'ancien village, dont les ruines ont été conservées pour perpétuer le souvenir des violences commises par l'occupant nazi.

Ils ont été guidés par Camille Senon, survivante du tramway d'Oradour-sur-Glane, qui a fait partie des quelques personnes rentrées assez tard de Limoges pour échapper au massacre mais pour, hélas, découvrir l'horreur du village en feu et de la disparition de sa famille. La jeune femme, devenue après la guerre militante politique et syndicale, a fait de la recherche des responsabilités de ce qui s'est passé le combat d'une vie. 

Principale source :

Partager cet article
Repost0
4 juillet 2014 5 04 /07 /juillet /2014 14:54

Le 30 juin 2014, l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) était réunie, comme tous les ans, à l'occasion du mois de solidarité avec le peuple coréen (25 juin-27 juillet, dates de début et de fin de la guerre de Corée), coïncidant cette année avec le vingtième anniversaire du décès du Président Kim Il-sung (8 juillet 1994). En présence des diplomates de la délégation générale de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) en France, les responsables de l'AAFC ont évoqué l'action du Président Kim Il-sung en faveur de la réunification de la Corée, une question de justice pour le peuple coréen et de paix pour le monde entier.

 

S'exprimant en premier, Benoît Quennedey, vice-président de l'AAFC en charge des actions de coopération, a rappelé que, le 7 juillet 1994, soit un jour avant sa disparition, le Président Kim Il-sung signait un document préparatoire à un futur sommet intercoréen qui aurait marqué un tournant décisif sur la voie de la réconciliation et de la réunification de la péninsule coréenne. Les événements en ont décidé autrement, et l’attitude des autorités sud-coréennes après la disparition du Président Kim Il-sung a alors reporté sine die toute perspective de sommet intercoréen. 

 

Benoît Quennedey a souligné que la contribution du Président Kim Il-sung à la réunification de la Corée, selon des propositions qu’il a formulées très tôt, dès le lendemain de la libération de la Corée en 1945 (voir ci-dessous), forment un corpus homogène qui a fondé, et détermine toujours, la position nord-coréenne dans les relations intercoréennes.

 

Si, côté Sud, la volonté de dialogue et ses modalités ont oscillé au gré des changements de régimes et de dirigeants, la République populaire démocratique de Corée témoigne pour sa part d’une constance quant à l’objectif de la réunification et les moyens d’y parvenir. L’ensemble des déclarations intercoréennes conclues depuis 1972 obéissent aux mêmes principes : réunification pacifique et indépendante de la Corée, par les Coréens eux-mêmes, transcendant les différences de systèmes existant au Nord et au Sud. 

 

C'est sur la base de ces principes que ce sont tenus, à Pyongyang, les sommets Nord-Sud du 15 juin 2000 et du 4 octobre 2007, écrivant ainsi une nouvelle page dans l’histoire des relations intercoréennes. Ces sommets ont jeté les bases d’une coopération et ont permis l’engagement d’un processus graduel de rapprochement, impliquant, dans un premier temps, des échanges accrus dans certains domaines, notamment économiques, la confiance peu à peu instaurée devant ensuite permettre de progresser plus avant sur la voie de la réunification.

 

Toute l'histoire du rapprochement intercoréen enseigne qu’il faut négocier avec ses partenaires tels qu’ils sont, et non tels qu’on voudrait qu’ils soient, a dit en conclusion Benoît Quennedey. C’est ce à quoi s’emploie l’Association d’amitié franco-coréenne, fondée en 1969, en œuvrant à la conclusion d’un véritable traité de paix et en encourageant les échanges bilatéraux de manière à briser le cycle sans fin des tensions et des sanctions, néfaste à la paix et à la prospérité dans la péninsule coréenne.

 

Prenant ensuite la parole, S.E. Kim Yong-il, délégué général de la RPD de Corée en France et ambassadeur de la RPDC auprès de l'UNESCO, a aussi souligné l'action continue du Président Kim Il-sung en faveur de la paix et de la réunification de la Corée. A cet égard, le délégué général a annoncé la dernière initiative en date de son pays, la proposition faite, le jour même, par la Commission de la défense nationale de la RPDC aux autorités de Corée du Sud de mettre fin aux hostilités entre les deux pays, en suspendant notamment les exercices militaires américano-sud-coréens annuels prévus au mois d'août.

Puis Patrick Kuentzmann, secrétaire général de l'AAFC, est revenu sur l'injustice historique que représente pour le peuple coréen la division de son pays après la libération de 1945, et l'enjeu que constitue la réunification de la Corée pour la paix, dans la péninsule coréenne, bien sûr, mais aussi dans le monde.

 

La division de la Corée, annexée par le Japon en août 1910, est ainsi un processus largement initié par les grandes puissances, vainqueur de la Seconde Guerre mondiale : en novembre 1943, le document final de la Conférence du Caire, réunissant le président américain Franklin Roosevelt, le Premier ministre britannique Winston Churchill et le chef du gouvernement de la République de Chine Tchang Kai-chef, stipule que « la Corée deviendra libre et indépendante le moment venu », sans davantage de précisions. Le 15 août 1945, la Corée est libérée du joug japonais mais aussitôt divisée en deux zones pour désarmer les troupes japonaises, les Etats-Unis choisissant arbitrairement, sans que l'URSS s'y oppose, le 38eme parallèle. Les Etats-Unis ne débarquent eux-mêmes en Corée que le 8 septembre 1945, instaurant au Sud un « gouvernement militaire de l'armée des Etats-Unis en Corée » (USAMGIK), alors que le Comité populaire provisoire est déjà établi au Nord. Au Sud, les élections séparées du 10 mai 1948, organisées à l'instigation des Etats-Unis, aboutissent à la création de la République de Corée le 15 août 1948, à laquelle répond, au Nord, la fondation de la République populaire démocratique de Corée le 9 septembre suivant.

 

De 1945 à 1950, année du déclenchement de ce qu'il est convenu d'appeler la guerre de Corée, les affrontements intercoréens le long de l'artificielle frontière du 38eme parallèle font près de 100 000 victimes. En 1953, les combats de la guerre de Corée prennent fin sur un simple cessez-le-feu, et la péninsule coréenne reste donc techniquement en état de belligérance. Aujourd'hui, les Etats-Unis stationnent toujours près de 30 000 soldats en Corée du Sud et y mènent régulièrement des exercices militaires dirigés contre le Nord.

Répondant ensuite aux questions des membres et sympathisants présents de l'Association d'amitié franco-coréenne, les responsables de l'AAFC et les représentants de la RPDC ont à nouveau souligné l'importance d'une réunification indépendante et pacifique de la Corée pour la paix mondiale, alors que l'Asie orientale devient une priorité pour les Etats-Unis dans leur stratégie visant à contrer la montée en puissance de la Chine.

 

Le certain désintérêt, voire la crainte (en raison de son coût), d'une partie des citoyens sud-coréens face à une éventuelle réunification de la Corée a été mis sur le compte d'une confusion entre une réunification « à l'allemande » - en fait, l'absorption d'une partie par l'autre - et la réunification de la Corée telle que l'envisageait le Président Kim Il-sung et réaffirmée au plus haut niveau des deux Etats coréens dans les déclarations du 15 juin 2000 et du 4 octobre 2007 : un Etat, deux systèmes, une coopération étendue dans tous les domaines.

 

Pour l'Association d'amitié franco-coréenne, il ne fait aucun doute que le peuple coréen peut être à la pointe de l'innovation politique, comme il sait déjà être à la pointe de l'innovation technique : les Coréens du Nord, du Sud et d'outre-mer disposent des ressources nécessaires pour réunifier, par leurs propres efforts, leur pays, selon un modèle original, réparant ainsi une injustice historique et rendant le monde plus sûr.

 

Un demi-siècle d'initiatives

en faveur d'une réunification indépendante et pacifique de la Corée

 

18 avril 1948 - Une conférence réunit à Pyongyang des représentants des forces politiques et sociales de l'ensemble de la péninsule coréenne, dont Kim Il-sung, alors président du comité populaire provisoire de Corée du Nord et le nationaliste Kim Ku, président du gouvernement provisoire de Corée du Sud.

La proposition défendue par Kim Il-sung, et consistant à former une seule assemblée législative et un gouvernement unifié, n'est pas suivie : au Sud, à l'instigation des Etats-Unis, ont lieu en mai des élections séparées, boycottées par la gauche et une partie importante des nationalistes, aboutissant à la création de la République de Corée le 15 août 1948. 

Kim Il-sung, président du comité populaire provisoire de Corée du Nord, et Kim Ku, président du gouvernement provisoire de Corée du Sud, à Pyongyang en avril 1948

Kim Il-sung, président du comité populaire provisoire de Corée du Nord, et Kim Ku, président du gouvernement provisoire de Corée du Sud, à Pyongyang en avril 1948

4 juillet 1972 - La République populaire démocratique de Corée (Nord) et la République de Corée (Sud) signent un communiqué conjoint posant trois principes pour une future réunification de la Corée :

- La réunification devra être atteinte de manière indépendante, sans recours aux forces étrangères ni ingérence.

- La réunification devra être atteinte par des moyens pacifiques, sans recours aux armes d'une partie contre l'autre.

- Une grande union nationale devra être encouragée, transcendant les différences d'idéologie, d'idéal et de système.

Lee Hu-rak, directeur des services de renseignement sud-coréens, et Kim Il-sung, Premier ministre de la RPD de Corée, à Pyongyang en mai 1972

Lee Hu-rak, directeur des services de renseignement sud-coréens, et Kim Il-sung, Premier ministre de la RPD de Corée, à Pyongyang en mai 1972

 

10 octobre 1980 - Le Président Kim Il-sung présente la proposition de création de la République fédérale démocratique de Koryo lors du sixième congrès du Parti du travail de Corée. Il s’agit de fonder un Etat neutre, fédéral, dotée d’une assemblée unique et d’un seul gouvernement compétent sur les questions politiques, militaires et diplomatiques, parallèlement à la mise en place d’un comité permanent Nord-Sud. L’armée de la République fédérale démocratique de Koryo serait limitée à 100 000 hommes.

 

Le Président Kim Il-sung devant le sixième congrès du Parti du travail de Corée, à Pyongyang en octobre 1980

Le Président Kim Il-sung devant le sixième congrès du Parti du travail de Corée, à Pyongyang en octobre 1980

13 décembre 1991 - La République populaire démocratique de Corée et la République de Corée signent l’Accord sur la réconciliation, la non-agression, les échanges et la coopération entre le Nord et le Sud, qui permet notamment l’entrée simultanée des deux Etats coréens aux Nations Unies.

 

6 avril 1993 - Le Président Kim Il-sung présente le Programme en dix points pour une grande union de la nation :

- Il faut fonder un Etat unifié, indépendant, pacifique et neutre, grâce à une grande union de toute la nation.

- Il faut s’unir sur la base de l’esprit d’indépendance nationale.

- Il faut s’unir selon le principe consistant à favoriser la coexistence, la coprospérité et les intérêts communs.

- Il faut mettre fin à toute querelle dans le domaine politique qui soit de nature à favoriser la division et la confrontation entre les compatriotes.

- Il faut se débarrasser des craintes quant à l’éventualité d’une invasion de l’un par l’autre, d’une victoire sur le communisme ou d’une communisation.

- Il faut faire grand cas de la démocratie et agir de concert, au lieu de mettre à l’index l’autre partie en prétextant les différences d’idéologie et d’opinion.

- Il faut protéger les biens matériels et spirituels des particuliers et des organisations et favoriser leur utilisation en faveur de la grande union nationale.

- Tous les membres de la nation doivent se comprendre mutuellement et se fier les uns aux autres à travers les contacts, la circulation et les dialogues.

- Tous les Coréens au Nord, au Sud et à l’étranger doivent renforcer leur solidarité en faveur de la réunification de la patrie.

- Il  faut apprécier hautement ceux qui ont contribué à la grande union nationale et à la cause de la réunification de la patrie.

 

Les trois principes pour la réunification (1972), le projet de fondation de la RFD de Koryo (1980) et le programme en dix points (1993) constituent les « Trois Chartes pour la réunification de la Patrie » symbolisées par un monument de Pyongyang

Les trois principes pour la réunification (1972), le projet de fondation de la RFD de Koryo (1980) et le programme en dix points (1993) constituent les « Trois Chartes pour la réunification de la Patrie » symbolisées par un monument de Pyongyang

Partager cet article
Repost0
29 juin 2014 7 29 /06 /juin /2014 00:18

Il y a soixante-dix ans, des centaines de milliers de femmes asiatiques, coréennes, chinoises ou originaires d'autres pays d'Asie envahis par le Japon, ont été réduites en esclavage sexuel par le gouvernement japonais dans les bordels militaires de l'armée nippone. La venue en France et en Europe de l'une des anciennes "femmes de réconfort", Mme Kil Won-ok, avec la présidente du Conseil coréen pour les "femmes de réconfort", Mme Yun Mi-hyang, a donné lieu à un ensemble de manifestations à Paris pour exiger que le Japon reconnaisse les crimes de guerre qu'il a commis et apporte une juste indemnisation aux victimes de l'esclavage sexuel - car le combat en faveur des "femmes de réconfort" a une portée universelle, afin que plus jamais les femmes ne soient des armes de guerre. Comme en septembre 2013 à l'occasion de la visite en France de Mme Kim Bok-dong, puis lors des actions conduites en janvier et en avril 2014 à Paris dans le cadre de la campagne de pétition internationale, l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) a pleinement soutenu les initiatives menées par le Conseil coréen des femmes de réconfort, en relayant l'information auprès de ses contacts, en aidant matériellement à l'organisation de manifestations - c'est sous l'égide de l'AAFC qu'une salle a été mise à disposition à Paris le 24 juin 2014 - et en continuant à sensibiliser l'opinion publique. Pour les droits des femmes et pour que justice soit enfin rendue aux anciennes victimes de l'esclavage sexuel japonais, poursuivons le combat jusqu'à la victoire !

Mme Kil Won-ok, ancienne "femme de réconfort" victime de l'esclavage sexuel par l'armée japonaise, le 25 juin 2014 place du Trocadéro à Paris

Mme Kil Won-ok, ancienne "femme de réconfort" victime de l'esclavage sexuel par l'armée japonaise, le 25 juin 2014 place du Trocadéro à Paris

Kil Won-ok n'avait que 12 ans quand elle est devenue, en 1940, une esclave sexuelle de l'armée japonaise. Soixante-dix ans plus tard, la blessure est toujours vive, à l'instar de ces centaines de milliers de femmes dont la vie a été défintivement brisée. Mais dans les témoignages qu'elle donne, la gravité le dispute aussi à une capacité à prendre de la distance : sans doute est-ce aussi cette forme d'optimisme indéfectible qui lui a permis de tenir bon, pendant toutes ces années, puis de surmonter l'opprobre pendant les décennies au cours desquelles on préférait, en Corée, taire le crime qui avait été commis à l'encontre des "femmes de réconfort" - avant que le Conseil coréen pour les "femmes de réconfort" ne rende pleinement compte, depuis 1992, de cette violation inacceptable des droits humains fondamentaux.

La visite en Europe de Mme Kil Won-ok, accompagnée de Mme Yun Mi-hyang, président du Conseil coréen pour les "femmes de réconfort" a donné lieu à un ensemble de manifestations à Paris qu'a soutenues l'AAFC et auxquelles nous avons participé.


Un premier témoignage a eu lieu le lundi 23 juin à la Sorbonne, à l'invitation du professeur Jean Salem, en présence de quelque 70 invités, coréens, français mais aussi japonais, chinois, originaires d'autres pays asiatiques, arabes ou africains, tant la question de l'esclavage sexuel des femmes reste d'une brûlante actualité, trop souvent liée aux crimes de guerre commis dans les zones en conflit.

Campagne à Paris et en Europe pour refuser les crimes sexuels commis contre les "femmes de réconfort"
Campagne à Paris et en Europe pour refuser les crimes sexuels commis contre les "femmes de réconfort"
Campagne à Paris et en Europe pour refuser les crimes sexuels commis contre les "femmes de réconfort"
Campagne à Paris et en Europe pour refuser les crimes sexuels commis contre les "femmes de réconfort"

Le mardi 24 juin, une rencontre très émouvante a eu lieu avec, notamment, des jeunes Sud-Coréens en visite en France et en Europe dans le cadre de la campagne pour la paix "Papillons de l'espoir" - coïncidant avec le centième anniversaire du début de la Première guerre mondiale.

Le mercredi 25 juin, Mme Kil Won-ok a livré son témoignage à la Maison du barreau, en présence de et grâce à Roland Weyl, de l'Association internationale des juristes démocrates. En effet, refuser la guerre et les crimes commis sous le prétexte des conflits exige de porter un regard lucide sur l'histoire : telle est l'une des missions qui incombent aux juristes, et qui justifient que les militants coréens ont porté la question des "femmes de réconfort" aux Nations Unies, pour obtenir une reconnaissance par le Japon.

A cette fin, la visite de Mme Kil Won-ok a aussi été l'occasion de rencontres avec des personnalités françaises, notamment la sénatrice Brigitte Gonthier-Maurin, présidente de la délégation du Sénat aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, et la sénatrice Mme Michèle André, ancienne ministre des droits des femmes. Le dépôt, la discussion et l'adoption en France d'une résolution parlementaire relative aux "femmes de réconfort", à l'instar des démarches accomplies par les Parlements d'autres pays, permettraient de faire reculer les violences ainsi faites aux femmes, par la reconnaissance officielle du préjudice subi par les anciennes esclaves sexuelles de l'armée japonaise. Une des questions abordées a aussi été la création d'un monument commémoratif, en France, pour ne pas oublier ce qui s'est passé.

Enfin, l'un des points d'orgue des manifestations a été le rassemblement place du Trocadéro, sur le parvis des droits de l'homme, le 25 juin 2014. Il coïncidait avec les manifestations du mercredi, organisées chaque semaine par les anciennes victimes de l'esclavage sexuel. Mme Kil Won-ok et Mme Yun Mi-hyang y ont pris la parole, de même que, parmi d'autres orateurs, Benoît Quennedey et Patrick Kuentzmann, respectivement vice-président chargé des actions de coopération et secrétaire général de l'AAFC. 

 L'AAFC a souligné que le rassemblement coïncidait avec le 64ème anniversaire du début de la guerre de Corée, et montrait la nécessité de la signature d'un traité de paix dans la péninsule coréenne, le conflit s'étant terminé par un simple accord d'armistice. Enfin, la question de l'esclavage sexuel et le combat pour la paix sont liés, les guerres coïncidant avec les pires violences perpétrées contre les femmes. Cette situation de "ni guerre ni paix" conduit à une militarisation de la société coréenne tout entière ; la reconnaissance, qu'exigent les militants pacifistes sud-coréens, de l'objection de conscience et de formes civiles de service national s'inscrivent dans le combat pour les droits de l'homme que mène l'AAFC avec les militants sud-coréens.

Les jeunes Coréens en visite en Europe dans le cadre de la campagne 2014 pour la paix ont pris une place très active dans le rassemblement au Trocadéro ce 25 juin 2014. Le spectacle dansé qu'ils ont donné, révélant une synchronisation parfaite, a retenu l'attention de la foule. Des chants et les banderoles déployées ont donné une ambiance festive à cette "manifestation du mercredi" d'un genre inédit, tandis que les papillons dessinés sur une toile posée à même le sol ont symbolisé l'espoir d'une envolée vers la paix : les jeunes militants pacifistes poursuivent à présent  vers d'autres contrées européennes leur rêve des papillons pour un monde sans guerre.

Campagne à Paris et en Europe pour refuser les crimes sexuels commis contre les "femmes de réconfort"
Campagne à Paris et en Europe pour refuser les crimes sexuels commis contre les "femmes de réconfort"
Campagne à Paris et en Europe pour refuser les crimes sexuels commis contre les "femmes de réconfort"
Campagne à Paris et en Europe pour refuser les crimes sexuels commis contre les "femmes de réconfort"

Photos Alain Noguès

 

Site du Conseil coréen pour les "femmes de réconfort" : www.womenandwar.net

Partager cet article
Repost0
24 juin 2014 2 24 /06 /juin /2014 23:31

A la différence de la Corée, la Chine est un État pluriethnique qui mélange plus d’une cinquantaine de « nationalités » (selon le lexique chinois), dont notamment l’ethnie ultramajoritaire Han qui compose 92% de la population de la République Populaire de Chine. Parmi les autres nationalités, on compte notamment les Ouïghours, les Tibétains, les Zhuang (un groupe vietnamien de Chine), les Hui et… les Coréens. Alors que les premiers, beaucoup plus importants en termes démographiques, disposent tous de régions autonomes de niveau national (respectivement le Xinjiang, le Tibet, le Guangxi, le Ningxia), les Coréens de Chine habitent d’abord la Préfecture Autonome Coréenne de Yanbian, située dans la province chinoise du Jilin et frontalière de la République Populaire et Démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord). A l’occasion d’un séjour en RPDC courant mai, un adhérent de l’Association d’amitié franco-coréenne (AAFC) a eu l’opportunité de séjourner dans la capitale de la préfecture autonome coréenne de Chine, Yanji, à la rencontre des Chaoxianju (Coréens de Chine).

 

Selon diverses estimations, il existe actuellement entre deux et trois millions de Chinois d’ethnie coréenne. Si l’immense majorité d’entre eux réside dans le nord-est chinois (le fameux Dongbei, composé du Liaoning, Jilin, Heilongjiang), ils sont particulièrement concentrés à Yanbian, puisque la préfecture en héberge plus de 800 000. La structuration de la minorité coréenne de Chine est particulièrement complexe puisque les Coréens de Chine sont à la fois issus de vagues d’immigration plus ou moins récentes, mais aussi de la mobilité extrême de la frontière Chine/Corée/Russie au fil des siècles. Rappelons-le, il y a de cela plusieurs siècles, l’actuel territoire coréen a été occupé au moins en partie par plusieurs dynasties « chinoises » (au sens politique plus qu’ethnique, certains empereurs chinois ayant occupé une partie de la péninsule coréenne étant issus de diverses ethnies mongoles – les dynasties Liao et Yuan notamment), d’où un métissage ethnique déjà relativement ancien et des liens culturels très forts : avant l’invention de l’alphabet syllabaire coréen en 1443 (appelé hangeul en Corée du Sud et chosongeul en Corée du Nord), la langue coréenne s’écrivait par exemple à l’aide des sinogrammes. Par ailleurs, comme les lecteurs réguliers du blog de l’AAFC le savent peut-être, parmi les Coréens ayant vécu une partie de leur vie dans le nord-est chinois et l’actuelle Yanbian, on trouve notamment Kim Il-sung (ayant animé en exil la guérilla antijaponaise) et son fils Kim Jong-il, respectivement président de la RPDC et Secrétaire Général du Parti du Travail de Corée.

 

Plus récemment, la frontière sino-(nord)-coréenne a été tracée à la fois à l’occasion des « traités inégaux » opposant la dynastie russe des Romanov à celle, sur le déclin, des Qing chinois (d’ethnie mandchoue), ce qui a eu pour principal effet la perte de la façade maritime chinoise (la ville de Vladivostok redevenant ainsi russe en 1860). Un siècle plus tard, avec l’avènement de la République Populaire de Chine (1949), et l’alliance sino-coréenne forgée dans le feu de la Guerre de Corée (1950-1953), naissait la « zone autonome » puis la « préfecture autonome » de Yanbian. Si la décentralisation importante de pouvoirs politiques à une ethnie n’était pas chose rare en Chine au début des années 1950 (c’est l’époque du fameux accord en 17 points sur la libération pacifique du Tibet), Yanbian revêt très vite un statut tout à fait particulier de par sa localisation stratégique : sas de communication et couloir économique de première importance entre Chine et Corée populaire, l’état-major militaire américain envisagera, au plus fort de la Guerre de Corée, de procéder à des frappes nucléaires sur la zone pour isoler la péninsule du continent (créer une « ceinture de cobalt radioactif » selon le vocable américain). Par ailleurs, l’histoire personnelle du dirigeant chinois Mao Zedong témoigne de l’importance prise par la préfecture de Yanbian : alors qu’est souvent évoqué le destin tragique de Mao Anying, fils de Mao disparu pendant la Guerre de Corée, il est moins connu que son propre neveu fut un temps (en pleine révolution culturelle) à la tête de Yanbian.

 

Un temps « minorité modèle », les Coréens de Yanbian ont subi coup sur coup un certain nombre de revers économiques majeurs, notamment la perte d’attractivité du Dongbei (aujourd’hui cœur industriel en net déclin) après la disparition de l’Union Soviétique, et la concurrence des provinces côtières exportatrices du sud de la Chine (Guangdong, Fujian) après « l’ouverture » menée par Deng Xiaoping dans les années 1980. Frontalière à la fois de la Corée du Nord et de la Russie, Yanbian a connu à la fois un sévère ralentissement économique consécutif à l’implosion soviétique et la « dure marche » en RPDC dans les années 1990. Aujourd’hui, les choses semblent lentement évoluer positivement, grâce notamment à l’investissement sud-coréen (en témoignent les nombreux édifices chrétiens de Yanji) et aux perspectives offertes par la Zone Économique Spéciale nord-coréenne de Rajin-Sonbong située à moins de 50km au sud. Cette dernière offre à Yanbian un débouché sur la mer de l’Est qui permet de désenclaver l’ensemble du nord-est chinois et offre une alternative au port russe de Vladivostok, qui gèle durant l’hiver. La mise en valeur relativement nouvelle de cette situation de carrefour (la ZES de Rason a été ouverte en 1991, mais le projet n’a véritablement pris forme qu’avec l’inspection du dirigeant Kim Jong-il en 2009) n’est pas sans soulever beaucoup d’espoir pour l’ensemble de l’Asie du nord-est, dont l’économie stagne depuis plusieurs années. Certains programmes soutenus par l’ONU (notamment le Greater Tumen Initiative) ont d’ailleurs pour objet de développer les infrastructures nord-coréennes et les liaisons entre Yanbian et la RPDC (ainsi que, dans une moindre mesure, la Russie). En effet, une part importante des investisseurs chinois en RPDC sont d’ethnie coréenne, issus de Yanbian, ce qui explique notamment la présence d’une délégation commerciale de la ZES de Rason dans la capitale de la préfecture, Yanji. Nous avons eu l’occasion de rencontrer des investisseurs chinois (et coréens américains) actifs dans la zone, qui ont pu nous exposer les difficultés mais aussi les perspectives offertes par le commerce transnational.

 

Si les grandes villes de la zone comme Yanji ou Tumen évoquent surtout la tristesse granitique de beaucoup de villes chinoises de cette importance, il ne faut pas s’y tromper : il existe encore de nombreuses traces d’architecture coréenne traditionnelle à découvrir, ainsi que de vibrants quartiers coréens, qui mélangent des Coréens du Nord, du Sud, de Chine ainsi que quelques Coréens américains. Située à trois heures de route de la ZES de Rason, deux heures du mont Paektu (Changbai en chinois) et une demi-heure de la frontière sino-nord-coréenne, il est plus que conseillé aux lecteurs intéressés par l’amitié sino-coréenne de s’attarder dans cette troisième Corée.

Yanbian : bienvenue dans la Corée chinoise
Yanbian : bienvenue dans la Corée chinoise
Yanbian : bienvenue dans la Corée chinoise
Yanbian : bienvenue dans la Corée chinoise

Sources :

Partager cet article
Repost0
28 mai 2014 3 28 /05 /mai /2014 23:36

Deux événements dramatiques ont récemment frappé la Corée : le 16 avril, le naufrage du ferry Sewol, au large des côtes sud-coréennes, a entraîné la mort ou la disparition de 302 personnes, majoritairement des lycéens ; le 15 mai, l'effondrement d'un immeuble dans le quartier de Pyongchon, à Pyongyang, aurait causé des centaines de morts. Solidaire de tout le peuple coréen, l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) a immédiatement présenté ses condoléances aux familles des victimes dans les comptes rendus de ces événements tragiques publiés sur son site Internet. Elle a également envoyé des messages de condoléances, signés de son Président, André Aubry, que nous reproduisons ci-après. La lettre au proviseur du lycée Danwon, à Ansan, où étaient scolarisés nombre des victimes du naufrage du Sewol, lui a été directement adressée et a été traduite en coréen. La lettre à M. Cha Hui-rim, président du Comité populaire de la ville de Pyongyang, a été transmise par l'intermédiaire de nos homologues de l'Association d'amitié Corée-France, en partie francophones, et n'a donc pas été traduite en coréen.

Messages de condoléances de l'AAFC après le naufrage du Sewol et l'effondrement d'un immeuble à Pyongchon
Messages de condoléances de l'AAFC après le naufrage du Sewol et l'effondrement d'un immeuble à Pyongchon

André AUBRY                                                                            Paris, le 5 mai 2014
Président de l’Association d’amitié franco-coréenne
c/o Maison des associations du 16ème arrondissement
14, avenue René Boylesve
75016 Paris
France

 

                                                                                   Proviseur du lycée Danwon
                                                                                   55, Danwon-Ro
                                                                                   Danwon-gu
                                                                                   Ville d’Ansan
                                                                                   Gyung-Gi Do
                                                                                         République de Corée
                                                                                                                                                                      



Madame, Monsieur



L'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) milite depuis quarante ans pour la paix et la réunification en Corée. A ce titre, nous avons toujours été aux côtés du peuple coréen, y compris dans les moments les plus douloureux de son histoire.


Dès la nouvelle de la tragédie du naufrage "Sewol", survenue le 16 avril dernier, nous avons informé et sensibilisé l'opinion publique française. Nous avons présenté nos condoléances, tout en continuant à espérer que les personnes disparues pourraient être sauvées. Par respect dû à la mémoire des victimes, nous formons le voeu que toute la lumière soit faite sur les causes de cette catastrophe, pour que plus jamais de telles tragédies ne se reproduisent. Lors de notre réunion du 29 avril, les membres du bureau de l'AAFC ont décidé d'exprimer aussi leur solidarité par la lettre que vous avez sous les yeux.


Ce naufrage représente un drame terrible pour les familles des 302 victimes, mortes ou disparues. Il s'agissait majoritairement de lycéens, arrachés trop tôt à l'affection des leurs, disparus dans des circonstances épouvantables sans avoir pu être secourus, et c’est pourquoi nous avons choisi de vous adresser cette lettre. Les messages poignants qui ont été adressés, à leurs familles et à leurs proches, resteront à jamais gravés dans nos mémoires.

Nous vous exprimons, à vous et à leurs familles, nos plus sincères condoléances, dans ces circonstances extrêmement douloureuses.



Le Président de l’Association d’amitié franco-coréenne,

                                                                                             André AUBRY

2014년 5월 5일 파리에서 드립니다.

 

앙드레 오브리

프랑스-코리아 친선 협회 이사회장

파리 16구 협회 주소지

르네 보아르스베 길 14번지

프랑스

 

                                                                          단원고등학교 귀하

                                                                          대한민국 경기도 안산시 단원구 단원로 55

 

세월호 참사로 인한 깊은 슬픔 속에 계시는 학교 관계자 여러분께


저희 프랑스-코리아 친선 협회는 지난 40년 이상 한반도의 평화와 통일을 위해 일해온 단체입니다.

저희는 그 시간 동안, 특히 고통스러운 많은 역사들의 한 순간 한 순간을 포함해서 한반도 민중들의 입장에 서 왔습니다.

지난 4월 16일 일어난 세월호 침몰의 비극을 접하고 나서, 저희 단체는 프랑스인들에게 이 참사의 소식을 전하고 프랑스인들로 하여금 이 참사가 무엇을 의미하는지 알게 하도록 노력하였습니다.

저희는 깊은 슬픔에 빠졌으며, 또한 실종자 분들의 구조를 진심으로 기원했습니다.

희생자 여러분을 영원히 잊지 않기 위해서, 또한 이러한 참극이 다시는 일어나지 않기 위해서, 저희는 이 참사의 진상이 제대로 규명되기를 바랍니다.

저희가 4월 29일에 가졌던 회의에서, 저희 프랑스-코리아 친선 협회의 이사회는 저희의 슬픔을 담아 위로와 연대를 전하기로 결정하였습니다.

총 302명의 희생자들이 실종되거나 돌아가신 이 참극은 유가족들에 끔찍한 고통과도 같을 것입니다.

대다수의 희생자들이 고등학생이었고, 평생을 함께 해 온 소중한 가족을 잃는, 뿌리채 뽑혀져 나가는 커다란 슬픔을 겪고, 구조될 것이라는 기약도 없는 그 끔찍한 고통을 짐작하기 힘듭니다.

이런 마음에서, 저희는 이렇게 편지로 마음을 전해 드리기로 하였습니다.

침몰된 배 안에서 구조를 바라는 희생자들의 절규, 가족들과 친구들과 가까웠던 사람들에게 전하는 그 가슴이 미어지도록 슬픈 절규를 떠올리면서 저희는 결코 희생된 분들을 잊을 수 없을 것입니다.

저희는 유가족 분들과 학교 관계자 여러분들께 저희의 가장 깊은 슬픔과 고통의 마음을 담아 진심으로 위로를 전합니다.

 

 

                                                                       프랑스-코리아 친선 협회 이사회장

                                                                                      앙드레 오브리

Messages de condoléances de l'AAFC après le naufrage du Sewol et l'effondrement d'un immeuble à Pyongchon

André AUBRY                                                                                Paris, le 22 mai 2014
Président de l’Association d’amitié franco-coréenne
c/o Maison des associations du 16ème arrondissement
14, avenue René Boylesve
75016 Paris
France

 

                                                             M. Cha Hui-rim
                                                             Président du Comité populaire
                                                             de la ville de Pyongyang
                                                             République populaire démocratique de Corée

 

                                  
Monsieur le Président,


L'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) milite depuis quarante ans pour la paix et la réunification en Corée. A ce titre, nous avons toujours été aux côtés du peuple coréen, y compris dans les moments les plus douloureux de son histoire.


Dès qu’a été rendu public l’effondrement d’un immeuble dans le quartier de Pyongchon, à Pyongyang, nous avons immédiatement rendu compte de cette terrible nouvelle sur notre site Internet, ainsi que des excuses présentées par plusieurs responsables, dont vous-même, devant les familles des victimes, en comprenant quelle douleur a été la vôtre – ayant moi-même été maire d’une ville française pendant sept ans. En mon nom propre comme en celui de l’Association d’amitié franco-coréenne (AAFC) que je préside, nous vous adressons nos plus sincères condoléances.


Cette catastrophe me touche au plus profond de mon cœur : je pense aux familles, aux hommes, aux femmes et aux enfants trop tôt disparus, ainsi qu’à l’affliction des leurs - parents, amis, voisins ou collègues. J’imagine leurs visages en me remémorant les Coréens que j’ai connus, ici en France et lors de mes voyages dans la péninsule.  Celles et ceux qui ont disparu ont pour moi des noms, des visages, qui resteront à jamais gravés dans nos mémoires.

 

Nous avons confiance dans la capacité du peuple coréen à se relever après cette catastrophe, étant certains que toutes les mesures seront prises, en termes de sécurité de la construction, pour que plus jamais de telles tragédies ne se reproduisent.

 

Je vous prie de croire, Monsieur le Président, en mon entière compassion et vous prie d'accepter mes sincères sentiments d’amitié.



                                             Le Président de l’Association d’amitié franco-coréenne,
                                                  André AUBRY

Partager cet article
Repost0
25 mai 2014 7 25 /05 /mai /2014 23:08

Les 24 et 25 mai 2014, 2 000 délégués de l'Association générale des résidents coréens au Japon (Chongryon) se sont réunis à l'occasion du 23e Congrès de l'organisation, en présence notamment de représentants des partis Komeito, démocrate et social-démocrate. Les orientations adoptées pour les quatre prochaines années - qui verront notamment la commémoration du 60e anniversaire de la Chongryon, le 25 mai 2015. Le rapport adopté a mis l'accent sur la défense des droits des Coréens du Japon, l'organisation de la communauté coréenne (et en particulier des écoles coréennes) et les activités à conduire pour la réunification indépendante et pacifique de la Corée, l'accent était porté sur le soutien aux efforts conduits en République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) pour l'édification d' "un pays puissant et prospère". Une lettre a été adressée au Maréchal Kim Jong-un, Président de la commission de la défense nationale de la RPD de Corée.

Dans un courrier - en anglais - adressé à l'AAFC le 1er mai 2014, Ho Jong-man, Président du Comité exécutif central de la Chongryon, réélu lors du 23e Congrès, a rappelé que l'organisation comptait 47 sièges locaux et 241 branches régionales, et qu'elle gérait 135 écoles coréennes dans l'archipel nippon, de la maternelle à l'université. Dans un contexte de répression des autorités japonaises, André Aubry, président de l'Association d'amitié franco-coréenne, a adressé en réponse, le 7 mai 2014, un message de soutien et de félicitations, en anglais et en français, que nous reproduisons ci-après.

(mise à jour le 31 mai 2014) Le 31 mai 2014, le Président Ho Jong-man a remercié l'AAFC pour son message de félicitations et s'est félicité de nos efforts pour renforcer l'amitié et la solidarité franco-coréennes.

Message de l'AAFC à la Chongryon à l'occasion de son 23e Congrès

Dear Friends,

Founded in 1969, the France-Korea Friendship Association (in French : Association d'amitié franco- coréenne, AAFC) fully supports the goals of the General Association of Korean Residents in Japan : helping the Koreans in Japan from both material and cultural point of view, considering your huge successes in promoting Korean culture and language in Japan. We appreciate your efforts for a peaceful, democratic and independent reunification of the Korean peninsula, as well as your long- standing contribution to promote economic and cultural exchanges with the Democratic People's Republic of Korea on the road to socialism. What you have done is a model for us, French people, to promote more actively ties between France and the DPRK in all fields.

For decades, AAFC has supported your efforts to fight against discriminations towards Koreans living in Japan. We also know that the Japanese authorities are currently trying to crack down on your activities. Please be assured that we fully support your stuggle not to be deprieved of your national seat. Several times, we published articles supporting Chongryon and calling for the recognition by the Japanese Government of the crimes committed during the Second World War, especially against "comfort women".


We are confident that you will continue to be successful in your activities and we are ready to cooperate with you more extensively, including welcoming the members of your association who would stay in France or visit France in the future.

We send you our congratulations on the occasion of your 23rd General Meeting, and hope that your work will be even more successful in the future.

Best regards

André Aubry
Former French Senator
Former Mayor of Antony
President of France-Korea Friendship Association

Chers Amis,

Fondée en 1969, l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) soutient pleinement les buts de l'Association générale des résidents coréens au Japon : soutenir les Coréens du Japon sur le plan tant matériel que culturel, en prenant en compte les grands succès que vous avez remportés dans la promotion de la culture et de la langue coréennes au Japon. Nous apprécions vos efforts pour une réunification pacifique, indépendante et démocratique de la Corée, ainsi que vos contributions de longue date pour promouvoir les échanges économiques et culturels avec la République populaire démocratique de Corée sur la voie du socialisme. Ce que vous avez fait est un modèle pour nous, Français, pour développer encore plus fortement les liens entre la France et la RPDC dans tous les domaines.

Depuis des décennies, l'AAFC a soutenu vos efforts pour lutter contre les discriminations qui touchent les Coréens du Japon. Nous savons également que les autorités japonaises s'efforcent aujourd'hui de réprimer vos activités. Soyez assurés que nous soutenons pleinement votre combat pour ne pas être privés de votre siège national. A plusieurs reprises, nous avons publié des articles soutenant la Chongryon et appelant à la reconnaissance par le Gouvernement japonais des crimes qu'il a commis pendant la Seconde Guerre mondiale, tout particulièrement à l'encontre des « femmes de réconfort ».

Nous sommes certains que vous remporterez de nouveaux succès dans vos activités et nous sommes prêts à coopérer encore plus étroitement avec vous, y compris en accueillant les membres de votre association qui séjourneraient en France ou visiteraient la France à l'avenir.

Nous vous adressons nos félicitations à l'occasion de votre 23ème Assemblée générale, en souhaitant que vos travaux soient pleinement couronnés de succès.

Bien à vous,
André Aubry ancien Sénateur
Ancien Maire d'Antony
Président de l'Association d'amitié franco-coréenne

Partager cet article
Repost0
21 mai 2014 3 21 /05 /mai /2014 22:46

Le 17 mai 2014, l'Association malienne pour la culture, l'échange et la solidarité (AMCES), basée à Stains, organisait une conférence-débat à la Maison des associations de Stains à l'occasion de la journée de l'Afrique (25 mai), sur le thème : "Afrique-Asie, singularité de partenariats : cas des deux Corée, de la Chine, du Japon...". L'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) était présente à cet événement, présentant notamment les photos réalisées par le photo-journaliste Alain Noguès, co-fondateur de l'agence Sygma, lors de ses divers séjours en République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) au sein de délégations de l'AAFC. D'autre part, Benoît Quennedey, vice-président de l'AAFC chargé des actions de coopération, était l'un des deux intervenants de la conférence.

Journée de l'Afrique : l'AAFC présente à la manifestation organisée par l'AMCES à Stains le 17 mai 2014

C'était un public divers, composé de personnes africaines ou d'origine africaine mais aussi asiatiques (notamment indiennes et pakistanaises), qui est venu pour mieux comprendre la nature des relations complexes entre l'Asie de l'Est (Chine, Corée(s), Japon, Inde, Vietnam...) et les pays du continent africain, à l'occasion de la conférence-débat organisée par l'Association malienne pour la culture, l'échange et la solidarité, le 17 mai 2014 à Stains, à l'occasion de la journée de l'Afrique célébrant l'anniversaire de la signature des accords de l'OUA (Organisation de l'Unité Africaine), le 25 mai 1963.

 

En ouverture de cette conférence-débat, Hamidou Konaté, président de l'AMCES a rappelé les activités développées par l'association, créée le 6 juin 2001, notamment dans le domaine linguistique (cours d'alphabétisation et de langues) et pour l'apprentissage de l'informatique.

 

Puis, Benoît Quennedey, vice-président de l'AAFC, ancien élève de l'ENA, a présenté le contexte politique et diplomatique des relations entre l'Afrique et l'Asie, qui nécessite préalablement de s'extraire d'une vision exclusivement sino-centrée de la présence asiatique en Afrique, et qui pose la question de la création ou non de nouveau liens de dépendance, semblables à ceux qui unissaient les métropoles européennes à leurs colonies africaines.

La recherche de solidarités globales, au sein du Tiers Monde, entre les nouveaux Etats indépendants d'Afrique et d'Asie a pris place dans le cadre du Mouvement des non-alignés (MNA), selon l'expression forgée par l'Indien Nehru en 1953, et popularisée suite à la conférence de Bandoeng d'avril 1955. Formellement constitué en 1961, le MNA a tenu depuis sa fondation 6 de ses sommets en Afrique et 4 en Asie, s'affirmant largement comme un forum défendant l'indépendance nationale, la souveraineté et l'intégrité des Etats du Tiers Monde, refusant l'impérialisme, le colonialisme, le néocolonialisme, la ségrégation, le racisme et le sionisme, selon les termes de la déclaration du MNA adoptée à La Havane en 1979. Le MNA regroupe aujourd'hui presque tous les pays d'Afrique, et la plupart des pays d'Asie (à l'exception notamment du Japon, de la Corée du Sud et de Taïwan, la Chine ayant le statut d'observateur), pour s'opposer au "consensus de Washington" néolibéral. Malgré des combats communs, contre une exploitation économique déséquilibrée des matières premières africaines ou d'autres pays du Tiers Monde, ou pour favoriser une conception multilatérale des relations internationales, le MNA a souffert de dissensions entre ses membres et ce sont d'abord les relations bilatérales entre l'Afrique et tel ou tel pays d'Asie de l'Est qui ont dominé les relations Afrique-Asie depuis plus d'un demi-siècle.

Les relations bilatérales ont ainsi d'abord été marquées par le cadre de la guerre froide et de la décolonisation. Les exemples chinois et coréen montrent clairement comment l'Afrique a été un champ de rivalités pour des Etats asiatiques en quête de légitimité internationale. Alors que jusqu'en 1971 la République de Chine à Taïwan était reconnue par une majorité des Etats du monde (70 sur 120), le choix américain de reconnaître la République populaire de Chine a entraîné une réduction comme peau de chagrin des Etats africains n'ayant de relations qu'avec Taïwan (aujourd'hui, le Burkina Faso, le Swaziland, la Gambie et Sao Tomé et Principe) quand la Chine a insisté sur le principe de non-conditionnalité de ses aides et de relations "gagnant-gagnant" avec l'Afrique se démarquant de la posture de donneurs de leçons propre à l'Occident. Le principe de reconnaissance d'une seule Chine, exigée de Pékin, a ainsi été couché noir sur blanc dans les accords signés avec le Botswana en 1975, le Zimbabwe en 1980 ou encore l'Erythrée en 1993. S'agissant de la Corée, la Corée du Sud a d'abord marqué des points face au Nord (en 1963, elle avait des relations avec 18 Etats africains sur 35, contre 4 pour la RPDC : Algérie, Guinée, Egypte, Mali), avant de voir ses positions céder suite à l'impopularité de sa très forte implication aux côtés des Américains dans la guerre du Vietnam, et de changements politiques avec l'arrivée au pouvoir de gouvernements progressistes, reconnaissant Pyongyang (comme par exemple en 1963 au Congo). Séoul a ainsi dû abandonner en 1973 le principe de reconnaissance exclusive d'une seule Corée, tandis que Pyongyang a forgé des relations privilégiées avec plusieurs Etats : la Namibie, fruit de sa lutte contre le régime d'apartheid, ou encore la Zambie, siège du MNA, dont le vice-président Guy Scott était présent à Pyongyang aux cérémonies du 60e anniversaire de la fin de la guerre de Corée en 2013.

Dans l'après-guerre froide, les relations bilatérales se sont inscrites dans le cadre nouveau de la diplomatie des sommets bilatéraux avec l'ensemble des pays africains, d'abord initiée par le Japon, dès 1993, tardivement venu sur le continent africain, imité ensuite par la Chine (depuis 2000), Taïwan (2007), l'Inde (2008), la Corée du Sud, la Malaisie... Il s'agit d'établir des relations globales, non seulement économiques, mais aussi culturelles et de coopération technique et universitaire. Plusieurs pays d'Asie - comme la Corée du Sud, voire le Vietnam - ont aussi appelé les pays d'Afrique subsaharienne à suivre leur exemple de développement. Dans ce cadre nouveau, les compétitions entre puissances asiatiques restent très présentes, notamment entre la Chine (présente sur les chantiers d'infrastructures, ayant développé une diplomatie culturelle avec la diffusion d'une vingtaine d'Instituts Confucius en Afrique), l'Inde (qui occupe les créneaux de la santé et des nouvelles technologies, et insiste sur son statut de démocratie parlementaire pour plaider sur des formes de relations de travail plus équilibrées que d'autres pays asiatiques), ou encore le Japon - qui met en parallèle sa pénétration économique par l'annonce, en 2013, de 6,5 milliards de dollars dans des projets d'investissement. Si l'Afrique peut légitimement avoir le sentiment d'être victime de nouveaux flux d'échanges inégaux, elle bénéficie aussi d'un accès à des produits de consommation meilleur marché que ceux des entreprises européennes, et aurait tout à gagner à développer les partenariats internes pour mettre en place des accords "Sud-Sud" lui permettant de peser davantage dans les négociations avec tel ou tel pays d'Asie.

Intervenant ensuite, Mamadou Camara, économiste, maître de conférences à l'Université de Paris 13, a dressé un panorama et analysé les relations économiques actuelles entre l'Afrique et l'Asie.

 

Rappelant que les flux d'échanges entre les deux continents sont anciens de plusieurs millénaires, notamment sur la côte swahilie, il a souligné que c'est l'essor des relations privilégiées entre l'Europe et l'Afrique, au 19ème siècle, qui a occulté et affaibli les échanges anciens avec le continent asiatique, donnant l'illusion trompeuse d'un essor nouveau après la Seconde guerre mondiale. Si les années des indépendances sont marquées par des flux d'échanges peu intenses, du fait de la faiblesse des économies tant africaines qu'asiatiques, puis par une phase du chacun pour soi dans les années 1970 malgré le développement du MNA, les années 1980 ont été caractérisées par la mise en place de rapports économiques durables, caractérisés par une complémentarité industrielle, notamment avec les "quatre dragons" est-asiatiques. L'intensification des flux commerciaux et d'investissements directs étrangers a caractérisé le développement d'une diplomatie asiatique offensive vis-à-vis de l'Afrique.

 

La baisse de la part relative de l'Afrique dans le commerce mondial (de 5 % des exportations mondiales entre 1970 et 1979 à 2,8 % entre 2000 et 2010, la part dans les importations baissant respectivement de 4,3 % à 2,5 % au cours des mêmes périodes) donne une impression trompeuse de marginalisation du continent africain. En réalité, en valeur, les échanges Afrique-Asie ont connu une importante augmentation. Dans le cas par exemple du Mali, la part de l'Asie dans les échanges commerciaux a atteint 29,3 % sur la période 2007-2011.

Une différence fondamentale entre l'Afrique et l'Asie est la part du commerce interrégional : entre 2007 et 2011, l'Afrique ne représentait en moyenne que 12,5 % des échanges commerciaux des Etats africains, quand cette part s'élevait à 53 % pour l'Asie en développement, pour laquelle il s'agit d'un facteur de développement économique et de croissance. La demande chinoise en matières premières a été un facteur majeur d'essor des échanges entre l'Afrique et la Chine. L'analyse de la diversification des partenariats commerciaux n'est cependant pas univoque. Les termes de l'échange (mesuré par le ratio entre le prix des produits importés et le prix des produits exportés) ont été marqués par une détérioration continue pour les pays africains, traduisant une position dominante des firmes multinationales.

 

En termes d'investissements directs étrangers (IDE), la crise économique des pays émergents a favorisé par contre-coup l'accueil d'IDE en Afrique. Selon le rapport 2012 de la CNUCED sur les IDE dans le monde, les flux annuels d'IDE ont atteint 50 milliards de dollars, en croissance de 5 % par rapport à l'année précédente - soit un dynamisme comparable à celui de 2011, à contre-courant de l'évolution mondiale. Les projets d'IDE restent cependant très concentrés sur les pays riches en matières premières. En 2012, le stock d'IDE japonais en Afrique s'élevait à 8,4 milliards de dollars (dont 2,4 milliards de dollars en Afrique du Sud). Pour la Chine et la Corée du Sud, ces données s'établissaient respectivement à 4,8 milliards de dollars (dont près de 2 milliards de dollars seulement au Nigéria) et 1,8 milliard de dollars.

 

En conclusion, quelles peuvent être les attentes de l'Afrique en termes d'IDE ? Les IDE chinois se voient reprocher de ne pas être accompagnés d'un recours à la main d'oeuvre locale et d'être trop limités au secteur minier, sans enclencher de réel processus d'industrialisation. Mais un processus de croissance apparaît manifestement enclenché, et la croissance moyenne annuelle de 5 % des économies africaines depuis le début des années 2000 coïncide avec une augmentation de la demande intérieure, une amélioration des récoltes et aussi un renforcement des liens avec les économies émergentes d'Asie.

Lors du très riche débat qui a suivi la conférence, les participants ont abordé la question de la redistribution des richesses pour les populations africaines, le besoin de stabilité politique pour offrir un cadre attractif aux IDE, le caractère artificiel des frontières de nombreux Etats africains (à la différence des nations asiatiques, dont l'unité est très ancienne, comme dans le cas de la Corée) et les effets néfastes de la libéralisation commerciale depuis la création de l'OMC en 1994 sur l'accès aux brevets et la perte de ressources douanières pour les économies africaines.

 

Les discussions se sont poursuivies dans une atmosphère conviviale, lors d'un dîner autour d'un buffet malien et coréen.

 

L'Association d'amitié franco-coréenne remercie l'Association malienne pour la culture, l'échange et la solidarité pour son invitation, en espérant que cette journée ait contribué à une meilleure compréhension entre les peuples.

Partager cet article
Repost0
12 avril 2014 6 12 /04 /avril /2014 23:57

Le 12 avril 2014, à la Maison des Mines et des Ponts et Chaussées de Paris s'est tenu le troisième colloque international sur la Corée, intitulé "Démocratie et paix : analyse et perspectives de la situation en Corée et en Asie de l'Est". Alors que les deux précédents colloques internationaux sur la Corée avaient été organisés à Paris à l'initiative de l'Institut de recherches coréennes du XXIe siècle - Forum coréen international, avec les interventions de membres de l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC), le colloque du 12 avril 2014 était pour la première fois co-organisé par le Forum coréen international et l'AAFC. Au moment où la défense de la démocratie au Sud de la péninsule constitue un objectif prioritaire tant pour l'AAFC que pour les militants progressistes sud-coréens en France, le colloque a réaffirmé la nécessité d'agir pour la paix et la démocratie dans la péninsule coréenne, les deux thématiques apparaissant intimement liées.

Après l'ouverture des travaux par Patrick Kuentzmann, secrétaire général de l'AAFC, la première table ronde a été consacrée à la défense de la démocratie en Corée du Sud en tant qu'exigence pour la paix et la réunification.


ouverture_colloque-international_coree_avril-2014.png
ji-young-chul_colloque_coree_12-avril-2014.pngJi Young-chul, ancien coprésident de l’Alliance coréenne pour la réunification indépendante et la démocratie, ancien coprésident du Centre pour l’économie alternative, a tout d'abord présenté les implications du changement politique opéré par la présidente sud-coréenne Mme Park Geun-hye, élue en décembre 2012 et entrée en fonctions en février 2013, comme traduisant le risque d'une dérive fasciste et une montée du danger de guerre. La crise politique a été précipitée par une intervention massive des services de renseignement (NIS) dans la campagne électorale présidentielle. Au plan social, la répression de la grève des cheminots de Korail a traduit le franchissement d'un degré supplémentaire dans l'offensive contre les travailleurs, entraînant par ailleurs une division du camp conservateur - le comportement du pouvoir ayant été critiqué par Kim Hyun-chol, fils de l'ancien président Kim Young-sam, l'expert des questions économiques du Parti Saenuri Kim Jong-in, ou encore Lee Jae-oh et Chung Mong-joon. Au plan économique, la crise se manifeste par une soumission du pouvoir aux intérêts des chaebols (comme en témoigne notamment la poursuite, contre l'opinion publique, du projet d'aménagement des quatre principaux fleuves sud-coréens) et une explosition de la dette publique et privée. Enfin, dans les relations internationales, Mme Park Geun-hye a choisi l'alignement sur les Etats-Unis, y compris dans la critique du Nord. Les choix gouvernementaux qui ont été opérés vise à la suppression brutale des forces d'opposition, conduisant à faire revivre la dictature fasciste de l'ère Yusin, tout en accélérant les préparatifs d'une guerre contre la Corée du Nord dans le cadre des exercices militaires menés conjointement avec les Etats-Unis. Dans ce contexte, l'unité s'impose pour permettre l'établissement d'un nouveau régime réformateur et démocratique.

lee-sang-hun_coree_colloque_12-avril-2014.pngPuis Lee Sang-hun, coprésident de l’Alliance coréenne pour la réunification indépendante et la démocratie, ancien vice-président du Parti démocratique du travail, a souligné les implications de la grève générale et de la nécessité d'une démocratie progressiste. Revenant sur la grève des cheminots de décembre 2013 contre la privatisation, qui a été la plus longue (23 jours) de l'histoire des chemins de fer sud-coréens, il a souligné le lancement le 25 février 2014, par le syndicat KCTU, d'une grève générale alliant les revendications sociales et les exigences démocratiques. Resituant ce mouvement social dans la tradition des luttes coréennes, depuis le soulèvement du 1er mars 1919 jusqu'à celui de juin 1987, il a mis en exergue la convergence des revendications dans un front uni des luttes sur le mot d'ordre de démission de la Présidente Park Geun-hye. Les militants progressistes combattant en ce sens subissent une répression sans précédent, dont témoignent la procédure d'interdiction en cours du Parti progressiste unifié (PPU) et la condamnation à douze ans de prison du député du PPU Lee Seok-ki. 

benoit-quennedey_paris_colloque_coree.pngEnfin, Benoît Quennedey, vice-président de l'AAFC chargé des actions de coopération, a mis en exergue les condamnations internationales de l'actuelle dérive autoritaire en Corée du Sud. Le rapport 2013 sur les droits de l'homme du département d'Etat américain dresse un bilan critique sans précédent, depuis la mise en place d'un régime de démocratie parlementaire à Séoul, des évolutions en cours en Corée du Sud. La loi de sécurité nationale (LSN), qui permet les arrestations arbitraires d'opposants, a conduit à 102 arrestations en 2013, soit un niveau record au cours de ces dix dernières années, tandis que s'étend la surveillance illégale de professionnels des médias, d'hommes politiques et de simples citoyens. La procédure de déclaration préalable des manifestations a été dénoncée en juin 2013 comme une atteinte à la liberté de réunion par Mme Margaret Sekaggya, rapporteure des droits de l'homme pour les Nations Unies, qui a également critiqué le manque d'indépendance politique de la Commission nationale des droits de l'homme (CNDH), dépourvue de pouvoirs contraignants. Enfin, l'interdiction le 24 octobre 2013 du syndicat des enseignants a méconnu les principes de l'Organisation internationale du travail (OIT). Dans ce contexte une mobilisation internationale, que relaie l'AAFC, s'organise, comme en ont témoigné l'ampleur des manifestations en France contre la visite de Mme Park Geun-hye, puis pour le premier anniversaire de son élection. Le gouvernement américain a choisi d'exercer des pressions directes sur la Corée du Sud en matière de droits de l'homme, mais d'autres gouvernements - dont celui français - ont préféré cédé aux pressions économiques de Séoul.

Les débats ont porté sur la qualification du régime sud-coréen, traduisant aussi les différences de cultures politiques : en Corée du Sud, la référence au fascisme renvoie explicitement à la période de colonisation japonaise puis au régime militaire du Président Park Chung-hee, père de l'actuelle présidente. Stephen Cho, directeur de l'Institut de recherches coréennes du XXIe siècle, a souligné le caractère répressif, ouvertement fasciste, de la LSN, en application de laquelle il a été emprisonné pendant sept ans. Sur la grève des cheminots, Lee Sang-hun a observé que d'ores et déjà 140 licenciements de dirigeants syndicaux avaient été prononcés et que des poursuites étaient en cours à l'initiative de l'entreprise, contre les cheminots ayant fait grève, notamment pour obtenir un dédommagement des pertes subies par Korail. Dans la mesure où l'accord de fin de grève n'a pas été respecté par la direction de Korail, 100 cheminots ont engagé, le 9 avril 2014, une grève de la faim.

La seconde table ronde a été consacrée à la situation diplomatique et militaire en Asie de l'Est et aux perspectives d'un système pour la paix.

Patrick Kuentzmann, secrétaire général de l'Association d'amitié franco-coréenne, a souligné l'enjeu coréen au coeur du "pivot asiatique". Le contrôle de l'Eurasie permet d'assurer une suprématie mondiale - hier de l'Angleterre, aujourd'hui des Etats-Unis, puissances maritimes - dessinant un pivot autour duquel s'organise la recherche de l'hégémonie sur la planète. Théorisé par Zbigniew Brzezinski, conseiller à la sécurité nationale du Président Jimmy Carter puis conseiller de Barack Obama, candidat à l'élection présidentielle en 2008, le maintien de l'hégémonie américaine se traduit par des interventions des Etats-Unis aux confins de "l'île-monde" (Corée 1950-1953, Vietnam 1955-1975) et dans un "arc des crises" s'étendant des Balkans à l'Asie centrale en passant par le Moyen-Orient. C'est dans ce cadre que s'est opéré, depuis 2000, un rééquilibrage des forces militaires vers la zone Asie-Pacifique qui doit concentrer, à l'horizon 2020, 60 % des unités de la marine américaine, tout en apparaissant également vitale pour le contrôle des flux d'approvisionnement en pétrole et en matières premières. Si la Chine a été identifiée dès le début des années 2000 comme le futur adversaire stratégique des Etats-Unis, elle est aussi devenue un créancier et un de ses fournisseurs majeur. La justification de la présence américaine en Asie Orientale implique d'entretenir un foyer de tensions dans la péninsule coréenne, la péninsule devenant un champ de bataille pour l'hégémonie mondiale. Le néoconservateur John Bolton, ancien sous-secrétaire d'Etat (2001-2005) chargé du contrôle des armements et de la sécurité internationale, a dressé la feuille de route de cette stratégie, consistant à accréditer l'idée que la Corée du Nord refuse de respecter ses engagements, à stopper les pourparlers à six, à renforcer les sanctions contre Pyongyang en y associant plus étroitement la Russie et la Chine et à l'étrangler économiquement. Le programme nucléaire nord-coréen apparaît ainsi comme la conséquence, et non la cause, de l'absence de traité de paix en Corée.

charles-de-gaulle_aafc_coree.png
victor-hugo_jijon_equateur_paris.pngPuis Victor Hugo Jijon, membre de la Commission pour la défense des droits humains en Equateur, et par ailleurs membre du Mouvement de l'unité plurinational Pachakutik, a exposé l'importance de l'Asie de l'Est au plan géoéconomique et géopolitique, pour la recherche de la paix. Dans un contexte de crises simultanées - socio-économique, alimentaire, écologique, énergétique (la production d'hydrocarbures a atteint son maximum au début des années 2010) - les investissements globaux pour l'exploitation et la production de gaz naturel et de pétrole ont placé l'Asie de l'Est pratiquement au premier rang mondial. La raréfaction globale des ressources naturelles alimente les conflits en Asie de l'Est, parallèlement à un déploiement de la puissance économique chinoise qui ne correspond pas à une présence de confrontation (contrairement à celle des Etats-Unis) mais s'opère néanmoins au mieux des intérêts de la Chine. Les alternatives consistent à rechercher de nouvelles formes d'intégration régionale, économique et politique (sur le modèle de l'ALBA), à dessiner les contours d'une nouvelle architecture financière internationale (en Equateur, la FMI et la Banque mondiale ont été rejetés du pays), à renouveler les organisations multilatérales et à établir de nouveaux rapports directs entre les pays en développement du Sud.

Benoît Quennedey, vice-président de l'AAFC, a ensuite présenté l'économie nord-coréenne, composée de plusieurs "strates" économiques : une économie planifiée traditionnelle, marquée par l'autonomie des entreprises depuis 2002 et la fin de la planification impérative ; les marchés généraux de biens et de services ; les zones économiques spéciales. Alors que les structures et le niveau de développement sont ceux d'un pays à revenus intermédiaires, les autres indicateurs de développement que le PIB/habitant (santé, éducation) étant plus élevés, l'objectif affiché des autorités nord-coréennes est aujourd'hui l'élévation du niveau de vie de la population - ce qui implique des investissements étrangers accrus. Des sanctions économiques sans équivalent au monde handicapent l'atteinte de cet objectif, et ont ouvert la voie à la Chine comme partenaire économique et investisseur étranger privilégié. Compte tenu du potentiel de développement de l'économie nord-coréenne, notamment au plan minier (y compris les terres rares), les questions économiques et la situation diplomatiquement apparaissent étroitement imbriquées.


jean-salem_colloque_paix-et-democratie_coree.pngEnfin, Jean Salem, professeur de philosophie à l'Université Paris 1 (Panthéon-Sorbonne), a exposé les perspectives de paix en Corée au regard de la situation politique en Asie orientale. Revenant sur son voyage en Corée du Sud en 2013, il a souligné la puissance des luttes sociales mais aussi le climat de répression, dont témoigne notamment les poursuites engagées contre l'avocat Jang Kyung-uk pour sa participation à une conférence sur la paix en Corée (à laquelle l'AAFC était également présente). Balayant avec ironie les clichés sur les deux Corée, il a détaillé les erreurs commises par les partisans de la thèse - démentie depuis plus de 20 ans - de l'effondrement imminent de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) - désormais réduits à prophétiser l'idée de survie de la Corée du Nord. Dans un contexte d'affaiblissement de l'empire américain et de montée des périls, la Corée apparaît comme le seul endroit au monde où se croisent les intérêts de quatre grandes puissances : les Etats-Unis, qui ont diabolisé la Corée du Nord dans le concept d' "Axe du mal" et persistent sur la triple voie du fondamentalisme, de l'unilatéralisme et du militarisme ; la Russie, dont la situation actuelle - comme en Syrie - témoigne du retour sur la scène internationale ; le Japon, qui est engagé dans une montée du militarisme dont témoigne les positions du Premier ministre Shinzo Abe ; la Chine, encerclée par un chapelet de bases américaines, et qui tente de desserrer cet étau au travers d'alliances comme au sein de l'Organisation de coopération de Shanghaï. Dans un tel contexte, le devoir des militants français est de soutenir les camarades coréens et de défendre la paix et la réunification de la péninsule contre ceux qui, Gouvernement français en tête, bradent l'intérêt national en s'alignant sur les positions américaines.

Les débats, très riches, ont porté notamment sur le déploiement de la puissance chinoise, et les comparaisons entre les situations de pays ou régions périphériques, comme le Vietnam et l'Amérique latine. 

cho-deok_won_PPU_coreen.pngEn conclusion, Stephen Cho, directeur de l'Institut de recherches coréennes du XXIe siècle, a souligné les risques de la constitution autour des Etats-Unis d'une alliance militaire menaçant la paix, de type OTAN, en Asie de l'Est, compte tenu de l'intérêt stratégique que revêt la position de la Corée. Il a souligné que l'alternative était le renforcement de la coopération régionale, sur un modèle qui devrait sans doute plus s'inspirer de l'ALBA que de l'Union européenne.

Les discussions se sont achevées autour d'un buffet offert aux participants.
   
colloque_institut-coreen_aafc_democratie-en-coree.png
Photos : Alain Noguès  

Partager cet article
Repost0

Présentation

  • : Association d'amitié franco-coréenne
  • : Soutenir une réunification indépendante et pacifique de la Corée, conformément à l'aspiration légitime du peuple coréen et dans l’intérêt de la sécurité et de la paix dans le monde
  • Contact

Recherche

D'où venez-vous?