Dans leurs échanges avec les Coréens, les Occidentaux sont souvent embarrassés par ce qui leur apparaît comme des non-réponses de part de leurs interlocuteurs du pays du Matin calme. En réalité, les incompréhensions qui peuvent en découler proviennent de différences tant culturelles que linguistiques.
Dans ses contacts avec la Corée, pays fortement imprégné d'une tradition confucéenne qui accorde une grande importante au respect de l'âge et de l'autorité, les Occidentaux se heurtent souvent à des silences ou à des réponses comme "je ne sais pas" de leurs vis-à-vis coréens. Qu'ils ne s'y trompent pas : il s'agit de décliner poliment des invitations ou des propositions, dans des circonstances où répondre par la négative serait considéré - du point de vue coréen - comme une marque d'impolitesse. Et si l'Occidental insiste pour obtenir un engagement précis, c'est lui qui sera vu comme indélicat en mettant son interlocuteur dans l'embarras. Naturellement, des Coréens plus familiers des contacts avec l'Occident ne se formaliseront pas de cette méconnaissance de leurs usages, mais d'expérience même des Coréens ayant vécu plusieurs années à l'étranger se font difficilement à cet usage culturel occidental.
Cependant, la difficulté n'est pas seulement d'ordre culturel, mais aussi d'ordre linguistique. En français, par exemple, à une question interrogative négative comme "Tu n'aimes pas ce plat ?", les réponses sont "Non, je n'aime pas ce plat" et "Si [pour "oui"], j'aime ce plat". En coréen, l'affirmation ou la négation s'entend par rapport au fait d'être d'accord ou non, avec l'interlocuteur qui pose la question, d'où les réponses suivantes en coréen à notre question "Oui, tu as raison. Je n'aime pas ce plat" ce qui donne "Oui, je n'aime pas ce plat", et "Non, j'aime ce plat". Cette différence linguistique ne favorise évidemment pas la réponse d'un Coréen par "oui" ou "non" à la question d'un Occidental. Par contre, le "si" est souvent préféré par les Coréens dans les réponses aux questions fermées de type oui/non. Ainsi, aux questions "Tu aimes ce plat" et "Tu n'aimes pas ce plat", un Coréen tendra à répondre en français "Si, j'aime ce plat" - sans risque d'incompréhension, même si répondre "si" à une question interrogative positive sonne de manière étrange pour un francophone.
D'autres structures affirmatives-négatives, plus élaborées, sont aussi difficiles à saisir pour un Coréen, quelle que soit la langue utilisée. La double négation, comme dans la phrase "Je ne dis pas que je n'aime pas ce plat", expose à un risque élevé d'incompréhension ou de mauvaise traduction. De même, la négation de politesse (par exemple, "Ne serais-tu pas d'accord pour manger dans ce restaurant ?") n'a pas d'équivalent coréen. En revanche, le changement d'intonation pour une affirmation ou une question existe à la fois en français et en coréen.
En conclusion, dans leurs contacts de la vie quotidienne ou leurs relations professionnelles avec des Coréens, les Occidentaux ont intérêt à éviter les questions interrogatives négatives. Sinon, les Coréens pourront avoir le sentiment que vous leur parlez chinois.