Selon la diplomatie américaine, un consensus existerait entre les membres du Conseil de sécurité vis-à-vis de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) après l'essai nucléaire du 12 février 2013. En réalité, comme nous l'analysions déjà dans notre édition du 7 février 2013, les divergences sont réelles entre la Chine et les Etats-Unis : si Pékin désapprouve fermement la politique nucléaire de Pyongyang, des universitaires chinois cités par le China Daily pointent la responsabilité majeure des Etats-Unis dans la crise de la péninsule coréenne : la RPDC est considérée comme un Etat souverain, menant une politique indépendante et ayant ses propres exigences de sécurité qui l'ont conduite à développer un programme nucléaire militaire - alors que la Corée du Sud et le Japon bénéficient, quant à elles, du "parapluie" nucléaire américain. Par conséquent, la position unanime des chercheurs chinois interrogés est que les Etats-Unis doivent dialoguer avec la RPDC, en répondant à ses attentes sur des garanties sur sa sécurité. La conclusion de l'article est sans doute l'élément le plus intéressant pour comprendre aujourd'hui la position chinoise : la solution à une sortie de crise est le dialogue, mais les Etats-Unis n'ont-ils pas intérêt à maintenir un climat de tensions pour justifier le renforcement de leurs capacités militaires en Asie de l'Est, conduire des exercices militaires et donc - ce qui apparaît en filigrane de l'article - contrecarrer la puissance chinoise ? L'insistance sur la coopération américano - japonaise à propos de la RPDC, dans une période actuelle de tensions entre la Chine et le Japon notamment sur les îles Diaoyu, n'est pas anodine : les intérêts de la Chine ne sont pas nécessairement ceux des Etats-Unis et de leurs alliés. Nous reproduisons ci-après, traduit de l'anglais, l'article de Zhou Wa paru le 18 février dans le China Daily et intitulé "Les Etats-Unis doivent agir pour apaiser les tensions dans la péninsule".
Selon les observateurs, Washington doit assumer sa responsabilité pour résoudre la question de la péninsule coréenne et revoir sa politique.
L'appel de ces observateurs intervient alors que Washington et Tokyo se rencontrent cette semaine pour discuter du dernier essai nucléaire de Pyongyang.
Les Etats-Unis sont les premiers à blâmer pour la montée des tensions dans la péninsule, il est temps pour Washington d'adapter sa politique vis-à-vis de la République populaire démocratique de Corée selon Wang Junsheng, chercheur spécialisé dans les études est-asiatiques à l'Académie chinoise des sciences sociales.
Selon Wang, la politique de Washington à l'égard de la RPDC n'a jamais été claire depuis la fin de la guerre froide, ce qui a nourri le sentiment d'insécurité de Pyongyang.
La RPDC a conduit un essai nucléaire le 12 février dernier - le troisième depuis 2006.
Toutefois, Wang ajoute que cet essai était inapproprié, et que compte tenu des incertitudes de la politique américaine Pyongyang devrait rester calme et respecter les résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies plutôt qu'accroître les tensions.
Selon Liu Jiangyong, professeur de relations internationales à l'Université Tsinghua (photo à gauche, source), les pourparlers à six sont le meilleur moyen de résoudre le problème et toutes les parties devraient faire un effort.
La Chambre des représentants a adopté une résolution vendredi, appelant les Etats-Unis à travailler avec les autres pays pour imposer de nouvelles sanctions à la RPDC, exigeant de Pékin de faire pression sur Pyongyang pour cesser ses programmes nucléaires.
Pékin a déclaré être "fermement opposée" et "profondément mécontente" de l'essai nucléaire de Pyongyang. Elle a appelé à des négociations pour résoudre cette question.
Shi Yinhong, professeur de relations internationales à l'Université chinoise Renmin, a déclaré à l'agence de presse Xinhua que la RPDC avait décidé de procédé à un essai nucléaire sur la base de ses propres intérêts.
Il a déclaré que la RPDC était un pays indépendant qui décide de ses propres affaires.
Selon Chen Qi, professeur de relations internationales à l'Université Tsinghua (photo à droite, source), les Etats-Unis n'ont pas respecté les préoccupations de sécurité de la RPDC et c'est la raison pour laquelle la question nucléaire sur la péninsule coréenne n'a pas été résolue.
D'après Chen, "au coeur de la question nucléaire se trouvent les préoccupations de sécurité de Pyongyang, ignorées depuis longtemps par Washington".
Les Etats-Unis ont déployé des armes nucléaires en République de Corée pendant la guerre froide. Ce n'est qu'en 1991 qu'ils les ont retirées.
Malgré ce retrait, Washington a déclaré que Séoul est toujours sous le parapluie nucléaire américain, position réaffirmée par le Président américain Barack Obama après le dernier essai nucléaire nord-coréen.
Selon la Maison blanche, Obama rencontrera le Premier ministre Shinzo Abe vendredi, et l'essai nucléaire de Pyongyang figurera en bonne place dans les discussions.
Obama a qualifié l'essai de "provocation" et déclaré que lui et Abe étaient d'accord pour coopérer sur des mesures visant à empêcher le développement du programme nucléaire de la RPDC. Il a déclaré que les Etats-Unis restaient engagés dans la défense du Japon, y compris par des moyens nucléaires.
Cité par l'agence Xinhua, Ruan Zongze a observé que "la situation actuelle en Asie du Nord-Est est déséquilibrée, la Corée du Sud et le Japon étant protégés par le parapluie nucléaire américain".
Dans le même temps, les Républicains américains appellent l'administration Obama à adopter une position plus dure contre Pyongyang.
Selon Wang, les sanctions ont été le principal instrument politique des Américains. Mais les sanctions seules ne permettent pas de résoudre la question : elles ne font qu'accroître l'hostilité entre les Etats-Unis et la RPDC.
Chen de l'Université Tsinghua a déclaré que Washington ne souhaitait peut-être pas voir la question nucléaire de Pyongyang résolue, parce qu'elle apporte un prétexte aux Etats-Unis pour déployer des systèmes antimissiles et conduire des exercices militaires dans la région, conformément à sa volonté de rééquilibrage militaire en Asie de l'Est.
Source : China Daily (article traduit de l'anglais par l'AAFC)
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