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22 avril 2013 1 22 /04 /avril /2013 22:52

Robert-Charvin_19_avril_2013.jpgLe 19 avril 2013, Robert Charvin, ancien doyen de la faculté de droit de Nice, vice-président de l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC), a présenté une conférence organisée par l'AAFC Ile-de-France "Où en est la question coréenne". Cet événement s'est tenu à la maison des associations du 16ème arrondissement de Paris, siège du comité régional Ile-de-France de l'AAFC. Au moment où les tensions dans la péninsule coréenne soulèvent de nombreuses questions sur la nature et les causes de l'escalade en cours, le professeur Robert Charvin a expliqué devant une salle comble les origines complexes de la crise. Il a aussi plaidé pour une résolution des différents dans le cadre du droit international public, dont la pierre angulaire est le respect de la souveraineté des Etats.

Quand Robert Charvin intervient dans le cadre d'une conférence, les accents du professeur de droit, pédagogue, se marient avec ceux du militant, engagé dans des causes qui n'apparaissent difficiles que parce que les médias ont fait le choix d'une présentation manichéenne de questions complexes.

La conférence qu'il a prononcée le 19 avril 2013, à la maison des associations du 16ème arrondissement de Paris, a été un exposé magistral précis, détaillé et sans concessions vis-à-vis de ceux qui s'étonnent des difficultés économiques de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), soumise au plus vieil embargo au monde. Comme l'a observé Robert Charvin, quand on étrangle quelqu'un, il respire mal.

En Corée, la question nationale s'avère décisive. Porté par les combats de libération nationale contre la colonisation japonaise, le nationalisme de la RPD de Corée n'est pas et n'a jamais été expansionniste, ou encore de nature à menacer un autre pays : il est comparable au patriotisme des révolutionnaires français à Valmy, qui voulaient protéger la République française contre la coalition des monarchies européennes.

L'identité nationale est un fait, chaque peuple ayant son identité, son histoire, des modes de pensée et des valeurs qui lui sont propres. Dès lors, la démocratie ne peut se construire que dans un cadre national. Tous les Coréens, du Nord, du Sud ou d'outre-mer, sont profondément attachés à la sauvegarde de leur souveraineté nationale. Ayant choisi de résister plutôt que de capituler, quand d'autres Etats du Tiers Monde ont renoncé à leur souveraineté en adoptant un modèle culturel standardisé ou en se pliant aux diktats du FMI, la RPD de Corée a fait ce choix avec les moyens limités dont elle dispose. Elle a développé notamment une force de dissuasion nucléaire dont les principes, proches de ceux définis par le général de Gaulle, ne peuvent pas nous être étrangers, à nous Français.

Conference_Robert-Charvin_MDA_16eme-arrondissement_2.jpg

Sur la Corée du Nord, plusieurs idées fausses doivent être combattues. En ce qui concerne le poids et le rôle de l'armée, il ne faut pas perdre de vue que l'Armée populaire de Corée est aussi une force économique de première importance, et constitue probablement le premier opérateur économique. En ce sens, le budget militaire est un budget économique. Mais le Parti du travail de Corée joue un rôle politique majeur, et il est erronné de décrire comme militaire le régime de la RPD de Corée. 

De même, les difficultés à renouer avec l'autosuffisance alimentaire ne doivent pas occulter que, traditionnellement, les meilleures terres céréalières se situent au Sud de la péninsule, pénalisant ainsi le Nord après la division.

Le Traité de non-prolifération (TNP) fait l'objet d'une lecture partielle, et partiale, par les médias occidentaux, qui n'en retiennent qu'une partie : à savoir que les Etats non nantis de l'arme nucléaire ne doivent pas s'en doter. Mais le TNP stipule également que les puissance nanties de l'arme nucléaire doivent trouver les moyens de leur dénucléarisation militaire. Or, en pratique, l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), chargée de sanctionner l'application du TNP, a une politique de gendarme des nantis. Quant à distinguer parmi les Etats ayant accédé au statut officieux de puissance nucléaire, entre ceux qui pourraient disposer de l'arme nucléaire (l'Inde, Israël et le Pakistan) et ceux auxquels elle serait refusée (la RPDC, mais aussi l'Iran), elle reproduit la vieille distinction de l'ère coloniale entre les peuples civilisés, dont les dirigeants seraient des gens raisonnables, et les autres, rejetés sous les figures du barbare ou du sauvage. Une telle discrimination n'est pas acceptable.

En s'inscrivant dans une surenchère avec les Etats-Unis, la RPD de Corée exprime sa volonté de négocier coûte que coûte, quitte à en payer le prix, à savoir une image dégradée dans l'opinion publique occidentale. Cette demande de vraies négociations doit aboutir à un traité de paix assorti de garanties réelles, non à de simples accords sans portée, qu'un pays comme la Tchécoslovaquie de l'entre-deux-guerres négociait en grand nombre, sans qu'elle ait été sauvée de l'invasion et du dépeçage de son territoire par l'Allemagne hitlérienne. Selon le professeur Robert Charvin, on peut faire confiance à la RPD de Corée pour imposer le dialogue par tous les moyens pacifiques possibles.

Tel est le rôle que pourraient jouer les gouvernements, au premier rang desquels la France, membre permanent du Conseil de sécurité des Nations Unies, afin de mettre fin à l'état de belligérance qui se perpétue en Corée, les combats ne s'étant soldés en 1953 que par un accord d'armistice, et non par un traité de paix.

Pour favoriser son développement économique, la RPD de Corée est favorable à accueillir des investissements étrangers, notamment de PME. Elle n'est pas un "royaume ermite", comme se plaisent à la décrire certains journalistes en mal d'information.

En conclusion, Robert Charvin a souligné la nécessité de construire un monde multipolaire, en faisant sienne une observation de Régis Debray : aujourd'hui, ce sont les empires et pas les nationalismes qui sont la cause des guerres. Rendant hommage aux Etats qui résistent à l'Empire, quel que soit leur régime, comme tendant à la création d'une société internationale plus équilibrée, il a souligné la puissance de la souveraineté comme force de progrès qui permet aux Etats de coopérer librement, avec qui ils le souhaitent.

Répondant ensuite aux questions de la salle, il a établi des comparaisons avec les luttes nationales menées dans d'autres parties du monde, notamment en Afrique et au Proche-Orient, et abordé les points communs et les différences entre la réunification du Vietnam et le processus qui devrait conduire à la restauration de l'unité coréenne car, comme l'avait proclamé le président Hô Chi Minh, la Corée est une et le peuple coréen est un.

 

Photos : Alain Noguès

 


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