La délégation officielle nord-coréenne, qui s'est rendue à Séoul pour les funérailles de l'ancien président Kim Dae-jung dans un geste d'ouverture sans précédent de Pyongyang à l'égard d'un dirigeant politique du Sud, a rencontré le président Lee Myung-bak. Elle a remis à ce dernier un message du dirigeant Kim Jong-il, soulevant l'espoir du peuple coréen de la paix et de la réconciliation dans la péninsule. La réunification était le voeu le plus cher du président Kim Dae-jung, dans l'hommage post mortem que lui rendent ainsi tous les Coréens.
La rencontre a finalement eu lieu : le dimanche 23 août 2009, à la Maison Bleue, siège de la présidence de la République, le président sud-coréen Lee Myung-bak a rencontré la délégation nord-coréenne conduite par Kim Ki-nam (photo AP), secrétaire du Parti du travail de Corée. La délégation était venue à Séoul pour rendre hommage au président défunt Kim Dae-jung, dont la politique d'ouverture au Nord avait permis d'enclencher une dynamique de dialogue et de coopération entre les deux Corée. C'est la première rencontre à ce niveau depuis l'entrée en fonctions de Lee Myung-bak, qui avait condamné la "politique du rayon de soleil" de ses deux prédécesseurs démocrates, entraînant la remise en cause des déclarations conjointes Nord-Sud du 15 juin 2000 et du 4 octobre 2007.
La délégation nord-coréenne a transmis à Lee Myung-bak un message verbal du dirigeant Kim Jong-il, au cours d'une entrevue d'une demi-heure décrite par un porte-parole de la présidence sud-coréenne comme "très sérieuse et courtoise". Selon le porte-parole de la Maison Bleue Lee Dong-kwan, la délégation nord-coréenne aurait transmis les voeux du dirigeant Kim Jong-il d'un progrès dans les relations intercoréennes, et la réponse du président Lee Myung-bak aurait été un appel à la reprise du dialogue entre les deux pays, tout en déclarant aux Nord-Coréens qu'il n'y avait pas de sujet que les deux parties ne pouvaient pas résoudre, si elles parlaient avec sincérité. L'administration présidentielle sud-coréenne a déclaré à l'agence Yonhap : "nous pouvons dire qu'il y a eu un changement de paradigme".
L'espoir que soulève cette rencontre est à l'image de la douleur du peuple coréen après la mort de l'ancien président Kim Dae-jung, qui a reçu des funérailles d'Etat dimanche après-midi, pendant que des dizaines de milliers de personnes s'étaient réunies à l'extérieur du Parlement. Son engagement continu en faveur de la paix et de la réconciliation en Corée, avant même le premier contact intergouvernemental en 1972, l'avait alors fait accuser de "communisme", tout en ayant été l'objet d'une tentative d'attentat, d'un enlèvement et de condamnations à mort par le pouvoir militaire sud-coréen. L'ouverture de ces derniers jours, à l'initiative du Nord, est le plus bel hommage qui puisse lui être rendu.
Lors de son investiture, en février 2008, Lee Myung-bak avait refusé la présence d'une délégation nord-coréenne. Sa rencontre avec Kim Ki-nam est déjà, en soi, le signe d'un infléchissement notable. Lee Myung-bak ne peut pas ignorer le changement de contexte international, après les rencontres de Bill Clinton et de Mme Hyun Jeong-eun, présidente de Hyundai, avec Kim Jong-il, président de la Commission de la défense nationale de la République populaire démocratique (RPD) de Corée, à l'instar du Parti démocrate du Japon, aux portes du pouvoir, dont le président prône le dialogue avec Pyongyang. Dans ce cadre, le gouverneur du Nouveau-Mexique, Bill Richardson, qui a été un interlocuteur régulier de la RPD de Corée aux Etats-Unis, a rencontré récemment deux diplomates nord-coréens en poste aux Nations-Unies. Il est ressorti de ces échanges l'attente par Pyongyang d'un dialogue bilatéral direct avec les Etats-Unis, ainsi qu'un intérêt marqué pour les questions d'énergie.
Pour le pouvoir sud-coréen, la difficulté sera de répondre aux attentes des Coréens, du Sud comme du Nord, d'une reprise du dialogue et des échanges, sans apparaître renier trop ouvertement les principes de fermeté et de réciprocité qui, après être devenus les marques de fabrique de la politique nord-coréenne de Lee Myung-bak, ont mené les relations entre les deux Etats au bord de l'affrontement militaire.
Source principale : Blaine Harden, Washington Post
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