Après l'essai nucléaire nord-coréen du 25 mai, la tension continue de monter dans la péninsule coréenne : alors que le Conseil de sécurité des Nations-Unies pourrait décider de nouvelles sanctions dès la semaine prochaine, la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) a déjà annoncé qu'elle adopterait alors de nouvelles mesures d'auto-défense.
Dans la guerre des nerfs qui oppose la Corée du Nord et les Etats-Unis, la tension continue de monter. Alors que le Conseil de sécurité des Nations-Unies (CSNU) poursuit ses travaux en vue d'adopter de nouvelles sanctions contre Pyongyang, le ministère des Affaires étrangères de la République populaire démocratique de Corée, cité par l'agence KCNA, a affirmé que "si le Conseil de sécurité de l'ONU nous provoque, de nouvelles mesures de légitime défense seront inévitables", en précisant qu'un acte hostile du CSNU signifierait la fin de l'accord d'armistice de 1953. Si le contenu de telles mesures d'auto-défense n'a pas été précisé, le Pentagone a relevé, dans des photos prises par satellite, des mouvements de véhicules qui pourraient, selon lui, préparer le lancement d'un missile balistique intercontinental. Le 29 mai, selon l'agence sud-coréenne Yonhap, la Corée du Nord a procédé à un nouveau tir de missile à courte portée sur la côte Est.
Pyongyang n'est plus partie au Traité de non-prolifération, dont l'article 10 dispose que "chaque Partie, dans l'exercice de sa souveraineté nationale, aura le droit de se retirer du Traité si elle décide que des événements extraordinaires, en rapport avec l'objet du présent Traité, ont compromis les intérêts suprêmes de son pays." Face à l'attitude menaçante des Etats-Unis, la Corée du Nord estime qu'elle a le droit souverain de se défendre, et qu'une situation exceptionnelle justifie un événement aussi exceptionnel qu'un essai nucléaire - alors que plus de 99 % des essais dans le monde ont été effectués par les cinq membres permanents du Conseil de sécurité.
Par ailleurs, en rejoignant le dispositif PSI créé par George W. Bush, la Corée du Sud se donne le droit d'arraisonner des navires nord-coréens qu'elle soupçonnerait de contribuer à la prolifération d'armes de destruction massive. Pyongyang ayant réagi très vivement contre ce qui constituerait une attente à sa souveraineté, l'AAFC rappelle que, dans la crise actuelle, ce sont les Américains et les Sud-Coréens qui ont ainsi envisagé des actions contre la Corée du Nord. Pyongyang se situe exclusivement dans une logique d'auto-défense, quelles que soient les déclarations du secrétaire d'Etat américain à la défense Robert Gates quant à une possible attaque nord-coréenne contre les Etats-Unis et leurs alliés, lors d'une conférence sur la sécurité qui s'est tenue à Singapour le 30 mai.
Pour sa part, la Chine se trouve dans une situation délicate : liée à Pyongyang par un accord de défense et des intérêts économiques évidents (la Chine a investi notamment dans les industries textiles nord-coréennes et le secteur minier), hostile à la présence de troupes américaines à sa frontière dans l'hypothèse d'un effondrement de la RPDC dont rêvent les néo-conservateurs américains, elle n'est pas favorable à ce que la Corée du Nord se dote de l'arme nucléaire, car elle pourra alors être imitée par d'autres Etats, au premier rang desquels le Japon. Sa ferme condamnation du second essai nucléaire nord-coréen rappelle les termes déjà utilisés lors du premier essai de la RPDC, en octobre 2006, après lequel la Chine avait appuyé l'adoption par le CSNU de sanctions contre Pyongyang.
Si la Chine appelle ainsi à la retenue, certains milieux dirigeants appellent à réviser les relations avec la Corée du Nord, dont le récent essai nucléaire a montré l'indépendance vis-à-vis de Pékin, qui reste néanmoins son principal fournisseur d'énergie. Ces réflexions sont-elles le fruit d'une influence américaine au coeur même de certains milieux dirigeants, à Pékin ? Les puissances occidentales ont intérêt à ce que la Chine isole la Corée du Nord, et une campagne médiatique a été lancée sur l'idée que la Chine devait faire pression sur Pyongyang, par exemple en cessant ses livraisons d'énergie et de produits alimentaires. Pékin a cependant rappelé, lors du récent sommet Union européenne-Chine, qu'on ne pouvait pas faire l'impasse sur ses intérêts propres, en lui demandant de se comporter en auxiliaire des Etats-Unis et de l'Europe, et de défendre ainsi des intérêts qui ne sont pas les siens.
Sources : AAFC, AFP, AP, KCNA
commenter cet article …