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4 août 2008 1 04 /08 /août /2008 19:15
Les spécialistes de la fausse monnaie avaient déjà mis en doute  les accusations portées à ce sujet contre la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord). C'est maintenant un livre écrit par un ancien journaliste de la chaîne américaine CNN qui révèle que, dans des circonstances rappelant les justifications de la guerre en Irak, les partisans de la ligne dure au sein de l'administration américaine ont délibérément manipulé les renseignements sur le programme nucléaire nord-coréen : les informations sur un effort de la RPDC en vue d'acquérir des composants pour son programme nucléaire ont servi à décrire ce pays comme possédant d'ores et déjà des installations capables de fabriquer une bombe. Cette distorsion de la vérité est à l'origine d'une nouvelle crise nucléaire avec la Corée du Nord.

 

Jusqu'en 2006, Mike Chinoy était correspondant pour la chaîne d'information américaine CNN, principalement en Asie. Il travaille maintenant pour le Pacific Council on International Policy basé à Los Angeles. De quatorze séjours en Corée du Nord et deux cents entretiens menés à Washington, Séoul, Tokyo et dans d'autres capitales asiatiques, il a tiré un livre de 405 pages intitulé Meltdown: The inside story of the North Korean nuclear crisis* (littéralement "En fusion : l'histoire de la crise nucléaire nord-coréenne vue de l'intérieur") à paraître au mois d'août 2008.


L'ouvrage de Chinoy révèle que, si les services de renseignement américains ont bien découvert en 2002-2003 que la Corée du Nord s'efforçait d'acquérir des composants pouvant être utilisés pour l'enrichissement d'uranium, il ne s'agissait que d'une tentative visant à s'en procurer, aucun renseignement crédible ne prouvant l'existence d'installations nord-coréennes capables de fabriquer des bombes à base d'uranium.



Selon l'enquête menée par Mike Chinoy, les partisans de la ligne dure au sein de l'administration Bush, à l'instar de John Bolton, ambassadeur américain aux Nations Unies de 2005 à 2006, étaient prêts à tout pour faire dérailler l'"accord-cadre" sur le nucléaire signé avec la Corée du Nord en 1994. Ils ont donc saisi cette occasion pour aller jusqu'à la confrontation avec Pyongyang,


Lors d'un déplacement en octobre 2002 à Pyongyang, le secrétaire d'Etat adjoint de l'époque, James Kelly, reçut l'instruction de ne pas négocier et de simplement répéter aux Nord-Coréens qu'ils devaient abandonner leur programme d'enrichissement de l'uranium avant toute autre avancée.

 

Il reçut aussi l'ordre de ne pas observer les règles élémentaires de la correction diplomatique comme organiser un dîner pour ses hôtes nord-coréens ou porter un toast lors du repas donné en son honneur à son arrivée.

 

Il a été largement dit que les Nord-Coréens avaient admis devant Kelly mener un programme d'enrichissement de l'uranium, ce qui avait poussé les Etats-Unis à prendre une série de mesures de rétorsion qui ont provoqué l'escalade avec Pyongyang ayant abouti à l'essai nucléaire nord-coréen d'octobre 2006.


Mais, après avoir interrogé la plupart des membres de la délégation de Kelly, Mike Chinoy affirme ne pas avoir trouvé la moindre preuve que les Nord-Coréens aient expressément admis poursuivre un tel programme d'enrichissement.

 

"Il est intéressant que les transcriptions restent classifiées mais il semble que le responsable nord-coréen ait utilisé un langage bien plus ambigu et également présenté une offre de négociation - offre rejetée par Kelly", a déclaré Chinoy à l'AFP. 

 
Selon lui, "des analogies et des différences peuvent toujours être trouvées avec la controverse suscitée par les renseignements à propos de l'Irak mais, à la différence de l'Irak, les vrais renseignements recueillis en Corée du Nord par les Américains au printemps et à l'été 2002 étaient assez solides."


Pour évoquer l'attitude des faucons de l'administration Bush farouchement opposés à un engagement vis-à-vis de la Corée du Nord, Colin Powell, alors secrétaire d'Etat, a déclaré : "Ils voulaient utiliser cela comme un amas d'étoiles rouges brillant dans le ciel pour signaler que les Nord Coréens trichaient, et mettre fin à l'accord-cadre en disant 'nous vous avions bien prévenus que c'était une mauvaise idée'."

 

L'ouvrage de Mike Chinoy revient aussi sur le surprenant revirement opéré par les Etats-Unis dans leur politique à l'égard de la Corée du Nord au cours du second mandat de George W. Bush.


Il montre comment le successeur de James Kelly, Christopher Hill, s'est emparé du processus - d'abord en tenant des réunions bilatérales avec les Nord-Coréens, contre les instructions de la secrétaire d'Etat Condoleezza Rice, puis, après avoir obtenu le soutien de Condoleezza Rice, en neutralisant les opposants à la politique d'engagement, notamment dans l'entourage du vice-président Dick Cheney.


Christopher Hill a aidé à la relance des pourparlers à six grâce auxquels la RPDC a fermé l'usine nucléaire de Yongbyon où était produit son plutonium à usage militaire.


L'administration Bush cherche actuellement à ce que la Corée du Nord abandonne toutes ses armes nucléaires en échange d'une normalisation des relations entre les Etats-Unis et la RPDC et de garanties de sécurité. 

 

Et Chinoy de conclure : "Quelle ironie de constater que les tentatives des partisans de la ligne dure pour que les Nord-Coréens ne se dotent pas de la bombe ont, en fait, créé une situation où le Nord est devenu une puissance nucléaire en rendant l'ensemble du processus de renonciation à ce programme nucléaire bien, bien plus difficile que s'ils avaient adopté une telle approche depuis le début."  (source : AFP)

 



* Mike Chinoy, Meltdown: The Inside Story of the North Korean Nuclear Crisis, St. Martin's Press, 2008

 

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