Elu président de la Corée du Sud le 19 décembre 2007, sur une ligne de rupture avec la politique de ses prédécesseurs selon lui trop favorable à Pyongyang, le conservateur Lee Myung-bak cherche manifestement les voies du rétablissement d'un dialogue avec le Nord. Mais les premiers signes d'infléchissement ne signifient pas encore une évolution de la position sud-coréenne, et encore moins le rétablissement de la confiance dans les relations d'Etat à Etat.
Pour le président (conservateur) sud-coréen Lee Myung-bak, élu le 19 décembre 2007, les relations intercoréennes doivent être fondées sur un principe de réciprocité : l' "aide" qu'entend apporter le Sud au redressement économique du Nord serait conditionnée par l'approfondissement de la politique d'ouverture économique.
Ainsi posés, les termes du plan "Vision 3.000" (car visant à porter à 3.000 dollars par habitant le produit intérieur brut de la République populaire démocratique de Corée, RPDC) étaient difficilement acceptables pour Pyongyang : ils signifiaient une ingérence du Sud dans la politique intérieure du Nord et introduisaient le principe d'une conditionnalité fondée sur la notion misérabiliste d'une assistance du Sud au Nord.
Après une période d'attentisme de plus de trois mois, le Nord a dénoncé en Lee Myung-bak un "traître" et un "sycophante" des Etats-Unis.
De fait, après la visite exceptionnelle de Lee Myung-bak aux Etats-Unis, rien n'indique un changement de cap dans la politique de la Corée du Sud vis-à-vis du Nord. Cependant, l'administration Lee Myung-bak cherche apparemment les voies du rétablissement d'un dialogue :
- à la suite des Etats-Unis qui devraient livrer 500.000 tonnes de céréales à la RPD de Corée, dans des conditions encore à préciser, Séoul envisagerait une reprise des livraisons alimentaires au Nord, sous réserve que la RPDC formule une telle demande ;
- une assistance médicale a également été proposée, suite à l'apparition d'une épidémie de malaria au Nord, conséquence de la fragilisation de la situation sanitaire après les très graves inondations d'août-septembre ;
- la visite d'une délégation de métallurgistes sud-coréens à Pyongyang témoigne de la poursuite de la coopération non gouvernementale, alors que la dialogue intercoréen au niveau gouvernemental n'a jamais été rompu.
Par ailleurs, si Lee Myung-bak a poursuivi sa récente visite à Washington par un déplacement au Japon où il a invité l'empereur du Japon à venir en Corée tout en éludant le sujet de la brutale colonisation japonaise de la Corée de 1910 à 1945, son prochain déplacement en Chine pendant quatre jours, fin mai 2008, peut attester d'un début de rééquilibrage par rapport à l'axe Séoul-Washington-Tokyo privilégié dès son investiture.
Mais la RPDC a précisé vouloir atteindre l'autosuffisance alimentaire en comptant sur ses propres forces : dans ce contexte, les geste humanitaires de Séoul apparaissent condescendants... sauf à supposer que Séoul ne veut pas réellement aider son voisin du Nord, en présentant des demandes dans des formes inacceptables pour Pyongyang.
Si Lee Myung-bak souhaite réellement rétablir le dialogue intercoréen, la seule option possible est de mettre en oeuvre un programme global sortant du seul enjeu humanitaire et considérant le Nord comme un partenaire égal, et non comme devant appliquer les directives de Séoul pour accomplir les réformes souhaitées par le Sud. Un accord a été signé lors de la rencontre entre les deux présidents coréens, le 4 octobre 2007 : si Séoul manifestait une volonté concrète de mettre en oeuvre ces projets, comme le rétablissement des liaisons ferroviaires, des progrès seraient certainement possibles sur d'autres dossiers. Et la Corée du Sud ne serait plus obligée, comme aujourd'hui, d'être à la remorque de Washington, à la veille de la reprise des pourparlers multilatéraux sur le nucléaire nord-coréen, le plus vraisemblablement début juin.
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