Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
24 septembre 2016 6 24 /09 /septembre /2016 10:48

Après l'adoption par le Conseil de sécurité des Nations Unies, le 2 mars 2016, de la résolution 2270 ayant significativement accru les sanctions contre la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) au regard de la poursuite de ses programmes nucléaires, spatiaux et balistiques, les gouvernements occidentaux, sud-coréen et japonais poussent la République populaire de Chine à fortement diminuer ses échanges économiques avec la RPDC, dans le but de provoquer une asphyxie de l'économie nord-coréenne et un changement de régime à Pyongyang. Dans ce contexte, les données commerciales chinoises (en l'absence de séries statistiques comparables publiées par la RPD de Corée) sont scrutées avec attention, tout particulièrement dans les milieux néoconservateurs. Pékin est ainsi régulièrement condamnée de ne pas appliquer les sanctions contre la RPD de Corée en l'absence d'effondrement du commerce bilatéral Chine-Corée du Nord. Une analyse factuelle dépassant le procès d'intention montre pourtant que cette accusation reste à démontrer. 

La ville de Dandong, à la frontière sino-coréenne, est l'un des principaux points de passage des échanges entre la Chine et la RPD de Corée.

La ville de Dandong, à la frontière sino-coréenne, est l'un des principaux points de passage des échanges entre la Chine et la RPD de Corée.

Selon les données statistiques douanières chinoises, les échanges bilatéraux avec la RPD de Corée ont atteint 17,7 milliards de yuans (soit 2,2 milliards d'euros) au premier semestre 2016, en baisse de 5,6 % par rapport aux six premiers mois de l'année 2015, les importations nord-coréennes ayant diminué encore plus fortement (de 8,7 %). Un rebond a cependant été constaté en août 2016 (+ 30 % par rapport à août 2015, se répartissant entre + 41,6 % pour les exportations chinoises et + 18,7 % pour les importations chinoises), après un repli en juillet 2016 (- 15,7 % par rapport à juillet 2015), n'effaçant pas une tendance globale au ralentissement. Les importations chinoises de minerai de fer ont fortement augmenté en août 2016 ; en revanche, la Chine importe moins de charbon nord-coréen, dans un contexte de saturation du marché chinois. Si l'on complète ces données par des observations de visu des échanges à la ville frontalière chinoise de Dandong, les échanges par voie ferroviaire et terrestre se poursuivent à un rythme comparable avec la période antérieure à l'adoption de la résolution 2270.

Le fait que les exportations nord-coréennes, dominées par les produits miniers, aient plus fortement baissé que les importations de la RPD de Corée, est cohérent avec le fait qu'elles sont ciblées par la résolution 2270. Cette évolution doit cependant aussi tenir compte de l'évolution de la production nord-coréenne et des besoins chinois.

On ne constate donc pas l'effondrement attendu (espéré ?) par les faucons néo-conservateurs, à Washington, Séoul, Tokyo ou Paris. Mais de là à affirmer que la Chine n'applique pas les sanctions commerciales contre Pyongyang, il y a un pas que ces partisans de la guerre et du chaos n'ont pas hésité à franchir.

Il y a en effet tout lieu de croire la Chine quand, opposée au programme nucléaire militaire nord-coréen, elle affirme mettre en oeuvre les résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies. Elle a ainsi publié plus rapidement que d'ordinaire les textes réglementaires régissant son application des sanctions. Par ailleurs, le texte de la résolution 2270 reposait sur une ambiguïté - à savoir que les restrictions aux principales exportations de minerais (notamment charbon et minerai de fer) par la Corée du Nord seraient exclues du champ d'application de la résolution dès lors qu'elles seraient utilisées à "des fins concernant les moyens d'existence" de la population nord-coréenne. Cette précision a dû été acceptée par les Etats-Unis et leurs alliés, pour obtenir l'aval de la Chine dans l'adoption de la résolution : comment reprocher à présent aux autorités chinoises de ne pas respecter les termes d'un accord accepté par Washington et ses alliés,en pleine connaissance de cause ?

Dire aujourd'hui que "la Chine n'applique pas les sanctions contre la Corée du Nord", selon les éléments de langage de l'administration américaine volontiers repris par les médias occidentaux, relève ainsi d'une méconnaissance du texte de la résolution 2270 et occulte le fait que les Etats-Unis ne sont, pour leur part, guère sensibles au respect du multilatéralisme, en s'arrogeant le droit de prendre des initiatives unilatérales - qu'il s'agisse du déploiement en Corée du Sud du système de missiles THAAD (sans aucune concertation avec Pékin ni Moscou, pourtant directement concernées) ou de la mise en oeuvre de sanctions américaines contre la RPD de Corée, à nouveau sans consulter d'autres puissances que les Etats qui leur sont affidés

Le procès fait aux autorités chinoises est d'autant plus injuste que celles-ci n'hésitent pas à poursuivre leurs entreprises nationales qui enfreignent les règles clairement définies du régime de sanctions internationales - à savoir l'interdiction des exportations permettant la poursuite par Pyongyang de ses programmes nucléaires et balistiques.
Le département de la sécurité publique de la province de Liaonin vient ainsi d'annoncer des poursuites contre le conglomérat Hongxiang, dirigé par Mme Ma Xiaohong et qui constitue l'un des acteurs majeurs des échanges sino - nord-coréens, basé à Dandong. Les pousruites portent sur de "graves crimes économiques" - dont la nature n'a toutefois pas été précisée.

Principales sources :

 

Partager cet article
Repost0

commentaires

Recherche

D'où venez-vous?