L'agence américaine Associated Press (AP), qui dispose de bureaux à Pyongyang, a pu rencontrer et interroger, le 1er août 2014, deux citoyens des Etats-Unis détenus en République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) pour "crimes contre l'Etat", dans l'attente imminente de leur procès : Jeffrey Edward Fowle (56 ans) et Matthew Todd Miller (24 ans). Selon AP, les deux hommes ont demandé l'aide du gouvernement américain, mais Jeffrey Fowle indique n'avoir reçu "aucune réponse". Les entretiens faisaient suite aux demandes répétées de l'agence AP, auxquelles les autorités nord-coréennes ont donc accepté de répondre positivement. Ce geste humanitaire vis-à-vis des deux détenus et de leurs familles indique également que la RPDC laisse la porte ouverte à des négociations avec le gouvernement américain, ce qui pourrait alors conduire à une mesure de clémence vis-à-vis de Jeffrey Fowle et Matthew Miller - comme ce fut le cas par le passé vis-à-vis des autres Américains arrêtés en RPDC depuis l'armistice de la fin de la guerre de Corée, la visite de Bill Clinton en 2009 ayant par exemple abouti à la libération des journalistes Laura Ling et Euna Lee qui étaient entrées illégalement en Corée du Nord.
La rencontre entre l'agence AP et Jeffrey Fowle et Matthew Miller, arrêtés l'un et l'autre depuis plus de trois mois, avait été autorisée à condition de ne pas rendre public le lieu où s'est déroulé l'entretien. Les journalistes américains ont pu leur poser des questions et ont diffusé une vidéo d'eux. Jeffrey Fowle a montré une lettre qu'il avait écrite en RPDC.
Les deux hommes, qui n'étaient pas en costume de prisonnier, ont déclaré être en bonne santé et bien traités, et autorisés à faire des sorties quotidiennes. Mais ces conditions pourraient changer après l'ouverture de leur procès, a indiqué Jeffrey Fowle.
Matthew Miller est entré en RPDC le 10 avril 2014. Selon l'agence de presse nord-coréenne KCNA, il a déchiré son visa à son arrivée en Corée et crié qu'il demandait l'asile politique. Ayant vécu en Corée du Sud il y a quatre ans, après avoir rendu visite à son frère qui y servait dans l'armée de l'air, il avait enseigné l'anglais et appris le coréen au Sud de la péninsule, comme l'a précisé une de ses voisines, Carol Stewart, dans un entretien donné le 1er juillet. Carol Stewart n'a ensuite plus parlé aux médias, sur la demande de la famille de Matthew Miller.
Entré en RPDC le 29 avril 2014, Jeffrey Fowle a déclaré qu'il avait été arrêté après avoir laissé une bible dans un lieu public (une discothèque) qu'il visitait avec son groupe à Chongjin. Selon sa famille, Jeffrey Fowle n'était pas en mission pour son église. Marié et père de trois enfants, il a ajouté : "Les perspectives sont plutôt sombres en ce qui me concerne. Je ne sais pas quel pourrait être le pire scénario, mais j'ai besoin d'aide pour me sortir de cette situation. Je demande donc au Gouvernement de m'aider". Il a précisé n'avoir reçu aucune réponse des autorités américaines.
La même remarque sur une demande d'aide et son absence de réponse a été formulée par Matthew Miller, dans l'attente d'un procès devrait avoir lieu prochainement (peut-être d'ici un mois selon Jeffrey Fowle) et conduire à des condamnations à de longues peines de prison pour "crimes contre l'Etat". Les actes hostiles qu'ils ont commis méconnaissaient leur statut de touristes, selon les autorités nord-coréennes, qui n'ont pas encore annoncé publiquement la date des procès.
Un troisième Américain est détenu en Corée du Nord : Pae Jun-ho (Kenneth Bae) a été arrêté en novembre 2012 et condamné en mai 2013 à quinze ans de travaux forcés, pour prosélytisme religieux et espionnage. Le cas de Kenneth Bae est plus complexe, non pas tant en raison de ses origines coréennes que du fait qu'il s'était déjà rendu à plusieurs reprises en RPDC et que les faits incriminés apparaissaient plus lourds que pour Jeffrey Fowle et Matthew Miller. Selon toutes apparences plus soucieuses du cas de Kenneth Bae que de ceux de Jeffrey Fowle et Matthew Miller, les autorités américaines ont demandé à plusieurs reprises la libération de Kenneth Bae, en arguant notamment de son état de santé. Sa mère avait été autorisée à lui rendre visite en octobre 2013. Dans un entretien qu'il a récemment donné aux Nord-Coréens du Japon, il a déclaré se sentir "abandonné" par le gouvernement américain.
Sur la base des observations de l'agence RIA Novosti citant une ONG américaine, le Centre d'information sur la peine de mort, les remarques du gouvernement américain concernant les conditions de détention de ses deux ressortissants en attente de jugement ne peuvent pas être considérées comme valables par Pyongyang au regard des propres pratiques de la justice américaine et ne font ainsi que diminuer les chances des trois Américains d'être libérés. Selon Ria Novosti, "les Etats-Unis sont connus pour mener une politique étonnamment similaire (NdA : à celle de la Corée du Nord) concernant les détenus étrangers" en ce qui concerne les motifs des arrestations et les condamnations. Trente étrangers ont même été arrêtés et exécutés aux Etats-Unis depuis 1979 sans avoir eu accès aux autorités consulaires de leur pays, en méconnaissance des dispositions de l'article 36 de la convention de Vienne sur les relations consulaires.
Sources :
2 Americans detained in North Korea seek US help
PYONGYANG, North Korea (AP) - Two American tourists charged with "anti-state" crimes in North Korea said Friday they expect to be tried soon and pleaded for help from the U.S. government to secure ...
http://bigstory.ap.org/article/2-americans-detained-north-korea-seek-us-help
Deux Américains détenus en Corée du Nord appellent Washington à l'aide
Deux Américains détenus en Corée du Nord ont pu rencontrer des journalistes d'Associated Press dans le pays, alors que Pyongyang prévoit de traduire en justice les deux homme (Jeffrey Fowle, 56...
Two Americans expecting long prison terms in North Korea
Two American tourists, imprisoned by North Korean authorities for "anti-state" crimes about three months ago made their first appearance on local AP Television News and asked the American government
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